2 mai 2024
Cour d'appel d'Orléans
RG n° 24/00969

Chambre des Rétentions

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Étrangers



ORDONNANCE du 2 MAI 2024

Minute N°

N° RG 24/00969 - N° Portalis DBVN-V-B7I-G7IQ

(1 pages)



Décision déférée : Juge des libertés et de la détention d'ORLÉANS en date du 01 mai 2024 à 10:49



Nous, Florence Chouvin, conseiller à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Hermine Bildstein, greffier stagiaire en pré-affectation sur poste, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,




APPELANT :

M. [Y] [P]

né le 23 décembre 1982 à [Localité 4] (Géorgie), de nationalité géorgienne,



actuellement en rétention administrative dans des locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire du centre de rétention administrative d'[Localité 2],

comparant par visioconférence, assisté de Me Bérangère Dufour, avocat au barreau d'Orléans,



en présence de Mme [U] [N] [L], interpète en langue géorgienne, expert près la cour d'appel d'Orléans, qui a prêté son concours lors de l'audience et du prononcé ;



INTIMÉ :

LA PREFECTURE D'EURE-ET-LOIR

non comparante, non représentée ;



MINISTÈRE PUBLIC : avisé de la date et de l'heure de l'audience ;





À notre audience publique tenue en visioconférence au Palais de Justice d'Orléans, conformément à l'article L. 743-8 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), le 2 mai 2024 à 10 heures;



Statuant en application des articles L. 743-21 à L. 743-23 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), et des articles R. 743-10 à R. 743-20 du même code ;



Vu l'ordonnance rendue le 1er mai 2024 à 10:49 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Orléans rejetant les exceptions de nullité, rejetant le recours formé à l'encontre de l'arrêté de placement, et ordonnant la prolongation du maintien de M. [Y] [P] dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 28 jours à compter du 30 avril 2024 à 09h45 ;



Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 1er mai 2024 à 13:42 par M. [Y] [P] ;



Vu les conclusions et pièces de la préfecture d'Eure-et-Loir reçues au greffe le 2 mai 2024 à 9:22 ;



Après avoir entendu :

- Me Bérangère Dufour, en sa plaidoirie,

- M. [Y] [P], en ses observations, ayant eu la parole en dernier ;





AVONS RENDU ce jour, publiquement et contradictoirement, l'ordonnance suivante :



Il résulte de l'article 66 de la Constitution et de l'article L. 743-9 du CESEDA que le juge des libertés doit s'assurer que l'étranger est pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir lorsqu'il se trouve placé en rétention administrative.



Aux termes de l'article L. 743-12 du CESEDA, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la main levée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.

Selon l'article L. 741-3 du CESEDA , « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps nécessaire à son départ, l'administration étant tenue d'exercer toutes diligences à cet effet, dès le placement en rétention »,



Il convient de considérer que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents qu'il y a lieu d'adopter que le premier juge a statué sur l'ensemble des moyens de nullité et de fond soulevés devant lui et repris devant la cour, étant observé, au vu des termes de la déclaration d'appel du retenu du 1er mai 2024 et des moyens repris lors des débats de ce jour :



Sur la régularité de la procédure



M. [Y] [P] soutient que si le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) a bien été consulté au cours de sa garde à vue, l'administration ne démontre nullement que ce fichier a bien été consulté par une personne habilitée.



Il ressort de la procédure que l'enquêteur n'a pas consulte le FAED, mais s'est rapproché des enquêteurs gérant ce chier. La personne qui a réalisé la consultation était identi ée par le système et donc dûment habilitée. ( 345174 IDIHIA ISMAEL). Le moyen sera écarté.




Sur les diligences de l'administration.



Aux termes de l'article L. 741-3 du CESEDA, l'administration doit accomplir toutes les diligences pour que la rétention ne puisse durer que le temps strictement nécessaire à la mise en 'uvre de l'éloignement, à chaque examen de demande de prolongation.M. [Y] [P] fait valoir que l'administration ne démontre pas sérieusement avoir accompli toutes les diligences pour que sa rétention ne puisse durer que le temps strictement nécessaire à la mise en 'uvre de son éloignement.



En l'espèce, M. [Y] [P] a été placé en rétention le 28 avril 2024, et l'administration a effectué des démarches auprès de l'ambassade de la Géorgie le 29 avril 2024 afin de solliciter la délivrance d'un laissez-passer consulaire.

Ainsi, l'autorité administrative a effectué des diligences nécessaires et suffisantes à ce stade de la procédure administrative de rétention, s'agissant d'une première demande de prolongation, étant rappelé qu'elle ne détient aucun pouvoir d'instruction ou de contrainte sur les autorités consulaires, de sorte qu'il ne peut lui être reproché le défaut de réponse du consulat. Le moyen est rejeté.



Sur l'insuffisance de motivation de la décision de placement en rétention administrative.



