19 April 2022
Cour d'appel de Montpellier
RG n° 19/07729

Chambre commerciale

Texte de la décision

Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



Chambre commerciale



ARRET DU 19 AVRIL 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/07729 - N° Portalis DBVK-V-B7D-ONJR



Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du 20 NOVEMBRE 2019

TRIBUNAL DE COMMERCE DE PERPIGNAN

N° RG 2019rj0029





APPELANTE :



SA COMPAGNIE GENERALE DE LOCATION D'EQUIPEMENTS au capital de 58.606.156,00 euros, immatriculée au RCS de LILLE METROPOLE sous le n° 303 236 186 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représentée par Me Gilles BERTRAND de la SCP ROZE, SALLELES, PUECH, GERIGNY, DELL'OVA, BERTRAND, AUSSEDAT, SMALLWOOD, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Bachir BELKAID, avocat au barreau de MONTPELLIER







INTIMES :



Maître [I] [Z] agissant ès qualités de mandataire judiciaire de la SARL EG CLIM

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Sylvain DONNEVE de la SCP DONNEVE - GIL, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant non plaidant



SARL EG CLIM

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Sylvain DONNEVE de la SCP DONNEVE - GIL, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant non plaidant



SELARL ESAJ prise en la personne de Maître [F] [H], agissant ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la SARL EG CLIM

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentée par Me Sylvain DONNEVE de la SCP DONNEVE - GIL, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant non plaidant



Ordonnance de clôture du 02 Février 2022



COMPOSITION DE LA COUR :





En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 FEVRIER 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marianne ROCHETTE, conseiller, chargé du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Jean-Luc PROUZAT, président de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, conseiller

Mme Marianne ROCHETTE, conseiller



Greffier, lors des débats : Madame Hélène ALBESA





Ministère public :



L'affaire a été communiquée au ministère public.





ARRET :



- contradictoire



- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;



- signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, président de chambre, et par Madame Hélène ALBESA, greffier.






FAITS-PROCEDURE-MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES :



La SARL Eg clim, dont le gérant est M. [L] [N], est spécialisée dans le secteur d'activité des travaux d'installation électrique, de climatisation, et de plomberie, à [Localité 8] (66).



Le 26 octobre 2017, elle a signé avec la SA Compagnie Générale de Location d'équipements (ci-après CGLE) un contrat de location avec option d'achat de 60 mois portant sur un véhicule utilitaire Fiat Ducato FG moyennant un loyer mensuel de 495,55 euros. Le véhicule a été réceptionné le 30 octobre 2017.



Par jugement du tribunal de commerce de Perpignan en date du 23 janvier 2019, la société Eg clim a fait l'objet d'une ouverture de procédure de redressement judiciaire, Mme [Z] et la société Esaj prise en la personne de M. [H] étant respectivement désignés mandataire judiciaire et administrateur judiciaire.



Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 31 janvier 2019, la société CGLE a déclaré entre les mains du mandataire judiciaire une créance à titre chirographaire pour un montant échu de 545,11 euros correspondant au loyer impayé du mois de décembre 2018 et à échoir de 22 302,20 euros au titre du solde dû en cas de résiliation du contrat.



Parallèlement, par courrier recommandé du même jour, la société CGLE a mis en demeure la société Esaj, ès qualités, de prendre position sur la poursuite du contrat de location avec option d'achat auquel cette dernière a répondu le 11 février 2019, pour lui notifier 'la résiliation du contrat' liant la CGLE à son administré.



Après avoir déclaré en conséquence de cette décision le 25 février 2019, une créance à titre échu pour un montant de 21 823,93 euros, la CGLE a vendu le véhicule aux enchères pour un prix de 13 800 euros, ce qui l'a amenée à adresser au mandataire judiciaire une nouvelle déclaration de créance rectificative le 19 avril 2019, pour un montant de 8 023,93 euros.



Cette créance a été contestée le 4 juillet 2019 par Mme [Z], ès qualités en ce qu'elle constituait une clause pénale manifestement excessive et par courrier en réponse en date du 9 juillet 2019, CGLE a rejeté le bien fondé de cette contestation en invoquant les dispositions contractuelles librement visées, acceptées et signées par la SARL EG Clim et l'économie générale du contrat.



