13 juillet 2022
Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
RG n° 18/00810

Chambre sociale

Texte de la décision

AFFAIRE : N° RG 18/00810 - N° Portalis DBWB-V-B7C-FAQ2

 Code Aff. :





ARRÊT N° PB





ORIGINE :JUGEMENT du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT PIERRE en date du 25 Avril 2018, rg n° F 17/00175







COUR D'APPEL DE SAINT-DENIS

DE LA RÉUNION



CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 13 JUILLET 2022





APPELANTE :



Association pour la gestion du Régime de Garantie des créances des salariés, association déclarée, dont le siège est au [Adresse 3], agissant poursuites et diligences de son Président, par l'UNEDIC en qualité de gestionnaire de l'AGS en application de l'article L.3253-14 du Code du Travail, domicilié en son établissement du Centre de gestion et d'étude AGS de la Réunion,

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentant : Me Nathalie JAY, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION



INTIMÉS :



Monsieur [G] [F]

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentant : M. François SMITH, défenseur syndical ouvrier



Maître [M] [B] de la SELARL [M] [B], mandataire judiciaire, es qualité de liquidateur de l'E.U.R.L. AREBAT, immatriculée au registre de commerce et des sociétés de SAINT- DENIS DE LA REUNION sous le numéro B 507 587 574,

[Adresse 2]

[Localité 5]

Non représenté



Clôture : 2 septembre 2019



DÉBATS : En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 mars 2022 en audience publique, devant Philippe BRICOGNE, président de chambre chargé d'instruire l'affaire, assisté de Nadia HANAFI, greffier, les parties ne s'y étant pas opposées.



Ce magistrat a indiqué à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 9 juin 2022, mise à disposition prorogée au 13 juillet 2022;



Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :



Président :Philippe BRICOGNE

Conseiller:Laurent CALBO

Conseiller :Aurélie POLICE

Qui en ont délibéré



ARRÊT : mis à disposition des parties le 13 JUILLET 2022





* *

*





LA COUR :





EXPOSÉ DU LITIGE





1. Monsieur [G] [F] a été embauché par l'E.U.R.L. Arebat en qualité d'ouvrier maçon, selon contrat à durée indéterminée à effet au 1er juillet 2015. Il a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre du 4 février 2016. Il a également fait l'objet d'un licenciement par lettre du 15 février 2016.



2. Saisi par Monsieur [G] [F], qui sollicitait un arriéré de salaires, des indemnités de préavis et pour les congés payés afférents, une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et des dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail, le conseil de prud'hommes de Saint-Pierre de la Réunion, par jugement rendu le 25 avril 2018, a :



- fixé les créances de Monsieur [G] [F] à l'égard de l'E.U.R.L. Arebat aux sommes suivantes :

* 1.741,75 € bruts au titre du salaire du mois de janvier 2016,

* 1.741,75 € bruts à titre d'indemnité de préavis,

* 174,17 € bruts à titre de congés payés sur préavis,

* 6.000,00 € bruts à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

* 600,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,



- ordonné la délivrance des bulletins de paye des mois de janvier à mars 2016, d'une attestation destinée à Pôle Emploi et d'un certificat de travail, sous astreinte de 50,00 € par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement,



- dit que la garantie due par l'association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés -ci-après l'AGS- est plafonnée et ne comprend pas les créances au titre des frais non répétibles d'instance et des dépens,



- débouté Monsieur [G] [F] du surplus de ses demandes.



3. Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion du 24 mai 2018, l'AGS a interjeté appel de cette décision.



4. Par ordonnance du 7 mai 2019, le conseiller de la mise en état a :



- dit que la constitution de Monsieur [N] [H] dans les intérêts de Monsieur [G] [F] est régulière,



- déclaré irrecevables les conclusions et pièces communiquées par Monsieur [G] [F] le 18 février 2019,



- condamné Monsieur [G] [F] aux dépens de l'incident.



5. Par arrêt avant dire droit du 28 septembre 2021, la cour a :



- invité les parties à s'expliquer sur la recevabilité de l'appel en l'absence de l'E.U.R.L. Arebat qui dispose d'un pouvoir propre et en raison de l'indivisibilité du litige,



- renvoyé l'affaire à l'audience du 23 novembre 2021,



- dit que l'arrêt vaut convocation des parties en justice,



- réservé tous les chefs de demande ainsi que les dépens.





