20 octobre 2022
Cour d'appel de Montpellier
RG n° 17/00074

3e chambre civile

Texte de la décision

Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 20 OCTOBRE 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/00074 - N° Portalis DBVK-V-B7B-M7CP



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 21 NOVEMBRE 2016

TRIBUNAL D'INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 11-16-000051





APPELANTE :



Madame [W] [P]

née le 11 Janvier 1950 à PARIS 10 (75010)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Philippe CALVET, avocat au barreau de NARBONNE, substitué sur l'audience par Me Yannick CAMBON, avocat au barreau de NARBONNE







INTIMEE :



S.A. MMA IARD, RCS de LE MANS n° 440 048 882, prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Alain ARMANDET de la SEP ALAIN ARMANDET ET YANN LE TARGAT, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué sur l'audience par Me Yann LE TARGAT, avocat au barreau de MONTPELLIER



Ordonnance de clôture du 15 Mars 2022



COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 AVRIL 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Fabrice DURAND, Conseiller, et Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée, chargée du rapport.



Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de Président

M. Fabrice DURAND, Conseiller

Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée par ordonnance du premier président en date du 01 décembre 2021



Greffier, lors des débats : Mme Sabine MICHEL







ARRET :



- contradictoire,



- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour fixée au 2 juin 2022 prorogée au 8 septembre 2022, au 1er décembre 2022, puis au 20 octobre 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;



- signé par M. Thierry CARLIER, Conseiller, faisant fonction de Président et par Mme Sabine MICHEL, Greffier.






*

**







EXPOSE DU LITIGE



Par acte authentique du 6 août 2010, Mme [W] [P] a acquis une maison à usage d'habitation située [Adresse 4]) à M. [D] [Y] qui lui a remis un rapport de repérage des matériaux ou produits contenant de l'amiante réalisé le 4 mai 2005 par M. [F] [H] exerçant sous l'enseigne Cabinet ACI.



A l'occasion d'un dégât des eaux, Mme [P] s'est aperçue que la couverture de la maison est composée de plaques sous tuiles en fibrociment lesquelles contiennent de l'amiante.



La compagnie d'assurance de Mme [P] a missionné la société Polyexpert Construction afin de réaliser une expertise amiable, dont la réunion s'est déroulée le 31 août 2015.



Par acte du 14 décembre 2015, Mme [P] a assigné M. [D] [Y], M. [F] [H] et la SA MMA Iard devant le tribunal d'instance de Narbone, aux fins de les voir condamner à lui régler la somme de 5 500,84 euros en réparation du préjudice subi .



Par jugement du 21 novembre 2016, le tribunal a :

- constaté que l'action dirigée contre M. [F] [H] est devenue sans objet,

- débouté Mme [W] [P] de l'intégralité de ses demandes,

- condamné Mme [P] à payer à la SA MMA Iard la somme de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [P] aux dépens.



Par déclaration du 4 janvier 2017, Mme [W] [P] a interjeté appel du jugement à l'encontre de la SA MMA Iard.



Par ordonnance sur requête du 10 juin 2021, le conseiller de la mise en état a rejeté l'incident de péremption d'instance.



Vu les conclusions de Mme [W] [P] remises au greffe le 29 mars 2017 ;



Vu les conclusions de la SA MMA Iard remises au greffe le 28 mars 2017.






MOTIFS DE L'ARRÊT



Mme [W] [P] sollicite l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions et la condamnation de la SA MMA Iard à lui payer la somme de 5500,84 euros en réparation du préjudice subi sur le fondement délictuel. Elle fait valoir que le cabinet ACI a commis une faute concernant sa mission de signaler les matériaux contenant de l'amiante, visibles à l'intérieur et à l'extérieur de la construction et son obligation légale tirée de l'arrêté du 22 août 2002 pris pour l'application de l'article 10-3 du décret du n°96-97 du 7 février 1996 instaurant une obligation de repérage visuel de matériau contenant de l'amiante. Elle soutient que l'opérateur de repérage aurait dû s'apercevoir de la présence d'amiante sur la toiture du bien vendu, les plaques en fibrociment étant visibles depuis l'extérieur de la maison sans sondage destructif.



