2 mai 2024
Cour d'appel d'Orléans
RG n° 24/00960

Chambre des Rétentions

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL D'ORLÉANS

Rétention Administrative

des Ressortissants Étrangers



ORDONNANCE du 2 MAI 2024

Minute N°

N° RG 24/00960 - N° Portalis DBVN-V-B7I-G7IB

(1 pages)





Décision déférée : Juge des libertés et de la détention d'Orléans en date du 28 avril 2024 à 15h25







Nous, Florence Chouvin, conseiller à la cour d'appel d'Orléans, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Hermine Bildstein, greffier stagiaire en pré-affectation sur poste, aux débats et au prononcé de l'ordonnance,






APPELANT :

M. [W] [C]

né le 26 Janvier 1988 à [Localité 2] (Algérie), de nationalité algérienne,



actuellement en rétention administrative dans des locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire du centre de rétention administrative d'[Localité 1],

comparant par visioconférence, assisté de Me Achille Da Silva avocat au barreau d'Orléans,



ayant renoncé à l'audience à son droit à un interprète ;





INTIMÉ :

LA PRÉFECTURE DE LA SEINE-MARITIME

non comparante, non représentée ;





MINISTÈRE PUBLIC : avisé de la date et de l'heure de l'audience ;







À notre audience publique tenue en visioconférence au Palais de Justice d'Orléans, conformément à l'article L. 743-8 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), le 2 mai 2024 à 10 heures ;



Statuant en application des articles L. 743-21 à L. 743-23 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), et des articles R. 743-10 à R. 743-20 du même code ;



Vu l'ordonnance rendue le 28 avril 2024 à 15h25 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Orléans ordonnant la jonction des procédures de demande de prolongation par la préfecture et de recours contre l'arrêté de placement en rétention administrative par le retenu, rejetant le recours formé par le retenu contre l'arrêté de placement en rétention administrative, et ordonnant la prolongation du maintien de M. [W] [C] dans les locaux non pénitentiaires pour une durée de vingt huit jours à compter du 28 avril 2024 ;



Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 30 avril 2024 à 12h05 par M. [W] [C] ;



Après avoir entendu :

- Me Achille Da Silva, en sa plaidoirie,

- M. [W] [C], en ses observations, ayant eu la parole en dernier ;







AVONS RENDU ce jour, publiquement et contradictoirement, l'ordonnance suivante :





Il résulte de l'article 66 de la Constitution et de l'article L. 743-9 du CESEDA que le juge des libertés doit s'assurer que l'étranger est pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir lorsqu'il se trouve placé en rétention administrative.

Aux termes de l'article L. 743-12 du CESEDA, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la main levée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.



Selon l'article L. 741-3 du CESEDA , « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps nécessaire à son départ, l'administration étant tenue d'exercer toutes diligences à cet effet, dès le placement en rétention »,



Il convient de considérer que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents qu'il y a lieu d'adopter que le premier juge a statué sur l'ensemble des moyens de fond soulevés devant lui et repris devant la cour, étant observé, au vu des termes de la déclaration d'appel du retenu du 30 avril 2024 et des moyens repris lors des débats de ce jour :



1. Sur la discussion à titre liminaire



Sur la motivation de la décision du premier juge, M. [W] [C] estime que les moyens soulevés en première instance n'ont pas tous été étudiés par le juge des libertés et de la détention. Il ne précise pourtant pas lesquels ont été omis, et il sera constaté par la cour que les moyens suivants ont été soulevés : le défaut d'examen de sa situation personnelle par le préfet dans la décision de placement, les diligences accomplies par la préfecture, et la demande d'assignation à résidence judiciaire. Or le premier juge y a parfaitement répondu, par une analyse pertinente et circonstanciée.



En outre, à supposer que le juge des libertés et de la détention n'ait pas répondu à tous les moyens développés oralement par le retenu et son conseil au cours de l'audience du 28 avril 2024, cette circonstance ne saurait entraîner la main levée de la mesure de rétention puisque, compte tenu de l'effet dévolutif de l'appel en application des articles 561 et 562 du code de procédure civile, il appartient au premier président de la cour d'appel ou au magistrat délégué par lui de statuer sur la requête préfectorale sollicitant la prolongation de la rétention et, le cas échéant, sur la requête en contestation de l'arrêté de placement. Le moyen est rejeté.



