13 janvier 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-21.138

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:SO00064

Titres et sommaires

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Discrimination entre salariés - Dénonciation de faits de discrimination - Sanction interdite - Exception - Mauvaise foi - Caractérisation - Portée

Aux termes de l'article L. 1132-3 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis aux articles L. 1132-1 et L. 1132-2 ou pour les avoir relatés. En vertu de l'article L. 1132-4 du même code, toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul. Il s'en déduit que le salarié qui relate des faits de discrimination ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Nullité - Cas - Licenciement prononcé en raison de la dénonciation de faits de discrimination - Exception - Dénonciation de mauvaise foi - Caractérisation - Portée

Texte de la décision

SOC.

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 janvier 2021




Rejet


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 64 F-P+B

Pourvoi n° U 19-21.138




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 JANVIER 2021

M. O... T..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° U 19-21.138 contre l'arrêt rendu le 7 juin 2019 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 1, chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Serma ingénierie, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ott, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. T..., de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Serma ingénierie, après débats en l'audience publique du 18 novembre 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ott, conseiller rapporteur, Mme Lanoue, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 7 juin 2019), M. T... a été engagé le 19 mai 2008 en qualité d'ingénieur électronique par la société Serma ingénierie (la société).

2. Le 27 février 2012, il a adressé un courrier au président du groupe ainsi qu'à son supérieur hiérarchique pour dénoncer des faits de discrimination en raison de son origine à son encontre de la part du directeur commercial. Il a également saisi le Défenseur des droits, lequel a classé l'affaire le 22 décembre 2014.

3. Le 22 mars 2012, il a été licencié pour faute grave, l'employeur lui reprochant de proférer des accusations de discrimination en raison de son origine dont il avait conscience du caractère fallacieux.

4. Le 11 décembre 2014, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de la contestation de son licenciement.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé


5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement repose sur une faute grave, de le débouter de l'intégralité de ses demandes, alors :

« 1°/ que la seule fausseté des faits dénoncés ne peut justifier le licenciement d'un salarié qui dénonce des faits discriminatoires ; qu'en retenant, pour dire que le licenciement de M. T... était fondé, que la dénonciation de discrimination avait été faite de mauvaise foi, les juges ont retenu que la mission proposée à Pessac n'était pas déloyale, que l'employeur avait adressé le curriculum du salarié à différentes entreprises, que la situation d'inter-contrat était commune à des nombreux salariés et que le courrier de M. E... était justifié au regard des horaires effectués par le salarié, la cour d'appel s'est fondée sur la seule fausseté de la déclaration, et a ainsi violé les articles L. 1132-3, L. 1132-4 et L. 1234-5 du code du travail ;

2°/ que le salarié qui relate des faits de discrimination ne peut être licencié pour ce motif sauf mauvaise foi, laquelle résulte de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce ; qu'en retenant que la société était lauréate d'un prix contre les discrimination, que le salarié avait voulu obtenir une rupture conventionnelle, ou encore que le salarié avait créé son entreprise peu de temps après son licenciement, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs impropres à établir la mauvaise foi de M. T..., et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-3, L. 1132-4 et L. 1234-5 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. Aux termes de l'article L. 1132-3 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis aux articles L. 1132-1 et L. 1132-2 ou pour les avoir relatés. En vertu de l'article L. 1132-4 du même code, toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul. Il s'en déduit que le salarié qui relate des faits de discrimination ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.