La société MMA Iard sollicite la confirmation du jugement en toutes ses dispositions. Elle fait valoir qu'à la date de réalisation du diagnostic litigieux, la toiture et la majeure partie des éléments extérieurs étaient exclus du programme de repérage dans le cadre du diagnostic amiante avant vente. Elle soutient qu'en l'état des dispositions applicables au jour du diagnostic, l'opérateur de repérage doit rechercher et constater de visu la présence de matérieux et produits accessibles sans travaux destructifs et à l'intérieur de l'habitation. Elle soutient qu'en tout état de cause, rien ne permet d'établir que les matériaux litigieux étaient décelables visuellement.



Tout tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle , un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage.



Il s'ensuit que tout acquéreur d'un immeuble ayant reçu une information erronée est fondé à rechercher la responsabilité délictuelle du diagnostiqueur en raison du dommage que lui cause la mauvaise exécution, par ce technicien, du contrat qu'il a conclu avec le vendeur.



Il résulte de l'article L. 271-4 du code de la construction et de l'habitation que le dossier de diagnostic technique annexé à la promesse de vente ou à l'acte authentique de vente d'un immeuble garantit l'acquéreur contre le risque mentionné au 3° du deuxième alinéa du I de ce texte et que la responsabilité du diagnostiqueur se trouve engagée lorsque le diagnostic n'a pas été réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l'art et qu'il se révèle erroné (Ch. mixte., 8 juillet 2015, pourvoi n° 13-26.686).



En application de l'article R. 1334-26 du code de la santé publique dans sa version applicable au litige le dossier technique 'Amiante' comporte :1° La localisation précise des matériaux et produits contenant de l'amiante ainsi que, le cas échéant, leur signalisation; 2° L'enregistrement de l'état de conservation de ces matériaux et produits ; 3° L'enregistrement des travaux de retrait ou de confinement de ces matériaux et produits et des mesures conservatoires mises en oeuvre ; 4° Les consignes générales de sécurité à l'égard de ces matériaux et produits, notamment les procédures d'intervention, y compris les procédures de gestion et d'élimination des déchets ; 5° Une fiche récapitulative.

Le dossier technique " Amiante " est établi sur la base d'un repérage portant sur les matériaux et produits figurant sur la liste définie à l'annexe 13-9 et accessibles sans travaux destructifs. Pour le réaliser, les propriétaires font appel à un contrôleur technique, au sens du code de la construction et de l'habitation, ou à un technicien de la construction ayant contracté une assurance professionnelle pour ce type de mission, satisfaisant aux obligations définies à l'article R. 1334-29. Les analyses de matériaux et produits sont réalisées selon les modalités prévues au deuxième alinéa de l'article R. 1334-18.

En cas de repérage d'un matériau ou produit dégradé contenant de l'amiante, le contrôleur technique ou le technicien de la construction est tenu de le mentionner ainsi que les mesures d'ordre général préconisées.



L'annexe 13-9 du code de la santé publique dans sa version applicable au litige définit le programme de repérage de l'amiante mentionné à l'article R1334-26 et la partie du composant à vérifier ou à sonder :

1. - Parois verticales intérieures et enduits, murs, flocage, projections et enduits, revêtements durs (plaques menuiserie, amiante-ciment), poteaux, flocage, enduits projetés, entourages de poteaux (carton, amiante-ciment, matériau sandwich, carton + plâtre), cloisons, flocage,projections et enduits, panneaux de cloison, gaines et coffres verticaux, panneaux de cloisons.

2. - Planchers, plafonds et faux plafonds, plafonds, flocage, panneaux collés ou vissés, poutres et charpentes, projections et enduits, gaines et coffres verticaux,panneaux, planchers, dalles de sol.

