18 avril 2024
Cour d'appel de Colmar
RG n° 21/04973

Chambre 2 A

Texte de la décision

MINUTE N° 174/2024





































Copie exécutoire

aux avocats



Le 18 avril 2024



La greffière,

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 18 AVRIL 2024





Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 21/04973 -

N° Portalis DBVW-V-B7F-HXBM



Décision déférée à la cour : 19 Novembre 2021 par le tribunal judiciaire de Saverne





APPELANT et INTIMÉ SUR APPEL INCIDENT :



Monsieur [L] [M]

demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Christine BOUDET, Avocat à la cour





INTIMÉS et APPELANTS SUR APPEL INCIDENT :



Monsieur [U] [F] et

Madame [J] [I] épouse [F]

demeurant tous deux [Adresse 9]



représentés par Me Ahlem RAMOUL-BENKHODJA, Avocat à la cour





COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 18 Janvier 2024, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre

Madame Myriam DENORT, Conseillère

Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseillère

qui en ont délibéré.



Greffière lors des débats : Madame Corinne ARMSPACH-SENGLE



ARRÊT contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente, et Madame Sylvie SCHIRMANN, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




FAITS ET PROCÉDURE



Depuis le 12 novembre 2007, M. [L] [M] est propriétaire d'un chalet et d'un terrain, situé au lieudit [Localité 2], cadastré section [Cadastre 5], [Adresse 9].



Il est constant que ce terrain est enclavé.



M. [U] [F] et Mme [J] [I], épouse [F], ont acquis, en 2014, un chalet situé sur la parcelle [Cadastre 3] et un chemin constituant la parcelle [Cadastre 8].



Saisi suite à l'assignation délivrée par M. [M] à M. et Mme [F], le tribunal judiciaire de Saverne a, par jugement du 19 novembre 2021 :

- ordonné l'inscription d'une servitude de passage conventionnelle au profit de M. [M] sur la parcelle [Cadastre 8] de la commune de [Localité 10],

- dit n'y avoir lieu à retrait de la barrière,

- ordonné que la barrière puisse être ouverte dans le cadre de la servitude et que M. [M] dispose de clés en ce sens,

- condamné M. [L] [M] au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de droits proportionnels de l'article 682 du code civil,

- dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres frais et dépens,

- rejeté les plus amples demandes,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision.



Pour statuer ainsi, se fondant sur les articles 682 et 683 du code civil, le tribunal a relevé l'existence de nombreux incidents émaillant l'existence du passage litigieux, le fait que l'autre passage envisageable se trouvait sur la propriété d'un tiers et qu'aucun élément ne permettait de définir s'il était mieux adapté, que le passage réalisé sur la parcelle [Cadastre 8] avait été largement utilisé depuis des décennies et que M. [M] avait participé financièrement à la rénovation et à l'entretien dudit passage.



Il a retenu que le fait d'avoir érigé une barrière était conforme aux dispositions de l'article 647 du code civil, dès lors que les époux [F] avaient proposé à chaque usager de mettre à disposition un jeu de clés et ainsi respecté les dispositions de l'article 701 dudit code, de sorte qu'il n'y avait pas lieu de leur imposer le retrait de ladite barrière.



Il a encore retenu que la demande d'indemnité des époux [F] apparaissait fondée en son principe, dès lors qu'il n'était pas contestable qu'un tel passage générait des frais d'entretien et qu'une telle indemnité était prévue à l'article 682 du code civil. Il l'a évaluée à 5 000 euros correspondant à la proportion du passage rapportée à la valeur usuelle d'une parcelle sur la commune de [Localité 10]. En contrepartie, il a ordonné l'inscription de la servitude.



S'agissant de la demande des époux [F] concernant la vente d'une partie de la parcelle, le tribunal a retenu qu'aucun élément chiffré ne permettait d'y faire droit.



S'agissant de la demande des époux [F] de condamnation au paiement du remplacement de la barrière, il a considéré qu'aucun élément suffisamment probant ne permettait d'attribuer ladite dégradation au requérant.







Le 6 décembre 2021, M. [M] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à retrait de la barrière, l'a condamné à payer la somme de 5 000 euros au titre de droits proportionnels de l'article 682 du code civil, dit que chacune chacune des parties conservera la charge de ses propres frais et dépens et rejeté les plus amples demandes.



L'ordonnance de clôture a été prononcée le 7 février 2023.



MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES



Par ses dernières conclusions du 27 janvier 2023, transmises par voie électronique le même jour, et selon un bordereau de communication de pièces du 31 janvier 2023, transmis par voie électronique le même jour, M. [M] demande à la cour de :

- déclarer son appel recevable et bien fondé,

- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné l'inscription d'une servitude de passage conventionnelle à son profit sur la parcelle [Cadastre 8] de la commune de [Localité 10],

- infirmer le jugement en toutes ses autres dispositions et, statuant à nouveau :

- fixer l'indemnité prévue par l'article 682 du code civil à un montant ne pouvant excéder 323 euros,

- ordonner aux époux [F] de retirer la barrière située sur la parcelle [Cadastre 8] à hauteur de la parcelle [Cadastre 4],

- débouter les époux [F] de l'ensemble de leurs fins et conclusions,

- condamner les époux [F] à lui payer le somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.



Il expose qu'avant 2014, date à laquelle les époux [F] sont devenus propriétaires du chemin constituant la parcelle [Cadastre 8], il utilisait, comme avant lui, M. [S], propriétaire du chalet qu'il a acquis en 2007, et comme les autres résidents enclavés, ledit chemin de terre qui relie la route départementale pour accéder aux chalets. Il soutient qu'en 2014, M. [F] a demandé aux différents propriétaires des chalets une participation financière pour la réfection du chemin, que des différends concernant l'usage de ce chemin s'en sont suivis, qu'il s'est acquitté de la somme de 771,42 euros au titre des frais de mise en état du chemin, puis régulièrement et jusqu'en 2019, des frais d'entretien que les époux [F] lui demandaient chaque année. Il ajoute, qu'en 2019, les époux [F] ont installé une barrière quelques mètres avant sa propriété et qu'il ne dispose pas de la clé. Il précise avoir refusé un projet de convention prévoyant les règles d'utilisation de la barrière que les époux [F] lui ont soumis, évoque les incidents ayant eu lieu et les échanges de courrier de leur avocat respectif.



S'agissant du chef du jugement ordonnant l'inscription d'une servitude de passage, il observe que les époux [F] concluent à titre principal à la confirmation du jugement, ce qui le rend définitif sur ce point.



S'agissant de l'indemnité prévue par l'article 682 du code civil, il soutient qu'elle doit être calculée en tenant compte du seul dommage occasionné au fonds servant et qu'en l'espèce, le préjudice des intimés est minime, dès lors qu'ils n'ont apporté aucune transformation à la parcelle du fait de la servitude sollicitée, que les frais ont déjà été exposés et supportés en partie par M. [M].









Il fait valoir que l'indemnité ne peut être fixée à la valeur vénale du terrain correspondant à l'assiette du passage, que le fait d'utiliser un accès déjà en partie existant entraîne une forte décote et que l'abattement est, en général, de l'ordre de 40 à 50 %. Il soutient qu'en l'espèce, les terrains, dans le secteur, ne sont pas constructibles, qu'il n'y a aucun aménagement communal et que les terrains se vendent au prix de la terre agricole, soit entre 30 et 50 euros l'are, de sorte qu'il n'est pas déraisonnable d'appliquer une décote de 50 % sur la valeur vénale, étant précisé qu'il n'est pas le seul à emprunter ce chemin.



Il ajoute participer régulièrement aux frais nécessaires à l'entretien du passage et que l'usure normale du chemin résultant de son utilisation se trouve ainsi neutralisée en raison de son soutien financier.



S'agissant de sa demande de retrait de la barrière, il soutient qu'en la posant après leur propre fonds, soit au derniers tiers du chemin, après leur propriété et quelques mètres avant la sienne, c'est-à-dire sans intérêt de se protéger, M. et Mme [F] ont méconnu les dispositions des articles 647 et 701 du code civil. Il demande donc que la cour leur enjoigne de retirer la barrière, tout au moins de ne jamais la fermer à clé.



S'agissant de la demande fondée sur une dégradation de la barrière, il conteste l'avoir dégradée et soutient que la barrière est en parfait état de marche et fermée à clé.



S'agissant de la proposition de vente de la partie 'gauche' de la parcelle, il soutient que cela ne réglerait pas le différend, puisque sa propriété resterait enclavée, les époux [F] lui refusant désormais le passage sur la partie 'droite' dudit chemin. Il ajoute qu'il ne semble pas possible d'inscrire une servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 6] appartenant à Mme [G] au regard des particularités du chemin et de l'absence d'accord de cette dernière.



