François Molins - Les 60 ans de l’ENM

23/05/2019

Allocution prononcée par M. François Molins, procureur général près la Cour de cassation, à l'occasion des "60 ans de l’ENM : "La formation judiciaire : un enjeu pour la démocratie" "

Monsieur le Premier président, Madame la Première présidente de la cour d’appel de Bordeaux, Monsieur le Procureur général près ladite cour, Monsieur le directeur, Mes chers collègues, Mesdames et Messieurs,

Je suis particulièrement heureux de me trouver avec vous, aujourd’hui, à Bordeaux, à l’Ecole nationale de la magistrature.

Je tiens à remercier M. LEURENT, directeur de l’E.N.M, qui a souhaité la tenue ce colloque, et l’ensemble de ses services, qui en ont permis la réalisation.

Si les anniversaires sont des moments de fête, ce sont aussi souvent des occasions d’établir un bilan et de réfléchir sur l’avenir. Surtout lorsque le compte des années atteint celui de la maturité et même de la sagesse comme vous l’avez souligné Monsieur le Directeur. Je voudrais dire ici aujourd’hui, toute la fierté que je ressens et que ressentent tous les anciens auditeurs de justice d’être passés dans cette école.

Je voudrais dire toute la fierté de notre formation dans cette école où nous nous sommes épanouis, où nous avons donné du sens à notre vie et à nos fonctions, et où nous avons acquis des convictions et des ambitions pour la justice au service des autres.

Une école où l’on aime revenir en sentant tout ce qu’on y a gagné et tout ce qu’on y a laissé, en se souvenant de tous ces professeurs, maîtres de conférence que l’on a admirés, et qui nous ont donné confiance en nous-mêmes et en la justice de notre pays.

Oui, l’ENM est « une école de la République » qui a su garder son identité tout en démontrant sa grande capacité d’adaptation à l’évolution de la société et des attentes des citoyens.

Cette identité conservée repose depuis 60 ans sur trois éléments forts que sont le caractère professionnel de la formation au métier de magistrat, la technicité des compétences enseignées et le souci constant de l’ouverture d’esprit des futurs magistrats. Ces trois dimensions, toujours conservées, font de cette école un véritable modèle à l’étranger pour la formation des juges et des procureurs.

Les magistrats acquièrent à l’ENM des compétences professionnelles et une culture judiciaire qui sont communes à tous les juges et procureurs.

Ils apprennent un savoir, un savoir-être et un savoir-faire, selon la trilogie chère à l’Ecole, qui font des auditeurs de justice, non plus seulement d’excellents juristes, mais des magistrats dignes et loyaux, à l’écoute de la société, capables d’incarner l’autorité judiciaire et d’appliquer la loi avec discernement et sens de l’équité.

Etre magistrat, c’est beaucoup plus qu’exercer une profession, c’est remplir une mission au service de nos concitoyens. C’est être le garant des libertés individuelles, mais aussi le protecteur des plus fragiles et des plus vulnérables. C’est être en permanence au cœur de la cité, au centre des débats de société, en prise avec tous les enjeux et difficultés d’un monde à la complexité sans cesse croissante. C’est, en permanence, choisir et décider.

Parce qu’aujourd’hui le modèle des écoles formant les hauts fonctionnaires de l’Etat et par ricochet, le modèle de notre école de la magistrature, est, si ce n’est remis en cause, à tout le moins questionné, je souhaite évoquer devant vous successivement plusieurs pistes de réflexion qui me paraissent essentielles :

  • La formation initiale et l’ouverture indispensable du recrutement
  • L’importance de la formation continue
  • La défense de l’unité du corps de la magistrature, et le statut particulier du ministère public

 

Je crois tout d’abord aux mérites du professionnalisme. Comme le rappelait le Conseil supérieur de la magistrature dans son rapport 2002-2003 : « juger, c’est un métier, requérir aussi », métier auquel, comme toute autre activité professionnelle, il est indispensable de se former.

A la base de toute activité juridictionnelle, doit impérativement se trouver une solide formation juridique et judiciaire, dispensée par l’Université et l’Ecole nationale de la magistrature.

L’ENM a pour mission de former au métier de magistrat dans ses différentes fonctions par l’acquisition de compétences fondamentales permettant une prise de décision conforme à la loi et adaptée à son contexte, respectueuse de l’individu et des règles éthiques et déontologiques, et s’inscrivant dans un environnement institutionnel, national et international.

