18 November 2020
Cour d'appel de Paris
RG n° 18/08804

Pôle 6 - Chambre 4

Texte de la décision

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 18 NOVEMBRE 2020



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/08804 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6DH2



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Juin 2018 -Conseil de Prud'hommes de BOBIGNY - RG n° 16/03358



APPELANTE



SA ALSTOM TRANSPORT SA prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 9]

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477



INTIME



Monsieur [U] [G]

[Adresse 1]

[Localité 6]

né le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 7]

Représenté par Me Anne MACUDZINSKI, avocat au barreau de PARIS, toque : E1186



COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 06 Octobre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre

M. Olivier MANSION, Conseiller

Mme Anne-Gaël BLANC, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, Président, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.



Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD



ARRET :



- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.










EXPOSÉ DU LITIGE :



M. [U] [G] a été embauché le 20 mars 1983, par contrat à durée indéterminée par la société Alsthom Atlantique. Aux droits de celle-ci, se sont trouvées successivement en 1989 la société GEC Alsthom, puis en février 1993 GEC Alsthom Transports devenue Alstom Transport à compter de 1998.



La société Alstom Transport, compte, en France plus de 9.000 salariés et 1.300 salariés en ses établissements de [Localité 9].



La relation de travail était régie par la convention collective nationale de la métallurgie.



A compter de décembre 1983, le salarié a travaillé au sein de l'établissement Alstom TIS (transport information solution) situé [Adresse 8]. Cet établissement a notamment pour activité la fourniture de système de signalisation ferroviaire pour tramway, métro, ligne à grande vitesse ainsi que des systèmes d'information et de communication pour les utilisateurs.



Par courrier du 6 avril 2016, la Caisse d'Assurance Maladie d'Ile de France notifiait à M. [U] [G] son admission au bénéfice de l'Allocation de Cessation Anticipée d'Activité des Travaileurs de l'Amiante dite ACAATA.



Par lettre du 27 avril 2016, le salarié a présenté sa démission auprès de la SA Alstom Transport pour 'un départ en retraite dans le cadre de la cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante' à compter du 1er août 2016. La société lui répondait par courrier du 13 juin 2016 que l'établissement Alstom TIS Transport au sein duquel il avait travaillé et dont il se prévalait pour bénéficier de cette cessation d'activité n'était pas classé par arrêté ministériel comme y ouvrant droit, de sorte que sa démission ne pouvait être acceptée 'au titre de l'allocation CAATA', qu'elle ne constituait qu'une démission simple et que l'employeur ne pouvait lui allouer l'indemnité de cessation d'activité des travailleurs de l'amiante.



Néanmoins, par lettre du 17 juin 2016, M. [U] [G] confirmait sa démission.



Par demande enregistrée au greffe le 26 juillet 2016, M. [U] [G] saisissait le conseil de prud'hommes de Bobigny aux fins d'obtenir le paiement par la société Alstom Transport de l'indemnité de cessation d'activité qu'il revendique à la suite de son départ dans le cadre du dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante prévu par l'article 41 de la loi 98-1194 du 23 décembre 1998. Il sollicitait la condamnation de l'employeur à lui verser les sommes suivantes :

- 26.989,48 euros, subsidiairement 19.278,20 euros et encore plus subsidiairement 15.422,56 euros d'indemnité de cessation d'activité ;

- 10.000 euros de dommages et intérêts pour préjudice d'anxiété ;

- 5.000 euros de dommages et intérêts pour perte du bénéfice des garanties frais de santé et prévoyance prévues par les accords du groupe du 28 décembre 2011 ;

- 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- avec intérêts au taux légal de ces indemnités et capitalisation des intérêts.



De plus, il sollicitait la condamnation de la partie adverse à lui remettre une attestation Pôle Emploi conforme à la décision attendue à peine d'une astreinte de 150 euros par jour de retard, le conseil s'en réservant la liquidation.



