2 mai 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG n° 21/02211

4ème chambre 2ème section

Texte de la décision

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:




4ème chambre 2ème section

N° RG 21/02211


N° MINUTE :

Assignations des :
22 Novembre 2018, 29 Novembre 2018 et 30 Décembre 2018







JUGEMENT
rendu le 02 Mai 2024
DEMANDEUR

Monsieur [Y] [K]
[Adresse 3]
[Localité 10]
représenté par Maître Olivier LECA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C0896


DÉFENDEURS

S.A.M.C.V. FILIA MAIF prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 8]
représentée par Maître Isabelle DUQUESNE CLERC, avocat au barreau de PARIS,vestiaire #A0895

Mutuelle MAIF venant aux droits de la FILIA MAIF SA
[Adresse 2]
[Localité 8]
représentée par Maître Isabelle DUQUESNE CLERC, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0895

Monsieur [T] [V]
[Adresse 4]
[Localité 7]
représenté par Maître Jean-Eric CALLON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0273

Décision du 02 Mai 2024
4ème chambre 2ème section
N° RG 21/02211

Société ALLIANZ IARD
[Adresse 1]
[Localité 9]
représentée par Maître Stéphane BRIZON de l’AARPI AARPI BRIZON MOUSAEI AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #D2066

S.A.M.C.V. MATMUT en sa qualité d’assureur de Monsieur [T] [V]
[Adresse 5]
[Localité 6]
représentée par Maître Jean-Eric CALLON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0273



COMPOSITION DU TRIBUNAL

Nathalie VASSORT-REGRENY, Vice-Présidente
Géraldine DETIENNE, Vice-Présidente
Matthias CORNILLEAU, Juge

assistés de Gilles ARCAS, Greffier,


DÉBATS

A l’audience du 08 Février 2024 tenue en audience publique devant M. CORNILLEAU, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.


JUGEMENT

- Contradictoire
- En premier ressort
- Prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile



FAITS ET PROCEDURE

Le 18 juillet 2016, M. [Y] [K] a déclaré à la société Filia Maif SA, son assureur, un dégât des eaux affectant son appartement situé au rez-de-chaussée et en sous-sol d'un immeuble sis [Adresse 3] à [Localité 10].

A l'issue d'une expertise amiable diligentée par la société Filia Maif SA au contradictoire de M. [T] [V], propriétaire de l'appartement situé au premier étage, de M. [P], propriétaire de celui du second étage, et de leur assureur respectif, la société Matmut et la société Allianz Iard, la cause du sinistre a été attribuée à une fuite localisée dans l'appartement de M. [P] qui a été réparée.

Après avoir signalé à son assureur la persistance d'un taux d'humidité important dans son appartement, M. [Y] [K] s'est rapproché du syndicat des copropriétaires de l'immeuble qui a alors mandaté la société Ravier aux fins de recherche de fuite, laquelle société a conclu dans son rapport non contradictoire daté du 14 juin 2017 à la persistance d'un taux d'humidité de 80 % dans l'appartement de M. [Y] [K] et à l'absence de ventilation et de chauffage dans celui de M. [T] [V].

Le 22 juin 2017, la société Filia Maif SA a informé M. [T] [V] des conclusions de la société Ravier et l'a invité à transmettre ce courrier à son assureur et à lui faire part de sa position sous 15 jours.

Suivant procès-verbal en date du 21 mars 2018, les experts et les propriétaires des trois appartements ont constaté que l'appartement de M. [Y] [K] ne présentait plus un taux anormal d'humidité.

La société Filia Maif SA a versé la somme de 6 978,29 euros au titre du sinistre et a, dans un courrier daté du 9 juin 2018, refusé de prendre en charge les frais de garde-meubles et de perte d'usage de l'appartement.

Se prévalant de ce refus, M. [Y] [K] a fait assigner la société Matmut, la société Filia Maif, M. [V] devant le tribunal judiciaire de Paris, par exploit d'huissier respectivement signifié les 22 novembre, 29 novembre et 30 décembre 2018, aux fins notamment d'indemnisation.

Selon ordonnance en date du 23 janvier 2020, le juge de la mise en état a ordonné une médiation judiciaire laquelle n'a pas permis de résoudre l'intégralité du litige.