L’Ecole de la magistrature doit continuer à s’adapter aux évolutions de la société contemporaine et gagner encore davantage en ouverture : en améliorant la diversité au sein de la magistrature, en favorisant les liens avec les autres milieux professionnels (professions juridiques et judiciaires, autres administrations, monde économique…), et en renforçant la formation continue des magistrats.

S’agissant du recrutement au sein de l’Ecole nationale de la magistrature, il importe en effet de continuer à rechercher encore et toujours une plus grande diversité sociale et géographique, ainsi qu’une plus grande diversité des parcours professionnels. On peut souligner que le pourcentage d’élèves boursiers reçus au 1er concours est actuellement de 33 %, en grande partie grâce au récent dispositif des classes préparatoires dites égalité des chances.

Mais des améliorations sont toujours possibles :

  • en développant notamment ce dispositif, actuellement mis en œuvre à Douai, Paris et Bordeaux, et qui a démontré son efficacité (142 étudiants issus de milieux défavorisés ont ainsi intégré la magistrature depuis 2009 après avoir suivi l’une de ces préparations), force est de constater que ce dispositif ne couvre pas l’Est et le Sud-Est de la France. La création de nouvelles classes à Strasbourg et/ou Lyon pourrait combler cette carence géographique. Mais de telles créations, qui constitueraient un signe fort d’une plus grande démocratisation de l’accès à la magistrature, hautement symbolique en période de perte de confiance dans nos institutions républicaines, nécessiteraient des moyens budgétaires renforcés, et donc une volonté politique forte. 
  • en multipliant les conventions avec les Cours d’appel qui visent à nouer des partenariats entre les universités, les IEP et les juridictions afin de faciliter l’accès à la magistrature des étudiants méritants, sur le modèle des conventions déjà passées avec les Cours d’appel de Rennes et d’Aix-en-Provence.
  • en améliorant la diversité des recrutements au bénéfice des publics en reconversion professionnelle : dans le prolongement de la réforme renforçant l’attractivité des 2ème et 3ème concours, qui a intégré notamment la reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle à l’instar des autres concours internes de la fonction publique, il convient de soutenir le projet de réforme actuellement en cours concernant le recrutement sur concours et sur dossier des professionnels faisant le choix d’une reconversion.

Leur formation, dont la durée serait allongée, tiendra compte, grâce à une pédagogie différenciée, des compétences qu’ils ont acquises à l’occasion de l’exercice de leurs précédentes fonctions. 

 

Concernant la formation, tout au long de son parcours professionnel, nous savons tous que le magistrat doit s’inscrire dans une démarche empreinte d’ouverture sur le monde et de curiosité. Rien n’est pire que la culture de l’entre soi qui conduit au repli sur soi. Un ancien premier président avait appelé il y a presque 50 ans, les magistrats à sortir de leur tour d’ivoire. Pour rendre une justice adaptée et acceptée, le magistrat doit demeurer à l’écoute de la société, de ses évolutions et de ses interrogations. L’office du juge n’est pas immuable, il doit s’adapter à son environnement en mutation permanente.

L’accompagnement des magistrats par l’Ecole nationale de la magistrature dans la mise en œuvre des réformes législatives actuelles et à venir est indispensable, en partenariat avec les directions du ministère de la justice, et sous la forme de séquences pédagogiques spécifiques en formation initiale, de colloques et de modules adaptés en formation continue, notamment à l’occasion des sessions de changement de fonction.

C’est à l’ENM d’insuffler à chaque magistrat, qu’il soit sortant d’école et découvre son métier ou qu’il soit un professionnel chevronné, l’envie et la nécessité de toujours apprendre plus, ou de réapprendre mieux. L’ENM doit être le lieu par excellence de la confrontation des idées et du débat libre sur la Justice.

Il appartient à tout magistrat, pour progresser, de savoir se remettre inlassablement en question, et de prendre conscience que son indépendance, pierre angulaire de l’acte de juger, ne se confond pas avec l’absence de dialogue, d’écoute et de discussion.