La défenderesse s'est opposée à ces prétentions et a sollicité l'allocation de la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile





Par jugement du 12 juin 2018, le conseil des prud'hommes de Bobigny a condamné la SA Alstom Transport à payer à M. [U] [G] les sommes suivantes :

- 26.989,48 euros d'indemnité de cessation d'activité en application l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;

- 2.400 euros de dommages et intérêts pour perte du bénéfice des garanties frais de santé et prévoyance prévues par les accords du groupe du 28 décembre 2011 ;

- 8.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice d'anxiété ;

-1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la défenderesse de sa convocation devant le bureau de conciliation, soit le 23 novembre 2016 pour les créances salariales, et à compter du prononcé de la décision pour les créances à caractère indemnitaire, dans les deux cas avec capitalisation des intérêts au titre de l'article 1154 du code civil.



L'employeur a en outre été condamné à délivrer à M. [U] [G] une attestation Pôle Emploi conforme au jugement et a ordonné l'exécution provisoire en application de l'article 515 du code de procédure civile.



La SA Alstom Transport a été déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamnée aux dépens.



Appel a régulièrement été interjeté par la société le 12 juillet 2018.



Par conclusions notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 29 juin 2020, l'appelante demande à la cour d'infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bobigny le 12 juin 2018 en ce qu'il a jugé que l'intimé a quitté la société Alstom Transport dans le cadre du dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante prévu par l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et l'a condamné à payer diverses sommes. La société conclut à l'irrecevabilité de la demande de dommages-intérêts au titre du préjudice d'anxiété et en tout état de cause au rejet de toutes les prétentions adverses.



Par conclusions notifiées par le réseau virtuel privé des avocats le 14 septembre 2020, l'intimé demande à la cour de confirmer le jugement entrepris. Subsidiairement s'agissant du quantum de l'indemnité de cessation d'activité, il propose de la limiter à la somme de 19.278,20 euros sur le fondement de l'accord de groupe de 2009 et, encore plus subsidiairement, à la somme de 15.422,56 euros sur le fondement de la convention collective.



Pour plus ample exposé sur le litige, la cour se réfère aux conclusions des parties en application de l'article 455 du Code de procédure civile.




MOTIFS :



I - Sur l'indemnité de cessation anticipée d'activité



1 - Le droit à l'indemnité



La SA Alstom Transport expose que les sociétés aux droits desquelles elle se trouve, exploitaient entre 1979 et 1987, l'établissement TIS, où travaillait M. [U] [G] sis [Adresse 4], à distinguer de l'établissement TSO sis au [Adresse 3] de la même rue qui avait pour objet la transmission et la distribution d'énergie, qui a fait l'objet d'une inscription par arrêté du 23 décembre 2011 sur la liste des établissements ouvrant droit à l'ACCATA et qui ne lui aurait jamais appartenu. Elle soutient que ce dernier établissement appartenait à la Gec Alstom T&D. Dès lors que seule la seconde a fait l'objet d'une inscription sur l'arrêté ministériel du 23 décembre 2011 ouvrant droit à la préretraite amiante, elle s'estime dégagée de toute obligation. En effet, elle soutient que seule l'établissement TSO utilisait à l'échelle industrielle de l'amiante. Selon l'employeur, si la CRAMIF a admis M. [U] [G] au bénéfice de la CAATA, cette décision ne saurait s'imposer à la SA Alstom Transport, faute de compétence pour cet organisme social pour ajouter un établissement à la liste fixée par arrêté interministériel. La société prétend que les zones du site de la [Adresse 8] dans lesquelles avaient lieu les opérations de calorifugeage à l'amiante étaient protégées et leur accès réservé aux seuls salariés de l'établissement TSO à l'exclusion de ceux de l'établissement TIS, et que la mise en commun par ces deux établissements de certains services annexes telles que la bibliothèque, la vidéothèque ou le service médical n'avait pas d'influence sur l'exposition à l'amiante. L'employeur conclut que si la décision contestable de la CRAMIF d'admettre M. [U] [G] au bénéfice de l'ACAATA implique l'obligation par cet organisme de la verser mensuellement à l'occasion du départ en préretraite de M. [U] [G], la société, pour sa part, n'a pas à payer l'indemnité mise à la charge de l'employeur par ce dispositif.



