6 October 2022
Cour d'appel de Bordeaux
RG n° 19/02576

2ème CHAMBRE CIVILE

Texte de la décision

COUR D'APPEL DE BORDEAUX



DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE



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ARRÊT DU : 06 OCTOBRE 2022





N° RG 19/02576 - N° Portalis DBVJ-V-B7D-LAKN







SARL AUTOANTHO





c/



Monsieur [U] [C]



























Nature de la décision : AU FOND





























Grosse délivrée le :



aux avocats





Décision déférée à la cour : jugement rendu le 26 mars 2019 (R.G. 19/000132) par le Tribunal d'Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 07 mai 2019



APPELANTE :



La SARL AUTOANTHO, société à responsabilité limitée unipersonnelle immatriculée au RCS de BORDEAUX sous le n° 820 250 959, dont le siège social est sis [Adresse 6] - [Localité 3], actuellement domiciliée [Adresse 7] ' [Localité 2], prise en la personne de son Gérant domicilié en cette qualité audit siège



Représentée par Me Mathilda BONNIN, avocat au barreau de BORDEAUX



INTIMÉ :



[U] [C]

né le 02 Mars 1965 à [Localité 4] ([Localité 4])

de nationalité Française

Profession : Employé communal,

demeurant [Adresse 1] - [Localité 5]



Représenté par Me Dominique LAPLAGNE, avocat au barreau de BORDEAUX





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 septembre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle LOUWERSE, Conseiller chargé du rapport,



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :



Madame Paule POIREL, Président,

Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller,

Madame Isabelle LOUWERSE, Conseiller,



Greffier lors des débats : Mme Audrey COLLIN





ARRÊT :



- contradictoire



- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.




EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE :



Par acte d'huissier en date du 4 janvier 2019, M. [U] [C] a assigné la Sarl AUTOANTHO devant le tribunal d'instance de Bordeaux aux fins notamment de voir ordonner la résolution de la vente du véhicule de marque BMW de type série 3, immatriculé AJ 596 MF, intervenue le 25 novembre 2018 entre la société AUTOANTHOet M. [C].



Par jugement du 26 mars 2019, le tribunal d'instance de Bordeaux a :



- prononcé la résolution de la vente du véhicule de marque BMW de type série 3, immatriculé AJ 596 MF, intervenue le 25 novembre 2018 entre la société AUTOANTHO et M. [C] ;

- condamné la Sarl AUTOANTHO à restituer à M. [C] le prix du véhicule, soit la somme de 3 340 euros, et à récupérer à ses frais ledit véhicule au [Adresse 1], [Localité 5];

- condamné la Sarl AUTOANTHO à payer à M. [C] la somme de 1 151,19 euros à titre de dommages et intérêts ;

- débouté M. [C] du surplus de ses demandes ;

- condamné la Sarl AUTOANTHO à payer à M. [C] la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement ;

- condamné la Sarl AUTOANTHO au paiement des entiers dépens de l'instance.



La Sarl Autoantho a relevé appel de cette décision le 7 mai 2019.



Aux termes de ses dernières conclusions en date du 6 août 2019, la Sarl AUTOANTHO demande à la cour de : 

- la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes ;

Y faisant droit :

- infirmer le jugement dont appel rendu le 26 mars 2019 par le tribunal d'instance de Bordeaux, sauf en ce qu'il déboute M. [C] du surplus de ses demandes et dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement ;

Statuant à nouveau :

- constater et prononcer la validité de la vente du véhicule de marque BMW de type série 3, immatriculé AJ596MF, intervenue le 25 novembre 2018 entre elle et M. [C] ;

- rejeter la demande de dommages et intérêts infondée et injustifiée formulée par M. [C] ;

- débouter, en conséquence, M. [C] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions ;

En toutes hypothèses :

- condamner M. [C] à lui verser la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- le condamner aux entiers dépens.



