13 septembre 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-23.452

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:SO00881

Texte de la décision

SOC.

HP



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 septembre 2023




Cassation partielle


Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 881 F-D

Pourvoi n° A 21-23.452





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 SEPTEMBRE 2023

La société Servier France, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], [Localité 6], a formé le pourvoi n° A 21-23.452 contre l'arrêt rendu le 14 avril 2021 par la cour d'appel de Versailles (19e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [Y] [W], épouse [E], domiciliée [Adresse 2], [Localité 3],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est[Adresse 1]", [Localité 5],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Sornay, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Servier France, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de Mme [W], après débats en l'audience publique du 21 juin 2023 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Sornay, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société Servier France du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Pôle emploi.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 avril 2021) Mme [W] a été engagée en qualité de déléguée à l'information médicale à compter du 1er février 2004 par la société Euthérapie, aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société Servier France (la société).

3. Licenciée le 29 avril 2015, la salariée a saisi le 10 mars 2016 la juridiction prud'homale d'une contestation de ce licenciement et de demandes en paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée une certaine somme à titre de rappel de salaires sur congés payés, alors « que selon l'article L. 3141-22 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, le congé annuel ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération totale brute perçue par le salarié au cours de la période de référence ; qu'après avoir relevé que la société Servier France faisait valoir que les primes bimestrielles, qui étaient calculées pour l'ensemble du secteur auquel étaient affectés plusieurs délégués médicaux, en fonction des ventes de médicaments prescrits par les médecins, n'étaient pas affectées par les départs en congé desdits délégués, elle a, pour considérer que les primes bimestrielles devaient être intégrées à l'assiette de l'indemnité de congés payés et condamner la société Servier France au paiement d'un rappel de salaire sur congés payés, affirmé que "lorsque les objectifs sur la base desquels est calculée la rémunération variable sont définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, [il] peut les modifier [lorsqu]'ils sont réalisables et ont été portés à la connaissance du salarié en début d'exercice", puis retenu qu'en l'espèce, la société ne produisait pas d'éléments sur les modalités de calcul des primes bimestrielles, ne justifiait pas que ces modalités avaient été portées à la connaissance de la salariée en début de période et qu'elle avait été préalablement avisée de ses objectifs ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, sans rechercher si la prime bimestrielle était affectée par la prise de congé annuel de la salariée de sorte qu'elle devait être incluse dans l'assiette des congés payés, la cour d'appel a privé de base légale sa décision au regard de l'article L. 3141-22 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3141-22 et L. 3141-23 du code du travail, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

5. Il résulte de ces textes que n'ont pas à être pris en compte dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés les indemnités et avantages en nature dont le salarié jouit l'ensemble de l'année, temps de travail et temps de congé confondus, et dont le montant ou la valeur ne sont pas diminués du fait des congés payés.

6. Pour condamner la société au paiement d'une certaine somme à titre de rappel de salaire sur congés payés, l'arrêt rappelle que lorsque les objectifs sur la base desquels est calculée la rémunération variable du salarié sont définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été portés à la connaissance du salarié en début d'exercice, et retient que la société ne justifie pas que les objectifs bimestriels servant de base au calcul des primes en cause ni les modalités de calcul de ces primes ont été portées à la connaissance de la salariée au début de chaque période bimestrielle, puisqu'elle ne produit aucun élément sur l'assiette et les modalités de calcul des primes en cause.

7. La cour d'appel en a déduit que l'argumentation de l'employeur était inopérante et que faute par lui de démontrer que la salariée avait eu une connaissance préalable de ses objectifs, celle-ci était fondée à réclamer une indemnité de congés payés au titre des primes bimestrielles perçues entre 2012 et 2015.

8. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l'attribution ou le montant des primes bimestrielles litigieuses étaient affectés par le départ de la salariée en congés payés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquences de la cassation

9. La cassation prononcée n'atteint pas les dispositions de l'arrêt statuant sur les dépens et les demandes formées par les parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiées par d'autres dispositions non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Servier France à verser à Mme [W] la somme de 4 054 euros à titre de rappel de salaire sur congés payés, l'arrêt rendu le 14 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Condamne Mme [W] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille vingt-trois.

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