2 mai 2024
Cour d'appel de Montpellier
RG n° 23/04783

2e chambre civile

Texte de la décision

ARRÊT n°































Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre civile



ARRET DU 02 MAI 2024



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 23/04783 - N° Portalis DBVK-V-B7H-P65G





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 04 JUILLET 2023

JUGE DE L'EXECUTION DE BEZIERS

N° RG 22/02050





APPELANT :



Monsieur [W] [M]

né le 10 Décembre 1965 à [Localité 4]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représenté par Me Xavier LAFON de la SCP LAFON PORTES, avocat au barreau de BEZIERS

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023-007426 du 13/09/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)







INTIMEE :



L'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DU DEPARTEMENT DE L'HERAULT - HERAULT LOGEMENT (anciennement HERAULT HABITAT), dont le siège social est [Adresse 1], prise en la personne de son directeur-général en exercice, domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Alexia ROLAND de la SCP VPNG, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Laurie MARTI

COMPOSITION DE LA COUR :



En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 MARS 2024, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre

Madame Nelly CARLIER, Conseillère

Madame Fanny COTTE, Vice-Présidente placée

qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO



ARRET :



- contradictoire ;



- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;



- signé par Mme Michelle TORRECILLAS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.




*

* *



FAITS ET PROCÉDURE



Par acte sous seing privé du 12 décembre 2008 l'Office public de l'Habitat du département de l'Hérault, ci-après désigné OPH, a donné en location à Monsieur [W] [M] un appartement avec petit jardin sis [Adresse 5]).



Considérant que le bailleur lui imputait des charges indues et avait augmenté le loyer bien au-delà de ce qu'il avait été convenu, Monsieur [M] l'a fait assigner devant le Tribunal d'instance de Béziers par acte délivré le 8 janvier 2018 pour obtenir sa condamnation à restituer les trop perçus de charges et de loyer.



Monsieur [W] [M] a été débouté de toutes ses demandes par jugement rendu le 15 avril 2019 par le Tribunal d'instance de Béziers qui l'a condamné à payer à HERAULT HABITAT la somme de 600 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens et l'a en outre condamné à une amende civile de 800 €.



Monsieur [M] a saisi le Juge de l'exécution du Tribunal judiciaire de BEZIERS qui, par jugement prononcé le 20 octobre 2020, a :

- annulé un commandement aux fins de saisie-vente en date du 27 novembre 2019,

- autorisé Monsieur [M] à se libérer de sa dette par 23 versements mensuels de 32 euros

- condamné HERAULT HABITAT aux dépens.



En exécution de cette décision depuis novembre 2020, l'OPH prélève chaque mois sur le compte bancaire de Monsieur [M], en sus du loyer mensuel, une somme de 32 €, en plus, depuis octobre 2021, d'une somme mensuelle de 100 euros correspondant au paiement d'une autre condamnation.



Par arrêt prononcé le 17 juin 2021 la Cour de Cassation a cassé le jugement rendu le 15 avril 2019 par le Tribunal d'Instance de BEZIERS en ce qu'il avait débouté Monsieur [M] de sa demande de sa restitution des charges et en ce qu'il l'avait condamné au paiement d'une amende civile.



Les parties ont été renvoyées devant le Tribunal judiciaire de BEZIERS.



Par acte d'huissier du 18 août 2022 M. [W] [M] a assigné l'OPH devant le Juge de l'exécution pour obtenir la condamnation de cet établissement public à lui rembourser la somme de 736 € (32 x 23), pour qu'il lui soit ordonné de mettre fin au prélèvement mensuel de la somme de 32 € sur le compte bancaire du demandeur et pour ordonner à l'OPH de créditer son compte de la somme de 800 euros déjà réglée et inscrite à tort à son débit depuis l'échéance de loyer de mai 2021.



Le 4 juillet 2023, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Béziers, par jugement contradictoire :


S'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes formées par Monsieur [W] [M]

A condamné Monsieur [W] [M] à payer à l'OPH la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

A rappelé que le jugement était exécutoire par provision






Le 28 septembre 2023, [W] [M] a interjeté appel de la décision.