8. Après avoir retenu que la discrimination alléguée n'était pas établie, la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a relevé que l'employeur démontrait que plusieurs propositions de missions avaient été faites au salarié qui se trouvait en inter-contrat, que celui-ci avait refusé en février 2012 d'effectuer une mission à Pessac, et que, dans le même temps, il alléguait auprès du Défenseur des droits et de ses supérieurs hiérarchiques pour la première fois une situation de discrimination en raison de ses origines, que l'allégation a été faite par le salarié en des termes très généraux sans invoquer de faits circonstanciés, que le salarié était dès le mois de décembre 2011 déterminé à quitter l'entreprise, son désengagement professionnel durant la période d'inter-contrat montrant sa volonté d'obtenir une rupture conventionnelle du contrat de travail en cherchant à imposer ses conditions financières, qu'aucune alerte n'avait été faite durant la relation de travail auprès des délégués du personnel, de la médecine du travail ou de l'inspection du travail et que le salarié n'avait fait aucun lien avec ses origines avant les emails adressés à ses supérieurs hiérarchiques et au Défenseur des droits en février 2012.

9. La cour d'appel a pu en déduire que le salarié connaissait la fausseté des faits allégués de discrimination en raison de son origine.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. T... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. T...


Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR jugé que le licenciement de M. T... reposait sur une faute grave, de l'AVOIR débouté de l'intégralité de ses demandes, et d'AVOIR condamné le salarié aux entiers dépens d'appel et à la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « suivant courrier du 22 mars 2012, la société Serma Ingéniérie a adressé à M. O... T... une lettre de licenciement pour faute grave en indiquant les motifs suivants : "le lundi 5 mars 2012, envoyez un courriel en fin d'après-midi au Président du Groupe Serma ainsi qu'à M. P..., dans lequel vous avez jugé utile de proférer des accusations très graves à l'encontre du Président et de M. P... en les accusant entre autre de discrimination raciale. Force est de constater que dans votre courriel vous ne donnez aucun élément à l'appui de ces accusations. Pire encore, vous avez parfaite conscience du caractère fallacieux desdites accusations. En effet, vous savez pertinemment que la société Serma Ingéniérie a toujours pratiqué une politique de diversité. Vous en êtes le témoin et ce y compris dans votre environnement professionnel. Cette diversité des nationalités, des origines, participe d'une logique exactement contraire d'une supposée politique de discrimination raciale avancée par vos soins. Ces reproches sont intolérables et inacceptables. Après réflexion et au vu des éléments ci-dessus, nous vous informons par la présente lettre que nous prenons la décision de vous licencier pour faute grave [...]" ; que selon l'article L. 1152-2 du code du travail en sa version en vigueur à la date du licenciement litigieux, "Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés" ; que cette protection ne peut être invoquée si le salarié a dénoncé de mauvaise foi de tels faits, l'employeur ayant la charge de la preuve d'un tel comportement ; qu'il est constant en l'espèce que le Défenseur des droits, saisi par M. T..., a répondu à ce dernier avoir classé sans suite sa plainte en indiquant, par courrier du 22 décembre 2014 à ce dernier, qu'il avait "procédé à une enquête approfondie auprès de la société Serma Ingéniérie" et que "cette enquête n'a pas permis d'établir l'existence d'une discrimination à votre encontre" en ajoutant que "la société Serma Ingéniérie justifie votre licenciement par le fait que vous avez dénoncé de mauvaise foi des faits de discrimination. Elle produit en ce sens des attestations de plusieurs salariés démontrant que vous n'étiez pas satisfait de votre activité au sein de la société ainsi que des documents indiquant que vous avez créé une société peu de temps après votre licenciement" ; qu'il n'est pas plus discuté que la société Serma Ingéniérie, lauréate d'un prix de lutte contre les discriminations et l'égalité salariale décernée en 2008 par la Région Midi-Pyrénées développe une politique de recrutement et de promotion des salariés exclusivement axée sur la valorisation des compétences professionnelles sans considération d'origine. Ces points sont d'ailleurs illustrés par de nombreuses pièces tel le tableau des promotions (pièce 2 du dossier de l'intimée) et les courriers de soutien à des demandes de naturalisation de salariés. Mme L... A..., salariée de la société depuis dix ans et secrétaire du CHSCT a attesté en 2012 n'avoir jamais personnellement assisté à des faits de discrimination au sein de l'entreprise et que l'ensemble des membres de du CHSCT auxquels cette attestation a été soumise, s'associe à celle-ci ; que dans ce contexte qui ne pouvait être ignoré de M. T..., il convient de concrètement examiner la situation de ce dernier qui a dénoncé le 27 février 2012 à