23 février 2023
Cour d'appel de Rouen
RG n° 22/00343

Ch. civile et commerciale

Texte de la décision

N° RG 22/00343 - N° Portalis DBV2-V-B7G-I7W4







COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE



ARRET DU 23 FEVRIER 2023









DÉCISION DÉFÉRÉE :



2021006038

Ordonnance du juge commissaire de Rouen du 13 Janvier 2022





APPELANTE :



S.A.S. EIF INNOVATION

[Adresse 8]

[Localité 6]



représentée par Me Stéphane SELEGNY de la SELARL AXLAW, avocat au barreau de ROUEN







INTIMES :



Maître [E] [B]

[Adresse 1]

[Localité 7]



S.A.S. SAS REMADE

[Adresse 2]

[Localité 5]





S.E.L.A.R.L. SBCMJ

[Adresse 3]

[Localité 4]



représentées par Me Camille PERCHERON de la SCP Ince & Co France, avocat au barreau du HAVRE























COMPOSITION DE LA COUR  :



En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 06 Décembre 2022 sans opposition des avocats devant Madame FOUCHER-GROS, Présidente, rapporteur,



Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :



Mme FOUCHER-GROS, Présidente

M. URBANO, Conseiller

Mme MENARD-GOGIBU, Conseillère





GREFFIER LORS DES DEBATS :



Mme DEVELET, Greffière





DEBATS :



A l'audience publique du 06 Décembre 2022, où l'affaire a été mise en délibéré au 23 Février 2023





ARRET :



CONTRADICTOIRE



Rendu publiquement le 23 Février 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,



signé par Mme Foucher-Gros, Présidente et par Mme Develet, Greffière.






*

* *





EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE



La société EIF Inovation est un cabinet de conseil expert dans le financement de l'innovation des entreprises.



La société Remade SAS avait pour activité la vente, la revente, la réparation et le reconditionnement d'appareils de téléphonie mobile.



Le 15 janvier 2015, la société MY2MI a signé avec la société EIF un contrat d'audit valorisation. Les factures de prestations n'ayant pas été intégralement réglées, les société EIF Inovation et Remade sont convenues d'un protocole d'accord signé les 29 avril et 2 mai 2019 aux termes duquel la société Remade a reconnu être débitrice d'une somme de 687 778,36 € que la société EIF Inovation a accepté d'échelonner.



Par jugement du 30 septembre 2019, le tribunal de commerce spécialisé de Rouen a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Remade, SAS. Ce même jugement a fixé la date de cessation de paiement au 26 septembre 2019, désigné la SELARL FHB prise en la personne de Maître [D] [S] et de Maître [O] [A] ainsi que la SELARL AJIRE prise en la personne de Maître [J] [H] en qualité de co-administrateurs judiciaires, d'une part et la SELARL SBCMJ prise en la personne de Maître [I] [C] ainsi que Maître [E] [B] en qualité de co-mandataires judiciaires, d'autre part.



Par jugements du même jour, le tribunal a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la quasi-intégralité des sociétés du groupe Remade, prononcé la liquidation directe des sociétés VDD et Resmart dont le redressement était manifestement impossible et désigné la SELARL SBCMJ prise en la personne de Maître [I] [C] et Maître [E] [B] en qualité de co-liquidateurs.



Les procédure de redressement ont été converties quelques semaines ou mois plus tard en procédures de liquidation judiciaire et le tribunal a désigné conjointement la SELARL SBCMJ prise en la personne de Maître [I] [C] et Maître [E] [B] en qualité de liquidateurs.



Par ordonnance du 26 mai 2020, le juge commissaire, sur la demande des co-liquidateurs a désigné le cabinet TGS aux fins d'examen de la situation fiscale de la société Remade.



La société EIF Inovation a déclaré, le 15 novembre 2019, sa créance au passif de la société Remade pour la somme de 584 311 € à titre chirographaire se décomposant comme suit :







Créances déclarées



Numéros des factures



Date d'émission



Date d'échéance



Montant en euros HT



Montant en euros TTC





Au titre du protocole d'accord transactionnel







02 /05/2019



15/06/19



198148,63



237.778,36





Intérêts acquis au taux annuel de 0,87 % sur la créance au titre du protocole











30/09/19



107,68



107,68





Frais de procédure (signification de l'ordonnance portant injonction de payer)









