18 avril 2024
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 23/11151

Chambre 1-9

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9



ARRÊT AU FOND

DU 18 AVRIL 2024



N° 2024/ 221









Rôle N° RG 23/11151 N° Portalis DBVB-V-B7H-BL2KM







[T] [B]

S.C.I. SBO





C/



S.A.S. IMMO ANGELS









Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Fabrice BATTESTI



Me Nicolas MERGER













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge de l'exécution d'AIX EN PROVENCE en date du 10 Août 2023 enregistré au répertoire général sous le n° 23/01885.





APPELANTS



Monsieur [T] [B]

né le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 11]

de nationalité Française,

demeurant Chez Madame [S], [Adresse 9] - [Localité 2]



S.C.I. SBO

immatriculée au RCS d'AIX EN PROVENCE sous le numéro 432 871 978, prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 6] - [Localité 10]



Tous deux représentés et assistés par Me Fabrice BATTESTI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substitué par Me Agnès ERMENEUX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE





INTIMÉE



S.A.S. IMMO ANGELS

immatriculée au RCS de MONTPELLIER sous le n° 812 601 086

représentée par son Président en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1] - [Localité 5]



représentée par Me Nicolas MERGER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Bruno GUIRAUD de la SCP SPORTOUCH BRUN, GUIRAUD, avocat au barreau de MONTPELLIER,









*-*-*-*-*





COMPOSITION DE LA COUR





L'affaire a été débattue le 13 Mars 2024 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Evelyne THOMASSIN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.



La Cour était composée de :



Madame Evelyne THOMASSIN, Président

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller



qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Avril 2024.





ARRÊT



Contradictoire,



Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Avril 2024,



Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




***



Faits, procédure et prétentions des parties :



La société SBO dont le gérant est monsieur [T] [B], aurait confié à la société Immo Angels, le 17 septembre 2020 un mandat de vente, sur un bâtiment dont elle était propriétaire à [Localité 10] situé [Adresse 8], qu'elle a finalement vendu à la SCI Oslo, par acte authentique du 2 avril 2021.



La société Immo Angels a été autorisée le 28 janvier 2021 sur le fondement de l'article L511-1 du code des procédures civiles d'exécution, à prendre une mesure conservatoire entre les mains de Me [R], notaire à [Localité 10] pour avoir garantie du paiement de la somme TTC de 48 000 euros correspondant à ses honoraires selon le mandat signé, ce à l'encontre de monsieur [B] ou 'de toute autre personne s'y substituant'. Le notaire déclarait le 5 février 2021 ne pas détenir de fonds. Dénonce de la saisie conservatoire a été faite le 12 février 2021 avec assignation au fond le même jour à l'encontre de monsieur [B] et de la SCI SBO.



Le 21 juillet 2021, le juge de l'exécution a autorisé une inscription d'hypothèque sur d'autres biens situés [Adresse 6] à [Localité 10], pour garantir le paiement de cette somme. L'inscription a été déposée le 18 août 2021, dénoncée à monsieur [B] le 25 août 2021.



La société Immo Angels a également déclaré sa créance le 6 septembre 2021, dans le cadre d'une saisie immobilière diligentée par la société Crédit Agricole Mutuel Alpes Provence à l'encontre de monsieur [B] sur le bien immobilier du [Adresse 6] qui a finalement fait l'objet d'une vente de gré à gré.



Sur contestation des mesures conservatoires par monsieur [B] et la société SBO, le juge de l'exécution le 12 janvier 2023 a :

- rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la SAS Immo Angels du juge de l'exécution au profit du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence,

- rejeté l'exception de connexité soulevée par la SAS Immo Angels,

- débouté monsieur [T] [B] et la SCI SBO de leur demande tendant à voir ordonner la mainlevée de la mesure de saisie-conservatoire et l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire pratiquées à leur encontre ;

- débouté la SAS Immo Angels de sa demande reconventionnelle en condamnation à une amende civile ;

- condamné in solidum monsieur [T] [B] et la SCI SBO à verser à la SAS Immo Angels la somme de 1500 euros (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, avec intérêts légaux à compter de la présente instance;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au dispositif ;

- condamné in solidum monsieur [T] [B] et la SCI SBO aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les frais liés à la mesure de saisie-conservatoire et à l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire ;

- rappelé que la décision est exécutoire par provision, malgré l'appel qui pourrait en être interjeté

-dit qu'une copie de la décision sera adressée aux huissiers instrumentaires.



