24 novembre 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-18.576

Troisième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2021:C300839

Texte de la décision

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 24 novembre 2021




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 839 F-D

Pourvoi n° E 20-18.576




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 NOVEMBRE 2021

1°/ M. [W] [F],

2°/ Mme [Y] [F],

3°/ Mme [M] [F], veuve [K],

tous trois domiciliés [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° E 20-18.576 contre l'arrêt rendu le 19 mai 2020 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige les opposant à la SAFER (Société d'aménagement foncier et d'établissement rural) Auvergne Rhône Alpes, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Barbieri, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Mmes [M] et [Y] [F] et M. [W] [F], de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural Auvergne Rhône Alpes, après débats en l'audience publique du 19 octobre 2021 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Barbieri, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 19 mai 2020), par acte du 19 septembre 2012, Mmes [M] et [Y] [F] et M. [W] [F] (les consorts [F]) ont consenti une promesse de vente à Mme [H] portant sur diverses parcelles.

2. Par lettre du 2 octobre 2012, le notaire chargé d'instrumenter a notifié la vente à la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural Auvergne Rhône Alpes (la SAFER).

3. Par lettre du 27 novembre 2012 adressée au notaire, la SAFER a exercé son droit de préemption.

4. Par actes des 24 et 25 novembre 2015, la SAFER a assigné les consorts [F] en réitération par acte authentique de la vente, et transfert de propriété des parcelles à son profit. Les consorts [F] ont demandé reconventionnellement l'annulation de la préemption.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Les consorts [F] font grief à l'arrêt de rejeter leur demande d'annulation de la décision de préemption, alors :

« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 412-8 du code rural, le bénéficiaire du droit de préemption dispose d'un délai de deux mois à compter de la réception de la lettre recommandée ou de l'acte d'huissier par lequel le notaire l'informe d'une intention d'aliéner, pour faire connaître, dans les mêmes formes, au propriétaire vendeur, son refus ou son acceptation de l'offre aux prix ; qu'ainsi, la notification adressée au notaire, par la SAFER, concernant le souhait de celle-ci d'exercer son droit de préemption, ne peut pallier l'absence de notification au vendeur par la SAFER, s'il n'est pas établi que le notaire avait mandat de gérer la propriété ; qu'en retenant que la notification de la SAFER adressée au notaire était suffisante et la vente à son profit parfaite, au motif que la SAFER aurait demandé au notaire d'informer lui-même les propriétaires vendeurs de la décision de préempter, la cour d'appel a violé les articles L.143-8 et L. 412-8 du code rural ;

2°/ qu'en énonçant par ailleurs, pour rejeter les demandes des consorts [F], qu' « aucune mise en demeure n'ayant été délivrée par eux, les consorts [F] ne peuvent se prévaloir utilement des dispositions de l'article L. 412-8 du code rural pour invoquer l'absence de réalisation de l'acte authentique dans le délai de deux mois, carence due à leur seule opposition», cependant que les consorts [F] n'avaient pas été destinataires de la notification de préemption qui aurait pu justifier l'existence d'une mise en demeure subséquente, la cour d'appel a violé derechef les articles L.143-8 et L. 412-8 du code rural. »

Réponse de la Cour

6. D'une part, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que, selon l'article R. 143-6 du code rural et de la pêche maritime, la société d'aménagement foncier et d'établissement rural, contrairement au preneur à bail visé par l'article L. 412-8 du même code, doit notifier au notaire chargé d'instrumenter sa décision de préemption, en mentionnant l'identification cadastrale des biens concernés et leur prix d'acquisition, et en précisant les objectifs de la préemption. Elle a constaté que le notaire qui avait notifié la vente à la SAFER avait été chargé par les consorts [F] d'instrumenter et d'accomplir en leur nom l'ensemble des formalités. Elle en a exactement déduit que la nullité de la décision de préemption adressée par la SAFER à ce notaire n'était pas encourue.

7. D'autre part, ayant relevé que l'absence de réalisation de l'acte authentique dans le délai de deux mois prévu par l'article L. 412-8 précité était due, non pas à la carence de la SAFER, mais à la contestation du principe même de la préemption formée par les consorts [F], lesquels refusaient pour cette raison de régulariser la vente et n'avaient aucun intérêt de mettre la SAFER en demeure d'y procéder dans un délai impératif, la cour d'appel a légalement justifié sa décision.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mmes [M] et [Y] [F] et M. [W] [F] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour Mmes [M] et [Y] [F] et M. [W] [F]

Les consorts [F] font grief à l'arrêt attaqué de les avoir déboutés de leur demande visant à l'annulation de la décision de préemption de la Safer Rhône Alpes,

1°) ALORS QU'aux termes de l'article L.412-8 du code rural, le bénéficiaire du droit de préemption dispose d'un délai de deux mois à compter de la réception de la lettre recommandée ou de l'acte d'huissier par lequel le notaire l'informe d'une intention d'aliéner, pour faire connaître, dans les mêmes formes, au propriétaire vendeur, son refus ou son acceptation de l'offre aux prix ; qu'ainsi, la notification adressée au notaire, par la Safer, concernant le souhait de celle-ci d'exercer son droit de préemption, ne peut pallier l'absence de notification au vendeur par la Safer, s'il n'est pas établi que le notaire avait mandat de gérer la propriété ; qu'en retenant que la notification de la Safer adressée au notaire était suffisante et la vente à son profit parfaite, au motif que la Safer aurait demandé au notaire d'informer lui-même les propriétaires vendeurs de la décision de préempter, la cour d'appel a violé les articles L.143-8 et L.412-8 du code rural ;

2°) ALORS QU'en énonçant par ailleurs, pour rejeter les demandes des consorts [F], qu' « aucune mise en demeure n'ayant été délivrée par eux, les consorts [F] ne peuvent se prévaloir utilement des dispositions de l'article L.412-8 du code rural pour invoquer l'absence de réalisation de l'acte authentique dans le délai de deux mois, carence due à leur seule opposition » (arrêt attaqué, p.6), cependant que les consorts [F] n'avaient pas été destinataires de la notification de préemption qui aurait pu justifier l'existence d'une mise en demeure subséquente, la cour d'appel a violé derechef les articles L.143-8 et L.412-8 du code rural.

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