29 mars 2024
Cour d'appel de Douai
RG n° 21/02066

Sociale D salle 3

Texte de la décision

ARRÊT DU

29 Mars 2024







N° 336/24



N° RG 21/02066 - N° Portalis DBVT-V-B7F-UAF7



VCL/NB

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BETHUNE

en date du

01 Décembre 2021

(RG 21/00051)









































GROSSE :



aux avocats



le 29 Mars 2024





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [D] [X]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Gérald VAIRON, avocat au barreau de BETHUNE





INTIMÉE :



S.A.S. L'IJN62

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Gaëlle DELALIEUX, avocat au barreau de BETHUNE substitué par Me Justine HASBROUCQ, avocat au barreau de LILLE







DÉBATS : à l'audience publique du 01 Février 2024



Tenue par Virginie CLAVERT

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.



GREFFIER : Angelique AZZOLINI



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ







Pierre NOUBEL



: PRÉSIDENT DE CHAMBRE





Virginie CLAVERT



: CONSEILLER





Laure BERNARD



: CONSEILLER







ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2024,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Pierre NOUBEL, Président et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 17 août 2023


EXPOSE DU LITIGE ET PRETENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES :



La SASU IJN62, entreprise de nettoyage et de vitrerie pour professionnels et particuliers, a engagé M. [D] [X] par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel de 130 heures à compter du 11 février 2019 en qualité d'agent polyvalent.



Suivant avenant prenant effet le 1er mars 2019, le temps de travail a été porté à un temps complet.



M. [D] [X] a été convoqué le 21 octobre 2019 pour un entretien préalable au licenciement pour faute grave avec notification d'une mise à pied conservatoire.



Par courrier du 7 novembre 2019, l'intéressé a été licencié pour faute grave motivée par :

- Le fait d'avoir pris une pause non autorisée, assis sur une machine de découpe de jambon le 17 octobre 2019 et d'avoir le même jour refusé de revenir sur le site pour terminer le nettoyage de fin de chantier qu'il n'avait pas achevé,

- Des négligences concernant son travail de nettoyage de vitrerie le 18 octobre 2019,

- Des pointages tronqués, avec des fins de travail mentionnées plus tardives que les heures effectivement réalisées, les 15,16 et 17 octobre «'2018'»,

- Le fait d'avoir demandé à son collègue de le déposer près de sa voiture personnelle le 18 octobre 2019 afin de repartir chez lui, alors qu'il devait nettoyer le parking de [Localité 5],

- Le fait, ce même 18 octobre 2019, de ne pas porter ses chaussures de sécurité, malgré la demande de les mettre de son responsable d'exploitation.



Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant divers rappels de salaire et indemnités consécutivement à la rupture de son contrat de travail, M. [D] [X] a saisi le 6 avril 2021 le conseil de prud'hommes de Béthune qui, par jugement du 1er décembre 2021, a rendu la décision suivante :

- dit que le licenciement de M. [D] [X] intervenu n'est pas nul ni même discriminatoire,

- juge que le licenciement pour faute grave est fondé,

- juge que le licenciement n'est pas dénué de cause réelle et sérieuse,

-déboute M. [X] de toutes ses demandes de dommages et intérêts et d'indemnités,

- déboute M. [X] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- déboute la SAS IJN62 de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamne M. [X] aux entiers dépens.



M. [D] [X] a relevé appel de ce jugement, par déclaration électronique du 16 décembre 2021.



Vu les dernières conclusions notifiées par RPVA le 12 janvier 2022 au terme desquelles M. [D] [X] demande à la cour de :

- annuler la décision et, à tout le moins, la réformer ou l'infirmer,

-juger que le licenciement intervenu à l'égard de M. [X] est discriminatoire et donc nul,

- prononcer la nullité de la rupture du contrat de travail,

- juger que l'employeur s'est rendu coupable d'une violation de son obligation de santé au travail,

- annuler la mise à pied et condamner l'employeur à lui payer la somme de 1224,43 euros au titre des absences indument prélevées,

- condamner l'employeur au paiement des sommes suivantes :

-dommages et intérêts pour violation de l'obligation de santé au travail : 10 000 euros,

- dommages et intérêts pour licenciement nul : 15 000 euros,

- indemnité compensatrice de préavis un mois de salaire : 1597,09 euros,

- indemnité de licenciement : 1597,09x1/4 : 399,27 euros,

Subsidiairement,

- juger que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse,

- condamner l'employeur à lui payer :

- dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 8000 euros,

- dommages et intérêts pour violation de l'obligation de santé au travail : 10 000 euros,

- indemnité compensatrice de préavis un mois de salaire : 1597,09 euros,

- indemnité de licenciement : 1597,09x1/4 : 399,27 euros,

- remboursement de la mise à pied : 372,66 euros,

- prélèvement au titre des absences : 1224, 43 euros,

- condamner la partie défenderesse aux entiers frais et dépens ainsi qu'à lui payer une somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Au soutien de ses prétentions, M. [D] [X] expose que :

-Le conseil de prud'hommes n'a pas répondu aux conclusions du salarié concernant les problématiques liées au licenciement et ne comporte pas de motivation, ce qui constitue une cause de nullité du jugement.

-Son licenciement est abusif et dénué de cause réelle et sérieuse, en ce qu'il conteste l'intégralité des faits reprochés et qu'il n'avait jamais auparavant fait l'objet d'une sanction disciplinaire.

-En réalité, l'employeur a prémédité le licenciement en raison de ses problèmes de santé (tendinopathie des tendons supra épineux) l'ayant conduit à un arrêt de travail à compter d'août 2019, ce d'autant que le médecin du travail avait préconisé des aménagements de son poste et des restrictions ce qui avait été porté à la connaissance de l'employeur.

-Il a, ainsi, subi une discrimination liée à son état de santé, l'employeur ayant également manqué à son obligation de santé au travail.

- Son licenciement est, par conséquent, frappé de nullité avec toutes conséquences financières de droit.

- Subsidiairement, les plafonnements prévus par les ordonnances Macron doivent être écartés en ce qu'ils ne sont pas conformes au droit européen et notamment à l'article 158 de la convention internationale du travail.

- Les attestations produites émanent en tout état de cause de membres de la direction ou encore de salariés placés sous la subordination de l'employeur.



Vu les dernières conclusions notifiées par RPVA le 25 janvier 2024, dans lesquelles la SASU IJN62, intimée et appelante incidente, demande à la cour de :

-confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [D] [X] intervenu n'était pas nul ni même discriminatoire, en ce qu'il a jugé que le licenciement pour faute grave était fondé, en ce qu'il a jugé que le licenciement n'était pas dénué de cause réelle et sérieuse, en ce qu'il a débouté M. [X] de toutes ses demandes de dommages et intérêts et d'indemnités, en ce qu'il a débouté M. [X] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et en ce qu'il a condamné M. [X] aux dépens ;

- l'infirmer en ce qu'il a débouté la SASU IJN 62 de sa demande d'article 700 ;









Et statuant à nouveau :

-dire et juger la SASU IJN62 recevable et bien fondée en son appel incident et,

-débouter M. [X] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [X] au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 en première instance et à la même somme en cause d'appel,

-le condamner aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.



A l'appui de ses prétentions, la SASU IJN62 soutient que :

- M. [X] avait fait l'objet de deux avertissements, lesquels lui avait été notifiés en recommandé mais dont il n'a pas accusé réception.

- Le 14 octobre 2019, le médecin du travail a émis une attestation de suivi indiquant que l'état de santé du salarié était compatible avec la reprise de son activité sans aucune restriction.

- Les faits mentionnés dans la lettre de licenciement sont démontrés et ne sont pas prescrits, nonobstant une erreur matérielle concernant l'année. Ils justifiaient de la rupture du contrat de travail pour faute grave.

-Aucune discrimination liée à l'état de santé n'est établie et le médecin du travail avait conclu le 14 octobre 2019 à une compatibilité de l'état de santé avec une reprise du poste de travail, avis non contesté par le salarié.

-Les fiches de liaison antérieures n'étaient, en outre, pas remises à l'employeur, ce compte tenu du secret médical.

- Le licenciement est sans lien avec des problèmes de santé, ce d'autant que la pérennité desdits problèmes lors du licenciement n'est nullement établie.

- Aucun manquement n'est établi concernant l'obligation de santé au travail, les blessures de M. [X] trouvant leur origine dans un accident d'ordre privé de l'intéressé et aucune restriction médicale n'ayant été émise par la médecine du travail.

- M. [X] doit, ainsi, être débouté de ses demandes indemnitaires et ne justifie pas de sa situation professionnelle et financière, ce alors que les barèmes doivent trouver application.



La clôture a été prononcée par ordonnance du 17 août 2023.



Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux dernières conclusions susvisées.






