9 juin 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-12.974

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2022:C200611

Titres et sommaires

APPEL CIVIL - Appel incident - Forme - Conclusions - Signification - Exclusion - Assignation - Absence de nécessité

Il résulte des articles 909 et 911 du code de procédure civile que l'appel incident formé par un intimé contre un co-intimé défaillant est valablement formé par la signification de conclusions et n'a pas à revêtir la forme d'une assignation

APPEL CIVIL - Appel incident - Appel incident formé par l'intimé - Appel incident formé à l'encontre d'un co-intimé non constitué - Notification - Modalités - Détermination

APPEL CIVIL - Appel incident - Formation - Mode de formation - Dépôt de conclusions - Signification - Exclusion - Absence de nécessité d'une assignation

Texte de la décision

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 juin 2022




Cassation partielle


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 611 F-B

Pourvoi n° M 21-12.974







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUIN 2022

M. [I] [R], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 21-12.974 contre l'arrêt rendu le 27 avril 2020 par la cour d'appel de Basse-Terre (2e chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à la Caisse nationale des barreaux français, dont le siège est [Adresse 1],

2°/ à la société SCP [Z] [L] - [U] [V], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 3],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [R], et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 19 avril 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à M. [R] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la Caisse nationale des barreaux français.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 27 avril 2020) et les productions, la Caisse nationale des barreaux français a interjeté appel, le 22 août 2019, des chefs du jugement ayant ordonné la mainlevée de la saisie attribution effectuée le 5 décembre 2018, par la société d'huissiers de justice [L]-[V]-Bedes (la société [H]) devenue la SCP [Z] [L] - [U] [V], sur les comptes ouverts au nom de M. [R] et l'ayant condamnée à payer à ce dernier diverses sommes.

3. La Caisse nationale des barreaux français a signifié ses conclusions aux intimés le 15 octobre 2019. M. [R], constitué le 17 octobre 2019, a formé appel incident par conclusions remises au greffe le 14 novembre 2019 et signifiées à la société [H] le 18 novembre 2019.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. [R] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable son appel incident formé contre le chef du jugement qui l'avait débouté de sa demande de dommages-intérêts dirigée contre la société [H], alors « que les conclusions exigées par les articles 905-2 et 908 à 910 du code de procédure civile sont signifiées aux parties qui n'ont pas constitué avocat ; qu'il résulte des productions et des constatations de l'arrêt qu'après avoir remis au greffe ses conclusions comportant appel incident, M. [R], intimé, les a signifiées à la société [H] qui, régulièrement intimée par la Caisse nationale des barreaux français, appelante principale, n'avait pas constitué avocat ; qu'en retenant que l'appel incident formé par M. [R], dirigé contre la société [H], devait être déclaré irrecevable dès lors que les articles 68 et 551 du code de procédure civile prévoient que l'appel incident ou provoqué doit être formé par voie d'assignation lorsqu'il est dirigé contre une partie défaillante, la cour d'appel a violé ces textes, par fausse application, et l'article 911, alinéa 1er, du code de procédure civile, par refus d'application. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 909 et 911 du code de procédure civile :

5. Selon le premier de ces textes, l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant pour former le cas échéant appel incident. Aux termes du second, les conclusions sont signifiées, au plus tard dans le mois suivant l'expiration des délais prévus aux articles 905-2 et 908 à 910 du code de procédure civile, aux parties qui n'ont pas constitué avocat. Cependant, si, entre-temps, celles-ci ont constitué avocat avant la signification des conclusions, il est procédé par voie de notification à avocat.

6. Il en résulte que l'appel incident formé par un intimé contre un co-intimé défaillant est valablement formé par la signification de conclusions et n'a pas à revêtir la forme d'une assignation.