Le 5 octobre 2023, Madame la Présidente de la 2e chambre civile a autorisé Monsieur [W] [M] à assigner à jour fixe l'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DU DEPARTEMENT DE L'HERAULT dit HERAULT HABITAT à l'audience fixée le 4 mars 2023.



Vu l'assignation à jour fixe délivrée le 17 janvier 2024 par la partie appelante,



Vu les conclusions de l'intimée notifiées le 29 février 2024,











PRETENTIONS DES PARTIES :



Monsieur [W] [M] sollicite l'infirmation du jugement entrepris en ce que le juge de l'exécution s'est déclaré incompétent et l'a condamné au versement de la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Il demande à la Cour, statuant à nouveau de :




Dire et juger que le Juge de l'exécution était bien compétent pour trancher le litige et qu'en tous cas il ne pouvait relever d'office son incompétence.





Subsidiairement, dire et juger que la question de la compétence devait être réglée conformément à l'article 82-1 du code de procédure civile par une simple mention au dossier.





En ce cas renvoyer la cause et les parties devant le juge des contentieux de la protection de BEZIERS ou, à défaut, devant le Tribunal Judiciaire de BEZIERS statuant selon la procédure sans représentation obligatoire.





Décharger dans tous les cas Monsieur [M] de toute condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.




Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que le juge de l'exécution ne pouvait relever d'office son incompétence, les dispositions de l'article L213-6 du code de l'organisation judiciaire n'étant pas d'ordre public.

Il considère que le juge de l'exécution est compétent en ce que le litige porte sur une contestation qui s'élève à l'occasion d'une exécution forcée résultant de l'exécution des deux jugements du 15 avril 2019.

Il explique qu'à supposer qu'il ait été incompétent, le juge de l'exécution aurait dû faire application de l'article 82-1 du code de procédure civile en renvoyant l'affaire devant la juridiction qu'il estimait compétente par simple mention au dossier, au sein du même tribunal judiciaire.

Enfin, il n'y a pas lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en ce que le litige n'a pas été tranché par le jugement et qu'il n'a pas perdu son procès.



L'OPH demande à la cour de déclarer irrecevable l'appel interjeté par Monsieur [W] [M] sauf pour lui à justifier de son identité conforme aux mentions portées sur cet acte et à titre subsidiaire de confirmer le jugement entrepris, de débouter l'appelant de toutes ses demandes, fins et conclusions et de le condamner à lui payer la somme de 2.000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.



S'agissant de l'irrecevabilité de l'appel, il fait valoir que l'appelant ne justifie pas de son identité conformément à l'article 54 3° du code de procédure civile en ce qu'il entretiendrait un doute sur sa véritable identité. L'arrêt de la cour de cassation comme ses démarches auprès de la cour d'appel et l'ordonnance l'autorisant à assigner à jour fixe concernent Monsieur [W] [M] alors que la décision d'aide juridictionnelle concerne Monsieur [W] [M] et le jugement querellé Monsieur [W] [M]. Il demande à l'appelant de justifier de son identité, à défaut l'appel serait irrecevable.



S'agissant de l'incompétence du juge de l'exécution, il explique que la demande de l'appelant en première instance consistait à faire rejuger ce qui avait été tranché par le juge de l'exécution le 20 octobre 2020 et qui a autorité de la chose jugée.

L'appelant n'expose aucune difficulté relative à un titre exécutoire ou une contestation élevée à l'occasion de l'exécution forcée. Il ne vise par ailleurs aucun titre exécutoire ayant fait l'objet d'une exécution forcée. L'arrêt de cassation n'est pas suffisant pour justifier de la compétence du juge de l'exécution.

Il soutient que le juge de l'exécution avait la faculté de relever d'office son incompétence conformément aux articles R121-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution.