39644









08 /02/2019









08/02/19









59,15









87,97





Débours sur la signification de l'ordonnance portant injonction de payer







39644







08 /02/2019







08 /02/2019







16,99







16,99





Facture note d'honoraire -Crédit impôt Recherche 2018







2019/0363







29/06/19







30/04/19







76.700







92.040





Facture note d'honoraire -Crédit impôt Recherche 2018-Complément



2019/0441



30/04/19



31/05/19



9.900



11.880





Facture note d'honoraires-Audit et Valorisation de R&D 2018



2019/0730



31/07/19



31/08/19



202.000



242.400





TOTAUX















486.932,45



584.311,00













Cette déclaration a été contestée a hauteur de 346 532,64 euros, par lettre en date du 31 décembre 2020, Me [B], invitant le créancier à lui adresser les éléments permettant de justi'er de la réalisation des prestations facturées les 29 mars 2019, 30 avril 2019 et 31 juillet 2019 et précisant qu'en tout état de cause, la société Remade ne reconnaissait devoir a la société EIF Innovation que la somme de 581.260 euros à la date du jugement d'ouverture.



La société EIF Innovation, a expliqué que :



-les notes d'honoraires des 29 mars et 30 avril 2019 correspondaient aux diligences effectuées par la société EIF Innovation entre novembre 2018 et avril 2019 pour l'audit des activités de R&D de la société Remade au sein de ses locaux, pour le calcul du crédit d'impôt recherche et l'établissement du feuillet 'scal correspondant, pour l'établissement du rapport d'audit et la validation par un 'scaliste associé,



-la note d'honoraires du 31 juillet 2019 correspondait aux diligences réalisées par la société EIF Innovation pour l'établissement du dossier de valorisation de la recherche effectuée par la société Remade,



Elle a précisé que la différence entre le montant déclaré et celui reconnu par la société Remade correspondait aux pénalités de retard.



Les parties ont été convoquées à 1'audience du 18 novembre 2021 ou 1'affaire a été plaidée



Par ordonnance du 13 janvier 2022, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Rouen a :



-admis la société Eif Innovation au passif de la société Remade, à titre chirographaire, pour les sommes de :



-87,97 euros au titre des frais de signification de l'ordonnance d'injonction de payer,



-237.778,36 euros au titre du protocole d'accord signé le 29 avril 2019 et homologué,



-107,68 euros au titre des intérêts acquis au taux annuel de 0,87% sur la créance résultant du protocole,



-rejeté le surplus des demandes d'admission de la société Eif Innovation,



-dit que le greffier notifiera la présente aux parties et qu'il en fera mention sur l'état des créances,



-passé les dépens en frais privilégiés de la procédure collective.





La SAS Eif Innovation a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 28 janvier 2022.



L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 mai 2022.



Par jugement arrêt avant dire droit du 29 septembre 2022 la cour a :



-renvoyé l'affaire à l'audience du 6 décembre 2022 à 9h30 ;



-invité les parties pour cette date à présenter leurs observations sur le point suivant uniquement : La cour envisage de soulever d'office le moyen tiré de ce que le juge commissaire n'est pas compétent pour statuer sur la validité du contrat qui est le fondement de la créance contestée, dans l'hypothèse où elle considérerait que le moyen invoqué par les co-liquidateurs et la SAS Remade est une contestation sérieuse.



-sursis à statuer sur les demandes et les dépens.



Par note du 23 novembre 2022 la société EIF Innovation a observé que :



La société Remade et ses co-liquidateurs, pour s'opposer à l'admission au passif de la créance de la société EIF, invoquent la nullité des conventions ayant existé entre les sociétés Remade et EIF dont le contenu serait illicite. Ils avaient annoncé engager une action en nullité du contrat « afin de voir ordonner la restitution des sommes réglées en cours de conciliation au titre du « protocole » signé par l'ancienne direction de la société Remade » qui n'a pas été introduite.

A ce jour, aucune décision ayant autorité de chose n'a qualifié d'illicite le contenu des contrats conclus entre les sociétés EIF et Remade et le juge-commissaire est incompétent pour ce faire.

La Cour, dotée des pouvoirs du juge-commissaire, ne peut pas plus prononcer le rejet de la créance de la société EIF sur la base de l'exception de nullité avancée par les intimés. Aussi, dans l'hypothèse où le moyen invoqué par les co-liquidateurs et la SAS Remade serait considéré comme une contestation sérieuse, il ressort de l'article R. 624-5 du code de commerce que la cour, dotée des pouvoirs du juge-commissaire, est tenue de surseoir à statuer sur l'admission de celle-ci, après avoir invité les parties à saisir le juge compétent.