M. [U] [G] répond : qu'entre 1960 et 1997, les établissements litigieux sis [Adresse 3] et le [Adresse 4] formaient un seul site ; qu'ils appartenaient à une seule société, qui est la SA Alstom Transport et ce jusqu'en 1993 ; qu'à partir de cette date, cette dernière a conservé l'établissement TIS et la société GEC Alstom T&D a eu l'établissement TSO ; que ces deux établissements partageaient certains bâtiments et notamment ceux où était manipulé l'amiante, même si l'arrêté du 23 décembre 2011 n'a inscrit avec imprécision que 'l'établissement Alsthom, puis TSO (transformateur de [Localité 9]) puis Alsthom atlantique, [Adresse 3]' ; que nénamoins, les caisses régionales d'assurance maladie ont reçu pour instruction du ministère du travail d'accorder le bénéfice de l'ACAATA non seulement aux travailleurs des établissements d'Alsthom TSO, mais aussi à ceux d'Alstom TIS, du fait que les activités exposant à l'amiante se déroulaient à la fois au [Adresse 3] et au [Adresse 4].



Le salarié soutient qu'en tout état de cause, l'admission au bénéfice de cette cessation anticipée d'activité relevait selon l'article 3 du décret 99-247 du 29 mars 1999 de la compétence exclusive des caisses et du contentieux de la sécurité sociale, et que l'admission ainsi décidée se trouve opposable à tous les employeurs et en particulier au dernier.



Sur ce



Aux termes de l'article 41, I, de la loi du 23 décembre 1998 sur le financement de la sécurité sociale pour 1999, une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils travaillent ou ont travaillé dans un tel établissement et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués des matériaux contenant de l'amiante et qu'ils ont atteint un âge déterminé qui pourra varier en fonction de la durée du travail effectué dans les établissements précités sans pouvoir être inférieur à 50 ans.



Aux termes de l'article 41, II, l'allocation est attribuée et servie par les caisses régionales d'assurance maladie, et cesse d'être versée lorsque le bénéficiaire remplit les conditions requises pour bénéficier d'une pension de vieillesse au taux plein, telle qu'elle est définie aux articles L 351-1 et L 351-8 du code de la sécurité sociale.



Aux termes de l'article 41, V, le salarié qui est admis au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité présente sa démission à son employeur et cette rupture ouvre droit, au bénéfice du salarié, au versement par l'employeur d'une indemnité de cessation d'activité d'un montant égal à celui de l'indemnité de départ en retraite.



La combinaison de ces textes signifie que l'attribution de l'allocation de cessation anticipée d'activité incombe aux caisses régionales d'assurance maladie, et que la seule présentation par le bénéficiaire de sa démission au dernier employeur à raison de la décision de l'une de ces caisses ouvre droit à l'indemnité de cessation d'activité litigieuse égale à l'indemnité de départ en retraite, qui est à la charge dudit employeur. Le fait générateur du service de cette indemnité par le dernier employeur est la combinaison de la démission et de l'admission au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité par la caisse.



La question du droit à contestation par l'employeur de l'admission au bénéfice de l'ACAATA relève en application de l'article 41,VI, du tribunal de la sécurité sociale, à supposer qu'il puisse justifier d'un intérêt à agir.



