2 mai 2024
Cour d'appel de Nîmes
RG n° 24/00381

Rétention_recoursJLD

Texte de la décision

Ordonnance n°368









N° RG 24/00381 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JFWR











J.L.D. NIMES

29 avril 2024













[X]





C/



LE PREFET DES BOUCHES DU RHONES











COUR D'APPEL DE NÎMES



Cabinet du Premier Président



Ordonnance du 02 MAI 2024



Nous, Mme Alexandra BERGER, Conseillère à la Cour d'Appel de NÎMES, désignée par le Premier Président de la Cour d'Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l'Asile (CESEDA), assistée de Mme Ellen DRÔNE, Greffière,




Vu l'interdiction de territoire français prononcée le 09 octobre 2023 par la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence et notifié le même jour, ayant donné lieu à une décision de placement en rétention en date du 29 mars 2024, notifiée le 30 mars 2024 à 08h31 concernant :



M. [X] [O] ALIAS [Y]

né le 06 Juillet 2000 à [Localité 2]

de nationalité Comorienne



Vu l'ordonnance en date du 1er avril 2024 rendue par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes portant prolongation du maintien en rétention administrative de la personne désignée ci-dessus ;



Vu la requête reçue au Greffe du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes le 28 avril 2024 à 14h35, enregistrée sous le N°RG 24/2019 présentée par M. le Préfet des Bouches-du-Rhône ;



Vu l'ordonnance rendue le 29 Avril 2024 à 11h52 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de NÎMES sur seconde prolongation, qui a :

* Ordonné pour une durée maximale de 30 jours commençant à l'expiration du précédent délai de 28 jours déjà accordé, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, de M. [X] [O] ALIAS [Y] ;

* Dit que la mesure de rétention prendra fin à l'expiration d'un délai de 30 jours à compter du 29 avril 2024 à 08h31,



Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par Monsieur [X] [O] ALIAS [Y] le 30 Avril 2024 à 11h37 ;



Vu l'absence du Ministère Public près la Cour d'appel de NIMES régulièrement avisé ;



Vu l'absence du Préfet des Bouches-du-Rhône, régulièrement convoqué,



Vu la comparution de Monsieur [X] [O] ALIAS [Y], régulièrement convoqué ;



Vu la présence de Me Youssouf-Mdahoma ABOUBACAR, avocat au barreau de Marseille, de Monsieur [X] [O] ALIAS [Y] qui a été entendu en sa plaidoirie ;










MOTIFS



Monsieur [O] [X] alias [Y] a été condamné par la Cour d'appel d'Aix en Provence en date du 9 octobre 2023 à la peine complémentaire d'interdiction du territoire national pendant dix ans.



Le 29 mars 2024, il a été placé en rétention administrative par arrêté de la même Préfecture qui lui a été notifié le jour même, à 14h35.



Sur requête du Préfet, le Juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nîmes a, par ordonnance prononcée en présence de Monsieur [O] [X] alias [Y] le 1er avril 2024 ordonné la prolongation de cette mesure de rétention pour vingt-huit jours.



Par requête en date du 28 avril 2024, le Préfet des Bouches du Rhône a sollicité que la mesure de rétention administrative de Monsieur [O] [X] alias [Y] soit de nouveau prolongée pour trente jours et le 29 avril 2024, à 11h52, le Juge des libertés et de la détention de Nîmes a fait droit à cette demande.



Monsieur [O] [X] alias [Y] a interjeté appel de cette ordonnance le 30 avril 2024, à 11h37.



Sur l'audience, Monsieur [O] [X] alias [Y] déclare que :

- il veut respecter la décision, sa famille trouverait les billets pour repartir par ses propres moyens.



