23 février 2023
Cour d'appel de Chambéry
RG n° 22/00623

2ème Chambre

Texte de la décision

COUR D'APPEL de CHAMBÉRY







2ème Chambre



Arrêt du Jeudi 23 Février 2023





N° RG 22/00623 - N° Portalis DBVY-V-B7G-G62D



Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection de [Localité 21] en date du 18 Mars 2022, RG 1121000308



Appelante



Mme [T] [V]

née le 06 juin 1976 à BONNEVILLE (74130), demeurant [Adresse 4]



comparante en personne



Intimés



[34] dont le siège social est sis [Adresse 2] - pris en la personne de son représentant légal

non comparant, ni représenté



[15], dont le siège social est sis [Adresse 38] - prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



S.A.R.L. [27] dont le siège social est sis [Adresse 39] - prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



TRESORERIE [Localité 30] AMENDES, dont le siège social est sis [Adresse 12]

prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



[35] dont le siège social est sis [Adresse 10] - pris en la personne de son représentant légal

non comparant, ni représenté



TRESORERIE [Localité 21] AMENDES, dont le siège social est sis [Adresse 11]

prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



CENTRE PAJEMPLOI RESEAU URSSAF, dont le siège social est sis [Localité 8] - pris en la personne de son représentant légal

non comparant, ni représenté



URSSAF RHONE ALPES dont le siège social est sis [Adresse 36] - prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



[18] dont le siège social est sis [Adresse 6]

prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



TRESORERIE HAUTE-SAVOIE AMENDES, dont le siège social est sis [Adresse 13]

prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



Mme [O] [Z]

demeurant [Adresse 7]

non comparante, ni représentée



M. [B] [U]

demeurant Chez Mme [U] [E] - [Adresse 1]

non comparant, ni représenté



INTRUM dont le siège social est sis [Adresse 9]

prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



CARREFOUR BANQUE dont le siège social est sis Chez [Localité 31] CONTENTIEUX - [Adresse 3]

prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



FLOA dont le siège social est sis Chez [23] - [Adresse 25]

prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



ENGIE dont le siège social est sis Chez [29] - [Adresse 5]

prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



[20], dont le siège social est sis Chez [Localité 31] CONTENTIEUX [Adresse 3]

prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



[19] dont le siège social est sis Chez [20] - [Adresse 37]

prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



[33], dont le siège social est sis Chez SELARL [28] [Adresse 22]

prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



[16] dont le siège social est sis [Adresse 17] - prise en la personne de son représentant légal

non comparante, ni représentée



POLE EMPLOI AUVERGNE RHONE ALPES SERVICE CONTENTIEUX DIRECTION DE LA PRODUCTION CENTRALISEE dont le siège social est sis [Adresse 32]

pris en la personne de son représentant légal

non comparant, ni représenté



-=-=-=-=-=-=-=-=-





COMPOSITION DE LA COUR :



Lors de l'audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des avocats, le 13 décembre 2022 par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente, qui a entendu les plaidoiries, en présence de Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller, avec l'assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,



Et lors du délibéré, par :



- Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, qui a rendu compte des plaidoiries



- Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,



- Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,




-=-=-=-=-=-=-=-=-=-



EXPOSÉ DU LITIGE



Le 8 février 2021, Mme [T] [V] a saisi la commission de surendettement de la Savoie de sa situation. Celle-ci a déclaré son dossier recevable le 8 avril 2021.



Le 12 août 2021, la commission prenait à l'encontre de Mme [T] [V] des mesures imposées de rééchelonnement des dettes sur 77 mois, par mensualités allant de 241,05 euros à 1 188,74 euros.



La commission de surendettement des particuliers de la Haute-Savoie retenait :



- au titre des ressources :

- 2  891 euros d'allocations chômage,

soit un total de 2 891euros,



- au titre des charges :

- 762 euros forfait de base,

- 145 euros forfait habitation,

- 112 euros forfait chauffage,

- 9 euros (assurance/mutuelle),

- 650 euros (logement)

soit un total de 1 678 euros.



Les dettes retenues par la commission sont les suivantes :

Dettes sur charges courantes :

- [16] : 1 237,32 euros

- Engie : 945,29 euros

- Intrum : 3 050,44 euros

- [33] : 150,85 euros

- SGC [Localité 14] : 832,56 euros,

- SGC [Localité 21] : 112,17 euros

Dettes pénales et réparations pécuniaires :

- Antai : 64 euros

- Trésorerie [Localité 21] amende : 1 122 euros

- Trésorerie Haute-Savoie amende : 1 691,77 euros,

- Trésorerie [Localité 30] amende : 913 euros

Dettes sociales :

- Urssaf Paje Emploi : 1 621,91 euros

- Urssaf Rhône-Alpes : 4 872,64 euros

Dettes sur crédit à la consommation :

- BP Auvergne Rhône-Alpes : 7 789,52 euros (6 813,22 euros restant dû + 976,30 euros impayés)

- BP Auvergne Rhône-Alpes : 21 704,83 euros (20 422,60 euros restant dû + 1 282,23 euros impayés)

- [20] : 1 520,08 euros,

- Carrefour banque : 6 476,58 euros,

- Carrefour banque : 22 314,33 euros

- [26] :1 162,71 euros

Autres dettes :

- [O] [Z] : 5 000 euros,

- [B] [U] : 6 000 euros,

- Garage des pins : 963,25 euros.

soit un total de 89 545,25 euros.