2 - le montant de l'indemnité



M. [U] [G] sollicite en application de l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 une indemnité égale à l'indemnité qu'il percevrait au titre de son départ à la retraite, en se prévalant en premier lieu de l'article 5.1 du chapitre 5 de l'accord de groupe de gestion prévisionnelle des emplois et des âges (GPEA) du 30 janvier 2012 qui accorde une indemnité de départ en retraite majorée dans le cadre d'un départ volontaire à la retraite à l'initiative du salarié et égale à 7 mois de salaire brut pour 30 ans d'ancienneté. A ce titre il prétend à la somme de 26.898,48 euros en arguant de ce qu'il peut totaliser plus de 36 ans d'ancienneté.



Subsidiairement il se prévaut de l'accord de groupe du 15 avril 2009 relatif à l'indemnité versée lors d'un départ en cessation anticipée d'activité amiante, qui accorde au salarié l'indemnité fixée par la convention collective majorée d'un mois, soit l'équivalent de 6 mois, ce qui donne la somme de 19.278,20 euros.



A défaut il revendique l'article 34 de la convention collective qui alloue une indemnité de départ en retraite de 5 mois à tout salarié après 35 d'ancienneté, soit la somme de 15.422,56 euros.



La SA Alstom Transport objecte que l'accord de groupe du 15 avril 2009 doit supplanter l'accord de groupe GPEA de 2012, en application du principe selon lequel les règles spéciales dérogent aux règles générales. En effet, elle souligne qu'en l'espèce le montant de l'indemnité due selon l'accord de 2009 spécifique aux bénéficiaires de l'allocation de cessation anticipée d'activité doit prévaloir sur l'accord de groupe qui s'applique de manière générale à tous ceux qui demandent un départ anticipé à la retraire. Elle relève néanmoins que M. [U] [G] n'entrant pas dans le cas spécial ainsi réglementé faute d'avoir travaillé dans un établissement inscrit sur l'arrêté ministériel, il ne peut bénéficier de cette disposition spéciale. L'employeur écarte tout autant la convention collective dans ses dispositions relatives à l'indemnité de départ volontaire à la retraite, dès lors, que selon lui, il ne s'agit pas d'un départ volontaire à la retraire mais d'une démission.



Sur ce



Aux termes de l'article 41 de loi du 23 décembre 1998 précitée, l'indemnité de cessation d'activité due par l'employeur est d'un montant égal à celui de l'indemnité de départ à la retraite prévue par le premier alinéa de l'article L. 122-14-13 du code du travail et se trouve calculée sur la base de l'ancienneté acquise au moment de la rupture du contrat de travail, sans préjudice de l'application des dispositions plus favorables prévues en matière d'indemnité de départ à la retraite par une convention ou un accord collectif ou par le contrat de travail.



Il s'ensuit que l'intéressé a droit à l'indemnité de départ à la retraite en application de l'article L 1237-9 du code du travail qui régit le droit à indemnité de départ à la retraite due à tout salarié quittant volontairement l'entreprise pour bénéficier d'une pension de vieillesse, sans préjudice de convention ou accord ou clause du contrat de travail plus favorable à l'intéressé.



Aux termes de l'article 5.1 de l'accord de groupe du 30 janvier 2012, dans le cadre de tout départ volontaire à la retraite à l'initiative du salarié, les salariés concernés perçoivent à leur départ de l'entreprise une indemnité de départ à la retraite majorée, appelée allocation de départ en retraite (ADR). Il fixe cette indemnité à 7 mois de salaire pour ceux qui ont entre 30 et 40 ans d'ancienneté. Ce texte ajoute : 'l'ADR se substitue à toutes indemnités prévues par les conventions collectives applicables, dans le cadre des départe en retraite'.



Il s'évince clairement de cette formule que la convention collective ne saurait être appliquée.



L'accord de groupe du 15 avril 2009 qui concerne salariés présents à l'effectif à la date de signature quittant une société du groupe dans le cadre du dispositif de cessation d'activité amiante confère à ceux-ci une indemnité de départ à la retraite prévue par la convention collective majorée d'un mois de salaire.