l'employeur, en communiquant un arrêt de travail, une "discrimination raciale très perturbante - Nous étions 2 français d'origine maghrébine et, à ce jour, vous avez réussi à licencier mon collègue d'origine étrangère - un harcèlement profond et intolérable, une mise à l'écart systématique et tout ceci de manière incessante, sans compter l'ignorance et l'arrogance de vos commerciaux durant ces 2 derniers mois. Je suis particulièrement étonné, déstabilisé et choqué par votre comportement inadmissible, étant donné que j'ai toujours mis la société Serma en avant lorsque j'étais chez les différents clients, en témoigne les remerciements sur mes diverses interventions des cadres dirigeants de ces dits clients" ; que cette dénonciation formulée en des termes très généraux a été explicitée à l'entreprise par le courrier du Défenseur des droits qui, le 31 juillet 2012, relatait plus précisément la version du salarié, en situation d'intercontrat depuis le 21 novembre 2011, en même temps que M. R... S..., tous deux convoqués en entretien individuel le 8 décembre 2011 par M. P... qui aurait formulé à l'endroit de M. T... divers reproches concernant ses horaires ainsi que la qualité de son travail auprès des clients de l'entreprise et l'aurait invité à démissionner ; qu'il résulte de diverses attestations que M. T... a refusé les missions qui lui étaient proposées durant sa période d'intercontrat (Pilote de validation BMS sur les batteries Renault) et que l'entreprise avait consenti à maintenir durant un certain temps le salarié sur la région toulousaine pour raison familiale (pièce 4 du dossier de l'intimée). Le 17 février 2012, l'entreprise lui a finalement proposé une mission de développement des cartes électroniques pour des boards de test ou de drivers pour les essais de fiabilité sur des composants électroniques au sein de la société Serma Technologie à Pessac (33) du 1er mars 2012 au 6 avril 2012 ; que cette mission d'une durée limitée à cinq semaines et à exécuter à 200 km de Toulouse ne pouvait être considérée comme une proposition déloyale dans le contexte d'une activité imposant par essence et contractuellement une réelle mobilité géographique à laquelle M. T... avait adhéré ; que le salarié a refusé cette mission et M. P... écrivait le jour même à Mme V... pour indiquer "M. T... avant d'entendre le type de mission qui lui est confié m'a dit qu'il refusait d'aller à Bordeaux qu'il nous transmettrait un certificat médical. Il a écourté l'entretien est sorti de mon bureau avant la fin, avec tranquillité. Il m'a redit qu'il refusait de se déplacer" ; qu'il convient de relever que durant cette période, la société a adressé le curriculum vitae du salarié à différentes entreprises comme en attestent les nombreux courriels produits au dossier et qui contredisent ainsi une volonté de pousser le salarié vers la sortie. Cette situation d'intercontrat commune à de nombreux salariés de l'entreprise qui en ont connu au cours de leur activité et qui s'explique par la nature de l'activité développée par la société Serma, ne saurait signer une mise à l'écart de l'intéressé qui n'a jamais caractérisé l'existence d'une consigne de l'employeur aux fins notamment d'interdire aux salariés de lui adresser la parole ; que l'attestation de M. S... nommé par le Défenseur des droits ne vise qu'une surveillance des horaires durant la période d'intercontrat ; que la société Serma Ingéniérie produit pour sa part au dossier des courriels particulièrement éloquents, émanant du salarié, objectivant des arrivées sur le lieu de travail entre 10 h 45 et 11 heures et des départs entre 15 h 40 et 16 h 40 accompagnés de propos désinvoltes de sorte que les termes du courriel de M. E..., délégué syndical, : "je ne pense pas qu'il prépare vraiment quelque chose, cependant il est clair que vous êtes dans le colimateur" prend tout son réel sens, dépourvu de toute teinte discriminatoire, sur la gestion des horaires de travail par M. T... et sur la disponibilité de ce dernier pour l'obtention d'une nouvelle mission ainsi que l'auteur de ce courriel en atteste clairement ; que d'ailleurs, M. E... indiquait à M. T... dans ce courriel produit par le salarié en pièce 2 de son dossier : "alors mon conseil c'est de faire 9 h-17 h au minimum et de se faire voir quand tu pars sans pour autant le crier sur tous les toits" démontrant bien que le salarié pouvait être en délicatesse sur ce plan-là et ajoutait même après avoir rappelé la période de baisse d'activité lié aux fêtes de fin d'année, "Il faut montrer que vous êtes motivés, actif et disponibles pour décrocher une nouvelle mission", conseil auquel M. T... a répondu "on va faire le nécessaire dans le bon sens bien sûr" révélant l'absence de contestation des faits que la hiérarchie avait rapportés à ce délégué syndical tant sur R... S... que sur O... T... ; que l'employeur démontre, échanges de courriels à l'appui, que loin de se plaindre de la situation d'intercontrat, M. T... écrivait à certains salariés de manière provocatrice des messages empreints d'ironie tels que "je glande tellement que je n'avais pas ouvert ma messagerie" (9 septembre 