7. Pour déclarer irrecevable l'appel incident formé par M. [R] contre le chef du jugement l'ayant débouté de sa demande de dommages-intérêts dirigée contre la société [H], l'arrêt retient que les articles 68 et 551 du code de procédure civile prévoient, à peine d'irrecevabilité, que l'appel incident ou provoqué doit être formé par voie d'assignation lorsqu'il est dirigé contre une partie défaillante, que la société [H], partie intimée dans l'acte d'appel principal, a constitué avocat le 9 décembre 2019 et que l'appel incident dirigé contre elle, partie défaillante à l'appel incident, et formé par conclusions remises au greffe le 14 novembre 2019, doit être déclaré irrecevable.

8. En statuant ainsi, alors que la société [H] avait été régulièrement intimée par l'appelant, et que M. [R], qui formait un appel incident contre elle, n'était donc tenu que de lui signifier ses conclusions d'appel incident dans les délais requis et non de l'assigner à comparaître, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable l'appel incident formé par M. [I] [R] contre le chef du jugement critiqué l'ayant débouté de sa demande de dommages-intérêts dirigée contre la SCP [L]-[V]-Bedes et condamné M. [I] [R] à verser à la SCP [L]-[V]-Bedes huissiers de justice la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 27 avril 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre autrement composée ;

Condamne la SCP [Z] [L] - [U] [V] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCP [Z] [L] - [U] [V] à payer à M. [R] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juin deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. [R]

M. [R] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable son appel incident formé contre le chef du jugement qui l'avait débouté de sa demande de dommages et intérêts dirigée contre la société [L] – [V] – Bedes ([H]) ;

1°) ALORS QUE les conclusions exigées par les articles 905-2 et 908 à 910 du code de procédure civile sont signifiées aux parties qui n'ont pas constitué avocat ; qu'il résulte des productions et des constatations de l'arrêt qu'après avoir remis au greffe ses conclusions comportant appel incident, M. [R], intimé, les a signifiées à la société [H] qui, régulièrement intimée par la Caisse nationale des barreaux français, appelante principale, n'avait pas constitué avocat ; qu'en retenant que l'appel incident formé par M. [R], dirigé contre la société [H], devait être déclaré irrecevable dès lors que les articles 68 et 551 du code de procédure civile prévoient que l'appel incident ou provoqué doit être formé par voie d'assignation lorsqu'il est dirigé contre une partie défaillante, la cour d'appel a violé ces textes, par fausse application, et l'article 911, alinéa 1er, du code de procédure civile, par refus d'application ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, les conclusions exigées par les articles 905-2 et 908 à 910 du code de procédure civile sont signifiées aux parties qui n'ont pas constitué avocat ; que, pour déclarer irrecevable l'appel incident formé par M. [R], la cour d'appel s'est bornée à retenir que les articles 68 et 551 du code de procédure civile prévoient, à peine d'irrecevabilité, que l'appel incident ou provoqué doit être formé par voie d'assignation lorsqu'il est dirigé contre une partie défaillante, que la société [H], partie intimée dans l'acte d'appel principal, avait constitué avocat le 9 décembre 2019, et que « l'appel incident dirigé contre la SCP [H] partie défaillante à l'appel incident formé par conclusions remises au greffe par M. [I] [R] le 14 novembre 2019 » devait être déclaré irrecevable ; qu'en statuant de la sorte, sans constater que ces conclusions n'avaient pas été signifiées à la société [H] avant qu'elle ne constitue avocat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 911, alinéa 1er, du code de procédure civile ;

3°) ALORS QU'en tout état de cause, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que la société [H] ne soutenait pas que l'appel incident de M. [R] était irrecevable pour avoir été formé par conclusions remises au greffe le 14 novembre 2019, mais, uniquement, qu'il aurait été irrecevable dès lors que M. [R] avait relevé appel incident à son égard par voie de conclusions signifiées le 18 novembre 2019 quand, selon elle, il aurait dû procéder par voie d'assignation ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de ce que l'appel incident à l'égard de la société [H], partie défaillante, aurait été irrecevable pour avoir été formé par conclusions remises au greffe le 14 novembre 2019, sans inviter les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.

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