Mme [T] [V] contestait ces mesures le 17 août 2021.



Par jugement réputé contradictoire du 18 mars 2022, notifié à la débitrice par lettre recommandée avec avis de réception retirée le 30 mars 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Chambéry a, notamment :



- infirmé les mesures prises par la commission,

- fixé à la somme de 871,05 euros la capacité mensuelle de remboursement,

- dit que le remboursement des dettes interviendra à taux zéro, sur une durée de 84 mois, avec effacement partiel à l'issue du plan



Le juge des contentieux de la protection a retenu que Mme [T] [V] justifiait de ce que son allocation chômage mensuelle était de 2 297,56 euros (contre 2 891 euros retenu par la commission) et qu'elle justifiait de ce que son ancien conjoint a été condamné à lui payer une somme de 250 euros par mois au titre de la contribution à l'entretien et à l'éducation de leur fille née en 2008. Il a fixé ses charges à la somme de 1 676,51 euros (contre 1 678 euros). Il a ainsi retenu une capacité de remboursement de 871,05 euros par mois, le maximum légal pouvant lui être prélevé s'élevant à 1 034 euros par application du barème utilisé en matière de saisie des rémunérations.



Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 11 avril 2022, reçu au greffe de la cour d'appel le 13 avril 2022, Mme [T] [V] a interjeté appel de la décision.



Elle indique que ses allocations chômage s'élevant à 2 273 euros par mois s'arrêtent au mois de mai 2023 et, qu'à cette date, elle sera seulement éligible à l'ASS à hauteur de 490 euros mensuels. Elle expose avoir perdu son emploi rémunérateur en 2020 en raison de la crise sanitaire et ajoute que, quel que soit son emploi à l'avenir, elle ne retrouvera jamais le niveau de rémunération qu'elle a connu dans l'horlogerie de luxe. Elle dit pouvoir rembourser 871 euros par mois tout en précisant faire face à des dépenses exceptionnelles relatives à son véhicule. Elle a sollicité, en lien avec une assistante sociale, une mesure d'accompagnement social lié au logement pour éviter une expulsion.



Toutes les parties ont été convoquées par lettre recommandée avec avis de réception toutes retirées, à l'exception de celle de M. [B] [U] qui a été avisé mais n'a pas retiré le courrier recommandé.



Par courrier du 16 mai 2022, la société [26] dit qu'elle n'a pas d'observation à formuler.

Par courrier du 29 juillet 2022, l'Urssaf Paje Emploi précise que sa créance s'élève à 1 372,32 euros.

Par courrier du 29 août 2022, l'Urssaf précise que sa dette s'élève à 4 872,64 euros.

Par courrier du 28 octobre 2022 Mme [T] [V] fait parvenir à la cour un certain nombre de justificatifs (loyer octobre 2022 [24] : 874,70 euros + 200 euros de plan d'apurement pour une dette de 7 549,29 euros au 21 octobre 2022 /jugement du 15 septembre 2022 constatant l'acquisition de la clause résolutoire du bail et fixant un plan à hauteur de 200 euros par mois suspendant les effets de cette décision /notifications d'avis à tiers détenteur pour des dettes concernant l'ancien logement d'Annecy pour 425,70 euros et 406,86 euros / des avis de retenue sur allocations chômage à la demande du [34] et du [35] / le relevé de situation pôle emploi octobre 2022 / des frais dentaires à hauteur de 4 685 euros avec un restant dû de 2 050 euros / une facture d'orthodontie avec un reste à payer de 600 euros / un échéancier de 50 euros par mois pour des dettes fiscales).

Elle dit avoir exposé de grosses dépenses pour sa voiture et qu'avec l'ensemble des dépenses, notamment de santé, elle ne voit pas d'issue.



A l'audience du 13 décembre 2022 Mme [T] [V] expose qu'elle a à charge une fille âgée de 14 ans, que son passif s'élève à environ 89 000 euros. Elle suit une formation d'aide soignante. Ses droits chômage prennent fin en juillet 2023, c'est-à-dire, à la fin de la formation. Elle a retrouvé un emploi rémunéré à environ 1760 euros par mois mais ne pourra l'intégrer qu'à la fin de sa formation, l'embauche étant prévue au 1er août 2023. Elle dit que son loyer actuel s'élève à 1 000 euros par mois comprenant la mensualité d'apurement de 200 euros, la dette de loyer en question n'étant pas incluse dans le plan. Elle précise encore qu'il existe également un plan d'apurement avec le Trésor public à hauteur de 50 euros par mois jusqu'en 2025. S'agissant de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant que lui doit le père de l'enfant, une procédure est en cours et elle ne perçoit les 250 euros dûs que très irrégulièrement. La CAF se substitue mais pas en totalité.



