25 mars 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-12.037

Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:C200254

Titres et sommaires

APPEL CIVIL - Acte d'appel - Mentions nécessaires - Chefs du jugement critiqués - Défaut - Régularisation - Forme - Déclaration d'appel

La déclaration d'appel, qui ne mentionne pas les chefs critiqués du jugement, ne peut être régularisée que par une nouvelle déclaration d'appel, formée dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond, conformément à l'article 910-4, alinéa 1, du code de procédure civile. Il en résulte qu'en vertu de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, seul l'acte d'appel emporte dévolution des chefs critiqués du jugement et la régularisation du vice de forme de la déclaration d'appel, qui, tendant à la réformation du jugement, ne mentionne pas les chefs de jugement critiqués, ne s'opère, dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond, que par une nouvelle déclaration d'appel, conformément à l'article 910-4, alinéa 1, du code de procédure civile

APPEL CIVIL - Acte d'appel - Mentions nécessaires - Chefs du jugement critiqués - Défaut - Portée

APPEL CIVIL - Acte d'appel - Mentions nécessaires - Chefs du jugement critiqués - Défaut - Régularisation - Délai - Délai imparti à l'appelant pour conclure au fond

Texte de la décision

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 mars 2021




Cassation partielle sans renvoi


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 254 F-P

Pourvoi n° X 20-12.037


Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme D....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 3 décembre 2019.





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 MARS 2021

Mme Y... D..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° X 20-12.037 contre l'arrêt rendu le 4 avril 2019 par la cour d'appel de Bourges (chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à la Caisse d'épargne et de prévoyance [...], société anonyme, dont le siège est [...] ,

2°/ à la société Les 4 Vents, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [...] ,

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kermina, conseiller, les observations de Me Le Prado, avocat de Mme D..., de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de la Caisse d'épargne et de prévoyance [...], et l'avis de M. Girard, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 février 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Kermina, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 4 avril 2019), Mme D... a relevé appel, le 4 mai 2018, du jugement d'un tribunal de commerce rendu dans un litige l'opposant, avec la société Les 4 Vents, à la Caisse d'épargne et de prévoyance [...], la déclaration d'appel étant ainsi libellée : « Objet/Portée de l'appel : réformer le jugement ».

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches, ci-après annexé


2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

3. Mme D... fait grief à l'arrêt de constater que l'appel qu'elle a formé n'a saisi la cour d'appel d'aucun chef du jugement entrepris et, en conséquence, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement, alors :

« 2°/ que l'étendue de l'appel n'est pas seulement déterminée par la déclaration d'appel, mais également par les conclusions de l'appelant ; qu'en considérant cependant que seule la déclaration d'appel emporte effet dévolutif, la cour d'appel a violé les articles 561, 562 et 954 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. La déclaration d'appel, qui ne mentionne pas les chefs critiqués du jugement, ne peut être régularisée que par une nouvelle déclaration d'appel, formée dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond, conformément à l'article 910-4, alinéa 1, du code de procédure civile.

5. Il en résulte qu'en vertu de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, seul l'acte d'appel emporte dévolution des chefs critiqués du jugement et la régularisation du vice de forme de la déclaration d'appel, qui, tendant à la réformation du jugement, ne mentionne pas les chefs de jugement critiqués, ne s'opère, dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond, que par une nouvelle déclaration d'appel, conformément à l'article 910-4, alinéa 1, du code de procédure civile.

6. Ayant relevé qu'indépendamment de la sanction résultant de la nullité pour vice de forme de la déclaration d'appel qui n'aurait pu être mise en oeuvre que devant le conseiller de la mise en état, il résultait de l'article 562 du code de procédure civile, qui définit le contour de l'effet dévolutif de l'appel, qu'en l'absence d'énonciation expresse, dans la déclaration d'appel, des chefs de jugement critiqués, la cour d'appel n'était saisie d'aucun litige, les juges du fond en ont exactement déduit, l'appel de Mme D... ne tendant pas à l'annulation du jugement et l'objet du litige n'étant pas indivisible, qu'ils n'étaient pas saisis de l'appel du jugement.