3. - Conduits, canalisations et équipements Conduits de fluides (air, eau, autres fluides), conduit, calorifuge, enveloppe de calorifuges, clapets/volets coupe-feu, clapet, volet, rebouchage, portes coupe-feu, joints (tresses, bandes), vide-ordures, conduit,

4. - Ascenseurs, monte-charge, trémies, flocage



L'arrêté du 22 août 2002 relatif aux consignes générales de sécurité du dossier technique d'amiante, stipule que l'opérateur de repérage recherche et constate de visu la présence de matériaux et produits accessibles sans travaux destructifs qui correspondent à la liste définie à l'annexe (..), qui sont suceptibles de contenir de l'amiante. S'il a connaissance d'autres produits ou matériaux réputés contenir de l'amiante, il les repère également.



En l'espèce, il n'est pas contesté que Mme [W] [P] acquiert de M. [D] [Y], par acte authentique du 6 août 2010, à la suite du compromis signé le 10 mai 2010, une maison à usage d'habitation située [Adresse 4]) et qu'est annexé à l'acte, le rapport de repérage des matériaux ou produits contenant de l'amiante réalisé le 4 mai 2005 par M. [F] [H] exerçant sous l'enseigne Cabinet ACI.



Ce rapport mentionne 'qu'il est repéré des matériaux ou produits contenant de l'amiante' sur des conduits de fluide situés à l'extérieur du bâtiment.



Le cabinet Polyexpert, au terme d'un rapport amiable établi à la demande de la MACIF, constate que la couverture de la maison d'habitation, construite vers 1940, est constituée de plaques sous tuiles en fibrociment. Il précise que lors de la réunion du 31 août 2015, il est constaté en présence du précédent propriétaire ' depuis la [Adresse 4] et depuis une fenêtre d'une chambre à l'étage d'une maison voisine, que la couverture de la maison d'habitation de Mme [P] est effectivement constituée de plaques sous tuiles en fibrociment'.



Comme l'a justement retenu le tribunal lors de l'établissement du rapport, le repérage amiante des éléments extérieurs incluant les toitures, instauré par le décret du 3 juin 2011, n'était pas en vigueur.





Si au terme de son rapport, M. [F] [H] reprend les mentions de l'arrêté du 22 août 2002, concernant le repérage d'autre éléments réputés contenir de l'amiante, que le technicien doit repérer également, Mme [W] [P] ne rapporte pas la preuve du caractère apparent de ces plaques, par la visite de la maison, à défaut de constat, ni de la connaissance, par M. [F] [H], des plaques de tuiles en fibrociment.



Contrairement à ce que soutient, Mme [W] [P], ces plaques n'étaient pas apparentes lors de la visite, puisque seulement visibles depuis la fenêtre à l'étage, d'une maison se situant dans une autre rue, tel que repris dans le rapport amiable qu'elle produit, commandé par sa compagnie d'assurances, pour rechercher cette présence d'amiante dans le toit et qui n'a pu être constatée par la seule visite de la maison.



Il résulte de ces constatations, que les dispositions légales précitées applicables au litige, ne stipulant pas d'obligation de repérage d'amiante de la toiture, la responsabilité de M. [F] [H] n'est pas engagée, ce dernier n'étant pas tenu, en dehors des composants de la construction qu'il devait examiner de repérer des produits amiantés qui n'apparaissaient pas de la simple visite de la maison, ni de son extérieur immédiat.



C'est par une exacte application de la règle de droit et en de justes motifs que le premier juge a débouté Mme [W] [P] de ses demandes.

En conséquence, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.



PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Déboute Mme [W] [P] de l'ensemble de ses demandes ;

Déboute la société MMA Iard de ses autres demandes ;

Condamne Mme [W] [P] aux dépens d'appel et à payer à la société MMA Iard la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais engagés en cause d'appel.



Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président,

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