Selon ordonnance en date du 5 novembre 2020, le juge de la mise en état a prononcé la radiation de l'affaire qui a ensuite été réinscrite au rôle le 12 janvier 2021 sous le numéro 21/02211.

Par exploit d'huissier signifié le 24 juin 2021, la société Maif, venant aux droits de la société Filia Maif SA après fusion absorption, a fait intervenir la société Allianz Iard à l'instance ce qui a donné lieu à l'enregistrement d'une seconde procédure sous le numéro 21/08595.

Selon ordonnance en date du 4 novembre 2021, les deux procédures ont été jointes.

Par conclusions spécialement adressées au juge de la mise en état et notifiées par le RPVA le 24 février 2022, la société Allianz Iard a soulevé l'irrecevabilité de l'appel en garantie de la société Maif.

Selon ordonnance en date du 12 mai 2022, le juge de la mise en état a constaté le désistement par la société Maif de l'instance qu'elle a engagée à l'encontre de la société Allianz Iard.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions notifiées le 1er mars 2022 par le RPVA, M. [Y] [K] entend voir :
"A titre principal,
- CONDAMNER la Compagnie MAIF à une exécution forcée de son contrat d'assurance signé avec Monsieur [K] ;
- CONDAMNER la Compagnie MAIF à indemniser Monsieur [K] de la somme de 15 547,20 euros au titre de la garantie perte de jouissance plafonnée à 12 mois telle que prévue dans son contrat multi risque habitation ;
- CONDAMNER la Compagnie MAIF à indemniser Monsieur [K] de la somme de 4 320 euros au titre des frais de garde meuble, en exécution de son contrat multi-risques habitation ;
- CONDAMNER la Compagnie MAIF à indemniser Monsieur [K] de la somme de 5 000 euros au titre de son refus abusif de garantie et sa mauvaise foi dans l'inexécution contractuelle ;
- CONDAMNER in solidum, ALLIANZ, assureur de Monsieur [P], et Monsieur [V] et la Compagnie MATMUT à indemniser Monsieur [K] au titre du trouble anormal de voisinage ;
- CONDAMNER in solidum, ALLIANZ, assureur de Monsieur [P], et Monsieur [V] et la Compagnie MATMUT à verser à Monsieur [K] la somme de 11 660,82 euros au titre du préjudice lié à la perte de jouissance de son bien au delà de la garantie de la MAIF ;
- CONDAMNER la Compagnie MAIF à verser à Monsieur [K] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; "
- CONDAMNER in solidum, ALLIANZ, assureur de Monsieur [P], et Monsieur [V] et la Compagnie MATMUT à verser à Monsieur [K] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- CONDAMNER tout succombant aux dépens ce y compris l'intégralité des honoraires de Madame [D] [H], Médiatrice désignée par le Tribunal ;
A titre subsidiaire, pour le cas où le Tribunal n'entrerait pas en voie de condamnation contre la MAIF,
- CONDAMNER ALLIANZ au titre de l'action directe de Monsieur [K] contre le responsable du dégât des eaux initial, Monsieur [P], pour trouble anormal de voisinage ;
- CONDAMNER in solidum Monsieur [V] et la Compagnie MATMUT, trouble pour trouble anormal de voisinage consistant notamment l'absence de mise en œuvre d'un système d'assèchement de son appartement ;
- CONDAMNER in solidum, ALLIANZ, Monsieur [V] et la Compagnie MATMUT à indemniser Monsieur [K] au titre du trouble anormal de voisinage ;
- CONDAMNER in solidum, ALLIANZ, Monsieur [V] et la Compagnie MATMUT à verser à Monsieur [K] la somme de 27 208,02 euros au titre du préjudice lié à la perte de jouissance de son bien immobilier ;
- CONDAMNER in solidum, ALLIANZ, Monsieur [V] et la Compagnie MATMUT à verser à Monsieur [K] la somme de 4 320 euros au titre des frais de garde meuble ;
- CONDAMNER in solidum, ALLIANZ, Monsieur [V] et la Compagnie MATMUT à verser à Monsieur [K] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- CONDAMNER in solidum, ALLIANZ, Monsieur [V] et la Compagnie MATMUT aux dépens ce y compris l'intégralité des honoraires de Madame [D] [H], Médiatrice désignée par le Tribunal ".

