28 September 2016
Cour de cassation
Pourvoi n° 15-19.031

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2016:SO01549

Texte de la décision

SOC.

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 28 septembre 2016




Cassation partielle


M. HUGLO, conseiller le plus ancien faisant fonction de président



Arrêt n° 1549 F-D

Pourvoi n° W 15-19.031
Z 15-19.310JONCTION






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

I - Statuant sur le pourvoi n° W 15-19.031 formé par la société Air liquide France industrie, société anonyme, dont le siège est [...] ,

contre un arrêt rendu le 1er avril 2015 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. Y... K..., domicilié [...] ,

2°/ à la fédération nationale des industries chimiques CGT, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation ;

II - Statuant sur le pourvoi n° Z 15-19.310 formé par :

1°/ M. Y... K...,

2°/ la fédération nationale des industries chimiques CGT

contre le même arrêt rendu entre les mêmes parties ;

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse au pourvoi W 15-19.031 invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Les demandeurs au pourvoi Z 15-19.310 invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 29 juin 2016, où étaient présents : M. Huglo, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Mariette, conseiller référendaire rapporteur, Mme Reygner, conseiller, M. Petitprez, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Mariette, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Air liquide France industrie, de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de M. K..., et de la fédération nationale des industries chimiques CGT, l'avis de M. Petitprez, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu la connexité joint les pourvois W 15-19.031 et Z 15-19.310 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. K..., salarié de la société Air liquide devenue la société Air liquide France industrie a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de dommages-intérêts notamment en réparation d'un préjudice d'anxiété ;

Sur les premier et second moyen du pourvoi Z 15-9.310 du salarié :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi W1519031 de l'employeur :

Vu l'article L. 4121-1 du code du travail, ensemble l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;

Attendu qu'il résulte de ces textes que la réparation du préjudice d'anxiété n'est admise, pour les salariés exposés à l'amiante, qu'au profit de ceux remplissant les conditions prévues par l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et l'arrêté ministériel ;

Attendu que pour condamner l'employeur à payer au salarié une certaine somme en réparation de son préjudice d'anxiété, l'arrêt retient que le groupe Air liquide présentait au début des années 1980 un risque sérieux lié à l'amiante après la détection d'un cas d'asbestose ; que dès avril 1980, le CHSCT a alerté l'entreprise sur le fait que des personnes manipulaient des produits à base d'amiante ; que le chargé de sécurité courant 1986 a signalé que certaines fibres d'amiante peuvent occasionner à longue échéance des lésions de l'appareil respiratoire inscrites au tableau nº 30 des maladies professionnelles ; que des témoignages de salariés ont confirmé une utilisation de produits ou d'éléments d'équipement à base d'amiante sans protection ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les établissements dans lesquels le salarié avait été affecté, figuraient sur la liste des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Air liquide France industrie à verser à M. K... la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice d'anxiété, l'arrêt rendu le 1er avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. K... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par Mme Reygner, conseiller en ayant délibéré, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions de l'articles 452 du code de procédure civile, par M. Huglo, conseiller le plus ancien faisant fonction de président et par Mme Becker, greffier de chambre présente lors de la mise à disposition du présent arrêt ;

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit au pourvoi W 15-19.031 par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, pour la société Air liquide France industrie

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la Société ALFI à verser à Monsieur K... la somme de 20.000 € en réparation du préjudice résultant du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et de résultat ;