L’inter-professionnalité est également un gage d’ouverture de la magistrature sur l’extérieur. L’ENM est soucieuse d’apporter une réflexion approfondie sur l’environnement et le contexte dans lesquels le magistrat rend sa décision, ainsi qu’une meilleure connaissance des professionnels qu’il côtoie :

  • Afin de favoriser la notion d’équipe autour du magistrat et l’efficacité du travail collectif, il convient certainement de développer les formations communes entre directeurs des services de greffe judiciaires, greffiers assistants du magistrat, juristes-assistants et assistants spécialisés.
  • Les formations pluridisciplinaires doivent également réunir les professions judiciaires et juridiques autour des pratiques professionnelles et sur les questions déontologiques.
  • La réflexion des magistrats sur leur place au sein de l’Etat passe aussi par une meilleure connaissance du fonctionnement des autres administrations et donc par le développement d’une culture professionnelle partagée. A cet égard, des sessions communes et des échanges avec les écoles du réseau des écoles du service public (RESP), notamment avec l’ENA sont souhaitables. Elles permettraient aussi une meilleure connaissance de l’institution judiciaire et de ses fonctionnements par les autres administrations.
  • Le développement de l’inter-professionnalité peut également permettre une meilleure connaissance de la vie économique par les magistrats (sous forme de sessions communes des juristes d’entreprise ou sous forme de stages plus longs et encore plus diversifiés en entreprise).
  • Davantage de formations inter-professionnelles permettra d’aborder sous un angle plus efficace certaines thématiques particulièrement actuelles, telles que les violences intrafamiliales, le droit de l’environnement, la lutte contre le terrorisme et la prévention de la radicalisation ou encore les techniques de management et les risques psycho-sociaux.
  • Enfin, depuis l’extension des missions de l’ENM par le décret du 6 mai 2017 qui dispose que l’établissement est à présent officiellement chargé de la formation de toute personne concourant étroitement à l’activité judiciaire, la question de l’élargissement de ses publics se pose. Ainsi, les experts judiciaires, les interprètes, les assesseurs des tribunaux pour enfants, les délégués du procureur pourraient venir enrichir encore les publics formés par l’ENM. 

Des efforts peuvent donc encore être accomplis : depuis 2012, si 84 % des magistrats suivent au moins une journée de formation nationale ou déconcentrée par an, environ 55 % seulement des magistrats suivent les 5 jours de formation annuelle obligatoire.

Si l’on ne peut que déplorer que certains magistrats renoncent à leur obligation de formation compte tenu de leur charge de travail en juridiction, il est essentiel que le suivi de la formation continue soit fortement encouragé par les chefs de cours et de juridictions, et que sa prise en compte dans l’évaluation du magistrat soit considérablement accrue.

La remise en question constante, qu’elle soit intellectuelle ou professionnelle, indispensable à l’exercice du métier de magistrat, est à ce prix, de même que l’actualisation et l’élargissement permanents de ses compétences.

Sur certains contentieux spécialisés notamment, une véritable réflexion doit pouvoir s’ouvrir. A titre d’exemple, aujourd’hui, la thématique des violences faites aux femmes, qui constitue un véritable fléau de notre société, est intégrée dans la formation initiale des futurs magistrats. Ne faudrait-il pas la densifier en s’appuyant sur la qualité et l’expertise reconnues de l’ENM en matière de formation ? Si la formation continue est une obligation pour tout magistrat, celui-ci est libre d’en choisir le thème. Ne faudrait-il pas évoluer sur ce point et rendre par exemple obligatoire une formation spécialisée sur les violences faites aux femmes et ses conséquences, notamment sur les enfants mineurs, dès lors que l’on change de fonctions pour exercer celles du parquet, de JAF, ou de JE ? C’est ce que j’ai proposé lors du dernier conseil d’administration de l’école en mars dernier.

Nous voyons bien dans l’exercice quotidien de notre métier de magistrat que, sauf à prendre le risque d’un profond décalage avec la réalité, l’interprétation/l’application du Droit ne peut se faire dans l’ignorance du contexte.

Le magistrat doit garder un regard sur l’extérieur, afin que la règle de droit intègre pleinement les évolutions de notre société en mutation, et qu’il contribue ainsi à l’expression d’un droit vivant.

 

Concernant l’unité du corps et le statut du ministère public :

L’Ecole nationale de la magistrature est le creuset d’un principe auquel nous sommes tous profondément attachés : l’unité du corps judiciaire, qui est un facteur d’équilibre et d’enrichissement majeur.

C’est à l’Ecole nationale de la magistrature, en tant qu’auditeur de justice, futur juge ou futur procureur, que l’on peut ressentir en premier les implications de ce principe essentiel. En effet, il n’y a qu’une seule magistrature, qu’un seul serment, qu’une seule école, qu’un seul Conseil supérieur de la magistrature. C’est l’ADN commun des magistrats.

Juges et procureurs sont les magistrats qui composent un corps judiciaire unique, garant du respect des libertés individuelles, dont la mission est d’appliquer la loi de la même manière à tous, c’est-à-dire avec neutralité et impartialité, sans la dénaturer, sans préjugé, en laissant de côté toute conviction personnelle politique, religieuse ou syndicale, sans esprit partisan ou militant.