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions notifiées le 8 juin 2022 par le RPVA, la société Maif entend voir :
"Vu le contrat RAQVAM formule équilibre,
Vu la théorie du trouble anormal de voisinage,
Vu les articles 1240 et suivants du Code civil,
Vu les pièces, [...]
- ORDONNER LA JONCTION, in limine litis, de la présente procédure avec la procédure enregistrée sous le numéro RG : 21/02211 pendante devant le Tribunal judiciaire de PARIS ;
- DEBOUTER Monsieur [Y] [K] de ses demandes, fins et conclusions, dirigées à l'encontre de la Filia-MAIF ;
Plus précisément,
- DEBOUTER Monsieur [Y] [K] de sa demande d'indemnisation, par la MAIF, de la perte de jouissance non garantie par le contrat d'assurances ;
- DEBOUTER Monsieur [Y] [K] de sa demande d'indemnisation, par la MAIF, des frais de garde meuble ;
- DEBOUTER Monsieur [Y] [K] de sa demande d'indemnisation, par la MAIF, fondée sur un prétendu refus abusif ;
- DEBOUTER Monsieur [Y] [K] de sa demande au titre de l'article 700 du code de Procédure civile et aux dépens ;
A titre subsidiaire :
- CONDAMNER Monsieur [V] et la MATMUT à relever et garantir indemne la MAIF de toute condamnation prononcée à son encontre ;
En tout état de cause :
- CONDAMNER tous succombant à régler à la MAIF la somme de 3.000 Euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens comprenant les honoraires de médiation;
- DEBOUTER Monsieur [K], Monsieur [V], et la MATMUT de toutes demandes, fins et conclusions contraires".

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions notifiées le 8 juin 2022 par le RPVA, M. [T] [V] et la société Matmut entendent voir :
- "DEBOUTER Monsieur [K] et la MAIF de l'intégralité de leurs demandes ;
- CONDAMNER Monsieur [K] au versement de la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens."

La société Allianz Iard n'a pas conclu au fond.

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées pour un exposé des moyens des parties.

Selon ordonnance en date du 16 juin 2022, le juge de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction et fixé l'audience de plaidoiries qui s'est finalement tenue le 8 février 2024.

A l'issue des débats l'affaire a été mise en délibéré au 2 mai 2024 et les parties ont été avisées du prononcé de la décision par sa mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 du code de procédure civile.


MOTIFS

Il est rappelé qu'en vertu de l'article 768 du code de procédure civile, applicable à la procédure écrite devant le tribunal judiciaire, il n'y a lieu de statuer que sur les prétentions figurant au dispositif ("

Par ces motifs") des dernières conclusions des parties, étant observé que toute demande figurant uniquement dans la discussion de ces écritures ne sera donc ici reproduite dans un souci de lisibilité de la décision.

Ne seront pas non plus reproduites ni examinées les demandes figurant au dispositif des conclusions respectives des parties qui constituent des moyens et non des prétentions sur lesquelles le juge doit statuer au sens des articles 4 et 5 du code de procédure civile.

Sur la demande de jonction

En application des articles 768 et 9 du code de procédure civile, faute de moyen soulevé dans la discussion des conclusions de la société Maif au soutien de cette demande, celle-ci ne peut qu'être rejetée.

Sur les demandes indemnitaires formées à l'encontre de la société Maif

M. [Y] [K] conclut au bien-fondé de sa demande aux motifs que son contrat d'assurance garantit l'impossibilité d'occuper le logement dans la limite de 12 mois de sorte que, le sien ayant été inhabitable du 18 juillet 2016 au 16 avril 2018, la société Maif est tenue de l'indemniser sur la base de la valeur locative de son appartement évaluée à 1 295,6 euros soit une somme totale de 15 547,2 euros pour une période d'un an. Il ajoute que le contrat garantit les frais de garde-meubles donc ceux qu'il a exposés à hauteur de 4 320 euros. Il estime que son assureur est mal fondé à se prévaloir du fait qu'il n'a pas sollicité son accord préalablement à l'engagement des frais car l'expert a chiffré ces postes de préjudice et qu'un tel reproche est potestatif.