Par leurs dernières conclusions datées du 1er février 2023, transmises par voie électronique le 2 février 2023, M. et Mme [F] demandent à la cour de :



A titre principal :

- déclarer l'appel irrecevable et mal fondé,

- le rejeter,

- confirmer le jugement,

- débouter M. [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [M] à leur payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers frais et dépens de l'instance,



A titre subsidiaire :

- débouter M. [M] de ses demandes formulées à titre subsidiaire,

- condamner M. [M] à leur verser une somme de 10 000 euros à titre d'indemnité eu égard au dommage occasionné par l'inscription d'une servitude de passage sur leur fond,

- condamner M. [M] à prendre en charge l'intégralité des frais qui seraient engendrés par l'inscription d'une servitude de passage,

- condamner M. [M] à leur payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers frais et dépens de l'instance,









Sur l'appel incident :

- déclarer leur appel incident recevable et bien fondé,

- infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leur demande de vente d'une partie de la parcelle [Cadastre 8] et des frais de remplacement de la barre,

Statuant à nouveau dans cette limite :

- ordonner la vente de la partie 'gauche' du chemin situé sur la parcelle [Cadastre 8], à partir de la limite du terrain de M. [M] se trouvant parcelle [Cadastre 5] et jusqu'à la parcelle [Cadastre 7],

- condamner M. [M] à leur payer la somme de 420 euros au titre des frais de remplacement de la barre de la barrière,

- condamner M.[M] à leur payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers frais et dépens de l'instance,



Ils exposent que le terrain de M. [M] est accessible, soit par leur chemin privé, soit par le chemin des voisins qui est plus court. Ils admettent que M. [M] utilise plutôt leur chemin, car il est aménagé et entretenu et que cela est également le cas d'autres résidents, de sorte qu'il se détériore rapidement. Ils ont accepté de maintenir la tolérance du passage, mais sous réserve de leur participation aux frais d'entretien du chemin et du respect des autres riverains, ce que tous les voisins ont accepté sauf M. [M]. Ils ajoutent que cela n'a cependant pas réglé le problème de la détérioration du chemin, notamment eu égard aux passages de camions ou camionnettes de livraisons et des véhicules des visiteurs. Pour y remédier, ils ont installé une barrière en mai 2018, sur la partie secondaire du chemin. Tous les voisins ont accepté la remise d'une clé, sauf M. [M]. Ils font état des incidents ayant eu lieu le 1er mai 2019 et reprochent à M. [M] d'avoir dégradé la barrière en faisant plier la barre. A compter de cette date, ils ont fermé la barrière à clé. Ils font état des échanges écrits et des incidents ayant eu ensuite lieu, et précisent que M. [M] s'est procuré une clé de sécurité pour la barrière.



Ils indiquent, d'abord, accepter l'inscription d'une servitude au profit de M. [M] sur leur parcelle [Cadastre 8], sous condition du maintien de la barrière avec remise des clés à ce dernier et le versement d'une indemnité en application de l'article 682 du code civil qui a été justement évaluée à 5 000 euros, de sorte qu'ils demandent la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.



A titre subsidiaire, ils répondent sur la demande d'inscription d'une servitude conventionnelle, contestant l'existence d'une servitude.



A titre subsidiaire, sur la demande de retrait de la barrière, ils soutiennent que le fonds de M. [M] n'a pas de servitude de passage sur leur fonds, que leur parcelle n'est pas close, puisque la barrière peut être ouverte avec une clé, que M. [M] dispose d'une telle clé et que la barrière a été placée au bon endroit pour limiter le dérangement pour les habitants empruntant le chemin, tout en ayant pour objectif d'éviter le passage de véhicules qui l'empruntaient indûment, étant précisé qu'elle ne pouvait être placée sur la partie principale du chemin qui mène à des résidences principales, ni à l'entrée du chemin qui donne sur une route nationale. Ils ajoutent que le chemin passant chez Mme [G] est emprunté par un autre résident et est praticable, de sorte qu'il pourrait être emprunté par M. [M] qui ne vient que quelques fois par an.