Elle fait notamment valoir que :

- le dernier contrôle technique effectué avant la cession du véhicule à M. [C] datait du 14 mai 2018 et ne relevait aucune défaillance majeure à corriger avec contre-visite. Ainsi, le prochain contrôle technique aurait dû intervenir au plus tard le 14 mai 2020 ;

- au-delà de la volonté non équivoque de M. [C] d'acquérir immédiatement le véhicule en l'état, en sachant parfaitement qu'aucun contrôle technique n'avait été effectué par le vendeur, force est de constater que l'article R.323-22 du code de la route n'en faisait pas l'obligation à la société dans la mesure où le véhicule avait déjà subi un contrôle technique dans les six mois précédant la demande d'établissement d'un nouveau certificat d'immatriculation par la société AUTO1 EUROPEAN CARS B.V. lorsque celle-ci a acheté ledit véhicule à M. [L] le 27 octobre 2018 ;

- M. [C] a tenté de négocier le prix de vente du véhicule à la baisse parce qu'il avait parfaitement conscience de l'absence de contrôle technique réalisé par l'appelante, ce que celle-ci a accepté. Dès lors, M. [C] est aujourd'hui mal fondé à solliciter la résolution d'une vente qu'il a pourtant négocié en toute liberté et connaissance de cause ;

- compte tenu de la validité de la vente intervenue entre les parties, il apparaît totalement infondé et injustifié de la condamner au paiement de dommages et intérêts au profit de M. [C].



Dans ses dernières conclusions notifiées le 20 août 2022, M. [C] demande à la cour de :

- déclarer recevable mais mal fondé l'appel de la société AUTOANTHO contre le jugement du tribunal d'instance de Bordeaux du 26 mars 2019 ;

- confirmer la résolution de la vente du véhicule de marque BMW de type série 3, immatriculé AJ596MF, intervenue le 25 novembre 2018 entre la société AUTOANTHO et lui ;

- confirmer le principe de la condamnation indemnitaire de la société AUTOANTHO et réformer la décision sur le montant de l'indemnisation ;

En conséquence :

- condamner la société AUTOANTHO à lui restituer le prix de 3 340 euros et à récupérer le véhicule à ses frais dans le lieu où il se trouve, soit 15, Lieu-dit [Adresse 1] - [Localité 5] ;

- condamner la société AUTOANTHO à lui payer la somme de 3 762,84 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires ;

- condamner la société AUTOANTHO à lui payer la somme de 2 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens dont distraction au profit de Me Laplagne, avocat à la cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



Il fait notamment valoir que :

- les défauts de conformité sont démontrés et présumés exister avant la vente, dès lors qu'ils ont été dénoncés dans les 6 mois de cette dernière ;

- à titre subsidiaire, le vendeur a manqué à son obligation de délivrance conforme ;

- le véhicule a été vendu sans contrôle technique en contravention des dispositions des articles R 323-1 et suivants du code de la route, ce qui a été dénoncé par l'assurance protection juridique du concluant dans les jours suivants la vente ;

- la société Autoantho, professionnel de la vente d'automobile, ne pouvait pas se délier de son obligation, sans avoir préalablement informé son cocontractant, consommateur, des dispositions réglementaires afférentes à la communication du PV de contrôle technique de moins de 6 mois;

- le jour de la livraison du véhicule, le concluant a fait réaliser un nouveau contrôle technique, faisant apparaître 7 défauts majeurs qui interdisaient la vente du véhicule en l'état, dès lors qu'il n'était pas conforme à la circulation ;

- il a acquis un véhicule qui ne peut pas rouler, si bien qu'il en résulte un préjudice de jouissance ainsi qu'un préjudice financier en lien avec les frais occasionnés par la vente et la possession du véhicule qui est inutilisable.



L'ordonnance de clôture a été rendue le 25 août 2022.



Par application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément fait référence aux conclusions susvisées pour un exposé complet des moyens et de l'argumentation développés par chacune des parties.




MOTIFS DE LA DECISION.



Sur la résolution de la vente du véhicule.



Le tribunal a prononcé la résolution de la vente intervenue le 25 novembre 2018 entre la Sarl AUTOANTHO et M. [C] en raison de l'absence de réalisation d'un contrôle technique dans le délai de six mois précédant la vente, laquelle constitue une obligation contractuelle essentielle faisant partie des accessoires indispensables de la vente et dont la méconnaissance justifie que soit prononcée la résolution de la vente.



