Visite du premier président et du procureur général à la CEDH : séminaire judiciaire et audience d’ouverture de l’année judiciaire

30/01/2024

Le 26 janvier 2024, M. le premier président Christophe Soulard et M. le procureur général Rémy Heitz se sont rendus à Strasbourg afin de participer à la cérémonie d’ouverture de l’année judiciaire de la Cour européenne des droits de l’Homme. M. le premier président était accompagné de Mme la présidente Zientara, directrice du Service de la Documentation, des Etudes et du Rapport et de Mme Clémence Bourrillon, cheffe du SRI ; M. le procureur général, de Mme l’avocate générale Sonya Djemni-Wagner.

L’évènement a permis de réunir les chefs des hautes juridictions des Etats membres du Conseil de l’Europe, des autorités locales, nationales et internationales autour du thème « Revisiter la subsidiarité à l’ère de la responsabilité partagée ».

Ouvert par la présidente de la Cour européenne des droits de l’Homme (Cour EDH), Mme Siofra O’Leary, le séminaire judiciaire visait à analyser l’évolution du principe de subsidiarité au regard de la jurisprudence de la Cour EDH notamment sur la marge nationale d’appréciation, après l’entrée en vigueur du protocole n°15 le 1er août 2021. La question ainsi posée revenait à saluer l’appropriation par les juges nationaux de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, devenus juges du quotidien des droits fondamentaux. Dès lors, la problématique permettait de s’interroger sur l’avènement d’un contrôle axé sur le processus. Dans le cadre de ce contrôle, la Cour EDH examine dans quelle mesure les autorités nationales ont mis en balance les intérêts concurrents et tenu compte du respect de la Convention dans leur processus décisionnel.

Ce choix de thématique est en lien étroit avec la situation actuelle de crises protéiformes de l’Etat de droit en Europe. En effet, comme présenté par l’arrêt Handyside c/ Royaume-Uni, la subsidiarité représente un instrument indispensable au bon fonctionnement du système pour éviter que la Cour EDH ne devienne une ultime voie de recours et ne soit engorgée. De plus, le principe de subsidiarité est le garant du maintien de la proximité du juge de son citoyen. Les tribunaux nationaux, par ce mécanisme, demeurent « en contact direct et permanent avec les forces vives de leurs pays »[1].

Ce séminaire judiciaire fait particulièrement écho au mouvement d’acculturation au droit européen des droits de l’Homme qui a eu cours en France, et à la Cour de cassation. D’abord réticente à viser la Convention, dès les années 1980, la Cour de cassation a opéré une appropriation avant de véritablement prendre conscience de l’internationalisation du droit et du pouvoir normatif de la jurisprudence de la Cour EDH en opérant des revirements de jurisprudence au regard des décisions de la Cour EDH[2]. Le contentieux de la liberté d’expression (art. 10 de la Convention) autrefois très nourri, est l’illustration de cette évolution à la lecture de la jurisprudence de la Cour de cassation, qui s’en fait le premier juge.  

Le Séminaire judiciaire concluait ainsi à l’idée d’une responsabilité partagée entre juges nationaux et juges supranationaux à « l’ère de subsidiarité » pour reprendre l’expression de l’ancien président de la Cour EDH Robert Spano.

 


[1] CEDH, 7 décembre 1976, Handyside c/ Royaume-Uni

[2] Cass., crim., 15 mai 1990, Bacha Baroudé, n° du pourvoi 90-80.827

L’audience de rentrée a offert l’occasion à Mme la présidente Siofra O’Leary de faire un bilan de l’activité de la Cour EDH en 2023. Lors de son discours, elle a pu manifester l’inquiétude de la Cour quant aux remises en cause de l’Etat de droit, et notamment de l’indépendance de la justice, relevant la hausse des attaques individuelles à l’encontre des juges, y compris internationaux, et l’augmentation des demandes de récusation. Elle a souhaité spécialement souligner l’évolution de la jurisprudence de la Cour EDH dans trois domaines particulièrement contemporains : la protection des victimes de violences familiales, la reconnaissance civile des couples de même sexe, et le droit des lanceurs d’alerte.

L’invité d’honneur de l’audience, Didier Reynders, commissaire européen à la justice, a souhaité rappeler l’ambition commune de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe dans la quête de paix conjointe et de protection des droits et libertés. Il a également souligné la proximité des valeurs protégées entre la Convention et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Il a notamment cité la jurisprudence de la Cour EDH Walesa c/ Pologne du 23 novembre 2023 aboutissant au même constat de non-conformité aux exigences d’impartialité et d’indépendance d’un tribunal que l’arrêt CJUE du 21 décembre 2023 dans l’affaire L.G. contre Krajowa Rada Sądownictwa (C-718/21). Cette concordance ce jurisprudence marque en effet le dialogue fructueux à l’œuvre entre les cours supranationales européennes. Il a conclu son propos en exposant le rôle important du rapport annuel de la Commission européenne sur l’Etat de droit comme outils de vigilance.

Ce déplacement a été l’occasion pour la Cour de cassation de renouveler son vœu de poursuivre la coopération nourrie avec la Cour EDH ainsi qu’avec les autres Cours suprêmes européennes.

L’audience de rentrée a offert l’occasion à Mme la présidente Siofra O’Leary de faire un bilan de l’activité de la Cour EDH en 2023. Lors de son discours, elle a pu manifester l’inquiétude de la Cour quant aux remises en cause de l’Etat de droit, et notamment de l’indépendance de la justice, relevant la hausse des attaques individuelles à l’encontre des juges, y compris internationaux, et l’augmentation des demandes de récusation. Elle a souhaité spécialement souligner l’évolution de la jurisprudence de la Cour EDH dans trois domaines particulièrement contemporains : la protection des victimes de violences familiales, la reconnaissance civile des couples de même sexe, et le droit des lanceurs d’alerte.

L’invité d’honneur de l’audience, Didier Reynders, commissaire européen à la justice, a souhaité rappeler l’ambition commune de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe dans la quête de paix conjointe et de protection des droits et libertés. Il a également souligné la proximité des valeurs protégées entre la Convention et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Il a notamment cité la jurisprudence de la Cour EDH Walesa c/ Pologne du 23 novembre 2023 aboutissant au même constat de non-conformité aux exigences d’impartialité et d’indépendance d’un tribunal que l’arrêt CJUE du 21 décembre 2023 dans l’affaire L.G. contre Krajowa Rada Sądownictwa (C-718/21). Cette concordance ce jurisprudence marque en effet le dialogue fructueux à l’œuvre entre les cours supranationales européennes. Il a conclu son propos en exposant le rôle important du rapport annuel de la Commission européenne sur l’Etat de droit comme outils de vigilance.

Ce déplacement a été l’occasion pour la Cour de cassation de renouveler son vœu de poursuivre la coopération nourrie avec la Cour EDH ainsi qu’avec les autres Cours suprêmes européennes.

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