La société Maif réfute l'argumentation adverse selon le moyen que sa garantie n'est pas mobilisable dès lors que les frais de garde-meubles dont se prévaut M. [Y] [K] ne sont pas consécutifs au sinistre initial mais à l'absence de mesures prises par M. [T] [V] et que M. [Y] [K] n'a pas sollicité son accord avant de les engager. Elle soutient que les frais de relogement ne sont pas davantage garantis dans la mesure où il ne s'agit pas de frais effectivement engagés et qu'ils sont afférents à l'occupation d'une résidence secondaire et non d'une habitation principale.

Réponse du tribunal :

En vertu de l'article 1134 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

En application de l'article 1313 du code civil, il appartient au créancier de rapporter la preuve de l'obligation et au débiteur de prouver qu'il l'a respectée.

L'article 9 du code de procédure civile impose à chaque partie de rapporter la preuve des faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions.

Au cas présent, M. [Y] [K] sollicitant l'exécution forcée des garanties contractuelles de la société Maif, il lui appartient alors de rapporter la preuve de l'existence de ces garanties et de ce que leurs conditions sont réunies. A cette fin, M. [Y] [K] verse aux débats le contrat d'assurance qu'il a souscrit auprès de la société MAIF et dont la validité n'est remise en cause par aucune partie.

S'agissant des frais d'indisponibilité de l'appartement, l'examen des conditions générales du contrat d'assurance met en évidence une clause stipulant :
"Les frais supplémentaires consécutifs à un événement garanti.
Ce sont les frais justifiés et réellement engagés avec notre accord à la suite d'un sinistre garanti.
Ils sont indemnisés dans les limites énoncées ci-dessous et rappelées aux conditions particulières en vigueur à la date de l'accident.
Sont indemnisés à concurrence de leur montant :
- les frais de déplacement et de replacement des biens mobiliers engagés lorsqu'il est indispensable de déplacer vos biens en un autre endroit pour vous permettre d'effectuer les réparations et/ou de vous reloger. Nous indemnisons les frais de transport, de garde-meuble et de réinstallation de votre mobilier,
- les frais de relogement temporaire engagés lors que vous êtes dans l'impossibilité d'occuper votre logement principal pendant la durée des travaux de remise en état : à concurrence de la valeur locative mensuelle du logement sinistré, dans la limite de 12 mois. "

Cette clause conditionne ainsi l'indemnisation des frais de relogement consécutif à un sinistre garanti aux conditions suivantes :
- le déboursement de frais de relogement dans la limite de la valeur locative du bien,
- l'accord préalable de l'assureur pour engager ces frais,
- l'impossibilité d'occuper l'habitation principale de l'assuré,
- une période d'indemnisation de 12 mois maximum.

Or, s'il n'est pas contesté que l'appartement de M. [Y] [K] était inhabitable pendant plus de 12 mois à la suite du sinistre en cause, il ne produit toutefois aucune pièce susceptible d'établir qu'il a exposé des frais de relogement sur la période considérée de sorte qu'il échoue à rapporter la preuve de ce que les conditions d'application de la clause de garantie sont réunies. La société Maif n'est donc pas tenue de les indemniser.

S'agissant des frais de garde-meubles, la clause énumérée ci-dessus conditionne leur prise en charge à :
- l'obtention de l'accord de l'assureur avant l'engagement des frais,
- le caractère indispensable du retrait du mobilier du logement,
- l'existence d'un lien de causalité entre le sinistre garanti et ces frais.

Or, si par la production d'une facture datée du 28 mars 2018 M. [Y] [K] démontre avoir exposé la somme de 4 320 euros au tire de la mise à disposition d'un local de stockage pour un buffet, une table et un miroir sur la période du 2 mai 2017 au 2 mai 2018, il ne peut qu'être relevé qu'il ne produit aucune pièce susceptible d'établir qu'il a ne serait-ce que sollicité l'accord de la société Maif avant d'engager ces frais, étant observé que le fait que l'expert mandaté par cette dernière a chiffré le préjudice afférent à la mise en garde-meubles du mobilier ne saurait emporter acquisition de plein droit de la clause de garantie. Les conditions de la clause de garantie n'étant pas réunies, la société Maif n'est donc pas tenue d'indemniser ces frais.