Par note du 7 octobre 2022 Me [B], la SAS Remade et la Selarl SBMJ ont observé que :



Le juge commissaire est incontestablement incompétent pour annuler le contrat qui fonde la demande de la société EIF et pour ordonner la remise des parties en leur état initial.



Toutefois, les liquidateurs ne sollicitent pas de la cour, dotée des pouvoirs du juge commissaire, qu'elle annule le contrat avec toutes conséquences de droit mais qu'elle examine, après avoir tranché la difficulté liée la légitimité de la demande, l'exception de nullité avancée par les liquidateurs pour s'opposer à l'admission au passif de la société EIF puisque sa demande est assise sur un contrat dont la cause est manifestement illicite (nullité absolue) et qui, par suite, ne peut être dotée d'aucun effet.

L'exception de nullité est perpétuelle, il s'agit d'une défense au fond et non d'une exception procédurale et elle est réservée au défendeur pour s'opposer aux réclamations du demandeur lorsque la demande en justice est assise sur un acte nul.

La cour, en ce qu'elle est chargée d'admettre ou rejeter une créance au vu des justificatifs qui lui sont produits, ne pourra que rejeter une créance assise sur un contrat dont la cause est manifestement illicite, exactement comme elle l'aurait fait si aucun justificatif n'avait été produit.



A cela s'ajoute que la société EIF est demanderesse au procès et doit justifier, comme tout justiciable et à peine d'irrecevabilité, d'un intérêt légitime pour agir et que les liquidateurs opposent à raison que n'est pas légitime, au sens de l'article 31 du code de procédure civile, la demande en paiement résultant d'un contrat conclu en fraude de la loi.









EXPOSE DES PRETENTIONS DES PARTIES :



Vu les conclusions du 5 mai 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et arguments de la SAS Eif Innovation qui demande à la cour de :



-déclarer la société Eif Innovation recevable et bien fondée en son appel,



-infirmer l'ordonnance rendue par le tribunal de commerce de Rouen le 13 janvier 2022 en ce qu'elle a rejeté la demande d'admission de la société Eif Innovation au passif de la société Remade pour les sommes de :



-92.040 euros au titre de la facture d'honoraires du 29 mars 2019,

-11.880 euros au titre de la facture d'honoraires du 30 avril 2019,

-242.400 euros au titre de la facture d'honoraires du 31 juillet 2019,



-confirmer l'ordonnance rendue par le tribunal de commerce de Rouen le 13 janvier 2022 en ce qu'elle a admis la société Eif Innovation au passif de la société Remade, à titre chirographaire, pour les sommes de :



-87,97 euros au titre des frais de signification de l'ordonnance d'injonction de payer,

-237.778,36 euros au titre du protocole d'accord signé le 29 avril 2019 et homologué,

-107,68 euros au titre des intérêts acquis au taux annuel de 0,87 % sur la créance résultant du protocole,



Et statuant à nouveau :



A titre principal,



-juger le rapport de TGS inopposable à la société Eif Innovation en ce qu'il est dépourvu de tout caractère contradictoire à son égard,



-débouter la SAS Remade, Me [B] et la SELARL SBCMJ, ès qualités, de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,



-juger que les prestations facturées en date du 29 mars 2019, 30 avril 2019 et 31 juillet 2019 ont bien été réalisées,



-admettre la société Eif Innovation au passif de la société Remade, à titre chirographaire, pour les sommes de :



-92.040 euros au titre de la facture d'honoraires du 29 mars 2019,

-11.880 euros au titre de la facture d'honoraires du 30 avril 2019,

-242.400 euros au titre de la facture d'honoraires du 31 juillet 2019,



En tout état de cause,



-condamner la SAS Remade, Me [B] et la SELARL SBCMJ, ès qualités, à payer à la société Eif Innovation d'une somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,



-condamner la SAS Remade, Me [B] et la SELARL SBCMJ, ès qualités, au paiement des dépens.



La société EIF Innovation reprend les moyens développés devant le premier juge et soutient que :



*la fraude invoqué par Me [B], la société SBCM3 et la société Remade n'est pas démontrée, le rapport sur lequel s'appuient les intimés n'est pas contradictoire, seul un extrait en est communiqué et ce rapport n'est pas objectif ;



*le juge commissaire n'a pas de compétence pour se prononcer sur la nullité des conventions passées entre les sociétés Remade et EIF ; aucune action en nullité n'a été engagée et elle ne peut l'être, dans le cadre des procédures collectives, que sur le fondement des articles L632-1 du code de commerce. De plus, ces contrats n'ont aucun contenu illicite.



