12 novembre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-23.565

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:C201189

Texte de la décision

CIV. 2

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 novembre 2020




Cassation partielle


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 1189 F-D

Pourvoi n° H 19-23.565




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020

La société Arcelormittal Gandrange, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° H 19-23.565 contre l'arrêt rendu le 3 septembre 2019 par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents de travail (section tarification), dans le litige l'opposant à la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail d'Alsace-Moselle, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Taillandier-Thomas, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Arcelormittal Gandrange, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail d'Alsace-Moselle, et l'avis de Mme Ceccaldi, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Taillandier-Thomas, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 3 septembre 2019), la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail d'Alsace-Moselle ayant refusé de lui appliquer, au titre de l'assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles, la tarification collective pour l'année 2016, la société Arcelormittal Gandrange (la société) a saisi d'un recours la juridiction du contentieux technique de la sécurité sociale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. La société fait grief à l'arrêt de rejeter son recours alors « que selon l'article D. 242-6-17 du code de la sécurité sociale, ne peut être considéré comme un établissement nouvellement créé, dont le classement dans une catégorie de risque est opéré en fonction de l'activité exercée et soumis pendant l'année de sa création et les deux années suivantes à une cotisation affectée du taux collectif, l'établissement issu d'un établissement précédent dans lequel a été exercée une activité similaire avec les mêmes moyens d'exploitation et ayant repris au moins la moitié du personnel ; qu'il résulte de ce texte qu'un événement affectant l'activité de l'établissement constitue une rupture du risque caractérisant un établissement nouveau, lorsqu'il entraîne une modification de l'activité, un changement des moyens d'exploitation et/ou une diminution de plus de moitié de l'effectif ; que le texte ne subordonne la reconnaissance d'un établissement nouveau à l'existence d'une reprise de l'activité par un nouvel employeur ; qu'au cas présent, la société Arcelormittal Gandrange faisait valoir, sans être contestée, que, d'une part, elle avait cessé l'activité de fabrication d'acier, qui était l'activité principale de l'établissement et qui justifiait l'application du code risque 7.1 ZF « fabrication de fonte et d'acier » et n'avait maintenu sur le site qu'une activité secondaire de laminage à chaud relevant du code risque 27.4 CH « métallurgie des métaux non ferreux et précieux – laminage à chaud ou relaminage sans fabrication de fonte ni d'acier », que, d'autre part, la cessation de l'activité d'aciérie avait entraîné un changement des moyens de production puisque tous les moyens de production liés à la fabrication d'acier et qui généraient le risque propre à cette activité ont été abandonnés et qu'enfin, cette cessation d'activité avait entraîné une diminution de plus de moitié des effectifs qui sont passés de 935 à 462 ; qu'il en résultait que la cessation d'activité avait entraîné une rupture du risque et la création d'un établissement nouveau ; que, pour débouter l'employeur de son recours, la CNITAAT a énoncé que les conditions d'application de l'article D. 242-6-17 du code de la sécurité sociale devaient être analysées « pour le repreneur d'une activité cédée » et qu' « à défaut d'avoir un successeur », la société Arcelormittal Gandrange ne pouvait se prévaloir de l'existence d'un établissement nouveau ; qu'en soumettant la reconnaissance d'un établissement nouveau à l'existence d'une cession de l'activité à un successeur, la CNITAAT a violé l'article D. 242-6-17 du code de la sécurité sociale en y ajoutant une condition qu'il ne prévoit pas. »

Réponse de la Cour

Vu l'article D. 242-6-17 du code de la sécurité sociale :

3. Il résulte de ce texte que les établissements nouvellement créés, dont le classement dans une catégorie de risque est effectué en fonction de l'activité exercée, sont redevables, au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, durant l'année de leur création et les deux années civiles suivantes, d'une cotisation affectée d'un taux collectif. Selon son troisième alinéa, ne peut être considéré comme un établissement nouvellement créé celui issu d'un précédent établissement dans lequel a été exercée une activité similaire, avec les mêmes moyens de production et ayant repris au moins la moitié du personnel.

4. Pour rejeter le recours de la société, l'arrêt retient que celle-ci, lors de son précédent classement sous le code risque 21.7 ZF correspondant à son activité principale, exerçait deux activités, que la cessation de l'activité principale a entraîné son reclassement sous le nouveau code risque 27.4 CH correspondant à la seconde activité devenue nouvelle activité principale, que la modification du classement d'un établissement du fait de la cessation de son activité principale n'entraîne pas sa qualification en établissement nouveau, que si aux termes de l'article D. 242-6-17 du code de la sécurité sociale, ne peut être considéré comme un établissement nouvellement créé celui issu d'un précédent établissement dans lequel a été exercée une activité similaire, avec les mêmes moyens de production et ayant repris au moins la moitié du personnel, il y a lieu d'analyser ces dispositions pour le repreneur d'une activité cédée et qu'à défaut d'avoir un successeur au sens de l'article précité, le taux de cotisation de la société doit être déterminé en prenant en compte l'ensemble de sa sinistralité y compris celle issue de l'activité qui a cessé.