La volonté des signataires de l'accord du 30 janvier 2012 de faire bénéficier de ses dispositions les salariés présents à l'effectif à la date de signature et qui quitteraient une filiale dans le cadre du dispositif de cessation d'activité amiante résulte de la combinaison des constatations suivantes :

- l'accord de 2009 avait pour objectif d'avantager les travailleurs concernés par la CAATA par rapport aux autres et aucune raison viendrait justifier qu'on leur impose finalement un traitement moins bon à la suite de l'accord de groupe de 2012 ;

- l'accord de groupe du 30 janvier 2012 entend favoriser les départs à la retraite, et rien ne justifierait que les salariés bénéficiaires de la CAATA n'y soient pas associés de la même manière ;

- la convention collective étant écartée par l'accord de groupe pour la fixation de l'indemnité de départ volontaire à la retraite, il serait incohérent qu'elle survive uniquement pour servir de référence au calcul de l'indemnité de cessation d'activité dans le cadre de l'application de l'accord de 2009.



Dans ces conditions l'accord du 30 janvier 2012 s'applique et il sera alloué à M. [U] [G] la somme de 26.989,48 euros.



Par voie de conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef, de même que sur la demande de délivrance d'une nouvelle attestation Pôle Emploi.



II - Sur la garantie frais de santé et de prévoyance



M. [U] [G] sollicite le paiement de la somme de 5.000 euros en réparation du préjudice subi du fait qu'il a dû souscrire une mutuelle complémentaire, alors que deux avenants de la SA Alstom Transport conclus le 28 décembre 2011 relatifs aux frais de santé et à la prévoyance lui permettaient de rester affilié au régime de base prévu par l'accord de groupe, en tant que bénéficiaire de l'ACAATA que la société a refusé de lui reconnaître.



La SA Alstom Transport oppose que le bénéfice de ces avenants suppose que l'on ait travaillé au sein d'un établissement figurant sur la liste fixée par arrêt ministériel des établissements ouvrant droit à l'ACAATA, ce qui ne serait pas le cas de l'établissement TIS.



Sur ce



Les avenants à 'l'accord frais de santé' et 'accord de prévoyance' du 28 décembre 2011 disposent tous deux en termes identiques :



'La direction d'Alsthom et les organisations syndicales représentatives ont considéré comme prioritaire de définir une protection sociale complémentaire pour les salariés quittant une entreprise du groupe dans le cadre du dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (CAATA)'



Par cette clause ces avenants intègrent nécessairement le cas de l'intéressé qui a quitté l'entreprise dans le cadre d'un tel dispositif, ainsi qu'il l'a indiqué expressément à l'employeur lorsqu'il lui a notifié sa démission par lettre du 9 mars 2016.



Un autre paragraphe dispose que pour bénéficier de la protection sociale complémentaire, il faut que le départ d'un salarié présent à l'effectif à la date de la signature résulte de son appartenance à la date de la signature de l'avenant à un établissement classé du groupe Alstom figurant sur la liste établie par arrêté ministériel ou d'une maladie professionnelle liée à l'amiante. Ce texte a pour objet de déterminer les conditions d'application dans le temps de ces avenants, en ce qu'ils ne peuvent profiter qu'au salarié bénéficiaire de l'ACAATA, qui appartient à la date de la signature à un établissement classé du groupe. Tel est le cas de l'établissement TIS, qui a été considéré comme classé par la caisse. M. [U] [G] était par conséquent bien bénéficiaire de ces avenants.



Le salarié prétend prouver son préjudice né de l'absence de bénéfice des garanties de santé et prévoyance de l'accord de groupe par un justificatif de paiement de cotisations à une assurance complémentaire santé au titre des années 2018, 2019 et 2020, pour une démission bien antérieure avec effet au 1er avril 2016. Le décalage entre cette date et les justificatifs rend douteux le lien entre ces dépenses et la démission. Ceci ne saurait démontrer qu'il a subi un manque à gagner au regard de la combinaison du montant des cotisations payées par lui et des avantages procurés par l'organisme auquel il s'est adressé. Il sera donc débouté de ce chef.