Enfin, il ne saurait être reproché au premier jugement de ne pas avoir renvoyé le dossier devant le juge compétent conformément à l'article 82-1 du code de procédure civile en ce qu'il ne s'agissait pas d'un problème de compétence mais de défaut de pouvoir juridictionnel en l'espèce.




MOTIFS



Sur la recevabilité de l'appel :



L'OPH soutient au visa des articles 54 et 901 du code de procédure civile que l'appelant entretient un doute sur son identité. Les décisions versées au débat sont rendues sur demande de Monsieur [W] [M] comme la requête auprès de Monsieur le premier président, l'assignation à jour fixe devant la cour d'appel, l'ordonnance valant autorisation d'assigner à jour fixe, la déclaration d'appel ainsi que les conclusions d'appelant.

En revanche, la décision d'aide juridictionnelle est au nom de [W] [M] et la décision querellée rendue par le juge de l'exécution est au nom de [W] [M].



L'appelant produit la copie de sa carte nationale d'identité au nom de [W] [M], identité qui correspond à l'identité mentionnée dans les différentes démarches réalisées en cours d'appel et dans les décisions de la cour d'appel. Il n'y a donc pas lieu de considérer l'appel irrecevable d'autant que [W] est la version hispanique de [W].



Sur le pouvoir juridictionnel du juge de l'exécution:



Il convient de relever que Monsieur [M] qui reproche au premier juge d'avoir soulevé d'office son incompétence n'en tire aucune conséquence sur la validité du jugement déféré.



En application de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution, saisi de la contestation d'une mesure d'exécution, n'étant tenu de statuer au fond que sur la validité et les difficultés d'exécution des titres exécutoires qui sont directement en relation avec la mesure d'exécution contestée, il n'entre pas dans les attributions de ce juge de prononcer une condamnation à paiement hors les cas prévus par la loi.



En l'espèce, comme l'a justement relevé le premier juge, Monsieur [W] [M] ne produit aucun procès verbal de commissaire de justice contenant mesure d'exécution forcée.



Sa demande ne concerne effectivement pas une contestation qui s'élève à l'occasion d'une exécution forcée et aucune exécution forcée n'existe dans le cas présent.



L'objet du litige est une demande de répétition de l'indu. L'appelant souhaite effectivement la restitution des sommes prélevées en application du jugement du 15 octobre 2019 rendu par le tribunal d'instance de Béziers qui l'avait condamné au paiement d'une somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à une amende civile de 800 euros.



Le premier juge a justement rappelé que la cassation de ce jugement remet les parties dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant le jugement cassé. Les sommes versées en exécution de la décision cassée donnent lieu à répétition et l'arrêt de cassation vaut titre de restitution de plein droit.



Il y a lieu en conséquence, compte tenu des éléments de fait ci-dessus exposés, de requalifier l'exception d'incompétence retenue à tort par le premier juge en fin de non recevoir, la demande, n'entrant pas dans le champ des pouvoirs juridictionnels du juge de l'exécution, ayant été présentée devant un juge n'ayant pas le pouvoir d'en connaître.



La décision sera infirmée en ce sens.



Sur les frais irrépétibles :



Il y a lieu de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a condamné Monsieur [W] [M] à verser à l'OPH la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles en ce qu'il succombait dans ses demandes en première instance.

En cause d'appel, l'équité commande de le condamner à la même somme en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel en ce qu'il succombe à nouveau.



PAR CES MOTIFS



La Cour,



Déclare recevable l'appel de Monsieur [W] [M],



Infirme le jugement déféré en ce que le juge de l'exécution s'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes principales formées par Monsieur [W] [M],



Statuant à nouveau,



Déclare les demandes principales formées par Monsieur [W] [M] irrecevables pour être portées devant le juge de l'exécution, dépourvu de pouvoir juridictionnel,



Confirme pour le surplus



Condamne Monsieur [W] [M] aux dépens de l'appel,



Condamne Monsieur [W] [M] à verser la somme de 800 euros à l'Office Public de l'Habitat de l'Hérault en application de l'article 700 du code de procédure civile





Le greffier La présidente

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