En conséquence, il y a lieu de débouter M. [Y] [K] de ses demandes indemnitaires formées à l'encontre de la société Maif.

Faute de preuve des obligations qu'il invoque, M. [Y] [K] est par voie de conséquence mal fondé à se prévaloir du refus abusif de la société Maif de les exécuter et doit donc être débouté de sa demande de dommages-intérêts en application de l'article 1231-6 du code de procédure civile.

Sur les demandes indemnitaires formées à l'encontre de la société Allianz Iard

M. [Y] [K] soutient que son action directe formée à l'encontre de la société Allianz Iard est bien fondée dès lors que le sinistre a été causé par une fuite localisée chez l'assuré de cette dernière.

La société Allianz Iard n'a pas conclu en réponse aux demandes formées par M. [Y] [K].

Réponse du tribunal :

L'absence de conclusions en réponse aux moyens soulevés par M. [Y] [K] ne pouvant être regardée comme un acquiescement au sens de l'article 408 du code de procédure civile, M. [Y] [K] demeure tenu de rapporter la preuve du bien-fondé de sa demande conformément aux articles 1313 du code civil et 9 du code de procédure civile précédemment exposés.

En vertu de l'article L.123-1 du code des assurances, le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.

Au cas présent, s'il n'a pas été contesté au cours de l'instruction que la société Allianz Iard était l'assureur de M. [P] chez qui la cause du sinistre a été localisée, il n'en demeure pas moins que M. [Y] [K] ne se prévaut d'aucune clause du contrat d'assurance souscrit par M. [P], contrat qui n'est pas davantage versé aux débats de sorte que ce dernier échoue à rapporter la preuve de ce que les garanties de la société Allianz Iard sont mobilisables pour les préjudices dont il se prévaut.

En conséquence, il y a lieu de débouter M. [Y] [K] de ce chef.

Sur les demandes indemnitaires formées à l'encontre de M. [T] [V] et de la société Matmut

M. [Y] [K] conclut au bien-fondé de ses demandes indemnitaires aux motifs qu'en ne procédant pas aux mesures d'assèchement rapidement après la réparation de la cause du sinistre, le taux d'humidité de son appartement n'a pas pu baisser ce qui caractérise un trouble anormal du voisinage à l'origine de l'indisponibilité de son logement et des frais de garde-meubles.


M. [T] [V] et la société Matmut contestent toute responsabilité du premier dans la survenance des dommages selon le moyen que n'est pas rapportée la preuve d'un lien de causalité irréfragable entre les mesures alléguées et le taux d'humidité important constaté chez M. [Y] [K]. Ils ajoutent qu'aucune faute n'est donc imputable à M. [T] [V] et ce d'autant que seul M. [P] est à l'origine du dégât des eaux et qu'il n'a pas été appelé à la cause.

Réponse du tribunal :

En vertu de l'article 1240 du code de civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

Il résulte de l'articulation de ce texte avec les dispositions de l'article 544 du code civil que celui qui cause à autrui un trouble anormal du voisinage est tenu de réparer les dommages en résultant.

En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de rapporter la preuve des faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions.

Au cas présent, si la persistance de l'humidité dans l'appartement n'est pas contestée en défense, il appartient toutefois à M. [K] d'apporter la preuve de ce qu'elle est imputable à l'appartement de M. [V], et présente un caractère anormal.

Le rapport d'intervention en date du 16 juin 2017 de la société Ravier indique que le 14 juin 2017, " les murs du salon et le mur mitoyen à la salle de bains sont très humides ", que l'appartement n'était " ni ventilé ni chauffé " et qu'elle a déposé le papier peint pour accélérer le séchage des murs. Ce rapport ne mentionne toutefois aucune humidité au niveau du sol de l'appartement de M. [V] alors que le procès-verbal de constat d'huissier daté du 9 mai 2018 met en évidence que seuls les plafonds de l'appartement de M. [K] sont encore humides.

En l'absence d'analyse technique et le surplus des rapports se bornant à reprendre les constatations de la société Ravier, ces constatations sont insuffisantes pour établir un lien certain entre l'humidité présente dans l'appartement de M. [K] et la condition de celui de M. [V].