Un appel a été interjeté à l'encontre de cette décision, et par arrêt du 1er février 2024 de la présente composition (pièce 50), il a notamment :

- été constaté que la cour n'était alors pas saisie de l'appel de l'ordonnance du 9 mars 2023 ayant autorisé le séquestre de la somme de 48 000 euros auprès de la CDC,

- confirmé le jugement du 12 janvier 2023, sauf concernant la mainlevée de la saisie conservatoire de créance,

Statuant à nouveau de ce chef,

- ordonné en raison de la constitution par monsieur [B] d'un nantissement conventionnel, la mainlevée de la saisie conservatoire de créance mise en oeuvre par la SAS Immo Angels entre les mains de Me [R],

Y ajoutant,

- dit recevables mais mal fondées les demandes de dommages et intérêts et de remboursement d'une somme de 4 270,59 euros présentées par monsieur [B] et la société SBO,

- rejeté lesdites demandes,

- condamné in solidum monsieur [B] et la société SBO à payer à la socité Immo Angels la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à amende civile,

- condamné in solidum monsieur [B] et la SCI SBO aux dépens d'appel.



Effectivement, par ordonnance sur requête du 9 mars 2023, à la demande de monsieur [B], le juge de l'exécution avait désigné la Caisse des Dépôts et Consignation en qualité de séquestre de la somme de 48 000 euros afin de la conserver jusqu'à la fin du litige opposant la SCI SBO et monsieur [B] à la société Immo Angels. Les termes de la décision sont les suivants :

'- Désigne la CDC conformément aux dispositions de l'article L 518-19 du Code Monétaire et Financier ; En qualité de séquestre de la somme de 48 000 euros, afin de la conserver soit jusqu'à l'intervention d'une mainlevée judiciaire par le juge de l'exécution, soit jusqu'à l'intervention d'un titre exécutoire rendu par un Tribunal statuant au fond dans le cadre du litige opposant la SCI SBO et Monsieur [T] [B] à la Société Immo Angels concernant le règlement d'une commission de 48 000 euros,

- Autorise maître [F] [R], Notaire, membre de la SCP [F] [R] et Sandrine Pasquier demeurant [Adresse 4] à [Localité 10], à se dessaisir de la somme de 48 000 euros qu'il détient à la suite de la saisie-conservatoire pratiquée par la Société Immo Angels en date du 5 février 2021 au profit de la Caisse des dépôt et consignations.'



Le 18 avril 2023, la société Immo Angels a assigné devant le juge de l'exécution d'Aix en Provence, la société SBO et monsieur [B] pour obtenir la rétractation de cette ordonnance sur requête. Elle expose qu'elle bénéficie d'un nantissement accepté par monsieur [B] avec le concours du notaire pour une somme de 48 000 euros à la suite de la vente de gré à gré, ce pour permettre la mainlevée de l'inscription d'hypothèque sur le bien immobilier vendu, et que dès lors, l'ordonnance du 9 mars 2023, fait double emploi, qu'il n'est nullement dans ses intentions de bloquer le double de la somme due et que les requerants à l'ordonnance du 9 mars 2023 n'ont présenté qu'une situation parcellaire au juge pour obtenir cette décision.



Monsieur [B] et la société SBO pour leur part, indiquaient vouloir obtenir un sursis à statuer dans l'attente de l'issue civile et pénale de ce dossier, ils contestaient le consentement aux actes, et soutenaient avoir subi une extorsion de fonds, n'avoir jamais adhéré au projet d'un nantissement supplémentaire alors qu'un saisie conservatoire pour 48 000 euros existait déjà entre les mains du notaire, mais avoir été contraints de le faire pour ne pas ruiner la vente de gré à gré espérée.