Par ordonnance en date du 20 novembre 2019, le juge-commissaire en charge de la procédure collective a rejeté la créance déclarée par la CGLE à hauteur de 8 023,93 euros au visa des articles L. 624-2 et R. 623-3 du code de commerce.



Par déclaration reçue le 29 novembre 2019 au greffe de la cour, la société CGLE a régulièrement relevé appel de cette ordonnance.



Elle demande à la cour, dans ses conclusions déposées le 24 janvier 2020 via le RPVA, de :

- Dire et juger recevable l'appel dirigé contre l'ordonnance du 20 novembre 2019 n° 2019 RJ 0029,

- La réformer en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- Rejeter la contestation régularisée par la société Eg clim à l'encontre de la créance déclarée par la société CGLE,

- Admettre sa créance à hauteur de 8023,93 euros,

- En tout état de cause ;

- Condamner la société Eg clim au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.



Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :



- l'exigibilité de l'indemnité de résiliation découle de l'article 19 a) des conditions générales et est justifiée pour la préservation de l'équilibre contractuel, remis en cause du fait de la défaillance de la société Eg clim tenue au règlement des loyers jusqu'au terme convenu en vertu d'un contrat conclu pour une durée irrévocable,

- subsidiairement, au visa de l'article L.622-13 V, si la résiliation est prononcée en application de IV de ce même article l'inexécution peut donner lieu à des dommages intérêts justifiés par le préjudice résultant de la mise en cause de l'équilibre contractuel.



La société Eg clim, la société Esaj, pris en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Eg clim et Mme [Z] prise en sa qualité de mandataire judiciaire de la société Eg clim, demandent à la cour dans leurs conclusions déposées par le RPVA le 15 avril 2020, au visa des articles 1103, 1104, 1240 et 1347 du code civil et L. 622-13 du code de commerce, de :

- Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées,

- Constater l'inapplicabilité des conditions générales,

- Constater l'absence de préjudice de la société CGLE,

En conséquence,

- Débouter la société CGLE de l'intégralité de ses demandes,

- La condamner au paiement d'une somme de 792,07 euros,

- La condamner au paiement d'une somme de 1500 euros en faveur de chacun des intimés et aux dépens.



Elle expose en substance que :



- la clause contractuelle telle que rédigée est inapplicable en cas de résiliation intervenue à la demande de l'administrateur judiciaire, de sorte que la CGLE ne justifie pas de l'exigibilité de la créance,

- la valeur vénale du véhicule venant en déduction de la créance aurait dû être déterminée selon le mode opératoire prévu à l'article 5 des conditions générales du contrat que l'appelante n'avait pas respecté en privant Eg clim de la possibilité de vendre le véhicule à meilleur prix et en faisant ainsi le choix de s'appauvrir dans le cadre d'une vente aux enchères pour une valeur bien inférieure à celle de la côte personnalisée du véhicule,

- la CGLE ne peut prétendre à un préjudice puisqu'en faisant ce choix, elle s'était elle-même privée d'une somme correspondant à la différence de valeur de la cote personnalisée du véhicule (22 416 euros) et le prix obtenu aux enchères (13 800 euros TTC) pour un montant supérieur à la somme déclarée,

- il en résulte nécessairement un préjudice à la SARL Eg Clim dont le passif est aggravé du fait de la CGLE qui en doit réparation au visa de l'article 1240 du code civil.



Le ministère public a été informé de l'affaire par voie de RPVA le 2 décembre 2019.



Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.



C'est en l'état que l'instruction a été clôturée par ordonnance du 2 février 2022.




MOTIFS DE LA DECISION :



Au visa de l'article L.622-13 du code de commerce, l'administrateur judiciaire interrogé par mise en demeure de la CGLE en date du 31 janvier 2019, a opté pour la non-continuation du contrat, étant constant qu'une telle option s'analyse comme une résiliation.