En outre, le procès-verbal de constatations du 29 mars 2018 mentionne que les assécheurs ont été retirés de l'appartement de M. [K] le 5 janvier 2017 et qu'" il semble que les assécheurs chez M. [V] aient été mis en place par une société inconnue courant décembre 2017 " pendant un mois de sorte que la résorption de l'humidité constatée en mars 2018 peut aussi bien être le fait de l'année écoulée depuis le 5 janvier 2017 que des mesures prises par M. [V] entre décembre 2017 et janvier 2018.

Faute de preuve suffisante de l'imputabilité de la persistance de l'humidité à l'appartement situé au-dessus, le trouble anormal du voisinage n'est pas caractérisé de sorte que la responsabilité de M. [V] n'est pas engagée.
Décision du 02 Mai 2024
4ème chambre 2ème section
N° RG 21/02211

En conséquence, il y a lieu de débouter M. [Y] [K] de ses demandes formées à l'encontre de M. [T] [V] et de la société Matmut.

Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, dès lors que le demandeur succombe à la présente instance, il y a lieu de le condamner aux dépens ainsi qu'à payer à la société Maif la somme que l'équité commande de fixer à 3 000 euros au titre des frais irrépétibles. Le dispositif des conclusions de M. [T] [V] et de la société Matmut ne précisant pas à qui bénéficie le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles mais la discussion indiquant qu'il s'agit de M. [V], il convient de condamner M. [Y] [K] à payer à ce dernier cette somme.
L'article 695 du code de procédure civile ne qualifiant pas les frais afférents aux mesures de médiation comme des dépens et ne conférant pas au juge le pouvoir d'ajouter à la liste des dépens, il y a lieu de débouter de la société Maif de sa demande tendant à les y inclure.
En application de l'article 514 du code de procédure civile, aucun élément ne justifiant d'écarter l'exécution provisoire celle-ci s'appliquera de plein droit.


PAR CES MOTIFS,

Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe,

REJETTE la demande de jonction formée par la société Maif ;

DEBOUTE M. [Y] [K] de sa demande en paiement formée à l'encontre de la société Maif au titre de l'indisponibilité de son appartement résultant du dégât des eaux déclaré le 18 juillet 2016 ;

DEBOUTE M. [Y] [K] de sa demande en paiement formée à l'encontre de la société Maif au titre des frais de garde-meubles résultant du dégât des eaux déclaré le 18 juillet 2016 ;

DEBOUTE M. [Y] [K] de sa demande en paiement formée à l'encontre de la société Allianz Iard au titre du préjudice de jouissance non indemnisé par la société Maif et résultant son appartement résultant du dégât des eaux déclaré le 18 juillet 2016 ;

DEBOUTE M. [Y] [K] de demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de la société Maif au titre de la résistance abusive ;

DEBOUTE M. [Y] [K] de sa demande en paiement in solidum de dommages-intérêts formée à l'encontre de la société Allianz Iard, M. [Y] [K] et de la société Matmut au titre du préjudice de jouissance de son appartement résultant du dégât des eaux déclaré le 18 juillet 2016 ;

DEBOUTE M. [Y] [K] de sa demande en paiement in solidum de dommages-intérêts formée à l'encontre de la société Maif au titre des frais de garde-meubles résultant du dégât des eaux déclaré le 18 juillet 2016 ;

DEBOUTE M. [Y] [K] de sa demande en paiement formée à l'encontre de la société Maif au titre des frais de garde-meubles résultant du dégât des eaux déclaré le 18 juillet 2016 ;

CONDAMNE M. [Y] [K] à payer à la société Maif la somme de 3 000 (trois mille) euros au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE M. [Y] [K] à payer à M. [T] [V] la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre des frais irrépétibles;

REJETTE la demande formée par M. [Y] [K] au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE M. [Y] [K] aux dépens ;

REJETTE la demande formée par la société Maif aux fins de voir inclure les frais de médiation dans les dépens ;

RAPPELLE que la présente décision est exécutoire par provision de plein droit ;

Fait et jugé à Paris le 02 Mai 2024.


Le GreffierLa Présidente

Gilles ARCASNathalie VASSORT-REGRENY

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