2 mai 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG n° 24/02476

2ème chambre 2ème section

Texte de la décision

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Expéditions exécutoires délivrées le:
Copies certifiées conformes délivrées le :





2ème chambre


N° RG 24/02476
N° Portalis 352J-W-B7I-C32XI

N° MINUTE :




Assignation du :
19 Février 2024




JUGEMENT STATUANT SELON LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE AU FOND
rendu le 02 Mai 2024




DEMANDERESSES

Madame [Z] [A] épouse [S]
[Adresse 2]
[Localité 8]

Madame [K] [A] épouse [F]
[Adresse 3]
[Localité 6]

Représentées par Maître Alexandre DAZIN de la SCP LACHAUD MANDEVILLE COUTADEUR & Associés - DROUOT AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant, vestiaire #W0006


DÉFENDEUR

Monsieur [V] [A]
[Adresse 7]
[Localité 8]

Non représenté





Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 24/02476 - N° Portalis 352J-W-B7I-C32XI


* * *

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles 839 et 481 du Code de procédure civile et L.121-3 du Code de l’organisation judiciaire,

Madame Sarah KLINOWSKI, Juge, statuant par délégation du Président du Tribunal Judiciaire.

assistée de Adélie LERESTIF, greffière.

DÉBATS

A l’audience du 03 Avril 2024, avis a été donné aux avocats que la décision serait rendue le 02 Mai 2024.


JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Réputé contradictoire et en premier ressort


* * *

EXPOSE DU LITIGE

Madame [I] [E] est décédée le [Date décès 5] 2006, laissant pour lui succéder :
Monsieur [P] [A], son conjoint séparé de biens, Ses trois enfants, issus de son union avec Monsieur [P] [A] : Madame [Z] [A] épouse [S],Monsieur [V] [A],Madame [K] [A] épouse [F].
Monsieur [P] [A] est décédé le [Date décès 4] 2019, laissant pour lui succéder ses trois enfants.

Par acte de donation-partage du 28 juin 1993, les époux [A] ont consenti à leurs trois enfants la nue-propriété de la moitié de leurs biens et droits immobiliers, à savoir un appartement de type 2 pièces (lot n°487) et un appartement de type 4 pièces (lot n°486) situés au 18ème étage du [Adresse 7] à [Localité 8].

Par acte de licitation du 22 février 2008, Madame [K] [F] a cédé à son frère ses droits en nue-propriété à hauteur d’un sixième indivis sur l’appartement de type 2 pièces.

Par acte de licitation du 29 octobre 2009, Mesdames [Z] [S] et [K] [F] ont chacune cédé à leur frère leurs droits en nue-propriété à hauteur d’un sixième indivis sur l’appartement de type 4 pièces.

Reprochant à leur frère d’occuper l’appartement de type deux pièces indivis depuis le décès de leur père sans verser d’indemnité d’occupation à l’indivision conventionnelle et successorale, Mesdames [Z] [S] et [K] [F] l’ont, par exploit d’huissier du 19 février 2024, fait assigner devant le président du tribunal judiciaire de Paris statuant selon la procédure accélérée au fond et demandent au tribunal, au visa de l’article 815-9 du code civil, de :
Juger recevable leur demande au titre de l’article 815-9 du code civil,Juger que Monsieur [V] [A] est redevable, depuis le jour du décès de [L] [A] le 17 mars 2019 et jusqu’au jour du partage, d’une indemnité d’occupation de l’appartement de type T2 au sein de l’ensemble immobilier situé à [Localité 8] au [Adresse 7], d’un montant mensuel de 865,60 euros,En conséquence,
Condamner Monsieur [V] [A] à verser à l’indivision (conventionnelle et successorale) portant sur l’appartement de type T2 correspondant au lot n°487 au sein de l’ensemble immobilier situé [Adresse 7] à [Localité 8] entre les mains de l’étude de Maître [U] [N], notaire associé dont l’étude est située [Adresse 1] à [Localité 9], la somme de 50 204 euros correspondant à la période du 17 mars 2019 au 17 janvier 2024 (58 mois),Condamner Monsieur [V] [A] à verser annuellement une indemnité d’occupation d’un montant de 865,60 euros par mois (à compter pour la première année du 18 janvier 2024), au plus tard le 30 janvier de l’année N+1, à l’indivision (conventionnelle et successorale) portant sur l’appartement du [Adresse 7] entre les mains de Maître [U] [N] une somme correspondant à la période annuelle d’occupation,Juger que le montant mensuel de l’indemnité d’occupation sera révisé annuellement au 1er janvier et pour la première fois, le 1er janvier 2025, en fonction de l’indice de référence des loyers, l’indice initial à prendre en considération étant l’indice du 4ème trimestre 2023 (142,06),Condamner Monsieur [V] [A] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Monsieur [V] [A] n’a pas constitué avocat, l’huissier ayant délivré l’assignation précisant que son nom est inscrit sur l’interphone et la boîte aux lettres et que l’adresse lui a été confirmée par le gardien, copie de l’acte ayant ensuite été déposée en son étude.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à l’assignation de Mesdames [Z] [S] et [K] [F] pour l'exposé plus ample des moyens de fait et de droit développés au soutien de leurs prétentions, lesquels sont présentés succinctement dans les motifs.