MOTIFS DE LA DECISION :



Sur la demande d'annulation du jugement :



Conformément aux dispositions des articles 455 et 458 du code de procédure civile, un jugement doit être motivé et doit répondre aux moyens invoqués, ce à peine de nullité.



M. [D] [X] se prévaut de la nullité du jugement au regard de l'absence de motivation et du défaut de réponse aux moyens soulevés particulièrement concernant les causes du licenciement.



Il résulte de l'examen des motifs du jugement que le conseil de prud'hommes de Béthune n'a pas répondu aux moyens soulevés par le salarié concernant le licenciement pour faute grave dont il a fait l'objet, se contentant d'indiquer «'au vu du dossier et des pièces, le conseil a validé le licenciement pour faute grave'».





En outre, et de manière générale, les différentes demandes n'ont fait l'objet d'aucune motivation.



Il convient, par suite, d'annuler le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Béthune le 1er décembre 2021.



Sur la discrimination liée à l'état de santé :



En application de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte en raison, notamment, de son état de santé.



En application des articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail, il appartient au salarié qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte de présenter des éléments de fait laissant supposer son existence. Il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent présumer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination étant rappelé que l'existence d'une discrimination n'implique pas nécessairement une comparaison avec la situation d'autres salariés.



En l'espèce, M. [D] [X] soutient avoir fait l'objet d'une discrimination liée à son état de santé ayant conduit à son licenciement, l'employeur n'ayant pris aucune mesure d'adaptation de son poste de travail.



Le salarié justifie, ainsi, de ce qu'il s'est vu diagnostiquer une tendinopathie des tendons supra- épineux droits.



Il communique, ainsi, plusieurs fiches de liaison au terme desquelles :

- le 3 septembre 2019, le Dr [Z], médecin du travail retient une incompatibilité temporaire au poste de travail, outre le fait que le salarié relève de la médecine de soins et la nécessité de le revoir à la reprise,

- le 30 septembre 2019, ce même médecin du travail retient un état de santé incompatible temporairement avec le poste de travail après échange avec l'employeur du fait de l'absence de poste à proposer avec les aménagements suivants :

- Limiter les activités avec les bras en élévation et pas d'acticités nécessitant les bras au-dessus du plan des épaules,

- Limiter le port de charges à 15kg

- Limiter l'utilisation de matériel vibrant (monobrosse).



M. [D] [X] produit également un courrier du médecin du travail à son médecin traitant et daté du le 30 septembre 2019 évoquant la persistance d'une symptomatologie douloureuse de l'épaule droite qui s'est, toutefois, nettement améliorée, la possibilité d'une récidive à court terme en cas de reprise du travail, faute de possibilité d'aménagement du poste et la nécessité de poursuivre l'arrêt de travail.



Enfin, le salarié indique que son poste de travail n'a fait l'objet d'aucun aménagement lors de sa reprise le 14 octobre 2019, l'employeur ayant décidé de son licenciement.



[D] [X] produit, dès lors des éléments de faits laissant supposer l'existence d'une discrimination liée à l'état de santé.







De son côté, la société à qui il incombe de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, produit l'attestation de suivi par la médecine du travail établie en date du 14 octobre 2019. Ainsi, dans le cadre de la visite de reprise dont il a fait l'objet, M. [D] [X] a fait l'objet d'un avis d'aptitude libellé de la façon suivante : «'état de santé compatible avec une reprise au poste de travail Dr [G] [Z]'».



La société L'IJN62 démontre, par suite, qu'aucun aménagement n'était plus préconisé par le médecin du travail lors de la visite de reprise du salarié à l'issue de son arrêt maladie.



L'employeur justifie également de ce que la pathologie contractée par M. [X] trouvait son origine dans un accident survenu, à la piscine, au cours de la vie personnelle du salarié (cf échanges de SMS entre le salarié et son supérieur).



Dans le même sens, la société L'IJN62 rapporte la preuve de l'absence totale de lien entre le licenciement et l'état de santé de l'appelant, faute de persistance d'un état pathologique de ce dernier.



En outre, le fait pour la lettre de licenciement de rappeler l'absence d'aptitude avec réserves de l'état de santé de M. [X] en réponse au refus de ce dernier d'exécuter certaines tâches alors assumées par ses collègues, ne constitue là encore nullement une quelconque discrimination, plusieurs salariés et collègues de travail de l'intéressé attestant, en effet, soit de son refus de réaliser certaines tâches soit de sa mauvaise exécution et de son départ anticipé des chantiers, conduisant alors ses collègues à devoir assumer à sa place la reprise des travaux mal exécutés par ce dernier qui ne justifiait alors d'aucune difficulté médicale.