Le juge de l'exécution d'Aix en Provence le 10 août 2023, a :

- Débouté monsieur [T] [B] et la société S.C.I SBO de leur demande de sursis à statuer;

- Ordonné la rétractation de l'ordonnance n°23/91 en date du 09 mars 2023 en désignation de séquestre prise par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence ;

- Condamné solidairement monsieur [T] [B] et la société S.C.I SBO à verser à la société IMMO ANGELS la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- Condamné in solidum monsieur [T] [B] et la société S.C.I SBO aux entiers dépens de l'instance, qui comprendront ceux de l'ordonnance rétractée n°23/91.



Il retenait dans sa motivation que la saisie conservatoire de sommes entre les mains de Me [R], n'avait pas eu d'effet, que le nantissement avait reçu l'accord des parties pour garantir le paiement de la société Immo Angels laquelle allait perdre le bénéfice de l'hypothèque sur le bien immobilier vendu tandis que l'ordonnance autorisant le séquestre, n'a plus d'utilité, outre le fait qu'elle n'avait été portée à la connaissance du notaire que 6 jours après la signature de la vente immobilière de sorte que le séquestre n'était de toute façon pas effectif.



Monsieur [B] et la société SBO ont fait appel de la décision par déclaration au greffe de la cour le 25 août 2023.



Leurs moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions du 12 octobre 2023 auxquelles il est ici renvoyé, ils demandent à la cour de :

- Infirmer le jugement rendu le 10 août 2023 par le Juge de l'exécution du Tribunal judiciaire

d'aix en provence (RG 23/01885),

Et statuant à nouveau,

In limine litis :

- Ordonner le sursis à statuer dans l'attente des procédures civile et pénale en cours,

A titre principal :

- Débouter la société Immo Angels de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- Condamner la société Immo Angels à leur payer la somme de 4 000 € chacun au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la première instance,

- Condamner la société Immo Angels aux entiers dépens de première instance,

En tout état de cause :

- Condamner la société Immo Angels à payer à monsieur [T] [B] et la SCI SBO la somme de 4 000 € chacun au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

- Condamner la société Immo Angels aux entiers dépens d'appel.



Ils contestent l'authenticité du mandat de vente exclusif qui n'a pas été signé par monsieur [B], une procédure en faux est en cours devant le tribunal judiciaire. La saisie conservatoire entre les mains de Me [R] avait eu effet, puisque le 29 août 2022, il écrivait avoir toujours en comptabilité cette somme de 48 000 €. Malgré cette garantie, la société Immo Angels a voulu un nantissement notarié entre les mains de Me [H], considérant que la précédente saisie conservatoire n'était pas suffisante à garantir la créance. Monsieur [B] n'a jamais donné son accord pour séquestrer la somme malgré ce que Me [H] a pu écrire. Pour obtenir la rétractation de l'ordonnance rendue encore faut-il faire constater l'existence d'un accord, lequel n'existe pas, le consentement était contraint. C'est bien une somme de 96 000 euros qui de fait a été bloquée.







Ses moyens et prétentions étant exposés dans des conclusions du 9 février 2024, auxquelles il est renvoyé, la société Immo Angels demande à la cour de :

Vu les articles 496 alinéa 2 et 497 du Code de Procédure Civile ;

- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Juge de l'Exécution le 10 août 2023,

- Condamner solidairement monsieur [T] [B] et la SCI SBO à lui payer la somme de 3 500 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- Condamner solidairement Monsieur [T] [B] et la SCI SBO aux entiers dépens, qui comprendront ceux issus de l'ordonnance entreprise ;

- Débouter monsieur [T] [B] et la SCI SBO de toutes leurs demandes, fins et conclusions, comme étant injustes et mal fondées.