7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Mais sur le moyen relevé d'office

8. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu l'article 562 du code de procédure civile :

9. Il résulte de ce texte que le juge qui décide qu'il n'est saisi d'aucune demande, excède ses pouvoirs en statuant au fond.

10. Après avoir dit qu'elle n'était saisie d'aucun chef du jugement entrepris, la cour d'appel a confirmé le jugement.

11. En statuant ainsi, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

12. En application de l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

13. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il a confirmé en conséquence en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Châteauroux le 14 mars 2018, l'arrêt rendu le 4 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

Condamne Mme D... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille vingt et un et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour Mme D...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR constaté que l'appel formé par Mme D... n'a saisi la cour d'aucun chef du jugement entrepris et, en conséquence, confirmé en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Châteauroux le 14 mars 2018 ;

AUX MOTIFS QUE Mme D... a relevé appel du jugement rendu par le tribunal de commerce de Châteauroux le 14 mars é018 par une déclaration reçue le 4 mai 2018 ainsi libellée « Objet / Portée de l'appel : réformer le jugement » ; que la société Les 4 VENTS n'a pas elle-même relevé appel de ce jugement mais s'est jointe aux conclusions prises par Mme D... ; qu'en application des dispositions de l'article 552 du code de procédure civile « En cas de solidarité ou d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel formé par l'une conserve le droit d'appel des autres, sauf à ces dernières à se joindre à l'instance » ; que le jugement ayant condamné solidairement l'EURL Les 4 Vents et Mme D... à payer à la Caisse d'Epargne la somme de 5 385,20 euros au titre du prêt [...], l'appel formé par Mme D..., sous réserve de ce qui sera dit ci-après concernant la portée de son appel, a donc conservé l'appel de l'Eurl des 4 Vents qui a pu se joindre à l'instance ; qu'en revanche, seule l'EURL Les 4 Vents a été condamnée au paiement d'une somme de 36 890,49 euros au profit de la Caisse d'Epargne au titre du prêt [...] ; qu'en l'absence de toute condamnation prononcée à l'encontre de Mme D..., il ne peut donc y avoir, s'agissant de ce prêt, ni solidarité ni indivisibilité du litige et l'appel de Mme D... n'a pu conserver un droit d'appel au profit de l'Eurl Les 4 Vents ; que par ailleurs, il résulte des énonciations du jugement que seul l'EURL Les 4 Vents a sollicité la condamnation de la Caisse d'Epargne au paiement de dommages et intérêts pur manquement au devoir de mise en garde, de sorte qu'il ne peut exister, là encore ni solidarité ni indivisibilité du litige ; qu'enfin, il ne saurai résulter aucune indivisibilité du seul fait que Mme D... soit la gérante de l'Eurl Les 4 Vents ou encore que leurs intérêts soient les mêmes, ces deux personnes ayant une personnalité juridique distincte et aucune condamnation ou absence de condamnation à l'égard de l'une n'étant incompatible avec une condamnation ou absence de condamnation à l'égard de l'autre ; que sous réserve de ce qui sera indiqué ci-après, la cour n'est donc saisie que d'un appel portant sur la condamnation solidaire de Mme D... et de l'EURL Les 4 VENTS concernant le prêt [...] ; que selon l'article 901 du code de procédure civile, en sa rédaction résultant du décret du 6 mai 2017, la déclaration d'appel est fait par un acte contenant, à peine de nullité, les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible ; que l'article 562 de ce même code dispose que l'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent ; que la dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du jugement est indivisible ; qu'il résulte du premier de ces deux textes que la déclaration d'appel qui ne mentionne pas expressément les chefs de jugement critiqués ne répond pas aux exigences de ce texte et encourt la nullité prévue par l'article 901 de ce code ; que cette nullité qui ne sanctionne pas une irrégularité de fond est une nullité pour vice de forme au sens de l'article 114 du code de procédure civile, qui ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité ; qu'elle peut être couverte par une nouvelle déclaration d'appel qui ne peut toutefois intervenir après l'expiration du délai imparti à l'appelant pour conclure conformément aux articles 910-4 alinéa 1 et 954, alinéa 1, du code de procédure civile (Avis, Cass., 20 décembre 2017) ; qu'indépendamment de cette sanction qui n'aurait pu être mise en oeuvre que devant le conseiller de la mise en état, il résulte du second de ces textes, qui définit le contour de l'effet dévolutif de l'appel, qu'en l'absence dénonciation expresse, dans la déclaration d'appel de chefs de jugement critiqués, la cour n'est saisie d'aucun litige et que le jugement ne peut qu'être confirmé ; qu'il est par ailleurs constant que l'appel ne tend pas à l'annulation du jugement et que l'objet du litige ainsi qu'il a été expliqué ci-dessus n'est nullement indivisibles ; qu'en conséquence, l'appel formé par Mme D... dans les termes ci-dessus énoncé auquel s'est jointe l'EURL Les 4 Vents, ne saisit la cour d'aucun chef du jugement entrepris et ce dernier ne peut qu'être confirmé ;