* * * * *











6. Dans ses dernières conclusions régulièrement notifiées déposées au greffe via RPVA le 1er décembre 2021, l'AGS demande à la cour de :



- sur la procédure,



- constatant que :



* le jugement lui-même mentionne comme seules parties l'AGS, Maître [B] représentant l'E.U.R.L. Arebat et Monsieur [G] [F],



* la déclaration d'appel reprend strictement l'indication des parties portée sur la décision attaquée,



* le liquidateur a qualité à représenter la société liquidée judiciairement pour ce qui concerne les actions patrimoniales et les demandes d'inscription de créance, même si la liquidation n'emporte plus dissolution de la société,



* l'erreur éventuelle commise dans la désignation de l'intimé dans la déclaration d'appel ne constitue pas une irrégularité de fond affectant la régularité de l'appel,



* à défaut de grief démontré, aucune irrecevabilité n'est encourue,



- déclarer recevable l'appel de l'AGS formalisé par déclaration d'appel du 24 mai 2018,



- en tout état de cause, faire droit à la demande de renvoi pour permettre la régularisation de l'appel par citation extra-judiciaire de l'E.U.R.L. Arebat,



- au fond,



- infirmer la décision attaquée en ce qu'elle a :



* fixé les créances de Monsieur [G] [F] à l'égard de l'E.U.R.L. Arebat aux sommes suivantes :

' 1.741,75 € bruts au titre du salaire du mois de janvier 2016,

' 1.741,75 € bruts à titre d'indemnité de préavis,

' 174,17 € bruts à titre de congés payés sur préavis,

' 6.000,00 € bruts à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

' 600,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,



* ordonné la délivrance des bulletins de paye des mois de janvier à mars 2016, d'une attestation destinée à Pôle Emploi et d'un certificat de travail, sous astreinte de 50,00 € par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement,



- statuant à nouveau,



- constatant que Monsieur [G] [F] se trouvait en congés payés du 1er janvier au 17 janvier 2016 inclus et que, ne pouvant se prévaloir d'un droit à véhicule de fonction, il ne s'est plus tenu à la disposition de l'employeur après cette date,



- constatant que Monsieur [G] [F] n'a pas travaillé du 18 au 31 janvier 2016, l'employeur constatant son absence lui ayant fait sommation de reprendre son poste,



- débouter Monsieur [G] [F] de sa demande à titre de salaire pour le mois de janvier 2016,



- dire sans effet le licenciement intervenu postérieurement à la prise d'acte,



- constatant qu'aucune preuve n'est apportée du manquement de l'employeur à une obligation de sécurité (le véhicule incriminé ne lui appartenant pas),











- constatant que Monsieur [G] [F] ne s'est pas tenu à la disposition de l'employeur, n'a pas travaillé en janvier 2016, et qu'il n'a pas démontré qu'un retard de paiement d'une moitié de salaire éventuellement due aurait été pour lui d'une gravité telle qu'il aurait interdit la poursuite du contrat de travail,



- dire que la prise d'acte de la rupture est imputable au salarié et qu'elle produit les effets d'une démission,



- débouter Monsieur [G] [F] de l'ensemble de l'intégralité de ses demandes liées à une rupture imputable à l'employeur (notamment indemnité compensatrice de préavis, indemnité pour non-respect de la procédure et dommages et intérêts),



- subsidiairement, si la prise d'acte était déclarée fondée sur des faits suffisamment graves de l'employeur,



- constatant l'absence de production aux débats d'élément de preuve relatifs à la situation personnelle et matérielle du demandeur permettant d'évaluer les préjudices qu'il invoque sans autre précision,



- réduire considérablement l'indemnité réclamée à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,



- confirmer la décision attaquée pour le surplus,



- sur sa garantie,



- dire que la décision à intervenir ne lui sera opposable que dans les seules limites de sa garantie légale prévue aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,



- en conséquence, dire que sa garantie est plafonnée, toutes créances

avancées pour le compte du salarié, à l'un des trois plafonds définis à l'article D. 3253 du code du travail,



- exclure de sa garantie les créances résultant de la rupture initiée par Monsieur [G] [F], soit l'indemnité compensatrice de préavis,

l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, les dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, l'indemnité compensatrice de congés payés et l'indemnité pour travail dissimulé,



- exclure de sa garantie les créances éventuellement inscrites au titre des frais irrépétibles, des dépens, en paiement d'une astreinte et en délivrance des documents.