2011) ou à 16 h 25 le 23 novembre 2011 "bon il est tard, il faut que j'y aille, je vais méditer à mon avenir" (pièce 7 du dossier de l'intimée) sans que son destinataire, M. F... depuis licencié disciplinairement pour une toute autre cause, puisse convaincre dans l'attestation faite pour le compte du salarié, de la malveillance de l'employeur en choisissant ces messages pour illustrer le comportement de M. T... ; qu'il s'avère qu'en fait, M. T... était dès le mois de décembre déterminé à quitter l'entreprise en écrivant le 15 décembre 2011 à H... G... : "J'attends de voir W... pour négocier mon départ" et, au même destinataire le 18 janvier 2012 : "Oui ça va, j'ai discuté avec C... qui m'a proposé un poste alors que P... lui a dit que je partais bientôt, je crois qu'il rêve. J'ai envoyé un mail à W... pour que l'on éclaircisse cette affaire, à mon avis l'autre ne lui a pas remonté mes conditions donc je vais au charbon" (pièce n° 19 du dossier de l'intimée) ; qu'il est constant que la date de création par M. T... d'une société de réalisation de logiciels est bien le 20 avril 2012 soit à peine un mois après la notification de son licenciement. Cet évènement qui exige une préparation minimale doit être ainsi mis en perspective avec la période de désengagement professionnel de M. T..., concrètement illustré par l'employeur, la volonté du salarié d'obtenir une rupture conventionnelle du contrat de travail en cherchant à imposer ses conditions financières, le refus sans motif légitime des missions qui lui ont été proposées durant la période d'intercontrat ; qu'il sera spécialement relevé sur ce dernier point que le salarié n'a jamais allégué la situation de son enfant handicapé, né en début d'année 2011, strictement aucune pièce parmi les échanges contemporains des faits n'en faisant état ; que sans avoir renversé la charge de la preuve et en ayant fait une analyse minutieuse des éléments apportés par l'employeur dont la cour vérifie la pertinence au travers de ses propres constatations qui viennent d'être énoncées, le premier juge a caractérisé la mauvaise foi de M. T... ; que la circonstance selon laquelle M. W... ait répondu le 27 février 2012 au message de ce dernier portant la dénonciation litigieuse : "Je pense que nous avons un vrai dossier" ne saurait être tenue à charge de l'entreprise au regard du décalage pouvant d'ores et déjà apparaître entre l'énoncé de l'accusation et la patience de l'employeur a fait preuve jusque-là face à une posture manifestement provocatrice. L'examen détaillé de la chronologie des faits et des écrits échangés fait apparaître la solidité du dossier ayant conduit l'entreprise à licencier le salarié ; que la décision rejetant l'ensemble des demandes de M. T... tendant à contester le bien fondé du licenciement pour faute grave prononcé à son endroit sera confirmée en toutes ses dispositions ; que M. T..., partie perdante au sens des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, sera condamnée aux entiers dépens d'appel ; que la Sas Serma Ingéniérie est en droit de réclamer l'indemnisation des frais non compris dans les dépens exposés à l'occasion de cette procédure. M. T... sera donc tenu de lui payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 alinéa 1er 1° du code de procédure civile » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE « la preuve de la bonne foi de Monsieur T... n'est pas avérée, aucun élément ne pouvant de manière sérieuse corroborer le ressenti allégué par lui de discrimination et de harcèlement ; que le seul fait que Monsieur S..., d'origine étrangère et en inter-contrat comme lui, ait été convoqué en même temps que lui le 8 décembre 2011, alors que les raisons à l'origine de son licenciement sont inconnues, ne peut suffire à établir la bonne foi du salarié ; que Monsieur T... avait donc nécessairement connaissance du caractère fallacieux des dénonciations portées à l'encontre de son employeur, n'ayant jamais fait aucun lien avec ses origines avant les mails adressés à la déléguée du Défenseur des droits et à ses supérieurs hiérarchiques ; que cette mauvaise foi ne lui permet pas de bénéficier de la protection des articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail ; que les accusations portées directement à l'encontre du Directeur de groupe et du Directeur commercial, dans des termes forts, une accusation de discrimination raciale sans fondement n'étant jamais anodine et comportant un caractère vexatoire et outrageant encore plus que celle d'harcèlement, qui plus est par un cadre, alors que le salarié avait nécessairement connaissance de leur caractère fallacieux, sont constitutives d'un défaut de loyauté ne permettant pas la poursuite des relations contractuelles ; que le licenciement pour faute grave de Monsieur T... est donc justifié. Le salarié sera débouté de l'ensemble de ses demandes à ce titre ; que les demandes formulées par le salarié à titre subsidiaire sont également rejetées, l'employeur ayant produit une partie du registre du personnel et ayant suffisamment démontré qu'aucun grief de discrimination raciale ne pouvait être formulé à son encontre » ;