Par conséquent, la société L'IJN 62 démontre que la reprise du travail par M. [X] sans aménagement puis son licenciement se trouvent justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.



M. [D] [X] est, par conséquent, débouté de sa demande de reconnaissance de l'existence d'une discrimination liée à l'état de santé, de sa demande subséquente de dommages et intérêts et de sa demande de nullité du licenciement.



Sur l'obligation de santé au travail :



Aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L4161-1, des actions d'information et de formation, et la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.



Respecte l'obligation de sécurité, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail (actions de prévention, d'information, de formation...).



Il incombe à la société L'IJN62 de rapporter la preuve du respect de cette obligation.





En l'espèce, M. [D] [X] se prévaut du manquement de l'employeur à son obligation de santé au travail en lien avec l'absence d'aménagement de son poste de travail à son retour d'arrêt de travail.



Néanmoins, il résulte des développements repris ci-dessus que l'employeur démontre que l'avis médical de reprise de M. [X] du 14 octobre 2019 n'a fait état d'aucune réserve ni aménagement nécessaire du poste de travail.



Et le salarié ne peut se prévaloir des aménagements préconisés par le médecin du travail pendant l'arrêt de travail et alors que la symptomatologie de la maladie contractée par l'intéressée perdurait ayant conduit à la prolongation de la période d'arrêt.



Aucun manquement à l'obligation de santé au travail n'est, par conséquent, établi et M. [X] est, par suite, débouté de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de santé au travail.



Sur le licenciement pour faute grave et la mise à pied conservatoire :



Il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur. Il forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, si besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; afin de déterminer si les faits imputés au salarié sont ou non établis, les juges du fond apprécient souverainement la régularité et la valeur probante des éléments de preuve qui leur sont soumis. La lettre de licenciement fixe les limites du litige.



La faute grave est, par ailleurs, entendue comme la faute résultant d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Les juges du fond, pour retenir la faute grave, doivent, ainsi, caractériser en quoi le ou les faits reprochés au salarié rendent impossible son maintien dans l'entreprise. Alors que la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'incombe pas particulièrement à l'une ou l'autre des parties, il revient en revanche à l'employeur d'apporter la preuve de la faute grave qu'il reproche au salarié ; en cas de doute il profite au salarié.



En l'espèce, il résulte de la lettre de licenciement du 7 novembre 2019 que M. [D] [X] a été licencié pour :

- avoir fait une pause non autorisée, assis sur une machine de découpe de jambon le 17 octobre 2019 et d'avoir le même jour refusé de revenir sur le site pour terminer le nettoyage de fin de chantier qu'il n'avait pas achevé,

- Des négligences concernant son travail de nettoyage de vitrerie le 18 octobre 2019,

- Des pointages tronqués, avec des fins de travail mentionnées plus tardives que les heures effectivement réalisées, les 15,16 et 17 octobre « 2018 »,

- avoir demandé à son collègue de le déposer près de sa voiture personnelle le 18 octobre 2019 afin de repartir chez lui, alors qu'il devait nettoyer le parking de [Localité 5],

- le 18 octobre 2019, ne pas avoir porté ses chaussures de sécurité, malgré la demande de les mettre de son responsable d'exploitation.











En premier lieu, il est relevé qu'aucune prescription ne se trouve encourue nonobstant l'erreur matérielle affectant la lettre de licenciement laquelle mentionne à une unique reprise les 15,16 et 17 octobre 2018 au lieu et place de l'année 2019, reprise, par ailleurs, à chaque fois pour ces mêmes dates, ladite erreur matérielle se trouvant confortée par le fait que M. [X] n'a été engagée par la société L'IJN62 qu'à compter de février 2019.



Surtout, l'employeur démontre, par la production de plusieurs attestations, que le 17 octobre 2019, sur le site du magasin Grand Frais d'[Localité 6], M. [D] [X] s'est mis en danger en «'s'affalant'» sur une machine à découper le jambon dans le cadre d'une pause non prévue, a négligé le travail de vitrerie qui lui avait été confié, a quitté le site plus tôt et a refusé de revenir sur ledit site afin de reprendre les malfaçons (attestation de M. [L] [N]), conduisant l'employeur à confier ces travaux de reprise à deux de ses collègues de travail qui en témoignent (attestations de MM. [G] [O] et [H] [I]).