Son avocat soutient que :

- il y a une nullité à faire valoir sur la méconnaissance du principe du contradictoire car étant le conseil du retenu depuis le 16 juin 2023, date à laquelle le retenu a été arrêté, il l'a défendu deux fois devant des juridictions pénales, puis devant le TJ de Nîmes, il a été le voir cinq fois en détention, donc il n'est pas un avocat désigné d'office ; lors de la première prolongation, il est venu en catastrophe, il n'a pas eu le temps de consulter le dossier au prétexte qu'on ne pouvait vérifier sa qualité, et lors de la seconde prolongation, il n'a pas été destinataire de la saisine, et dès la réception de la requête, le greffe doit aviser par tout moyen l'autorité, le procureur, le retenu et son avocat donc il aurait dû être destinataire du dossier, ce n'est pas à l'avocat de contacter le greffe du JLD, il y a un arrêt de la Cour d'appel d'Amiens, donc ce qui a été fait l'a été en méconnaissance des droits du retenu : il convient en conséquence de réformer l'ordonnance du JLD,

- sur le fond, les perspectives raisonnables d'éloignement, on attendait une réponse du consulat des Comores, L.741-3 CESEDA, et une directive européenne, quand il n'existe plus de perspectives, la rétention doit être levée, et dans le cas d'espèce, le retenu est en rétention le 29 mars 2024, puis après une prolongation, il avait été expliqué que contact avait été pris avec le consulat, mais rien n'a été fait avant 26 jours.



Monsieur le Préfet des Bouches du Rhône n'est pas représenté.



SUR LA RECEVABILITE DE L'APPEL :



L'appel interjeté par Monsieur [O] [X] alias [Y] à l'encontre d'une ordonnance du Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Nîmes prononcée en sa présence a été relevé dans les délais légaux et conformément aux dispositions des articles L.743-21, R.743-10 et R.743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Il est donc recevable.



SUR LES MOYENS ET ÉLÉMENTS NOUVEAUX INVOQUÉS EN CAUSE D'APPEL:



L'article L.743-11 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose: « A peine d'irrecevabilité, prononcée d'office, aucune irrégularité antérieure à une audience à l'issue de laquelle le juge des libertés et de la détention a prolongé la mesure ne peut être soulevée lors d'une audience ultérieure. »



L'article 563 du Code de Procédure Civile ajoute encore que «  pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. »



En l'espèce, ne restent recevables que le moyen d'irrecevabilité de la requête en prolongation sur laquelle l'ordonnance dont appel a statué et les moyens de fond, même nouveaux en appel. Monsieur [O] [X] alias [Y] soulève l'absence de respect du principe du contradictoire en première instance, ainsi que l'absence de perspectives d'éloignement tenant la carence de l'administration dans ses diligences. Ces moyens sont recevables.



Sur le respect du contradictoire :



L'article R.743-3 du CESEDA dispose que dès réception de la requête, le greffier l'enregistre et y appose, ainsi que sur les pièces jointes, un timbre indiquant la date et l'heure de la réception. Il avise aussitôt et par tout moyen l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention, le Procureur de la République, l'étranger et son avocat, s'il en a un, du jour et de l'heure de l'audience fixée par le juge des libertés et de la détention.



En l'espèce, l'administration a adressé sa requête en prolongation de la mesure, le 28 avril 2024, requête réceptionnée le même jour par le greffe du juge des libertés et de la détention, à 14h35. Avis de l'audience du 29 avril 2024, à 9h00, a été adressé, le 28 avril, aux autorités concernées et à l'avocat de permanence, Maître Romain FUGIER.



Il n'appartient pas au greffe du juge des libertés et de la détention d'aviser un autre avocat que celui de permanence en l'absence de désignation expresse de la part du retenu, quand bien même un avocat choisi aurait été désigné précédemment pour d'autres audiences devant le juge des libertés et de la détention, ou devant des juridictions pénales. Le retenu n'a, en tout cas, pas fait mention d'un avocat choisi lors de l'avis d'audience qui lui a été adressé. Enfin, comme le relève le juge de première instance, le conseil désigné finalement par le retenu a refusé expressément, plusieurs fois le bénéfice d'un délai, avant l'audience aux fins de prolongation de la mesure, pour consulter le dossier et préparer sa défense, préférant ainsi rester sur sa position initiale. Par voie de conséquence, il y a lieu de dire qu'aucune irrégularité n'est caractérisée pouvant emporter annulation de la décision attaquée. Le moyen sera donc rejeté.