La Sarl AUTOANTHO demande l'infirmation du jugement en faisant valoir qu'elle n'était pas tenue de faire passer un nouveau contrôle technique au véhicule, le précédent ayant été réalisé dans les six mois précédant la vente.



M. [C] demande la confirmation du jugement précisant en appel qu'il fonde sa demande de résolution sur la garantie légale de conformité des articles L.217-4 et suivants du code de la consommation et à titre subsidiaire sur le fondement des articles 1604 et suivants du code civil.

Les articles L.217-4 et suivants du code de la consommation posent le principe d'une garantie légale de conformité, obligeant le vendeur à répondre des défauts de conformité, le bien étant conforme au contrat s'il répond aux exigences de l'article L.217-5 selon lequel il doit être propre à l'usage habituellement attendu d'un bien semblable ou s'il présente les caractéristiques définies d'un commun accord par les parties ou est propre à tout usage spécial recherché par l'acheteur, porté à la connaissance du vendeur et accepté par lui.



Les dispositions relatives au contrôle technique ressortent de l'article R.323-22 du code de la route qui dispose que :

'Les véhicules légers définis au II de l'article R. 323-6 doivent faire l'objet :

1° D'un contrôle technique dans les six mois précédant l'expiration d'un délai de quatre ans à compter de la date de leur première mise en circulation ;

2° Postérieurement à ce contrôle, d'un contrôle technique périodique, renouvelé tous les deux ans;

3° Avant toute mutation intervenant au-delà du délai de quatre ans prévu au 1° ci-dessus, d'un contrôle technique, dont sont toutefois dispensés les véhicules ayant subi un contrôle technique dans les six mois précédant la date de demande d'établissement du nouveau certificat d'immatriculation ;

4° Pour les véhicules de collection, le délai entre deux contrôles techniques est porté à cinq ans à l'exception des cas de mutation.

II. - En outre, les véhicules légers de catégorie N1 doivent faire l'objet, dans les deux mois précédant l'expiration d'un délai d'un an après chaque contrôle technique, d'un contrôle technique complémentaire portant sur le contrôle des émissions polluantes. Cette disposition n'est pas applicable aux camionnettes de collection.

III. - Ne sont pas soumis à ces obligations les véhicules devant subir un contrôle technique en application d'une réglementation spécifique, notamment les véhicules de moins de dix places, conducteur compris, affectés au transport public, collectif ou particulier, de personnes, les véhicules utilisés pour les transports sanitaires terrestres, les véhicules utilisés pour l'enseignement de la conduite des véhicules à moteur'.



En l'espèce, le véhicule a été mis en circulation pour la première fois le 17 juillet 2002 et devait donc passer un contrôle technique tous les deux ans. Le dernier contrôle technique effectué avant la cession du véhicule à M. [C] date du 14 mai 2018 la vente ayant eu lieu le 25 novembre 2018, soit plus de six mois après le dernier contrôle technique en sorte que c'est à tort que la Sarl AUTOANTHO prétend qu'elle n'avait pas l'obligation de procéder à un nouveau contrôle technique avant la vente.



Le procès-verbal de contrôle technique du 14 mai 2018 ne mentionne aucune défaillance majeure tandis que le procès-verbal de contrôle technique du 28 novembre suivant en mentionne six.



La facture de vente du véhicule mentionne que le véhicule est vendu sans contrôle technique et avec une garantie de 3 mois pour le moteur, la boîte de vitesse et le pont.



Aux termes des articles L.217-9 et L. 217-10 du code de la consommation, en cas de défaut de conformité, l'acheteur choisit entre la réparation et le remplacement du bien et ce n'est que si la réparation et le remplacement du bien sont impossibles que l'acheteur peut rendre le bien et se faire restituer le prix ou garder le bien et se faire rendre une partie du prix, la résolution de la vente ne pouvant être prononcée si le défaut de conformité est mineur.



Ces dispositions n'ont pas été mises en oeuvre par M. [C] qui ne justifie pas avoir sollicité la réparation ou le remplacement du bien, n'étant pas davantage justifié que la réparation des défauts mentionnés comme étant majeurs sur le procès-verbal de contrôle technique du 28 novembre 2018 ne sont pas réparables.



