19 avril 2024
Cour d'appel de Bordeaux
RG n° 24/01757

2ème chambre civile - HSC

Texte de la décision

JURIDICTION DU

PREMIER PRÉSIDENT



2ème CHAMBRE

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Recours en matière

d'Hospitalisations

sous contrainte

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Madame [B] [M]



C/



CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE [3] pris en la personne de son directeur, AOGPE SA2P

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N° RG 24/01757 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-NXF2

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du 19 AVRIL 2024

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Notifications



le :





Grosse délivrée



le :



ORDONNANCE

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Rendue par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



Le 19 AVRIL 2024





Nous, Emmanuel BREARD, Conseiller à la cour d'appel de Bordeaux, désigné en l'empêchement légitime du premier président par ordonnance du 20 mars 2024 assisté de François CHARTAUD, Greffier ;





ENTRE :



Madame [B] [M], née le 04 Mai 1987 à [Localité 4] (INDONESIE), actuellement hospitalisée au CHS [3]



assistée de Maître Floriane DALLA COSTA, avocat au barreau de BORDEAUX



En présence de Madame [V] [H], interprète en langue indonésienne déclarée comprise par la personne retenue à l'inverse du Français, inscrite sur la liste des experts de la cour d'appel de Bordeaux,



régulièrement avisée, comparante à l'audience, accompagnée d'un personnel soignant,



Appelante d'une ordonnance (R.G. 24/00938) rendue le 02 avril 2024 par le Juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 09 avril 2024



d'une part,

ET :



CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE [3] pris en la personne de son directeur, [Adresse 1]



AOGPE SA2P, Mme [O] [K] - [Adresse 2]





régulièrement avisés, non comparants à l'audience,



Intimés,



d'autre part,





Le Ministère Public, en ses réquisitions écrites en date du 12 avril 2024,



Avons rendu publiquement l'ordonnance réputée contradictoire suivante après que la cause a été appelée devant nous, assisté de François CHARTAUD, greffier, en audience publique, le 18 Avril 2024




SUR LES FAITS ET LA PROCÉDURE



Vu la loi numéro 2011/803 du 5 juillet 2011 relative au droit et la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et les modalités de prise en charge modifiée par la loi du 27 septembre 2013 et notamment les articles L3211-12-1, L3211-12-2 et L3212-1 et suivants du code de la santé publique ;



Vu le décret 2011/846 du 18 juillet 2011 relatif à la procédure judiciaire de mainlevée ou de contrôle des mesures de soins psychiatriques et notamment des articles R3211-8, R3211-27 et R3211-28 du code de la santé publique ;



Vu l'admission de Mme [B] [M], née le 4 mai 1987 à [Localité 4] (Indonésie), en hospitalisation complète par décision du directeur de l'établissement de [3], à la demande d'un tiers (Mme [O] [K], curatrice), en date du 22 mars 2024, se référant au certificat médical rédigé le 21 mars 2024 par le docteur [A] [W] ;



Vu la décision du directeur de l'établissement en date du 25 mars 2024 maintenant l'intéressée en hospitalisation complète et les certificats de 24 heures du Dr [P] [T] et de 72 heures du Dr [U] [R] ;



Vu la requête du directeur de l'établissement adressée au juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bordeaux reçue au greffe le 26 mars 2024 et datée du 22 mars 2024 ;



Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 2 avril 2024 ordonnant la poursuite de l'hospitalisation complète de Mme [M] ;



Vu l'appel formé par le conseil de Mme [M] le 9 avril 2024 reçu au greffe de la cour ;



Vu les conclusions du ministère public en date du 12 avril 2024, versées dans le dossier consultable au greffe par les parties, aux fins de déclarer l'appel recevable et de confirmer l'ordonnance entreprise ;





Vu la convocation des parties à l'audience du 18 avril 2024 à 10 heures ;



Vu les avis médicaux des 28 mars et 16 avril 2024 ;



À l'audience, Mme [M] et son avocat ont été informés du contenu des réquisitions écrites du ministère public. La patiente, en présence de son conseil, a sollicité la mainlevée de l'hospitalisation d'office et la poursuite des soins en ambulatoire.



Le conseil a soulevé une irrégularité de la première décision tenant à ce que l'appelante a sollicité l'intervention d'un interprète en langue indonésienne afin de lui garantir une bonne compréhension de la procédure, mais n'a pu bénéficier de cette assistance devant le premier juge. Elle a réclamé sur le fond la mainlevée de la mesure.



Un interprète en langue indonésienne a pu assister Mme [M] durant les débats par téléphone, faute d'avoir été en capacité de se déplacer au vu de son éloignement.