1°) ALORS QUE la seule fausseté des faits dénoncés ne peut justifier le licenciement d'un salarié qui dénonce des faits discriminatoires ; qu'en retenant, pour dire que le licenciement de M. T... était fondé, que la dénonciation de discrimination avait été faite de mauvaise foi, les juges ont retenu que la mission proposée à Pessac n'était pas déloyale, que l'employeur avait adressé le curriculum du salarié à différentes entreprises, que la situation d'inter-contrat était commune à des nombreux salariés et que le courrier de M. E... était justifié au regard des horaires effectués par le salarié, la cour d'appel s'est fondée sur la seule fausseté de la déclaration, et a ainsi violé les articles L. 1132-3, L. 1132-4 et L. 1234-5 du code du travail ;

2°) ALORS QUE le salarié qui relate des faits de discrimination ne peut être licencié pour ce motif sauf mauvaise foi, laquelle résulte de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce ; qu'en retenant que la société était lauréate d'un prix contre les discrimination, que le salarié avait voulu obtenir une rupture conventionnelle, ou encore que le salarié avait créé son entreprise peu de temps après son licenciement, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs impropres à établir la mauvaise foi de M. T..., et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-3, L. 1132-4 et L. 1234-5 du code du travail ;

3°) ALORS QU'il appartient à l'employeur de prouver la mauvaise foi du salarié ; qu'en adoptant expressément les motifs du jugement selon lesquels « la preuve de la bonne foi de Monsieur T... n'est pas avérée », la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315, devenu 1353, du code civil, ensemble les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.

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