21 novembre 2006
Cour de cassation
Pourvoi n° 05-14.630

Première chambre civile

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2006:C101650

Titres et sommaires

ASSOCIATION - conseil d'administration - pouvoir disciplinaire - exercice - modalités - détermination - convention europeenne des droits de l'homme - article 6 § 1 - domaine d'application - exclusion - organes des groupements examinant la violation d'engagements contractuels - membre - fonctions - mandat - révocation - nature - distinction avec la sanction disciplinaire - portée - portée convention europeenne des droits de l'homme - révocation du mandat d'un membre d'une association

L'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'a pas vocation à s'appliquer aux organes des groupements qui, lorsqu'ils prononcent l'exclusion de l'un de leurs membres à titre disciplinaire, ne font qu'examiner la violation d'engagements contractuels

Texte de la décision

Attendu que Mme X..., membre de l'association franc-maçonne la "Grande loge féminine de France" (GLFF), élue en outre "députée" d'une loge locale et "vénérable maîtresse" d'une autre, a exercé une mission auprès de la Fédération solidarité emploi nationale, autre formation maçonnique ; qu'assignant celle-ci en raison d'imputations contenues dans une lettre anonyme et selon lesquelles elle aurait perçu à cette occasion des rémunérations illicites, Mme X... a versé cette pièce en vue des débats judiciaires, révélant ainsi l'appartenance maçonnique de plusieurs personnes ; qu'au titre de la contravention ainsi commise à l'article 1er du "Pacte social" de la GLFF "Nul ne doit dévoiler la qualité de franc-maçon d'une soeur ou d'un frère, mais chacun reste libre de faire état de la sienne... En toutes circonstances, les maçons se doivent aide et assistance, même au péril de leur vie", Mme X... en a été disciplinairement exclue, ses deux loges d'appartenance lui signifiant par ailleurs la révocation de ses responsabilités électives ;


Sur le premier moyen, pris en sa première branche :


Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 25 janvier 2005) d'avoir rejeté ses demandes en annulation de ces trois décisions et tendant à sa réintégration, alors, selon le moyen, que l'organe législatif d'une institution ayant pris le parti d'évincer un membre de celle-ci, dans le cadre d'une délibération motivée, formulée par le président de son organe exécutif, adoptée par l'ensemble de ses membres, et diffusé son ordre de procéder à l'exclusion, la procédure disciplinaire conduite par des organes locaux ne revêt aucun caractère équitable au sens de l'article 6 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où la prise de parti anticipée d'un organe législatif, dont est issu la juridiction disciplinaire d'appel, n'assure pas à la personne poursuivie la garantie d'un procès équitable par un organe indépendant et impartial ;


qu'en se contentant de relever que les membres des instances disciplinaires qui s'étaient prononcées en l'espèce n'avaient pas pris part au vote de l'assemblée générale représentative, la cour d'appel a violé l'article précité ;


Mais attendu, indépendamment de l'irrecevabilité partielle du moyen en ce qu'il porte sur une demande de réintégration non formulée devant les juges du fond, et de l'inapplicabilité de l'article 6 1 de la Convention aux organes des groupements examinant la violation d'engagements contractuels, que la cour d'appel, ne se contentant pas de relever que rien ne permettait d'établir, au mépris des incompatibilités stipulées dans les règlements de la GLFF, une participation des membres de ses trois instances disciplinaires ayant eu à connaître du dossier, comité de conciliation, comité régional, comité national, à l'assemblée générale du 16-17 mars 2002, laquelle avait fustigé le comportement de Mme X... et recommandé son exclusion, a retenu que chacun des recours intentés par celle-ci s'était exercé dans le respect de la contradiction, avec en outre, conformément aux statuts de l'association, l'assistance d'un avocat librement choisi ; que l'arrêt est légalement justifié ;


Sur la seconde branche du même moyen, telle qu'exposée au mémoire en demande et reproduite en annexe :


Attendu que Mme X..., qui n'a élevé aucune contestation avant la clôture des débats sur la production prétendument tardive du "Pacte social", d'ailleurs produit en première instance, n'est pas recevable à mettre en oeuvre devant la Cour de cassation un moyen qu'elle aurait dû invoquer devant la cour d'appel ;


Et sur le second moyen, pris en ses trois branches, pareillement exposé et reproduit :


Attendu que la cour d'appel, par motifs propres ou adoptés, a retenu qu'aux termes des statuts des deux loges dans lesquelles Mme X... était "députée" ou "vénérable maîtresse", ces fonctions s'analysaient en des mandats, révocables ad nutum sauf abus de droit, en l'espèce exclu par la constatation souveraine selon laquelle le comportement de Mme X..., dans l'un et l'autre cas, lui avait fait perdre la confiance des autres sociétaires ; qu'en outre, l'article 6 1 de la Convention est là encore sans application, la révocation d'un mandat n'étant en rien une sanction disciplinaire ; d'où il suit que le moyen est dépourvu de tout fondement ;

PAR CES MOTIFS :


REJETTE le pourvoi ;


Condamne Mme X... aux dépens ;


Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille six.

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