Vu les conclusions du 9 mai 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et arguments de Me [B], ès-qualités de liquidateur de la société Remade, la SELARL SBCMJ prise en la personne de Me [C] et la société Remade qui demandent à la cour de :



-réformer l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a déclaré la société Eif Innovation recevable en sa demande et l'a admis au passif de la société Remade pour la somme de 237.974,01 euros,



-débouter la société Eif Innovation de sa demande d'admission au passif de la société Remade pour la somme de 584.311 euros,



-condamner la société Eif Innovation à payer à Me [B] ès qualités ainsi qu'à la SELARL BCMJ prise en la personne de Me [C] la somme de 20.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure,



-condamner la société Eif Innovation aux entiers frais et dépens de la présente instance,



Subsidiairement,



-confirmer purement et simplement l'ordonnance dont appel,



-condamner la société Eif Innovation à payer à Me [B] ès qualités ainsi qu'à la SELARL BCMJ prise en la personne de Me [C] la somme de 20.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure,



-condamner la même aux entiers frais et dépens.



Me [B], la SELARL SBCMJ prise en la personne de Me [C] et la société Remade soutiennent que :



*antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, les sociétés Remade et Remade Group avaient obtenu du président du tribunal de commerce de Coutances l'ouverture d'une procédure de concliliation, qui s'est terminée par un protocole de conciliation homologué le 25 juin 2019. Ce protocole a prévu l'injection de 40 000 000 € par émission d'actions ou compensation avec des créances issues de précédentes levées de fonds. La nouvelle direction a expliqué avoir découvert de graves anomalies de gestion liées à la présentation d'un chiffre d'affaires ne correspondant pas au volume réel d'activité. Elle a dénoncé la mise en 'uvre de ventes circulaires sans mouvement de stocks associés et l'exécution d'un contrat de distribution exclusive avec la société Modelabs dans le sens défavorable à Remade et en violation des stipulations contractuelles. C'est dans ce contexte qu'il a été fait droit à la demande d'expertise des co-liquidateurs et que le cabinet TGS a été désigné.



*l'expert a déposé son rapport le 13 octobre 2021. Il en ressort des manipulations comptables qui ont conduit les co-liquidateurs des sociétés Remade, Remade Group et VDD a assigner leurs dirigeants en responsabilité pour insuffisance d'actifs.



*il ressort du rapport de l'expert que la société EIF Innovation a activement participé à l'une des fraudes commises par l'ancienne direction au préjudice de l'administration fiscale. Cette dernière n'étant pas dupe et ayant rejeté les Crédits d'Impôt Recherche (CIR) déclarés à hauteur de 85 %, la société Remade a demandé des avoirs à la société EIF Innovation qui les lui a refusés. C'est dans ce contexte que les parties se sont rapprochées et ont conclu un accord transactionnel en avril 2019.



*la société EIF fonde sa demande sur un contrat dont l'objet est illicite puisqu'il n'était pas d'assister la société Remade dans le calcul et la déclaration des CIR auxquels elle pouvait légalement prétendre mais de « valoriser » des énormes volumes de retours d'invendus en les capitalisant, dans le seul but de générer des CIR massifs et frauduleux et de fausser la comptabilité, falsification indispensable à la levée de fonds qui se préparait. Cette illicéité du contrat entache d'illicéité le protocole qui le termine.



*l'expertise diligentée en matière de procédure collective échappe au droit commun du contradictoire en matière d'expertise.



*la société EIF Innovation ne justifie pas du quantum de sa créance.






MOTIVATION DE LA DECISION :



Aux termes de l'article L624-2 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux procédures collectives ouvertes avant le 1er octobre 2021 : « Au vu des propositions du mandataire judiciaire, le juge-commissaire décide de l'admission ou du rejet des créances ou constate soit qu'une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence. En l'absence de contestation sérieuse, le juge-commissaire a également compétence, dans les limites de la compétence matérielle de la juridiction qui l'a désigné, pour statuer sur tout moyen opposé à la demande d'admission. »





Sur la créance déclarée à hauteur de 237 778,36 euros au titre du protocole transactionnel :



Le protocole transactionnel du 2 mai 2019 est revêtu de la force exécutoire par l'ordonnance du 20 septembre 2019 du président du tribunal de commerce de Paris.