AUX MOTIFS QUE « Au soutien de sa demande de ce chef, M. K... rappelle qu'il a régulièrement travaillé sur les sites de Vitry sur Seine de 1982 à 1995 et de Blanc Mesnil de 1995 à 2007, que tous ont été recensés par la société Air Liquide elle-même comme ayant pu provoquer une exposition de ses salariés à l'amiante, que la présence de ce produit a été détectée dès 1987 au sein de l'atelier H40 de l'unité 4 (Département de Construction et de Ventes Mécaniques ' DCVM) de l'établissement de Vitry sur Seine, qu'il a été spécialement mentionné en juillet 2006 comme un des salariés exposés à ce type de risque dans l'entité GIS, qu'il n'y avait aucune protection individuelle et collective réellement adaptée contre les risques physiques en découlant dès lors que, notamment, en l'absence de système d'aspiration, l'air ambiant était chargé de poussières d'amiante avec un mode de nettoyage de l'atelier totalement inapproprié, ce que ne pouvait ignorer l'employeur, et que malgré de telles conditions de travail il n'y a eu aucune information sur les risques pour leur santé, ce qui constitue, selon lui, un manquement de l'intimée à son obligation de sécurité de résultat au visa de l'article L.4121-1 du code du travail. Contrairement à ce qu'objecte sur ce point la Sa Alfi qui prétend que M. K... n'a pas été en contact avec des produits à base d'amiante qu'il aurait pu manipuler tout en étant exposé à un risque d'inhalation de fibres d'amiante, au vu des pièces produites par ce dernier, il ressort que dès avril 1980 la commission d'hygiène et de sécurité insistait sur la situation des «personnes manipulant des produits à base d'amiante», qu'en septembre 1981 la direction émettait une note «AMIANTE» suite à la détection d'un cas d'asbestose révélateur des «dangers présentés par la manipulation d'un produit contenant de l'amiante utilisé pour le garnissage de certains appareils de production de gaz»; que le chargé de sécurité en juin 1986 indiquait encore que «certaines fibres d'amiante peuvent occasionner à longue échéance des lésions de l'appareil respiratoire inscrites au tableau nº 30 des maladies professionnelles»; que dans un document de juillet 2006 «Point Amiante» présenté au comité central d'entreprise la direction faisait le recensement des salariés directement exposés à l'amiante en visant notamment l'entité GIS de Vitry sur Seine où il était alors en poste et que plusieurs témoignages viennent confirmer, outre les insuffisances dans la communication en direction des salariés concernés, une utilisation régulière et massive de produits ou d'éléments d'équipement à base d'amiante sans aucune protection individuelle adaptée et encore moins collective. En vertu du contrat de travail le liant aux salariés, l'employeur est tenu envers ceux-ci d'une obligation générale de sécurité de résultat en matière de protection de leur santé ainsi que de leur sécurité dans l'entreprise, ce dont l'intimée s'est manifestement abstenue pour les raisons venant d'être exposées, en violation des prescriptions posées par l'article L.4121-1 du code du travail, texte rappelant que «l'employeur prend les mesures nécessaires» en ce sens. La SA ALFI sera en conséquence condamnée à payer à M. K... la somme indemnitaire à ce titre de 20'000 € en réparation du préjudice qu'il a subi consécutivement à ce manquement de l'intimée, avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE seuls les salariés, qui ont travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, se trouvent, par le fait de l'employeur, dans une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante ; qu'en accordant à Monsieur K... une indemnité pour violation de l'obligation de sécurité de résultat en raison des risques liés à l'amiante au sein du groupe industriel AIR LIQUIDE, sans constater que les établissements dans lesquels Monsieur K... est intervenu au sein de la Société AIR LIQUIDE puis de la Société ALFI figuraient sur la liste des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et suivants du code civil et L.4121-l et suivants du code du travail ensemble l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;

ALORS, D'AUTRE PART ET PLUS ENCORE, QU'en accordant à Monsieur K... une indemnité pour violation de l'obligation de sécurité de résultat en raison des risques liés à l'amiante, sans constater que ce dernier ait été personnellement et régulièrement exposé à l'amiante au cours de sa carrière, ni même établir le caractère certain de son préjudice d'anxiété découlant de ce risque, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et suivants du code civil et L.4121-l et suivants du code du travail.

Moyens produits au pourvoi n° Z 15-9.310 par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils pour M. K... et autre

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande tendant à voir dire et juger qu'il avait fait l'objet d'une discrimination syndicale et, par conséquent, à obtenir son repositionnement professionnel en termes de coefficient et de salaire, le paiement de rappels de salaire en découlant ainsi que de dommages et intérêts pour préjudices financier et moral, la remise de documents sociaux conformes à ses droits et le paiement d'une somme en application de l'article 700 du Code de procédure civile et ainsi que des dépens.

AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'action, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de ses activités syndicales ; que selon l'article L. 1134-1 du code du travail, en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, au vu desquels, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en l'espèce, M. K... soutient que, si l'analyse du panel des comparants élaboré conjointement par le syndicat CGT et la direction, ne met pas en exergue de différence en termes de rémunération ou de coefficient, elle révèle une disparité de traitement dans la mesure où il aurait dû avoir une évolution de carrière plus favorable que la moyenne de son panel compte tenu de ses compétences spécifiques en matière de cryo bio, domaine dans lequel il est spécialiste en région parisienne, où il a formé des salariés et déposé de nombreuses innovations ; qu'il affirme que son engagement syndical a été un frein certain au développement de sa carrière ; que M. K... évoque par ailleurs le fait que ses augmentations individuelles ont toujours été nettement inférieures à la moyenne de celles des autres salariés de la filiale ; qu'il souligne en outre qu'en comparaison avec l'ensemble des salariés de la société, il bénéficie au coefficient 250 d'un salaire inférieur de 1% de la médiane, et qu'il est resté deux à trois fois plus longtemps dans chaque coefficient que les autres ; qu'il ressort des pièces versées aux débats que M. K... a été embauché au salaire mensuel de base de 716,51 € brut ; qu'il est établi que la date à partir de laquelle la société Alfi ne pouvait ignorer l'engagement syndical de M. K... a été conjointement validée par la direction et l'organisation syndicale CGT, à savoir l'année 1984 ; qu'il n'est pas contesté qu'un panel de comparaison a été conjointement établi au cours de l'année 2009 par la direction et la CGT, rassemblant des salariés ayant des caractéristiques comparables à celles du salarié dont la situation est examinée, à savoir : - une embauche au même coefficient - une ancienneté et un âge comparable - une qualification à l'embauche similaire - une appartenance au même département Air Liquide ; que M. K... a ainsi bénéficié d'un panel de comparaison comprenant 12 salariés ; qu'il en résulte qu'en 1983, seuls deux salariés bénéficiaient d'une rémunération plus importante que lui ; qu'en 2008, alors qu'il bénéficiait d'un salaire de 2 122 € et du coefficient 250, cinq salariés étaient mieux rémunérés que lui et quatre d'entre eux avaient atteint un coefficient supérieur au sien ; que la moyenne des salaires des 12 salariés composant le panel s'élevait en 1983 à 810 € et en 2008 à 1 € ; que ce mode de calcul doit être retenu en ce qu'il permet de tenir compte des niveaux de rémunération de chacun, les plus bas comme les plus hauts, et intègre donc de façon concrète les évolutions professionnelles de chacun, alors que le fait de retenir, comme le suggère l'employeur, le salaire médian, revient à éliminer les salaires les plus bas ainsi que les plus hauts, ce qui ne permet pas de refléter la diversité des possibilités d'évolution ; que M. K... percevait donc en 1983 une rémunération supérieure de 49 € à la moyenne des salariés du panel, et en 2008 d'une rémunération supérieure de € à cette moyenne ; qu'il résulte donc pas de ces éléments que l'évolution de la carrière de M. K... aurait été freinée à compter de son engagement syndical ; qu'en ce qui concerne les augmentations individuelles, M. K... verse aux débats des tableaux pour les années 2010, 2011 et 2012, dans lesquels il compare ses augmentations avec le montant moyen des augmentations individuelles accordé à l'ensemble des salariés hommes de la filiale à laquelle il appartient ; qu'il mentionne ainsi avoir bénéficié d'une augmentation annuelle de 300 € en 2010 lorsque le montant moyen d'augmentation individuelle était de 932 € dans sa tranche de rémunération, d'une augmentation de 431,14 € en 2011 alors que le montant moyen était de 702 €, et de 282,88 € en 2012 alors que le montant moyen était de 320 €, et de 426 € en 2013 alors que le montant moyen était de 722 € ; qu'il y a toutefois lieu de souligner que, si M. K... prétend avoir établi le montant des augmentations individuelles annuelles moyennes dans la filiale à partir des données issues du bilan de la paritaire salaire pour chaque année, force est de constater que ces bilans ne sont pas produits ; qu'en tout état de cause, cette comparaison est inopérante dans la mesure où M. K... ne saurait invoquer une discrimination en se comparant à l'ensemble des salariés de sa filiale, fondée sur une moyenne, ce qui ne permet pas d'établir si les salariés auxquels il se compare se trouvent dans une situation identique à la sienne, que ce soit en termes de coefficient, d'ancienneté ou de qualification ; qu'il convient de rappeler à cet égard qu'une différence de traitement entre les salariés d'une même entreprise ne constitue pas en elle-même une discrimination illicite au sens de l'article L. 1132-1 du code du travail précité, des salariés qui ne se trouvent pas dans une situation identique pouvant percevoir des salaires différents ; qu'il ressort des pièces versés aux débats que M. K..., qui a été embauché en 1982 au coefficient 150, est passé en 1984 au coefficient 160, puis au coefficient 175 en 1986, au coefficient 205 en 1993, au coefficient 225 en 1995, au coefficient 235 en 1998 puis au coefficient 250 en 2007 ; qu'il communique le rapport 2008 sur l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes mentionnant l'ancienneté moyenne des salariés au sein de chaque coefficient, à savoir trois ans pour le coefficient 175, trois ans pour le coefficient 235 et trois ans pour le coefficient 250, ce