A titre subsidiaire, sur la demande de réduction de l'indemnité prévue par l'article 682 du code civil, ils soutiennent qu'elle doit être proportionnée au dommage occasionné, et ainsi correspondre, non pas uniquement aux dégâts ou dégradations matérielles que peut engendrer le passage, mais également aux nuisances et surtout à la perte de valeur que l'inscription de la servitude engendre pour les propriétaires du fond. Ils soulignent qu'il n'existe, pour l'instant, aucune servitude, mais seulement une tolérance. L'inscription de la servitude de passage sur le chemin situé sur la parcelle [Cadastre 8] entraînerait une perte de valeur de cette parcelle, mais aussi de celle de leur terrain principal et de leur maison. Il sera plus difficile de vendre une maison et un terrain grevé d'une servitude de passage, ce d'autant plus qu'une fois cette servitude inscrite, les autres voisins seraient aussi susceptibles de demander à pouvoir en bénéficier.



Sur leur appel incident, ils soutiennent que la vente de la partie 'gauche' du chemin situé sur la parcelle [Cadastre 8], à partir de la limite du terrain de M. [M] se trouvant parcelle [Cadastre 5] et jusqu'à la parcelle [Cadastre 7], permettrait à ce dernier d'accéder à son terrain par la parcelle [Cadastre 6] sur laquelle se trouve un autre chemin privé, ce qui lui éviterait de passer par la partie droite de leur chemin, par la barrière, et en passant devant leur maison. Cela correspondrait aussi aux dispositions des articles 682 et 683 du code civil, puisqu'il emprunterait le chemin le plus court pour accéder à son terrain.



Sur leur demande de dommages-intérêts pour dégradation de la barrière, ils reprochent à M. [M] d'avoir dégradé la barrière le 1er mai 2019 et demandent paiement des frais de son remplacement selon devis du 23 juin 2019.



Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.




MOTIFS



1. Sur le chef du jugement ayant ordonné l'inscription d'une servitude de passage conventionnelle au profit de M. [M] sur la parcelle [Cadastre 8] de la commune de [Localité 10] :



La cour n'étant pas saisie d'un appel portant sur ce chef de jugement, elle ne peut que le confirmer.



2. Sur les chef du jugement ayant dit n'y avoir lieu à retrait de la barrière et ordonné que la barrière puisse être ouverte dans le cadre de la servitude et que M. [M] dispose de clés en ce sens :



M. [M] demande à la cour d'infirmer ce chef de jugement, et, statuant à nouveau, d'ordonner aux époux [F] de retirer la barrière située sur la parcelle [Cadastre 8] à hauteur de la parcelle [Cadastre 4].



Aux termes de l'article 647 du code civil : 'Tout propriétaire peut clore son héritage, sauf l'exception portée en l'article 682".



Selon son article 682 : 'Le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation









d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner'.



L'article 701 du code civil prévoit que : 'Le propriétaire du fonds débiteur de la servitude ne peut rien faire qui tende à en diminuer l'usage, ou à le rendre plus incommode.



Ainsi, il ne peut changer l'état des lieux, ni transporter l'exercice de la servitude dans un endroit différent de celui où elle a été primitivement assignée.



Mais cependant, si cette assignation primitive était devenue plus onéreuse au propriétaire du fonds assujetti, ou si elle l'empêchait d'y faire des réparations avantageuses, il pourrait offrir au propriétaire de l'autre fonds un endroit aussi commode pour l'exercice de ses droits, et celui-ci ne pourrait pas le refus.'



En l'espèce, le fait que le terrain de M. [M] soit enclavé n'est pas contesté. En outre, le jugement a ordonné l'inscription d'une servitude de passage, au profit de M. [M], sur la parcelle cadastrée [Cadastre 8] à [Localité 10]. Le principe de son droit de passage sur ce chemin ne peut donc plus être contesté.



Dans la mesure où la barrière est située à un endroit où passent d'autres personnes pour accéder à leur chalet, son installation ne peut être considérée comme ayant été effectuée pour nuire à M. [M]. En outre, elle vise à préserver le chemin de son utilisation par des tiers dépourvus de droits.



Ainsi, le fait d'installer la barrière à cet endroit du chemin est conforme aux dispositions de l'article 701 du code précité, à condition, toutefois, que M. et Mme [F] en donnent la clé à M. [M].



