26 janvier 2011
Cour de cassation
Pourvoi n° 09-43.139

Chambre sociale

ECLI:FR:CCASS:2011:SO00282

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 23 juin 2009), que M. X... a été engagé le 2 juillet 1990 par la société Fermatic, en qualité de technico-commercial ; que le salarié, en arrêt de travail pour maladie à compter du 20 janvier 2007, a été déclaré, à l'issue de la visite de reprise le 7 mai 2007, par le médecin du travail «inapte à tous postes de l'entreprise, procédure unique, notion de danger immédiat, article R. 241-51-1 du code du travail»; qu'après avoir refusé un poste de reclassement le 21 mai 2007, l'employeur l'a convoqué le 3 septembre à un entretien préalable à son licenciement fixé au 12 septembre ; que le 7 septembre, le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur, faisant valoir notamment que celui-ci devait, à la suite de son refus, soit faire de nouvelles propositions de reclassement, soit le licencier mais non pas maintenir artificiellement son contrat de travail ; que sur recours de l'employeur, l'inspecteur du travail a confirmé entre-temps le 17 juillet la décision d'inaptitude, décision confirmée le 30 octobre 2007 par le ministre du travail ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;


Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la prise d'acte de rupture du contrat de travail par M. X... doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, de rappel de salaire de mise à pied, et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que si les recours administratifs qu'il a formés contre la décision d'inaptitude du médecin du travail, puis contre la décision de l'inspecteur du travail ne le dispensent pas du respect de son obligation de paiement du salaire après l'expiration du délai d'un mois prévu à l'article L. 122-24-4, alinéa 3, du code du travail devenu l'article L. 1226-2 du même code, l'employeur n'est cependant pas tenu de tirer les conséquences du refus du salarié, déclaré inapte à son emploi par le médecin du travail, du poste de reclassement proposé, en procédant à son licenciement avant la notification de la décision du ministre du travail, statuant sur le recours qu'il a exercé contre la décision de l'inspecteur du travail ; qu'en décidant, après avoir constaté que c'est par décision du 30 octobre 2007 que le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité a confirmé la décision de l'inspecteur du travail concernant l'inaptitude de M. X..., que la société Fermatic a manqué à l'exécution des obligations découlant de la constatation de l'inaptitude du salarié à son emploi qui justifie la prise d'acte de la rupture du salarié parce qu'elle s'est abstenue d'effectuer toute nouvelle recherche de reclassement et n'a pas tiré les conséquences du refus du salarié exprimé par lettre du 21 mai 2007 à sa proposition de reclassement, en procédant à son licenciement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L. 241-10-1, dernier alinéa du code du travail, devenu l'article L. 4624-1 du même code, ensemble l'article L. 1222-1 du code du travail ;


Mais attendu, d'abord, que l'exercice du recours prévu à l'article L. 4624 –1 du code du travail ne suspend pas le délai d'un mois imparti à l'employeur pour procéder au licenciement du salarié déclaré par le médecin du travail inapte à son emploi ;


Attendu, ensuite , qu'en cas de refus du poste de reclassement proposé en application de l'article L.1226 –2 du code du travail au salarié déclaré inapte, il appartient à l'employeur de tirer les conséquences du refus du salarié, soit en formulant de nouvelles propositions de reclassement, soit en procédant au licenciement de l'intéressé aux motifs de l'impossibilité de reclassement ; que la reprise par l'employeur du paiement des salaires à laquelle il est tenu en application de l'article L. 1226 –4 dudit code ne le dispense pas de l'obligation qui lui est faite par l'article L. 1226 –2 du code du travail, de proposer un poste de reclassement ;


Attendu, enfin, qu'ayant relevé que le salarié avait refusé le 21 mai 2007 le poste proposé à titre de reclassement et que l'employeur, postérieurement à cette date, s'était abstenu d'effectuer toutes nouvelles recherches de reclassement, la cour d'appel a déduit les conséquences légales de ses constatations ;


D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;


PAR CES MOTIFS :


REJETTE le pourvoi ;


Condamne la société Fermatic aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Fermatic à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille onze.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Fermatic


Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la prise d'acte de rupture du contrat de travail par Monsieur Pierre X... doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en conséquence condamné la Société Fermatic au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, de rappel de salaire de mise à pied, et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,


