05/10/2021
Cassation de la relaxe pour provocation à la haine, injure et diffamation antisémites.
Les juges d’appel avaient considéré que ce clip ne visait pas la communauté juive dans son ensemble.
La Cour de cassation retient qu’ils n’ont pas recherché, comme ils l’auraient dû, le sens véritable du clip, qui comportait de nombreuses références antisémites.
Avertissement : le communiqué n’a pas vocation à exposer dans son intégralité la teneur des arrêts rendus. Il tend à présenter de façon synthétique leurs apports juridiques principaux.
Les faits et la procédure
Des associations de lutte contre le racisme et l’antisémitisme ont poursuivi, devant le tribunal correctionnel, le président de l’association politique Égalité et Réconciliation et directeur de publication du site internet sur lequel a été mis en ligne un clip de rap du groupe Rude Goy Bit.
Elles lui ont reproché des faits d’incitation à la haine à cause de certains passages du clip disant notamment qu’il faut «virer» des personnalités juives, accompagnés de leurs photographies qui brûlent, d’injure antisémite à raison de la phrase «Les français n'en peuvent plus, de ces parasites» illustrée par un slogan «République Française [E] Family» et de diffamation antisémite à raison des paroles «Les banques ont acheté les médias pour asseoir leur emprise», illustrées par l'image du nom [E] qui brûle.
La cour d’appel, revenant sur la condamnation prononcée en première instance, a relaxé le prévenu. Les associations, parties civiles, ont saisi la Cour de cassation pour contester cette décision.
La décision de la Cour de cassation
Repères
La loi sanctionne les comportements d’injure, de diffamation et de provocation à la haine envers une personne ou un groupe de personnes à raison «de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée».
Dans ce domaine, la Cour de cassation exerce un contrôle renforcé à l’égard du sens et de la portée des propos reprochés à la personne poursuivie.
Lorsque des propos sont formulés de manière insidieuse, déguisée ou allusive, il convient d’en rechercher le sens véritable et la portée réelle, afin, en particulier, de déterminer si des personnes sont critiquées en raison de leur appartenance, comme dans l’affaire considérée, à la communauté juive.
Selon la cour d’appel, qui relève que les personnalités dont la photographie est jetée dans le feu ne sont pas toutes juives, le clip dénonce l’influence qu’aurait le monde de la finance sur la politique menée par le Président de la République avec la complicité d’une partie de la presse audiovisuelle. La cour d’appel en a déduit que la communauté juive n’était pas visée dans son ensemble.
La Cour de cassation invalide cette analyse. Les juges auraient dû rechercher si la mise en cause de la seule banque [E], la mention d’une seule chaîne israélienne, le nom même du groupe de rap, le vocabulaire utilisé, comme le fait de jeter dans le feu des photographies de personnalités juives, tous deux évocateurs de l’extermination des juifs pendant la seconde guerre mondiale, ne visaient pas la communauté juive dans son ensemble, les personnalités non juives étant présentées comme manipulées par elle.
La Cour de cassation casse la décision. La cour d’appel, dans une composition différente, devra se prononcer à nouveau.
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