5. En statuant ainsi, la Cour, qui a ajouté au texte susvisé une condition tenant à la cession de l'activité à un repreneur qu'il ne prévoit pas, a violé ce dernier.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare le recours de la société Arcelormittal Gandrange mal fondé et la déboute de toutes ses demandes, l'arrêt rendu le 3 septembre 2019, entre les parties, par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Condamne la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail d'Alsace-Moselle aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail d'Alsace-Moselle et la condamne à payer à la société Arcelormittal Gandrange la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Arcelormittal Gandrange

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré mal fondé le recours de la société Arcelormittal Gandrange contre la décision de la CARSAT d'Alsace-Moselle fixant sont taux de cotisation pour l'exercice 2016, au titre de l'assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles, pour son établissement de Gandrange et d'AVOIR débouté la société Arcelormittal Gandrange de toutes ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE « en application des dispositions de l'article D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale et de l'arrêté du 17 octobre 1995, le taux de cotisation des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé par établissement. Le classement d'un établissement dans une catégorie de risque est effectué en fonction de l'activité exercée selon une nomenclature des risques et des modalités fixées par arrêté du Ministre chargé de la sécurité sociale. Le classement est effectué en fonction de l'activité exercée dans ledit établissement et en cas de pluralité d'activités, en fonction de l'activité principale, qui est celle exercée par le plus grand nombre de salariés. La cour observe que la société Arcelor Mittal, lors de son précédent classement sous le code risque 21.7 ZF, exerçait deux activités ; que son classement correspondait à l'activité qu'elle exerçait à titre principal ; que la cessation de l'activité principale a nécessairement entrainé le reclassement de la société Arcelor Mittal sous un nouveau code risque correspondant à la seconde activité devenue nouvelle activité principale, soit le code risque 27.4 CH. La Cour rappelle que la modification du classement d'un établissement du fait de la cessation de son activité principale n'entraine pas sa qualification en établissement nouveau ; que si aux termes de l'article D.242-6-17 du code de la sécurité sociale, ne peut être considéré comme un établissement nouvellement créé celui issu d'un précédent établissement dans lequel a été exercée une activité similaire, avec les mêmes moyens de production et ayant repris au moins la moitié du personnel, il y a lieu d'analyser ces dispositions pour le repreneur d'une activité cédée. La Cour relève qu'à défaut d'avoir un successeur au sens de l'article précité, le taux de cotisation de la société Arcelor Mittal doit être déterminé en prenant en compte l'ensemble de sa sinistralité y compris celle issue de l'activité qui a cessé. La Cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article D.242-6-3 du code de la sécurité sociale, le taux brut est calculé d'après le rapport de la valeur du risque propre à l'établissement à la masse totale des salaires payés au personnel, pour les trois dernières années connues. La valeur du risque comprend les capitaux représentatifs des rentes notifiées au cours de la période triennale de référence aux victimes atteintes, à la date de consolidation initiale de leur état de santé, d'une incapacité permanente afférente à l'accident ou à la maladie concernés, à l'exception de l'incapacité permanente reconnue après rechute. L'ensemble des dépenses constituant la valeur du risque est pris en compte par les caisses d'assurance retraite et de la santé au travail dès que ces dépenses leur ont été communiquées par les caisses primaires, sans préjudice de l'application des décisions de justice ultérieures. Or, à défaut d'établissement nouvellement créé au sens de l'article D. 242-6-17 du code de la sécurité sociale, les cotisations dues par le repreneur de l'établissement doivent être calculées en fonction des risques survenus à l'ensemble des salariés même si ces salariés exerçaient une activité qui a cessé. Dès lors, c'est à bon droit que la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail a rejeté la demande de la société Arcelor Mittal. La demande de la Société Arcelor Mittal doit donc être rejetée » ;

ALORS QUE selon l'article D. 242-6-17 du code de la sécurité sociale, ne peut être considéré comme un établissement nouvellement créé, dont le classement dans une catégorie de risque est opéré en fonction de l'activité exercée et soumis pendant l'année de sa création et les deux années suivantes à une cotisation affectée du taux collectif, l'établissement issu d'un établissement précédent dans lequel a été exercée une activité similaire avec les mêmes moyens d'exploitation et ayant repris au moins la moitié du personnel ; qu'il résulte de ce texte qu'un événement affectant l'activité de l'établissement constitue une rupture du risque caractérisant un établissement nouveau, lorsqu'il entraîne une modification de l'activité, un changement des moyens d'exploitation et/ou une diminution de plus de moitié de l'effectif ; que le texte ne subordonne la reconnaissance d'un établissement nouveau à l'existence d'une reprise de l'activité par un nouvel employeur ; qu'au cas présent, la société Arcelormittal Gandrange faisait valoir, sans être contestée, que, d'une part, elle avait cessé l'activité de fabrication d'acier, qui était l'activité principale de l'établissement et qui justifiait l'application du code risque 27.1 ZF « fabrication de fonte et d'acier » et n'avait maintenu sur le site qu'une activité secondaire de laminage à chaud relevant du code risque 27.4 CH « métallurgie des métaux non ferreux et précieux – laminage à chaud ou relaminage sans fabrication de fonte ni d'acier », que, d'autre part, la cessation de l'activité d'aciérie avait entraîné un changement des moyens de production puisque tous les moyens de production liés à la fabrication d'acier et qui générait le risque propre à cette activité ont été abandonnés et qu'enfin, cette cessation d'activité avait entraîné une diminution de plus de moitié des effectifs qui sont passés de 935 à 462 ; qu'il en résultait que la cessation d'activité avait entraîné une rupture du risque et la création d'un établissement nouveau ; que, pour débouter l'employeur de son recours, la CNITAAT a énoncé que les conditions d'application de l'article D. 242-6-17 du code de la sécurité sociale devaient être analysées « pour le repreneur d'une activité cédée » et qu' « à défaut d'avoir un successeur », la société Arcelormittal Gandrange ne pouvait se prévaloir de l'existence d'un établissement nouveau ; qu'en soumettant la reconnaissance d'un établissement nouveau à l'existence d'une cession de l'activité à un successeur, la CNITAAT a violé l'article D. 242-6-17 du code de la sécurité sociale en y ajoutant une condition qu'il ne prévoit pas.

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