6 avril 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-12.925

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:C200360

Texte de la décision

CIV. 2


LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 6 avril 2023




Cassation


Mme TAILLANDIER-THOMAS, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 360 F-D

Pourvoi n° G 21-12.925





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 AVRIL 2023

M. [T] [K], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 21-12.925 contre l'arrêt rendu le 8 janvier 2021 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre sociale, section 3), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie du Lot, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La caisse primaire d'assurance maladie du Lot a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Cassignard, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de M. [K], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du Lot, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 février 2023 où étaient présents Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cassignard, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller, et Mme Catherine, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 8 janvier 2021), la caisse primaire d'assurance maladie du Lot (la caisse) lui ayant notifié un indu d'indemnités journalières en raison de l'exercice d'une activité non autorisée sur les périodes du 16 au 31 mai 2013, du 11 au 30 juin 2013, du 4 septembre 2013 au 17 janvier 2014 et du 15 mai 2015 au 20 mars 2016, ainsi qu'une pénalité financière, M. [K] (l'assuré) a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en ses deux premières branches


2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

3. L'assuré fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la caisse la somme de 20 945,16 euros au titre de l'indu afférent aux indemnités journalières perçues du 4 septembre 2013 au 17 janvier 2014 et du 15 mai 2015 au 20 mars 2016, alors « qu'en toute hypothèse, le service de l'indemnité journalière est subordonné à l'obligation pour le bénéficiaire d'observer les prescriptions du praticien, de se soumettre aux contrôles organisés par le service du contrôle médical, de respecter les heures de sorties autorisées par le praticien et de s'abstenir de toute activité non autorisée ; qu'en cas d'inobservation volontaire de ces obligations, la caisse primaire d'assurance-maladie peut retenir, à titre de pénalité, tout ou partie des indemnités journalières dues ; qu'en cas de recours formé contre les décisions de la caisse, les juridictions des affaires de sécurité sociale contrôlent l'adéquation du montant de la sanction prononcée à l'importance de l'infraction commise par l'assuré ; qu'en condamnant l'assuré à payer à la caisse la somme de 20 945,16 euros au titre de l'indu afférent aux indemnités journalières perçues du 4 septembre 2013 au 17 janvier 2014 et du 15 mai 2015 au 20 mars 2016, sans procéder à aucun contrôle sur l'adéquation du montant de la sanction prononcée à l'importance de l'infraction commise par l'assuré, la cour d'appel a violé l'article L. 323-6 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-594 du 20 décembre 2010 applicable au litige, ensemble l'article 6 §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

4. La caisse conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient qu'il est nouveau et mélangé de fait et de droit.

5. Cependant, le moyen n'est pas nouveau, dès lors que dans ses écritures d'appel, l'assuré a demandé à la cour, si elle entrait en voie de condamnation, de prononcer une sanction en adéquation avec l'importance de l'infraction commise.

6. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article L. 323-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010, applicable au litige :

7. Selon ce texte, les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale contrôlent, en cas de recours contre les décisions relatives à la restitution des indemnités journalières qu'il prévoit, l'adéquation de la sanction prononcée par la caisse à l'importance de l'infraction commise par l'assuré.

8. Pour condamner l'assuré au titre de l'indu afférent aux indemnités journalières perçues du 4 septembre 2013 au 17 janvier 2014 et du 15 mai 2015 au 20 mars 2016, l'arrêt retient que la réalité de son activité pendant ces périodes, durant lesquelles il a bénéficié d'indemnités journalières en lien avec les arrêts de travail prescrits au titre de son accident du travail, est établie et que l'exercice de cette activité caractérise une inobservation volontaire de l'obligation de s'abstenir de toute activité professionnelle qui a pour conséquence de le priver des indemnités journalières perçues pendant ces périodes, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du revenu que cette activité a pu lui procurer.

9. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la sanction prononcée par la caisse était en adéquation à l'importance de l'infraction commise par l'assuré, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé.

Sur le moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

10. La caisse fait grief à l'arrêt attaqué de condamner l'assuré à lui payer la seule somme de 20 945,16 euros au titre de l'indu afférent aux indemnités journalières perçues du 4 septembre 2013 au 17 janvier 2014 et du 15 mai 2015 au 20 mars 2016, et, ce faisant, d'écarter le paiement de la somme de 1 721,52 euros au titre de l'indu afférent aux indemnités journalières pour les périodes du 16 au 31 mai 2013 et du 11 au 13 [lire 30] juin 2013, alors « que le service de l'indemnité journalière est subordonné à l'obligation pour le bénéficiaire de s'abstenir de toute activité non autorisée ; qu'en jugeant que les démarches effectuées par l'assuré pour déclarer sa société à la chambre des métiers et pour lui ouvrir un compte bancaire ne pouvaient être considérées comme constituant une inobservation volontaire de l'obligation de s'abstenir de toute obligation professionnelle, quand l'accomplissement de tâches administratives caractérisait une activité non autorisée justifiant la restitution des indemnités journalières par le bénéficiaire, la cour d'appel a violé l'article L. 323-6 du code de la sécurité sociale en sa rédaction issue de la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 applicable au litige. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 323-6 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010, applicable au litige :

11. Il résulte de ce texte que l'attribution d'indemnités journalières à l'assuré se trouvant dans l'incapacité physique de continuer ou de reprendre le travail est subordonnée à l'obligation pour le bénéficiaire de s'abstenir de toute activité non autorisée.

12. Pour dire que l'indu d'indemnités journalières au titre des périodes du 16 au 31 mai 2013 et du 11 au 13 [lire 30] juin 2013 n'est pas établi, la cour d'appel retient que les démarches effectuées pendant ces périodes par l'assuré pour déclarer sa société à la chambre des métiers et pour lui ouvrir un compte bancaire ne suffisent pas à établir la réalité d'une activité professionnelle exercée par lui pendant cette période, même si elles ont pour objet de la permettre par la suite, et ne peuvent être considérées comme constituant une inobservation volontaire de l'obligation de s'abstenir de toute activité professionnelle.

13. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que l'assuré avait exercé, sans autorisation médicale, une activité pendant une période d'arrêt de travail, de sorte qu'il ne pouvait prétendre au bénéfice des indemnités journalières, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

14. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions de la décision cassée ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.

15. L'arrêt énonce qu'il y a lieu de tenir compte de la sanction liée à l'indu retenu pour réduire le montant de la pénalité financière à 600 euros.

16. La cassation du chef du dispositif attaqué par le premier moyen du pourvoi principal et par le moyen du pourvoi incident entraîne la cassation par voie de conséquence du chef du dispositif attaqué par le second moyen du pourvoi principal.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 janvier 2021 entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six avril deux mille vingt-trois.

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