Aux motifs que selon l'article L 122-24-4 devenu L 1226-2 à L 1226-4 du Code du travail, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident, si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que si le salarié n'est pas reclassé dans l'entreprise à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail ou s'il n'est pas licencié, l'employeur est tenu de verser à l'intéressé, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail ; que le 7 mai 2007 à l'issue d'une seule visite, le médecin du travail, constatant le danger immédiat pour la santé du salarié, l'a déclaré inapte à tous les postes dans l'entreprise ; que l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur comme l'obligation de reprendre le paiement du salaire si le salarié n'est pas reclassé dans l'entreprise à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail ou s'il n'est pas licencié, trouvent à s'appliquer y compris en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail ; que le recours formé contre la décision d'inaptitude du médecin du travail ne dispense pas l'employeur du respect de ces obligations ; que pas plus la reprise du salaire par l'employeur ne le dispense de l'obligation de rechercher un poste de reclassement ; que le 18 mai 2007, la société Fermatic a proposé à Monsieur X... un poste de technico-commercial dans une autre société du groupe dont le dirigeant était le même que celui de la société Fermatic ; que le 21 mai 2007, le salarié a refusé cette proposition par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; que dès lors, indépendamment de l'obligation de reprise du paiement du salaire, il appartenait à la société Fermatic de tirer les conséquences du refus du salarié, déclaré inapte à son emploi par le médecin du travail, du poste de reclassement proposé, soit en formulant de nouvelles propositions de reclassement, soit en procédant à son licenciement, le cas échéant en se prévalant de ce qu'elle considérait comme un refus injustifié ; que la société Fermatic est mal fondée à prétendre que le juge des référés qui a dit n'y avoir lieu à référé sur une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail formulée par Monsieur X... aurait approuvé l'option qu'elle a choisie consistant à reprendre le paiement du salaire mais à ne pas licencier le salarié ; qu'au demeurant, le moyen soutenu devant la cour selon lequel la société Fermatic a choisi cette option démontre le caractère délibéré de l'attitude adoptée sur ce point par l'employeur ; qu'or, le 23 mai 2007, la société F ermatic a par courrier recommandé, informé Monsieur X... qu'après avoir recherché activement un poste de reclassement au sein de l'entreprise, il "s'avère que malheureusement aucun poste n'est disponible" ; que postérieurement à cette date, l'employeur s'est abstenu d'effectuer toute nouvelle recherche de reclassement et n'a pas tiré les conséquences du refus du salarié, maintenant donc sciemment celui-ci dans une situation d'inactivité forcée au sein de l'entreprise et sans aucune évolution possible, et ceci malgré la demande du conseil du salarié en date du 15 juin 2007 à laquelle l'employeur s'est borné à répondre que le salarié faisait toujours partie de l'effectif de l'entreprise ; que l'employeur a ainsi manqué à l'exécution des obligations découlant de la constatation de l'inaptitude du salarié à son emploi ; que cette inexécution justifie en l'espèce la prise d'acte de la rupture du salarié en considération notamment de ce que selon les décisions administratives intervenues et l'avis d'inaptitude du médecin du travail qui n'a pas été infirmé à ce jour, "l'altération des relations entre Monsieur X... et son employeur est la cause principale de la dégradation de l'état de santé du salarié", du fait de la situation persistante et gravement anormale de tension avec l'employeur lié à un conflit familial, de sorte que l'inaction volontaire de l'employeur tendant à maintenir le salarié sous son autorité ne pouvait qu'affecter la santé de son salarié ; que le juge ne doit examiner que les motifs de la prise d'acte de la rupture qui est antérieure au licenciement et il importe peu dans ces circonstances que l'employeur reproche au salarié d'avoir commencé à travailler pour un autre employeur à compter du 2 juillet 2007 ; que la prise d'acte de la rupture doit donc produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et le jugement sera confirmé de ce chef ;


Alors que, si les recours administratifs qu'il a formés contre la décision d'inaptitude du médecin du travail, puis contre la décision de l'inspecteur du travail ne le dispensent pas du respect de son obligation de paiement du salaire après l'expiration du délai d'un mois prévu à l'article L. 122-24-4, alinéa 3, du Code du travail devenu l'article L. 1226-2 du même Code, l'employeur n'est cependant pas tenu de tirer les conséquences du refus du salarié, déclaré inapte à son emploi par le médecin du travail, du poste de reclassement proposé, en procédant à son licenciement avant la notification de la décision du ministre du travail, statuant sur le recours qu'il a exercé contre la décision de l'inspecteur du travail ; qu'en décidant, après avoir constaté que c'est par décision du 30 octobre 2007 que le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité a confirmé la décision de l'inspecteur du travail concernant l'inaptitude de Monsieur X..., que la Société Fermatic a manqué à l'exécution des obligations découlant de la constatation de l'inaptitude du salarié à son emploi qui justifie la prise d'acte de la rupture du salarié parce qu'il s'est abstenu d'effectuer toute nouvelle recherche de reclassement et n'a pas tiré les conséquences du refus du salarié exprimé par lettre du 21 mai 2007 à sa proposition de reclassement, en procédant à son licenciement, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L. 241-10-1, dernier alinéa du Code du travail, devenu l'article L. 4624-1 du même Code, ensemble l'article L. 1222-1 du Code du travail.

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