A l’issue de l’audience du 3 avril 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 2 mai 2024, date à laquelle la décision a été rendue par mise à disposition au greffe.



MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’occupation du logement de type 2 pièces situé au [Adresse 7] à [Localité 8]

Mesdames [Z] [S] et [K] [F] soutiennent que leur frère occupe, à titre de résidence principale et de façon continue, depuis le décès de leur père, l’appartement de type 2 pièces situé au [Adresse 7] à [Localité 8] sans verser d’indemnité d’occupation à l’indivision conventionnelle et successorale alors qu’elles disposent respectivement de droits à hauteur du tiers indivis et du sixième indivis. Elles estiment ainsi que Monsieur [V] [A] est redevable à l’indivision depuis le jour du décès de leur père et jusqu’au jour du partage, d’une indemnité d’occupation d’un montant mensuel de 865,60 euros.

Sur ce,

Selon l’article 815-9 du code civil, le président du tribunal judiciaire est compétent, à défaut d’accord entre les indivisaires, pour régler provisoirement leur droit de jouissance et ainsi fixer une indemnité d’occupation à la charge de l’indivisaire qui jouit privativement de la chose indivise.

En l’espèce, il résulte de l’attestation de Monsieur [D] [X], gardien de l’immeuble situé au [Adresse 7] à [Localité 8] que Monsieur [V] [A] occupe un appartement de type 2 pièces depuis le décès de son père. L’attestation de propriété immobilière du 28 octobre 2021, versée aux débats par les demanderesses, précise également cette adresse pour le défendeur.

La jouissance exclusive de l’appartement de type 2 pièces dont il est indivisaire le rend donc redevable d’une indemnité d’occupation envers l’indivision successorale et conventionnelle, du 17 mars 2019 jusqu’à sa libération des locaux ou jusqu’au partage, étant rappelé qu’il est propriétaire d’un tiers du bien indivis depuis la donation-partage du 28 juin 1993 et la licitation du 22 février 2008 et qu’il dispose de droits indivis à hauteur d’un sixième de la valeur du bien depuis le décès de son père.

L’indemnité d’occupation dont Monsieur [V] [A] est redevable doit être évaluée au regard de la valeur locative du bien, elle-même déterminée en fonction des prix du marché, des caractéristiques du bien et de ses alentours, et corrigée à la baisse en raison du caractère précaire de l’occupation par l’indivisaire.

Il ressort des pièces versées aux débats que le bien indivis correspondant au lot n°487 de la copropriété du [Adresse 7] à [Localité 8] est constitué d’un appartement de type deux pièces situé au 18ème étage du bâtiment D.16. Il comprend un hall d’entrée, une salle de séjour, une chambre, une cuisine, et une salle de bain.

Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 24/02476 - N° Portalis 352J-W-B7I-C32XI

Si les photographies de l’appartement ne sont pas produites par les demanderesses, celles-ci versent aux débats une estimation obtenue sur le site Meilleursagents.com le 11 janvier 2024, selon laquelle le bien disposerait d’une valeur locative moyenne mensuelle de 1 082 euros.

Au vu de ces éléments, de l’absence d’estimation de la valeur locative du bien pour les années antérieures et du caractère précaire de la jouissance du bien indivis par Monsieur [V] [A], imposant l’application d’un abattement de 20%, la valeur locative mensuelle du bien sera fixée à la somme de 800 euros.

Monsieur [V] [A] sera donc déclaré redevable envers l’indivision propriétaire de l’appartement, à savoir l’indivision conventionnelle et successorale, d’une indemnité mensuelle d’occupation fixée à la somme provisionnelle de 800 euros et ce, à compter du 17 mars 2019 et jusqu’à la libération des locaux ou jusqu’au partage.

Il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de révision annuelle du montant de l’indemnité d’occupation au regard de la précarité de la jouissance du bien indivis par le défendeur et de l’absence de photographies du bien permettant d’en apprécier l’état.