Les feuilles de pointage produites démontrent, en outre, que M. [X] a déclaré avoir quitté son travail à 18h alors qu'en réalité, son départ était intervenu à 16h35.



L'employeur justifie, en outre, de ce que le 18 octobre 2019, le salarié a demandé à son collègue, M. [C] [V] qui en atteste, de le redéposer pour prendre son véhicule personnel à [Localité 3], ne souhaitant pas se rendre sur le dernier chantier de nettoyage d'un parking qui leur avait été confié et situé à [Localité 5]. Finalement incité par son employeur par téléphone à se rendre sur ledit chantier, celui-ci s'est présenté sans ses chaussures de sécurité, refusant alors de les mettre et déclarant au responsable d'exploitation « qu'il n'était pas nécessaire de les porter » (attestation de M. [L] [N]).



Ces agissements sont, en outre, intervenus après que M. [D] [X] s'est vu adresser deux avertissements les 5 juin et 23 août 2019 respectivement pour travail bâclé, emploi d'un langage grossier en présence d'un client, plainte auprès d'un client d'avoir du matériel détérioré et absence injustifiée, sanctions adressées en recommandé et qu'il n'était pas allé retirer et dont la société L'IJN62 justifie également du bien fondé par la production d'un mail de plainte d'un client et du témoignage de collègues de travail.



Ces agissements notifiés dans la lettre de licenciement du 7 novembre 2019 constituent, dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, une violation grave des obligations découlant du contrat de travail à l'égard de l'employeur, d'une importance telle qu'elle a rendu impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, y compris pendant la durée du préavis.



La mise à pied conservatoire se trouvait, en outre, pleinement justifiée et il n'y a pas lieu de l'annuler.



La faute grave est, par suite, établie et le licenciement pour faute grave avec mise à pied conservatoire est fondé.



M. [D] [X] est, par suite, débouté de ses demandes financières relatives à l'indemnité de préavis et des congés payés y afférents, au rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, à l'indemnité de licenciement et aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.







Sur les absences indument prélevées :



Il incombe à l'employeur de fournir au salarié le travail convenu, pour la durée d'emploi convenue et de lui payer la rémunération convenue.



L'employeur ne peut valablement réduire le montant de la rémunération ou opérer une retenue sur salaire qu'en cas d'absence injustifiée, de congé sans solde demandé et autorisé, de mise à pied conservatoire ou disciplinaire.



En l'espèce, M. [D] [X] sollicite la condamnation de l'employeur au paiement de la somme de 1224,43 euros qu'il estime indument prélevée sur son solde de tout compte sous le libellé «'absence pour entrée ou sortie'».



Il résulte de l'annexe au solde de tout compte et du bulletin de salaire du mois de novembre 2019 que la somme de 1224,43 euros a, en effet, été déduite de son bulletin de salaire du mois de novembre 2019 correspondant à 116,28 heures de travail.



L'analyse des pièces précitées permet, toutefois, de relever que cette mention correspond à l'intégration comptable de la sortie de M. [X] des effectifs de l'entreprise à compter du 7 novembre 2019, suite à son licenciement pour faute grave.



Il en résulte que cette « retenue » ne se fonde nullement sur une absence injustifiée mais bien sur la rupture du contrat de travail.



M. [D] [X] est, par conséquent, débouté de sa demande en paiement de la somme de 1224,43 euros au titre de la «'retenue pour absences injustifiées ».



Sur les autres demandes :



M. [D] [X] est condamné aux dépens de première instance et d'appel.



L'équité commande de laisser à chaque partie la charge des frais irrépétibles par elle exposés tant en première instance qu'en cause d'appel.







PAR CES MOTIFS :



La COUR,



ANNULE le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Béthune le 1er décembre 2021 ;



DIT que M. [D] [X] n'a pas subi de discrimination liée à son état de santé ;



DIT que la société L'IJN 62 n'a pas manqué à son obligation de santé au travail ;



DEBOUTE M. [D] [X] de sa demande de nullité du licenciement ;



DIT que le licenciement pour faute grave de M. [D] [X] est fondé ;











DEBOUTE M. [D] [X] de sa demande d'annulation de la mise à pied conservatoire et de l'ensemble de ses demandes financières ;



CONDAMNE M. [D] [X] aux dépens de première instance et d'appel ;



LAISSE à chaque partie la charge des frais irrépétibles par elle exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ;



DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires.













LE GREFFIER







Serge LAWECKI







LE PRESIDENT







Pierre NOUBEL

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