1°) ALORS QUE l'appel ne défère à la cour d'appel que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent ; que la mention dans la déclaration d'appel : « Objet et portée de l'appel : réformer le jugement » défère nécessairement à la cour d'appel la connaissance de l'intégralité des chefs du jugement ; qu'en énonçant cependant, pour considérer qu'elle n'était saisie d'aucune litige, que Mme D... n'avait pas indiqué de manière expresse dans sa déclaration d'appel, les chefs du jugement critiqués, quand une telle mention résultait nécessairement de l'indication « réformer le jugement », la cour d'appel a violé l'article 562 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE l'étendue de l'appel n'est pas seulement déterminée par la déclaration d'appel, mais également par les conclusions de l'appelant ; qu'en considérant cependant que seule la déclaration d'appel emporte effet dévolutif, la cour d'appel a violé les articles 561, 562 et 954 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE, subsidiairement, l'irrégularité affectant la déclaration d'appel tirée de l'absence d'indication des chefs du jugement expressément critiqués constitue une irrégularité de forme susceptible de régularisation ; que l'indication, dans les conclusions d'appelant des chefs critiqués du jugement, objet de l'appel, régularise le vice affectant la déclaration d'appel ; qu'en constatant que l'appel formé par Mme D... n'avait saisi la cour d'aucun chef du jugement entrepris en l'absence d'énonciation expresse, dans la déclaration d'appel, de chefs de jugement critiqués, après avoir cependant relevé que dans ses conclusions d'appel notifiées le 3 juillet 2018, Mme D... avait indiqué les chefs du jugement critiqués, ce qui régularisait le vice affectant la déclaration d'appel, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 114, 115, 561, 562, 901 et 954 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE, plus subsidiairement, l'irrégularité affectant la déclaration d'appel tirée de l'absence d'indication des chefs du jugement expressément critiqués constitue une irrégularité de forme susceptible d'être sanctionnée par la nullité que si celui qui l'invoque justifie d'un grief causé par l'irrégularité ; que l'indication, dans les conclusions d'appelant des chefs critiqués du jugement, objet de l'appel, ne cause aucun grief à l'intimé, qui informé des chefs du jugement critiqués peut conclure en toute connaissance de cause ; qu'en constatant que l'appel formé par Mme D... n'avait saisi la cour d'aucun chef du jugement entrepris en l'absence d'énonciation expresse, dans la déclaration d'appel, de chefs de jugement critiqués, après avoir cependant relevé que dans ses conclusions d'appel notifiées le 3 juillet 2018 Mme D... avait indiqué les chefs du jugement critiqués ce qui écartait tout grief, la cour d'appel a violé les articles 114, 115, 561, 562 et 901 du code de procédure civile.

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