7. À l'appui de ses prétentions, l'AGS fait en effet valoir :



- que le jugement ne mentionne pas l'E.U.R.L. Arebat à partir du moment où elle était représentée par son liquidateur, de sorte qu'elle ne pouvait donc pas l'inclure parmi les intimés dans sa déclaration d'appel, aucun grief n'étant par ailleurs établi et une régularisation étant toujours possible,



- que Monsieur [G] [F] réclame son salaire de la première quinzaine de janvier 2016 alors qu'il n'a pas travaillé, la caisse des congés payés du BTP étant responsable du paiement de cette période de congés,



- que Monsieur [G] [F] ne saurait reprocher à son employeur l'état d'un véhicule appartenant à un de ses collègues, utilisé pour se rendre à son travail, ce fait étant en toute hypothèse insuffisant pour refuser de se rendre à son poste, le salaire pour la seconde quinzaine du mois de janvier 2016 n'étant donc pas dû,



- que le licenciement intervenu postérieurement à la prise d'acte est nécessairement sans effet,









- que la prise d'acte s'analyse en une démission lorsque les faits, que doit prouver le salarié, ne sont pas d'une gravité suffisante, le doute profitant à l'employeur,



- que Monsieur [G] [F] a obtenu une indemnité équivalente à plus de 4 mois de salaire alors qu'il ne compte que 7 mois d'ancienneté.



* * * * *



8. La S.E.L.A.R.L. [M] [B], à qui la déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées à personne morale le 17 septembre 2018, n'a pas constitué avocat.



* * * * *



9. L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 février 2022.



10. Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.






MOTIFS DE LA DÉCISION



Sur la recevabilité de l'appel



11. L'article 553 du code de procédure civile dispose qu' 'en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel de l'une produit effet à l'égard des autres même si celles-ci ne sont pas jointes à l'instance ; l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance'.



12. En l'espèce, il ressort de la procédure de première instance que Monsieur [G] [F] a d'abord saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Pierre le 23 mars 2016, alors que l'E.U.R.L. Arebat était in bonis, l'affaire étant finalement, après plusieurs renvois, radiée le 5 juillet 2017 par suite de défaut de comparution du demandeur, avant d'être ré-enrôlée suivant requête du 16 août 2017, avec mise en cause de I'AGS et de la S.E.L.A.R.L. [M] [B], désignée en qualité de liquidateur de l'E.U.R.L. Arebat suivant jugement du tribunal mixe de commerce de Saint-Pierre du 1er mars 2017.



13. Le litige entre Monsieur [G] [F] et l'E.U.R.L. Arebat est né avant l'ouverture de la procédure collective, en sorte que la société dispose d'un droit propre à se défendre contre le jugement rendu le 25 avril 2018. Pourtant, l'acte d'appel de l'AGS désigne uniquement en qualité d'intimés la S.E.L.A.R.L. [M] [B] ès qualités de liquidateur de l'E.U.R.L. Arebat et Monsieur [G] [F].



14. La circonstance que le jugement entrepris ne mentionne pas, au rang des défendeurs, l'E.U.R.L. Arebat, est inopérante, dès lors qu'il s'évinçait de sa seule lecture que cette dernière disposait d'un droit propre à le critiquer en sa qualité de partie, en vertu de l'article L. 237-2 du code de commerce.



15. Par ailleurs, le litige présentant un caractère d'indivisibilité entre l'E.U.R.L. Arebat et son liquidateur la S.E.L.A.R.L. [M] [B] et aucune régularisation n'étant possible, il conviendra de déclarer l'appel de l'AGS irrecevable.



Sur les dépens



16. L'AGS, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.





PAR CES MOTIFS





La cour, statuant publiquement, en matière sociale et en dernier ressort, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,



Déclare l'appel de l'AGS irrecevable,



Condamne l'AGS aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Philippe BRICOGNE, président de chambre, et par Mme Nadia HANAFI, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



La greffière, Le président,

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