III - Sur le préjudice d'anxiété



La SA Alstom Transport soulève la prescription de la demande de dommages-intérêts formée par M. [U] [G] en réparation du préjudice d'anxiété découlant de la connaissance du risque de développer une maladie induite de son exposition à l'amiante. Elle soutient que le délai de prescription de deux ans édicté par l'article L 1471-1 du code du travail est applicable en l'espèce s'agissant d'exécution du contrat de travail et d'un salarié ayant travaillé dans un établissement non soumis au régime de l'ACAATA pour ne pas être inscrit par arrêté ministériel sur la liste de ceux y ouvrant droit. Or elle relève qu'à la date de saisine du conseil des prud'hommes, ce délai était écoulé.



M. [U] [G] objecte que c'est au contraire le délai de prescription de droit commun de cinq ans qui s'applique et que celui-ci était encore en cours à la date de la saisine du conseil des prud'hommes soit du 23 juillet 2016, puisque le classement du site de la rue des Bateliers qui a ouvert le droit du salarié à l'ACAATA remonte à un arrêté du 23 décembre 2011.



Sur ce



Le régime propre de réparation du préjudice d'anxiété ouvert aux salariés ayant travaillé dans un établissement éligible à l'ACCATA a trait à la violation par l'employeur de son obligation de sécurité dans le cadre de l'exécution du contrat de travail. C'est donc le régime de l'article L. 1471-1 du code du travail relatif à la prescription en matière d'exécution du contrat de travail dans sa version applicable au moment de la saisine du conseil des prud'hommes qui s'applique.



Aux termes de cet article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction de la loi du 16 juin 2013, l'action relative à l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.



Cet article s'applique selon les dispositions transitoires de la loi du 16 juin 2013, à compter de la promulgation de celle-ci, soit à compter du 17 juin 2013, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder celle de la durée prévue par la loi antérieure du 17 juin 2008 qui fixait le délai de prescription à cinq ans.



La publication de l'arrêté qui a classé le site de la rue des Batelliers au titre de l'ACAATA constitue le point de départ du délai de prescription.



A la date de promulgation de la loi du 16 juin 2013, le délai de prescription antérieur de cinq ans, qui a couru à compter de la publication de l'arrêté du 23 décembre 2011, était en cours. A la date de la saisine du conseil des prud'hommes, soit le 26 juillet 2016, le délai de deux ans qui à couru à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 16 juillet 2013 était écoulé. L'action est donc prescrite et la demande irrecevable.



IV - Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile



Il est équitable au regard de l'article 700 du code de procédure civile de condamner l'employeur qui succombe dans une large mesure, à verser à M. [U] [G] une indemnité de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et le même montant au titre des frais irrépétibles d'appel ainsi qu'aux dépens. La SA Alstom Transport qui succombe sera déboutée de ces chefs.



PAR CES MOTIFS :



La Cour statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe et en dernier ressort ;



Infirme le jugement déféré, uniquement sur les demandes de dommages-intérêts pour perte du bénéfice des garanties frais de santé et prévoyance et pour préjudice d'anxiété ;



Statuant à nouveau ;



Déclare M. [U] [G] irrecevable en sa demande en paiement de la somme de 10.000 euros au titre du préjudice d'anxiété ;



Rejette la demande de M. [U] [G] en paiement de la somme de 5.000 euros de dommages-intérêts pour perte du bénéfice des garanties frais de santé et prévoyance ;



Confirme pour le surplus ;



Y ajoutant ;



Condamne la SA Alstom Transport au paiement de la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;



Déboute la SA Alstom Transport de sa demande au titre des frais irrépétibles d'appel ;



Condamne la SA Alstom Transport aux dépens d'appel.



LA GREFFI'RE LE PR''SIDENT

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