Les créanciers n'étaient ni présents ni représentés.




MOTIFS DE LA DÉCISION



L'article L. 724-1 du code de la consommation dispose que : 'Lorsqu'il ressort de l'examen de la demande de traitement de la situation de surendettement que les ressources ou l'actif réalisable du débiteur le permettent, la commission prescrit des mesures de traitement dans les conditions prévues aux articles L. 732-1, L. 733-1, L. 733-4 et L. 733-7.

Lorsque le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise caractérisée par l'impossibilité manifeste de mettre en 'uvre des mesures de traitement mentionnées au premier alinéa, la commission peut, dans les conditions du présent livre :

1° Soit imposer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire si elle constate que le débiteur ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l'exercice de son activité professionnelle, ou que l'actif n'est constitué que de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale ;

2° Soit saisir, si elle constate que le débiteur n'est pas dans la situation mentionnée au 1°, avec l'accord du débiteur, le juge des contentieux de la protection aux fins d'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire.'.



Selon l'article L 732-2 du code de la consommation dispose que : 'le plan conventionnel peut comporter des mesures de report ou de rééchelonnement des paiements des dettes, de remise des dettes, de réduction ou de suppression du taux d'intérêt, de consolidation, de création ou de substitution de garantie.

Ce plan peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette. Il peut également les subordonner à l'abstention par le débiteur d'actes qui aggraveraient son insolvabilité'.



En l'espèce, il résulte des débats à l'audience et des pièces versées que Mme [T] [V] se trouve dans une situation évolutive tant au regard de ses ressources que de ses dettes. En effet, elle justifie la perception actuelle d'une indemnité chômage à hauteur de 1 942,02 euros par mois mais précise que cette allocation prendra fin en juillet 2023 au moment où se terminera sa formation. Si elle prétend avoir déjà un contrat de travail qui débuterait le 1er août 2023 mais pour un salaire moins élevé d'environ 1 700 euros, elle n'en justifie pas. De même, elle ne produit aucun document permettant de connaître le montant de la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant non payée par le père de l'enfant et pris en charge par la CAF.



Par ailleurs il est constant que les dettes ont évolué. En effet malgré l'interdiction d'y procéder résultant de la procédure de surendettement, les services des eaux d'[Localité 14] et de [Localité 21] ont opéré des saisies sur les indemnités chômage de sorte que leurs créances semblent aujourd'hui éteintes. Enfin, l'une des créances de l'URSSAF semble également avoir diminué.



Il en résulte que la situation n'est pas suffisamment clairement établie pour permettre à la cour de confirmer ou d'infirmer le plan prononcé par le juge des contentieux et de la protection. Il semble, en revanche, nécessaire de permettre à la commission de surendettement compétente d'être à nouveau saisie du dossier afin d'établir une situation mise à jour, à charge pour Mme [T] [V] de fournir l'ensemble des justificatifs.



Afin de ne pas aggraver sa situation et, dans la mesure où elle dit ne pas pouvoir assumer les mensualités fixées en première instance, il y a lieu d'ordonner un moratoire de 12 mois, délai pendant lequel Mme [T] [V] devra saisir à nouveau la commission et produire tout document utile à la réévaluation de sa situation.



En conséquence, la décision entreprise sera réformée en ce sens.



Les dépens seront laissés à la charge du Trésor public.



PAR CES MOTIFS



La cour, statuant publiquement, après en avoir délibéré conformément à la loi, par arrêt réputé contradictoire,





Réforme le jugement entrepris,



Statuant à nouveau,



Accorde à Mme [T] [V] un moratoire de 12 mois à compter de la date du présent arrêt,



Dit que pendant ce délai, Mme [T] [V] devra saisir la commission de surendettement compétente en vue d'un réexamen de son dossier et devra fournir toute pièces utiles à la clarification de sa situation,



Rappelle qu'en application de l'article L. 733-16 du code de la consommation, les créanciers, auxquels les mesures prises sont opposables, ne peuvent pas exercer de procédures d'exécution à l'encontre des biens Mme [T] [V] durant toute la durée d'exécution des dites mesures,



Dit que conformément à l'article L. 761-1 du code de la consommation, Mme [T] [V] ne pourra, ni souscrire de nouveaux emprunts, y compris auprès de particuliers, ni procéder à des actes de disposition de ses biens, quelle que soit leur valeur, sans l'accord du juge des contentieux de la protection territorialement compétent au regard de sa résidence, ce sous peine d'être déchue du bénéfice de l'ensemble des dispositions du livre du code de la consommation consacré au traitement des situations de surendettement,



Laisse les dépens à la charge du Trésor public.



Ainsi prononcé publiquement le 23 février 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.



La Greffière La Présidente

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