Pour obtenir l'ordonnance de séquestre, monsieur [B] et la société SBO ont tu des éléments substantiels et des échanges importants entre les parties. Lors de la saisie conservatoire le 5 février 2021, le notaire a dit n'avoir aucun fonds pour le compte de monsieur [B], et n'avoir pas à communiquer la date d'une vente immobilière. Il s'agissait du bien situé [Adresse 7], qui a été vendu le 2 avril 2021 et qui était grevé de sûretés. Une expertise judiciaire confirme que le mandat de vente exclusif est de la main de monsieur [B]. La cour saisie d'une demande de rétractation d'ordonnance n'a pas à statuer sur la prétendue contrainte lors du nantissement du 10 mars 2023, qui rend le séquestre inutile. Monsieur [B] et la société SBO immobilisent indûment une somme supplémentaire de 48 000 euros afin de lui en imputer faute ensuite. Les fonds détenus par Me [R] n'étaient pas bloqués contrairement à ce qui est affirmé, les notaires sont obligés de les transférer à la CDC après trois mois, ce pourquoi ils y avaient été transférés. Elle ne pouvait donc renoncer à l'hypothèque que contre une autre garantie efficace qu'était le nantissement conventionnel. Le premier juge a exactement stigmatisé le comportement de ses adversaires, qui ont tardé à notifié à maître [R] l'ordonnance de séquestre, qu'ils avaient eux mêmes sollicitée. Elle est de parfaite bonne foi et n'a jamais voulu obtenir une double garantie, dans un souci de transparence et de simplification elle sollicite donc la rétractation de l'ordonnance de séquestre devenue inutile.



L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 février 2024.






MOTIVATION DE LA DÉCISION :



La cour observe qu'il n'est guère fréquent, en matière de mesure d'exécution, que le créancier souhaite mettre fin à une mesure destinée à garantir son paiement tandis que le débiteur s'y oppose.



Quoiqu'il en soit, concernant le sursis à statuer, il s'agit d'un sursis facultatif, dont la cour est libre d'apprécier la pertinence et il n'y a pas lieu de différer la solution judiciaire à l'issue d'une plainte pénale contre X en extorsion ou à une procédure civile en nullité partielle d'un acte de vente qui exigeront plusieurs mois avant que la solution n'intervienne, tandis que le créancier lui même, la société Immo Angels, ne souhaite pas conserver le bénéfice d'une double garantie financière qu'elle affirme ne jamais avoir souhaité.



Saisie en rétractation d'une ordonnance sur requête du 9 mars 2023, la cour n'a pas à se prononcer sur l'existence ou non d'un accord entre les parties sur la mise en oeuvre d'un nantissement, il s'agit là d'une question de fond qui échappe à sa compétence, dans un contexte particulier qui effectivement a permis à monsieur [B] d'éviter les aléas d'une vente aux enchères de bien immobilier en obtenant la mainlevée d'une inscription d'hypothèque en contrepartie.



La société Immo Angels fait également à juste titre observer que la saisie conservatoire sur le prix de vente de l'immeuble, pratiquée entre les mains de Me [R], notaire à [Localité 10], pouvait être contestée voire tenue pour infructueuse, alors que le notaire déclarait le 5 février 2021 ne pas détenir de fonds pour le compte de monsieur [B] ou toute autre personne s'y substituant, et par la suite, n'avoir pas à communiquer la date de la vente immobilière et avoir laissé sans réponse des courriers officiels des 18 mars et 16 avril 2021, ce qui a pu l'interroger.



En conséquence de quoi, la motivation pertinente et complète du premier juge que la cour adopte justifie une confirmation de la décision déférée.



Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Immo Angels les frais irrépétibles engagés dans l'instance, une somme de 3 500 euros lui sera allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



La partie perdante supporte les dépens, ils seront à la charge des appelants qui succombent en leur prétentions.



PAR CES MOTIFS :



La cour, après en avoir délibéré, statuant par décision contradictoire, mise à disposition au greffe,



CONFIRME la décision déférée,



Y ajoutant,



CONDAMNE solidairement monsieur [B] et la SCI SBO à payer à la SAS Immo Angels la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,



CONDAMNE solidairement monsieur [B] et la SCI SBO aux entiers dépens.





LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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