La résiliation n'est donc pas survenue selon les modalités de l'article 19 des conditions générales du contrat intitulé 'Inexécution du contrat- Résiliation' qui prévoit 'en cas de défaillance [...] dans le versement des loyers ou de non respect d'une obligation essentielle du contrat [...] ' la possibilité pour le bailleur, 'huit jours après une mise en demeure notifiée sous la forme d'une lettre recommandée avec accusé de réception restée sans effet de se prévaloir de la déchéance du terme, cette situation entraînant notamment l'exigibilité immédiate de l'indemnité' [...]



Mais il ne pouvait en être autrement puisque l'article L.622-13 du code de commerce dispose que le défaut d'exécution des engagements du cocontractant n'ouvre droit au profit du créancier qu'à déclaration de créance.



Le fait que la résiliation soit intervenue à l'initiative de l'administrateur judiciaire n'a pas pour effet de neutraliser les sanctions pécuniaires convenues en cas de défaillance du locataire énoncées à l'article A des conditions spéciales du contrat modifiant l'article 5a 'en ce qui concerne le calcul de l'indemnité.



En déclarant dès le 31 janvier 2019 deux créances, l'une à titre échu et l'autre à échoir au titre de l'indemnité de résiliation qui serait due en cas de non-continuation du contrat, la CGLE a entendu se prévaloir de la sanction financière convenue à l'article A précité en cas de défaillance de la SARL Eg Clim.



Cette défaillance est indiscutable en l'espèce puisqu'au jour de l'ouverture de la procédure collective, le loyer de décembre 2018 n'avait pas été acquitté et qu'elle a perduré avec le loyer impayé du mois de janvier 2019. La décision de ne pas poursuivre le contrat alors que la SARL Eg Clim était engagée pour une durée de 60 mois sauf option d'achat exercée en cours de contrat qui n'a pas été mis en oeuvre, s'analyse aussi comme une défaillance





Les intimées ne peuvent ensuite faire grief à la CGLE de n'avoir pas mis en oeuvre les dispositions du contrat prévoyant que le bailleur ayant l'intention de vendre le bien doit en aviser le locataire pour lui permettre de présenter un acquéreur, puisque dans son courrier du 11 février 2019, l'administrateur judiciaire a expressément invité la CGLE à procéder à la 'récupération de vos matériels' en se déchargeant de toute responsabilité quant à 'leur bonne conservation' en laissant ainsi présumer l'absence d'acquéreur potentiel comme le désintérêt du locataire à en obtenir meilleur prix après détermination de sa valeur à dire d'expert.



Il ne peut donc être imputé faute à la CGLE de ne pas avoir permis au locataire de procéder à la vente par ses propres moyens et les demandes en dommages-intérêts comme celles tendant à la compensation des créances seront rejetées



L'indemnité de résiliation réclamée qui n'est que la stricte application des dispositions du contrat n'a ensuite rien d'excessif au regard d'un véhicule d'une valeur de 24 413,66 euros financée par la CGLE qui n'a perçu qu'un total de 19 746,60 euros (12 loyers payés et prix de vente) soit une perte de 4 667,06 euros en considération de la seule valeur d'origine et de 9 988,85 euros en considération du montant total de 29 735,45 euros qui aurait dû être perçu si le contrat avait été exécuté jusqu'à son terme.



Il convient donc d'infirmer l'ordonnance dont appel et d'admettre la créance déclarée par la CGLE au passif de la SARL Eg Clim à hauteur de 8 023,93 euros.



La SARL Eg Clim qui succombe, supportera les dépens de première instance et d'appel et sera condamnée à payer à la CGLE la somme de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS :



La cour statuant publiquement et par arrêt contradictoire,



Infirme dans toutes ses dispositions l'ordonnance en date du 20 novembre 2019 ayant rejeté la créance déclarée par la CGLE au passif de la SARL Eg Clim à hauteur de 8023,93 euros,



Statuant à nouveau,



Rejette la contestation de créance,



Admet la créance déclarée par la CGLE au passif de la SARL Eg Clim à hauteur de 8 023,93 euros,



Déboute société Eg Clim, la société Esaj, prise en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Eg clim et Mme [Z] prise en sa qualité de mandataire judiciaire de leurs demandes,



Dit que la SARL Eg Clim supportera les dépens de première instance et d'appel et payera à la CGLE une somme de 1000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.



le greffier, le président,

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