2. Sur la décision de placement en rétention



Sur le défaut d'examen de la situation personnelle liée à la possibilité d'assigner à résidence, M. [W] [C], reprenant les dispositions combinées des articles L. 731-1, L. 741-1 et L. 612-3 8° du CESEDA, conteste la décision du préfet de prononcer un placement en rétention sans envisager une assignation à résidence. Il affirme notamment être suivi par l'association « La case départ », et produit un courriel émanant d'une accompagnatrice sociale, dans lequel il est précisé qu'il s'est présenté dans les locaux de l'association le 28 avril 2023 pour un premier entretien, qu'il bénéficie depuis de certains services d'accueil (douche, café, buanderie et dortoir cités), mais qu'il n'a pu faire l'objet d'un accompagnement social. Il aurait également, lors de sa dernière visite au sein de la structure, fait part de son souhait de quitter la France pour atteindre la ville de San Sebastian en Espagne.



Sur ce point, la cour rappelle au préalable que le préfet n'est pas tenu, dans sa décision, de faire état de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé dès lors que les motifs positifs qu'il retient suffisent à justifier le placement en rétention, qui est la date à laquelle le juge doit se placer pour apprécier la légalité de la décision de placement.



En l'espèce, le préfet de la Seine Maritime a notamment justifié sa décision de placement en rétention du 25 avril 2024 par l'absence de document de voyage ou d'identité en cours de validité présenté par l'intéressé, l'absence de domicile fixe, ainsi que la menace qu'il représente pour l'ordre public.



La cour observe également que le courriel concernant l'aide de l'association « La case départ » n'avait pas été porté à la connaissance du préfet au jour du prononcé de l'arrêté de placement et qu'en tout état de cause, cet élément ne suffit pas à caractériser l'existence de ressources suffisantes ou d'un domicile stable, effectif et pérenne au sens du risque de fuite devant la mise à exécution de l'obligation de quitter le territoire.



Enfin, un projet de départ vers l'Espagne ne traduit pas la volonté de mettre à exécution l'obligation de quitter le territoire sans délai assortie d'une interdiction de retour pour une durée de un an, prise et notifiée à l'intéressé le 24 mai 2023, une telle mesure n'étant réputée exécutée qu'à la date à laquelle est apposée, sur les documents de voyage de l'étranger qui en fait l'objet, un cachet de franchissement des frontières extérieures de l'espace Schengen ou de sortie des espaces assimilés à ce dernier, en application des dispositions de l'article R.711-1 du CESEDA.





Ainsi, le préfet de la Seine Maritime a motivé sa décision de placement, conformément aux exigences de l'article L. 741-1 du CESEDA, l'intéressé étant dépourvu en l'espèce de garanties suffisantes de représentation en vue de prévenir le risque de soustraction à la mesure d'éloignement dont il fait l'objet. Le moyen est rejeté.




Sur les diligences de l'administration, M. [W] [C] reprend les dispositions de l'article L. 741-3 du CESEDA et estime ces diligences insuffisantes en l'espèce. Toutefois, la cour constate que parmi les pièces associées à la requête préfectorale du 26 avril 2024 figure la saisine des autorités consulaires algériennes, par courriel du 25 avril 2024 à 14h10. Ainsi, l'autorité administrative a effectué des diligences nécessaires et suffisantes à ce stade de la procédure administrative de rétention, s'agissant d'une première demande de prolongation, étant rappelé qu'elle ne détient aucun pouvoir d'instruction ou de contrainte sur les autorités consulaires, de sorte qu'il ne peut lui être reproché le défaut de réponse du consulat. Le moyen est rejeté.





PAR CES MOTIFS,



DÉCLARONS recevable l'appel de M. [W] [C] ;



DÉCLARONS non fondés l'ensemble des moyens et les rejetons ;



CONFIRMONS l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 28 avril 2024 ayant ordonné la prolongation de la rétention administrative pour une durée de 28 jours ;



LAISSONS les dépens à la charge du Trésor ;



ORDONNONS la remise immédiate d'une expédition de la présente ordonnance à la préfecture de la Seine-Maritime, à M. [W] [C] et son conseil, et au procureur général près la cour d'appel d'Orléans ;





Et la présente ordonnance a été signée par Florence Chouvin, conseiller, et Hermine Bildstein, greffier présent lors du prononcé.





Fait à Orléans le DEUX MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE, à heures



LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,



Hermine BILDSTEIN Florence CHOUVIN









Pour information : l'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien la rétention et au ministère public. Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification. Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.



NOTIFICATIONS, le 2 mai 2024 :

La préfecture de la Seine-Maritime, par courriel

Monsieur le procureur général près la cour d'appel d'Orléans, par courriel

M. [W] [C], copie remise par transmission au greffe du CRA

Me Achille Da Silva, avocat au barreau d'Orléans, copie remise en main propre contre récépissé



L'avocat de l'intéressé

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