Sur la répartition provisionnelle des bénéfices de l’indivision

Mesdames [Z] [S] et [K] [F] sollicitent la condamnation de leur frère à verser à l’indivision conventionnelle et successorale portant sur l’appartement du [Adresse 7] à [Localité 8] entre les mains de l’étude de Maître [U] [N], en charge de la succession de leurs parents, une somme de 50 204 euros correspondant à la période du 17 mars 2019 au 17 janvier 2024 ainsi qu’une somme mensuelle de 865,60 euros à compter de cette date.

Sur ce,

Si l’article 815-11 du code civil dispose que tout indivisaire peut demander sa part annuelle dans les bénéfices, qui sont composés des fruits de l’indivision déduction faite des dépenses de celle-ci, aucun texte ne permet en revanche de condamner un indivisaire à verser une somme au titre de la répartition provisionnelle des bénéfices de l’indivision entre les mains du notaire à titre de séquestre.

En outre, Mesdames [Z] [S] et [K] [F] ne démontrent pas que l’indivision produit des bénéfices, ne versant aux débats aucune pièce sur les dépenses générées par l’indivision, comprenant notamment la taxe foncière, la taxe d’habitation, les charges de copropriété ainsi que l’assurance du bien et les dépenses de conservation.

Mesdames [Z] [S] et [K] [F] ont seulement droit en l’état à une créance sur l’indivision au titre de leur compte d’administration et leur demande de versement des sommes susvisées entre les mains du notaire en charge de la succession, que le tribunal analyse en une demande en répartition provisionnelle des bénéfices, sera rejetée.
Décision du 02 Mai 2024
2ème chambre
N° RG 24/02476 - N° Portalis 352J-W-B7I-C32XI



Sur les autres demandes

Les dépens seront laissés à la charge des demanderesses.

Le caractère familial du litige commande de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

Il sera rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire.


PAR CES MOTIFS,

Le Président du tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe selon la procédure accélérée au fond, par jugement réputé contradictoire en premier ressort,

DIT que Monsieur [V] [A] est redevable envers l’indivision conventionnelle et successorale portant sur l’appartement de type deux pièces correspondant au lot n°487 de la copropriété située au [Adresse 7] à [Localité 8], composée de lui-même et de Mesdames [Z] [S] et [K] [F], ses sœurs, d’une indemnité mensuelle d’occupation à compter du 17 mars 2019 et jusqu’à la libération des locaux ou jusqu’au partage,

FIXE, à titre provisoire, à la somme de 800 euros le montant de l’indemnité mensuelle d’occupation portant sur l’appartement de type deux pièces correspondant au lot n°487 de la copropriété située au [Adresse 7] à [Localité 8], due par Monsieur [V] [A] à l’indivision composée de lui-même et de Mesdames [Z] [S] et [K] [F], ses sœurs, à compter du 17 mars 2019,

REJETTE la demande de Mesdames [Z] [S] et [K] [F] de condamnation de Monsieur [V] [A] à verser à l’indivision (conventionnelle et successorale) portant sur l’appartement de type T2 correspondant au lot n°487 au sein de l’ensemble immobilier situé [Adresse 7] à [Localité 8] entre les mains de l’étude de Maître [U] [N], notaire associé dont l’étude est située [Adresse 1] à [Localité 9], la somme de 50 204 euros correspondant à la période du 17 mars 2019 au 17 janvier 2024 (58 mois),

REJETTE la demande de Mesdames [Z] [S] et [K] [F] de condamnation de Monsieur [V] [A] à verser annuellement une indemnité d’occupation d’un montant de 865,60 euros par mois (à compter pour la première année du 18 janvier 2024), au plus tard le 30 janvier de l’année N+1, à l’indivision (conventionnelle et successorale) portant sur l’appartement du [Adresse 7] entre les mains de Maître [U] [N] une somme correspondant à la période annuelle d’occupation,

REJETTE la demande de Mesdames [Z] [S] et [K] [F] de juger que le montant mensuel de l’indemnité d’occupation sera révisé annuellement au 1er janvier et pour la première fois, le 1er janvier 2025, en fonction de l’indice de référence des loyers, l’indice initial à prendre en considération étant l’indice du 4ème trimestre 2023 (142,06),

REJETTE la demande au titre des frais irrépétibles,

LAISSE les dépens à la charge de Mesdames [Z] [S] et [K] [F],

RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit.

Fait et jugé à Paris le 02 Mai 2024


La GreffièreLa Présidente
Adélie LERESTIF Sarah KLINOWSKI

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.