Il convient dès lors de confirmer le chef du jugement ayant ordonné que la barrière puisse être ouverte dans le cadre de la servitude et que M. [M] dispose de clés en ce sens, ainsi que celui ayant dit n'y avoir lieu à retrait de la barrière



3. Sur le chef du jugement ayant condamné M. [L] [M] au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de droits proportionnels de l'article 682 du code civil :



M. [M] demande à la cour d'infirmer ce chef du jugement, et, statuant à nouveau de fixer l'indemnité prévue par l'article 682 du code civil à un montant ne pouvant excéder 323 euros.



M. et Mme [F] ne demandent pas l'infirmation de ce chef du jugement, mais demandent, à la cour, à titre subsidiaire de condamner M. [M] à leur verser une somme de 10 000 euros à titre d'indemnité eu égard au dommage occasionné par l'inscription d'une servitude de passage sur leur fond



L'existence même de la servitude de passage dont bénéficie M. [M] sur ce chemin occasionne un dommage aux fonds servant.



Ce dommage doit être apprécié en fonction de la valeur vénale du chemin.



Les éléments produits aux débats montrent que l'assiette de la servitude, à savoir le chemin, existe déjà et n'a pas à être créé. En outre, elle constitue une parcelle distincte de celle sur laquelle est construite la maison de M. et Mme [F]. La gêne occasionnée au fonds des époux [F] est ainsi minime. De plus, M. [F] n'est pas le seul usager de ce chemin.



Selon l'estimation de la Safer, qui n'est pas sérieusement contestée, la valeur de ce chemin est de 25 à 30 euros l'are, soit entre 269 et 323 euros pour la parcelle [Cadastre 8] de 10,77 ares.



Il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'indemnité a été fixée par le tribunal à un montant manifestement disproportionné au dommage occasionné, et ne saurait excéder la somme de 323 euros.



Il convient, dès lors, d'infirmer le jugement de ce chef, et, statuant à nouveau, de condamner M. [M] à payer à M. et Mme [F] la somme de 323 euros.



4. Sur le chef du jugement ayant rejeté les plus amples demandes :



M. et Mme [F] forment un appel incident et demandent d'infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leur demande de la vente d'une partie de la parcelle [Cadastre 8] et des frais de remplacement de la barre,



4.1. Sur leur demande tendant à ordonner la vente de la partie 'gauche' du chemin situé sur la parcelle [Cadastre 8], à partir de la limite du terrain de M. [M] se trouvant parcelle [Cadastre 5] et jusqu'à la parcelle [Cadastre 7] :



Cette demande ne peut qu'être rejetée en l'absence d'accord des parties, la cour ne pouvant suppléer la volonté des parties et imposer une cession forcée.



4.2. Sur leur demande tendant à condamner M. [M] à leur payer la somme de 420 euros au titre des frais de remplacement de la barre de la barrière :



Il n'est pas démontré que le coup que M. [M] a reconnu, lorsqu'il s'est rendu à la gendarmerie pour porter plainte, avoir donné dans la barrière, ait pu occasionner une dégradation de la barrière. En outre, l'avis de classement ne vaut pas preuve de l'imputabilité de cette dégradation à M. [M].



Le rejet de ces demandes sera donc confirmé.



5. Sur l'omission de statuer :



M. et Mme [F] demandent à la cour de condamner M. [M] à prendre en charge l'intégralité des frais qui seraient engendrés par l'inscription d'une servitude de passage.



Le tribunal a omis de statuer sur ce point.



S'il a rejeté 'les plus amples demandes', le jugement ne contient aucun motif sur cette demande, de sorte qu'elle n'a pas été expressément rejetée.



Il convient de condamner M. [M] à prendre en charge les frais d'inscription de ladite servitude dont il bénéficie.





6. Sur les frais et dépens :



En considération de la solution du litige, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a statué sur les frais et dépens.



A hauteur d'appel, chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d'appel.



L'équité commande de ne pas prononcer de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel, de sorte que les demandes seront rejetées.



PAR CES MOTIFS



La cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,



Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Saverne du19 novembre 2021, sauf en ce qu'il a condamné M. [L] [M] au paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de 'droits proportionnels' de l'article 682 du code civil ;



L'infirme de ce seul chef ;



Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant :



Condamne M. [L] [M] à payer à M.[U] [F] et Mme [J] [I] épouse [F] la somme de 323 euros (trois cent vingt-trois euros) au titre de l'indemnité prévue par l'article 682 du code civil;



Condamne M. [L] [M] à prendre en charge les frais de l'inscription de la servitude de passage ordonnée par le jugement précité ;



Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens d'appel ;



Rejette les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.



La greffière, La présidente,

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