dont il résulte qu'il est resté deux à trois fois plus longtemps dans chaque coefficient que la moyenne des salariés ; que toutefois, M. K... se compare là encore à l'ensemble des salariés sans distinction entre ceux qui pourraient se trouver dans une situation identique à la sienne et les autres ; qu'en outre, l'étude du panel le concernant pour l'année 2008, a relevé qu'il n'existait pas de différence notable entre lui et les 12 salariés auxquels il a été comparé, et qui se trouvaient bien dans une situation semblable à la sienne ; que M. K... verse aux débats ses entretiens d'évaluation réalisés en 2009, 2010, 2011, 2013 et 2014 ; qu'il en résulte qu'il a évoqué dès 2009 le projet d'évoluer vers l'expertise sur la petite cryogénie, domaine dans lequel ses compétences ont été soulignées à l'occasion de chacun de ces entretiens ; que s'il n'est pas contesté qu'il fournissait un travail de qualité, ayant toujours bénéficié de la note d'évaluation « C » qui correspond à de bonnes performances, force est de constater que M. K... ne communique aucun élément permettant d'étayer ses allégations selon lesquelles, eu égard à ses compétences particulières, il aurait du avoir une meilleur évolution de carrière, ni qu'il a été bloqué en cela par son employeur en raison de ses activités syndicales ; que M. K..., qui évoque également le fait qu'il a fait l'objet de demandes de détermination précise de la répartition entre les heures de délégation et l'activité professionnelle, ne verse aux débats que deux emails qu'il a luimême écrits, ainsi qu'un email de sa responsable qui n'est pas explicite sur le sujet puisque de nombreuses abréviations sont utilisées ; qu'en ce qui concerne l'exclusion de réunions ou les convocations infondées à des entretiens préalables dont il fait état, force est de constater qu'il ne communique que des emails ou courriers écrits par lui ou par son syndicat ; qu'il produit en revanche un courrier qui lui a été adressé par son employeur le 8 juin 2010, lui reprochant d'avoir participé au blocage du site du Blanc Mesnil le 25 mai 2008, qui a empêché la libre circulation des véhicules et interdit l'accès au personnel qui souhaitait se rendre sur son lieu de travail ; que ce seul élément, alors même que M. K... exerce des activités syndicales depuis 1984, ne saurait caractériser des faits de discrimination ; que par ailleurs M. K..., qui prétend avoir été exclu du bénéfice de certaines formations ou stages, communique des emails qu'il a écrits pour se plaindre de ce qu'il n'a pas eu de stage en 2009 et qu'il n'a eu qu'un stage de deux jours en 2010, un email adressé au mois de novembre 2008 à la directrice de région pour indiquer qu'il n'a jamais bénéficié de stage de conduite, ainsi que la réponse précisant que cette demande sera prise en compte pour son plan de formation de l'années suivante, et l'historique des formations qu'il a suivies depuis 2000 ; qu'il ressort de ce dernier document qu'il a bénéficié de deux formations en 2000, d'une en 2001, d'une en 2003, d'une en 2005, d'une en 2009, d'une en 2010, que ses trois demandes de formations pour 2011 ont été approuvées, et que la formation de 2009 portait sur la conduite, de sorte que l'employeur a tenu compte de la demande formulée par M. K... en 2009 ; que ces éléments ne permettent donc pas d'établir que M. K... a été exclu de bénéfice de formations et été ainsi victime de discrimination ;
qu'il ressort des entretiens d'évaluation communiqués qu'en 2009, est mentionné comme point à faire progresser le fait d'avoir une meilleure vision de sa disponibilité ; qu'en 2010 il est indiqué « Dans ses temps de présence pour la région GIS Ile de France, Y... a su se rendre disponible pour les opérations qui lui ont été confiées » ou encore « Y... sait se rendre disponible dans les 40% du temps qu'il consacre à la région Ile de France» ; qu'en 2011, il est précisé : « Même si Y... communique de plus en plus avec le pôle planification PCMS de St Priest, les 40% estimés de temps disponible pour ses missions de chargé d'affaires maintenance et services au sein de la région Ile de France sont difficilement programmables dans le cadre de l'organisation à 4 semaines qui a été mise en place» ; qu'il convient de relever que ces comptes rendu d'entretien d'évaluation ne font aucune référence à ses activités syndicales ; qu'en outre, il est précisé que ses missions sont les suivantes : « Sous l'autorité de responsable régional maintenance, services et ingénierie, il réalise des prestations de maintenance de services dans le respect des règles et dans un souci permanent d'efficacité, de professionnalisme et d'optimisation des coûts, il prépare et réalise en liaison avec le PCMS ses interventions en clientèle, il applique la politique Image de marque Air Liquide, Y... a en charge sur la région GIS Ile de France la maintenance préventive et curative des installations liées à la petite cryogénie » ; qu'il en résulte que les commentaires dont fait état M. K... peuvent faire référence à la répartition de son temps entre ses différentes missions et à sa disponibilité pour assurer chacune d'elle ; qu'il n'est donc pas établi qu'il lui a été reproché un manque de disponibilité en lien avec ses mandats, et qu'il aurait ainsi été victime de discrimination syndicale ; qu'en l'état des explications et des pièces ainsi fournies, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au sens des textes ci-dessus n'est pas démontrée ; que les demandes relatives au repositionnement professionnel (en termes de coefficient et de salaire), aux rappels de salaire en découlant, aux dommages et intérêts pour préjudices financier et moral, ainsi qu'à la remise de documents sociaux, doivent donc être rejetées.