La mandataire, régulièrement convoquée, est absente.



Il a été indiqué à l'audience que la décision sera rendue par mise à disposition au greffe le 19 avril avril 2024 à 12 heures.




MOTIFS DE LA DECISION



L'article L. 3216-1 du code de la santé publique prévoit que 'La régularité des décisions administratives prises en application des chapitres II à IV du présent titre ne peut être contestée que devant le juge judiciaire.

Le juge des libertés et de la détention connaît des contestations mentionnées au premier alinéa du présent article dans le cadre des instances introduites en application des articles L.3211-12 et L.3211-12-1. Dans ce cas, l'irrégularité affectant une décision administrative mentionnée au premier alinéa du présent article n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet.

Lorsque le tribunal judiciaire statue sur les demandes en réparation des conséquences dommageables résultant pour l'intéressé des décisions administratives mentionnées au premier alinéa, il peut, à cette fin, connaître des irrégularités dont ces dernières seraient entachées'.



L'article R3211-18 du même code précis que 'L'ordonnance est susceptible d'appel devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué, dans un délai de dix jours à compter de sa notification.



Le ministère public peut, dans tous les cas, interjeter appel dans le même délai'.



En vertu de l'article 563 du code de procédure civile, pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves.



S'agissant de l'argument tiré de l'absence de traducteur devant le premier juge, il ressort des mentions mêmes de l'ordonnance attaquée que si Mme [M] a indiqué avoir besoin d'un interprète pour lire et écrire en français, elle a néanmoins déclaré le comprendre. Elle a réitéré cette déclaration devant la cour, précisant ne pas avoir le niveau. Si certains termes lui ont échappé, l'intéressée a été capable de répondre à un certain nombre de questions dans un français compréhensible.



La procédure étant orale, il n'est pas établi que l'absence d'un interprète devant le premier juge ait constitué une irrégularité de fond (en ce sens première chambre de la Cour de Cassation le 5 juin 2020 pourvoi 19-24.700) faute qu'elle ait influé sur les droits de la défense, Mme [M] étant en capacité non seulement d'exprimer ses demandes, son agumentation, mais également de suivre la procédure, y compris grâce à l'assistance de son conseil. De même, il n'est pas remis en cause qu'elle a été en capacité d'exprimer son point de vue et d'exercer l'ensemble des recours à sa disposition. Ce moyen n'est donc pas fondé, quand bien même la cour a réévoqué l'ensemble de sa situation.



Sur la mesure elle-même, bien qu'elle le conteste à l'audience, il apparaît que l'admission de Mme [M] au centre hospitalier spécialisé est intervenue à la suite de troubles du comportement avec état d'agitation non dirigé et une absence de conscience de ces troubles, dont il est résulté un risque grave d'atteinte à son intégrité. L'urgence est donc caractérisée.



Aux 24 heures d'hospitalisation, la persistance des signes cliniques relevés ci-dessus est soulignée, avec des hallucinations visuelles, des idées délirantes de persécution. Mme [M], qui a pu faire valoir ses observations, n'avait aucune conscience de ses troubles et adhérait aux idées délirantes.



Le certificat de 72 heures reprenait les éléments qui précèdent et soulignait l'anosognosie de la patiente, dont les déclarations et observations en français étaient reprises, et les fluctuations de son consentement aux soins. La nécessité de maintenir la mesure était soulignée.







Les derniers avis médicaux notaient, outre une labilité importante, la persistance d'éléments délirants de persécution auxquels la patiente adhérait et participait, une anosognosie et une absence d'adhésion aux soins. Il était souligné que la patiente n'avait pas besoin d'interprète.



Dans ces conditions c'est à juste titre que le premier juge a considéré que la prise en charge dans un cadre contenant et sécurisé s'impose afin de garantir l'observance des soins et le cas échéant la réadaptation du traitement ce qui ne peut se faire qu'en milieu hospitalier et sous surveillance médicale constante de sorte que l'hospitalisation complète s'avère toujours nécessaire à ce jour.



Il convient donc de confirmer la décision entreprise qui a fait une exacte application des textes susvisés.



PAR CES MOTIFS



Accorde le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire à Mme [M] ;



Déclare la procédure régulière.



Confirme l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Bordeaux du 2 avril 2024 en toutes ses dispositions ;



Dit que la présente décision sera notifiée à l'intéressée, à son avocate, au tiers (curateur) , au directeur de l'établissement où elle est soignée ainsi qu'au ministère public ;



Dit que les dépens seront laissés à la charge de l'État.



La présente décision a été signée par Emmanuel BREARD, conseiller, et par François CHARTAUD, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



Le Greffier, Le Conseiller délégué,

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