SUR LE FOND :



Au motif de fond sur son appel, Monsieur [O] [X] alias [Y] soutient que l'administration française ne démontre pas avoir engagé les démarches utiles et nécessaires à son départ, qu'il n'existe à son sujet aucune perspective d'éloignement et que sa rétention ne se justifie donc plus.



Selon l'article L.742-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après la première période de prolongation de 28 jours depuis l'expiration du délai de quarante-huit heures mentionné à l'article L.742-1, le juge peut être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours dans les cas suivants:

« 1° en cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public,

2° lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement,

3° lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement,

b) de l'absence de moyens de transport. »

La prolongation de la rétention court alors « à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours ».



Ces dispositions doivent s'articuler avec celles de l'article L.741-3 du même code, selon lesquelles il appartient au juge judiciaire d'apprécier la nécessité du maintien en rétention et de mettre fin à la rétention administrative lorsque les circonstances de droit ou de fait le justifient, un étranger ne pouvant être placé ou maintenu en rétention « que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet ».



En l'espèce, l'administration a saisi les autorités consulaires dès le placement en rétention de l'intéressé, le 30 mars 2024. À ce stade, il n'est pas exigé de l'administration qu'elle établisse la preuve d'une délivrance à bref délai d'un laissez-passer. Il doit être relevé, en outre, que le retenu est connu sous plusieurs identités en France, que c'est d'abord de son fait si les opérations de l'administration nécessitent d'attendre le retour d'autorités souveraines sur lesquelles elle n'a pas de pouvoir de coercition.



Les circonstances et conditions exigées par l'article L742-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont donc satisfaites et la requête en prolongation de la rétention administrative de Monsieur [O] [X] alias [Y] fondée en droit. En conséquence, le moyen soulevé sera rejeté.



SUR LA SITUATION PERSONNELLE DE MONSIEUR [O] [X] alias [Y] :



Monsieur [O] [X] alias [Y], présent irrégulièrement en France est dépourvu de passeport et de pièces administratives pouvant justifier de son identité et de son origine de telle sorte qu'une assignation à résidence judiciaire est en tout état de cause exclue par les dispositions de l'article L743-13 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.



Il ne justifie, de plus, d'aucune adresse ni domicile stables en France, ne démontre aucune activité professionnelle et ne dispose d'aucun revenu ni possibilité de financement pour assurer son retour dans son pays.



Il est l'objet d'une mesure d'éloignement en vigueur, telle que précitée, et qui fait obstacle à sa présence sur le sol français.



Il s'en déduit que la prolongation de sa rétention administrative demeure justifiée et nécessaire aux fins qu'il puisse être procédé effectivement à son éloignement.



Il convient par voie de conséquence de confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions.



PAR CES MOTIFS



Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,



Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,



Vu les articles L.741-1, L.742-1 à L.743-9, R.741-3 et R.743-1 à R.743-19, L.743.21 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile;



DÉCLARONS recevable l'appel interjeté par Monsieur [X] [O] ALIAS [Y] ;



CONFIRMONS l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;



RAPPELONS que, conformément à l'article R.743-20 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation [Adresse 1].

Fait à la Cour d'Appel de NÎMES,

le 02 Mai 2024 à



LE GREFFIER, LE PRESIDENT,



















' Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 3] à [X] [O] ALIAS [Y].



Le à H

Signature du retenu

















Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel, à :

Monsieur [X] [O] ALIAS [Y], pour notification au CRA,

Me Youssouf-mdahoma ABOUBACAR, avocat,

M. Le Préfet des Bouches-du-Rhône,

M. Le Directeur du CRA de [Localité 3],

Le Ministère Public près la Cour d'Appel de NIMES,

M./Mme Le Juge des libertés et de la détention.

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