M. [Y] [P] fait valoir que l'arrêté portant placement en rétention administrative est insuffisamment motivé puisqu'il ne prend pas en compte son état de santé.



Aux termes de l'article L.741-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'arrêté de placement en rétention administrative, doit être motivé en fait et en droit.



Aux termes de l'article L. 21-1-5 du code des relations entre le public et l'administration, la motivation des actes administratifs s'entend d'un écrit comportant l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ; la régularité de l'arrêté de placement rétention ne saurait s'apprécier qu'en fonction des éléments dont le préfet disposait au temps où il a pris sa décision et non pas de ceux qui sont apparus ou ont été justifiés ultérieurement.



Aux termes de l'article L.741-4 du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet prenant la décision de placer un individu en rétention doit tenir compte, le cas échéant, de son état de vulnérabilité.



La cour rappelle au préalable que le préfet n'est pas tenu, dans sa décision, de faire état de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé dès lors que les motifs positifs qu'il retient suffisent à justifier le placement en rétention, qui est la date à laquelle le juge doit se placer pour apprécier la légalité de la décision de placement.

Il ressort des pièces du dossier que lorsque M. [Y] [P] a été avisé de l'éventuel prononcé d'une mesure d'éloignement il n'a pas fait état d'une difficulté particulière concernant son état de santé, indiquant simplement qu'il souhaitait se faire soigner en France d'une cirrhose du foie. Il n'a fait valoir aucune circonstance caractérisant un état de vulnérabilité. Le médecin l'ayant examiné en garde à vue a considéré que son état était compatible avec cette garde à vue, et lui a prescrit un traitement.



C'est donc à juste titre que le préfet a considéré dans la motivation de l'arrêté de placement rétention qu'il ne ressortait d'aucun élément du dossier que M. [Y] [P] présentait un état de vulnérabilité qui s'opposerait un placement rétention.



Le préfet motive sa décision par l'absence de garanties de représentation propre à prévenir le risque de soustraction à la mesure d'éloignement, M. [Y] [P] ne démontrant pas qu'il demeure de façon stable et habituelle au lieu de résidence qu'il invoque : [Adresse 1] à [Localité 3], ne justifiant pas non plus d'un emploi, ni de ressources pour financer son éloignement et étant dépourvu de documents d'identité ou de voyage en cours de validité.



Ces motifs suffisent à justifier le placement en rétention.



Ainsi, le préfet a motivé sa décision de placement, conformément aux exigences de l'article L. 741-1 du CESEDA, l'intéressé étant en l'espèce dépourvu de garanties suffisantes de représentation en vue de prévenir le risque de soustraction à la mesure d'éloignement dont il fait l'objet. Le moyen est rejeté.



Sur l'incompatibilité de l'état de santé avec un maintien en rétention administrative



M. [Y] [P] est atteint d'une cirrhose du foie des suites d'une hépatite B. Il se plaint de ne plus être pris en charge dans des conditions normales ce qui rend son placement en rétention incompatible avec son état de santé.

M. [Y] [B] ne démontre pas avoir été privé des traitements médicaux indispensables dans son cas de figure, ni avoir été dans l'impossibilité de s'adresser à l'unité médicale du centre de rétention administrative. Il sera en outre rappelé que le juge des libertés et de la détention n'est pas compétent pour se prononcer sur la compatibilité de l'état de santé d'un retenu avec la mesure de rétention dont il fait l'objet, cette compétence appartenant seule à l'OFII, pouvant être saisie en application des dispositions de l'article R. 751-8 du CESEDA. Le moyen est rejeté.







PAR CES MOTIFS,



DÉCLARONS recevable l'appel de M. [Y] [P] ;



DÉCLARONS non fondés l'ensemble des moyens et les rejetons ;



CONFIRMONS l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 1er mai 2024 ayant ordonné la prolongation de la rétention administrative de M. [Y] [P] pour une durée de 28 jours à compter du 30 avril 2024 à 09h45 ;



LAISSONS les dépens à la charge du Trésor ;



ORDONNONS la remise immédiate d'une expédition de la présente ordonnance à la préfecture d'Eure-et-Loir, à M. [Y] [P] et son conseil, et au procureur général près la cour d'appel d'Orléans ;





Et la présente ordonnance a été signée par Florence Chouvin, conseiller, et Hermine Bildstein, greffier présent lors du prononcé.





Fait à Orléans le DEUX MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE, à heures



LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,



Hermine BILDSTEIN Florence CHOUVIN







Pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien la rétention et au ministère public. Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification. Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.



NOTIFICATIONS, le 2 mai 2024 :

La prefecture d'Eure-et-Loir, par courriel

Monsieur le procureur général près la cour d'appel d'Orléans, par courriel

M. [Y] [P] , copie remise par transmission au greffe du CRA

Me Bérangère Dufour, avocat au barreau d'Orléans, copie remise en main propre contre récépissé



L'interprète L'avocat de l'intéressé

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