La société Remade et ses liquidateurs produisent l'extrait du rapport de la société TGS relatif au rôle du cabinet EIF. Le technicien critique le protocole transactionnel qu'il qualifie d'approximatif, et le coût des prestations de EIF au regard du résultat obtenu. Ce rapport n'est pas à lui seul suffisant pour contester sérieusement une créance constatée dans un titre exécutoire.

Il ressort du protocole que la société Remade devait apurer sa dette au moyen de 4 versements de 150 000 euros à échéances respectives des 30 avril, 31 mai, 15 juin, 30 juin et 31juillet 2019 et un versement de 87 778,36 euros à échéance du 31 juillet 2019. La somme de 237 778,36 euros correspond au solde impayé à l'échéance du 30 juin 2019.

La société Remade ne justifiant ni même n'alléguant que les deux dernières échéances ont été payées, l'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle a admis au passif de la société Remade les sommes de 237 778,36 euros et de 107,68 euros au titre des intérêts acquis sur la créance résultant du protocole.



Sur les factures d'honoraires du 29 mars (92 040 euros) , 30 avril (11 880 euros) :

La société EIF Inovation soutient que ces factures correspondent aux diligences qu'elle a effectuées entre les mois de novembre 2018 et avril 2019 pour l'audit des activités de R&D de la société Remade.

Le seul contrat de valorisation de la recherche qu'elle produit aux débats est daté du 22 mars 2019. Il prévoit que :

-les honoraires de la société EIF sont du montant forfaitaire de 150 000 euros jusqu'au montant de 3 Meuro de CIR déclaré puis plafonnés à 12 % au-delà de 3 Meuro.

-la rémunération sera facturée en deux fois :

*30 % Lors du dépôt du Feuillet Cerfa et du rapport d'audit,

*70 % lors de la remise du dossier de valorisation de la recherche

-la rémunération concerne uniquement les années sur lesquelles aura porté l'étude faisant l'objet du contrat.

Au soutien de sa demande, la société EIF Innovation produit le feuillet fiscal Cerfa des dépenses engagées par la société Remade au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2018, un rapport d'audit relatif à cet exercice et vise dans ses écritures des échanges qui se rapportent aux projets 2018 de la société Remade. Les deux notes d'honoraires précisent qu'elles se rapportent à l'année 2018. Il résulte de ces éléments qu'aucune diligence n'est concernée par le contrat du 22 mars 2019.

A défaut pour la société EIF de produire un élément de nature à justifier d'un accord préalable aux travaux sur le montant de la rémunération qu'elle réclame, l'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle a rejeté cette demande d'admisssion de la créance.



Sur la facture d'honoraires du 31 juillet 2019 (242 400 euros) :

La société EIF soutient que cette note correspond aux diligences qu'elle a réalisées pour l'établissement du dossier de valorisation de la recherche effectuée par la société Remade.

La note d'honoraires vise en objet l'audit et la valorisation des activités de R&D de Remade pour l'année 2018. Pour les mêmes motifs que ceux développés au paragraphe précédent, l'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle a rejeté cette demande d'admission de la créance.



Sur les créances de 87,97 euros et 16,99 euros liées à la procédure d'injonction de payer :



La société EIF Innovation précise dans le corps de ses écritures qu'elle abandonne sa demande au titre des débours de 16,99 euros sans reprendre cet abandon au dispositif de ses conclusions. L'ordonnance dont appel ne pourra qu'être confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande d'admission pour la somme de 16,99 euros.



La société Remade et les liquidateurs n'articulent aucun moyen au soutien de leur appel de la disposition de l'ordonnance qui admet la créance de 87,97 euros hormis ceux rappelés plus haut tirés d'une complicité de fraude. Cette somme correspond aux frais de signification d'une ordonnance d'injonction de payer signifiée le 7 février 2019 qui n'est pas produite aux débats. La seule pièce produite est la facture de l'étude d'huissier. La société Remade et les liquidateurs ne justifient d'aucun élément de nature à faire supporter par la société EIF Innovation la charge finale de cette signification d'acte. L'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle a admis cette créance au passif de la société Remade.



PAR CES MOTIFS :



La cour, statuant par arrêt contradictoire ;



Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;



Y ajoutant ;



Dit que les dépens de l'appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective ;



Déboute les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles.





La greffière La présidente

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