Les conditions de la résolution de la vente sur le fondement de la garantie légale de conformité ne sont donc pas remplies.



Sur la demande de résolution de la vente sur le fondement des articles 1604 et suivants du code civil selon lesquels le vendeur est tenu d'une obligation de délivrance conforme, la délivrance conforme suppose que la chose livrée est identique à celle convenue en nature, quantité et qualité. Il incombe aux juges du fond de déterminer in concreto quelles étaient les caractéristiques de la chose en considération desquelles la vente avait été conclue.





En l'espèce, c'est à juste titre que M. [C] souligne que les dispositions du code de la route prévoyant la remise du procès-verbal de contrôle technique sont d'ordre public et que le vendeur ne peut s'affranchir de celles-ci, que le procès-verbal de contrôle technique est un accessoire de la chose vendue dont la remise constitue une obligation contractuelle essentielle du vendeur permettant à l'acheteur de se convaincre de l'état réel du véhicule et que, quand bien même serait-elle mentionnée sur la facture du véhicule, le défaut de délivrance de ce document constitue ainsi un défaut de délivrance conforme justifiant que soit prononcée la résolution dela vente.



Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente du véhicule, a condamné la Sarl AUTOANTHO à restituer à M. [C] le prix du véhicule soit la somme de 3340 euros et à récupérer à ses frais le dit véhicule.



Sur les dommages-intérêts.



Le tribunal a condamné la Sarl AUTOANTHO à verser à M. [C] une somme de 1151,19 euros à titre de dommages-intérêts représentant le remboursement de frais divers et l'indemnisation du préjudice de jouissance à hauteur de 800 euros.



La Sarl AUTOANTHO demande l'infirmation du jugement et le rejet de la demande de dommages-intérêts de M. [C], soutenant que le tribunal n'a pas caractérisé le préjudice de jouissance et que le remboursement de la cotisation d'assurances et du procès-verbal de contrôle technique ne sont pas justifiés.



M. [C] demande également l'infirmation du jugement et sollicite que lui allouée une somme de 3762,84 euros à titre de dommages-intérêts, faisant observer qu'il ne peut circuler avec le véhicule depuis le jour de la vente soit depuis le 25 novembre 2018. Il demande à être indemnisé sur la base de 10 euros par jour, outre la réévalution de la cotisation d'assurance payée pour un véhicule qui ne peut circuler, et sollicite une somme de 2500 euros au titre de son préjudice financer, moral et de jouissance.



Il convient de relever qu'il n'est pas établi par les éléments du dossier en l'absence de tout avis technique, que le véhicule n'est pas en état de circuler. M. [C] n'est donc pas fondé à réclamer le remboursement des cotisations d'assurance payées, outre qu'il est parfaitement possible de suspendre une police d'assurance si un véhicule ne circule pas habituellement, pas davantage qu'il ne justifie de son préjudice de jouissance ne donnant aucune précision sur les éléments permettant de caractériser un tel préjudice, ni d'un préjudice moral ou financier.



La demande au titre du remboursement du contrôle technique du 28 novembre 2018 qui aurait dû être effectué avant la vente est par contre justifiée à hauteur de 69 euros.



Le jugement sera réformé en ce qu'il a condamné la Sarl AUTOANTHO au paiement d'une somme de 1151,19 euros à titre de dommages-intérêts, cette somme étant ramenée à 69 euros.



Sur les mesures accessoires.



Le jugement est confirmé en ce qu'il statué sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.



Partie perdante, la Sarl AUTOANTHO sera condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à M. [C] une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile du code de procédure civile.



Par ces motifs,



Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné la Sarl AUTOANTHO à payer à M. [U] [C] une somme de 1151,19 euros à titre de dommages-intérêts,



Statuant à nouveau de ce seul chef et y ajoutant,



Condamne la Sarl AUTOANTHO à payer à M. [U] [C] une somme de 69 euros à titre de dommages-intérêts,



Condamne la Sarl AUTOANTHO à payer à M. [U] [C] une somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne la Sarl AUTOANTHO aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.



La présente décision a été signée par madame Paule POIREL, présidente, et madame Audrey COLLIN, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.





LE GREFFIER LA PRESIDENTE

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