1°/ ALORS QUE lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge de se prononcer sur l'ensemble des éléments invoqués, et de dire si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, de dire si l'employeur prouve que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que l'existence d'une discrimination n'implique pas nécessairement une comparaison avec la situation d'autres salariés ; que dans ses écritures délaissées, le salarié soutenait non seulement qu'il est resté, ainsi qu'il a été relevé par la cour d'appel, 7 ans au coefficient 175 et 9 ans au coefficient 235 et qu'il s'était vu reprocher sa participation au blocage du site de Blanc Mesnil, mais aussi qu'il avait stagné depuis 2007, soit depuis plus de 8 ans, au coefficient 250, alors pourtant qu'il fournissait, ainsi qu'il a été encore relevé par la cour d'appel, un travail de qualité ; qu'omettant d'examiner ces éléments de fait invoqués par le salarié, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2145-5 du code du travail.

2°/ ALORS QU'en retenant, pour dire qu'il n'était pas établi que le salarié se soit vu reprocher un manque de disponibilité en lien avec ses mandats, que les mentions des comptes rendu d'entretien d'évaluation peuvent faire référence à la répartition du temps du salarié entre ses différentes missions et à sa disponibilité pour assurer chacun d'elle, la cour d'appel qui a cependant constaté que la difficulté de programmer ses missions en raison du temps disponible pour ces missions, limité à 40%, était mentionné dans les compte rendus d'entretien d'évaluation, ce dont il résultait que cette disponibilité réduite était prise en compte dans l'évaluation n'a pas tiré de ses constatations les conséquences qui s'en déduisaient au regard desdites dispositions.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour non respect de l'accord d'entreprise sur le droit syndical.

AUX MOTIFS QUE M. K... soutient que la société Alfi n'a pas respecté l'accord d'entreprise sur le droit syndical, qui dispose en son article 5 que «l'engagement syndical et de représentation du personnel ne doit pas empêcher, modifier ou ralentir l'évolution professionnelle en terme de promotion et de salaire », et en son article 11 que « la moindre disponibilité d'un salarié mandaté ne doit pas intervenir dans l'évaluation par sa hiérarchie de la performance réalisée » ; que la société souligne qu'un accord de droit syndical a été signé le 11 septembre 2002 entre la direction et les organisations syndicales représentatives, dont la CGT, par lequel la direction s'est engagée à ce que le pourcentage de représentant promus et/ou augmentés ne soit pas inférieur à celui obtenu pour l'ensemble des salariés ; qu'il convient toutefois de relever que M K... ne développe aucun argument à l'appui de cette allégation autre que ceux précédemment exposés, qui ne permettent pas d'établir qu'il a été victime de discrimination syndicale ; que M. K... sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation, relatif aux demandes tendant à voir dire et juger que le salarié avait fait l'objet d'une discrimination syndicale, invoqué au soutien de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour non respect de l'accord d'entreprise sur le droit syndical, entraînera par voie de conséquence la cassation de ce chef de dispositif en application de l'article 624 du Code de procédure civile.

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