Il peut paraître banal, de rappeler encore en 2019 que les magistrats du parquet sont des magistrats à part entière, dont la mission est de défendre les intérêts de la société dans le respect des libertés individuelles dont ils sont les gardiens.

 Ils ne sont pas une partie comme les autres : ils ne représentent pas des intérêts particuliers, mais la société toute entière et leur légitimité est fondée sur cette délégation de souveraineté.

Le magistrat du parquet se trouve bien évidemment dans une situation particulière qui explique son statut spécifique dû notamment au principe de la subordination hiérarchique à laquelle il est astreint. Vous le savez, ce statut est la conséquence de la dualité de sa nature puisque, magistrat garant des libertés individuelles et à ce titre indépendant, le magistrat du parquet est également représentant du pouvoir exécutif pour la mise en œuvre de la politique pénale, ce qui explique le principe de la subordination hiérarchique.

Deux grands principes apportent néanmoins une limite à cette subordination hiérarchique : le pouvoir propre des chefs de parquet (nul ne peut agir à sa place si ce n’est sur délégation de sa part et il n’existe aucun moyen pour son supérieur hiérarchique, le procureur général, d’exercer ce pouvoir à sa place) et la liberté de parole des magistrats du ministère public qui développent librement à l’audience les observations orales qu’ils croient convenables au bien de la justice.

Tout au long de ma carrière, j’ai constaté le profond attachement des magistrats du ministère public à être avant tout des magistrats, satisfaisant aux mêmes exigences déontologiques et répondant aux mêmes valeurs.

L’appartenance à la magistrature des membres du ministère public est essentielle : elle garantit une éthique et une déontologie communes avec les magistrats du siège.

Notre ministère public souffre pourtant aujourd’hui d’un malaise profond et d’une crise identitaire qui ont été parfaitement décrits dans le récent rapport de l’Inspection générale de la justice sur l’attractivité du ministère public.

Depuis 20 ans, il y a consensus sur le fait de considérer que l’avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature pour les nominations des magistrats du parquet et l’alignement de leur régime disciplinaire sur celui du siège devraient constituer un socle minimum. Le « venin de la suspicion » comme certains le qualifient, doit définitivement disparaître. Pour que la décision de justice soit reconnue, elle doit susciter la confiance, et ne doivent être suspectés ni le magistrat, ni le pouvoir politique.

Tout ce qui permet de renforcer les garanties statutaires du parquet doit donc être mis en œuvre. Le premier pas a été franchi avec la loi du 25 juillet 2013 sur l’interdiction, pour le garde des Sceaux, de donner des instructions individuelles aux magistrats du parquet. Il faut maintenant construire le 2ème étage de l’édifice qui consiste à sanctuariser les pouvoirs du Conseil supérieur de la magistrature, en instaurant la nécessité d’un avis conforme et l’alignement du régime disciplinaire des magistrats du parquet sur celui des magistrats du siège.

L’équilibre actuel, fondé sur une simple pratique consistant depuis 10 ans à ne pas passer outre aux avis défavorables du Conseil est en effet fragile. Il pourrait tout à fait être remis en cause du jour au lendemain, par l’avènement d’un pouvoir ne voyant pas les choses de la même façon et désireux d’avoir la haute main sur toutes les nominations des procureurs généraux et des procureurs de la République.

La réforme constitutionnelle est enfin rendue indispensable par l’accroissement des pouvoirs du parquet, comme en témoigne notamment la loi du 23 mars 2019.

Cette réforme constitutionnelle garantira et renforcera l’unité du corps. Nul ne comprendrait qu’elle n’aboutisse pas dès lors rapidement.

Formation, statut, neutralité du ministère public, voici les principales composantes d’une seule et unique exigence : l’impartialité sans laquelle la justice ne serait pas la justice. Et comment y accéder sans garantir l’indépendance de cette justice, une indépendance consubstantielle à l’état de magistrat ?

Car c’est bien sur ce socle d’un authentique pouvoir judiciaire que l’indépendance, le bien le plus précieux de la justice dans la République, sera, selon l’expression de l’un de mes prédécesseurs, André Dupin, “quelque chose de plus que la liberté” : la “liberté perfectionnée”.

Car toujours selon ce dernier, “Etre indépendant, c’est savoir défendre son opinion, sa croyance et ses actes contre les attaques du dehors, contre tous ceux qui, sans en avoir le droit, font effort sur notre volonté pour nous imposer la leur ; en un mot, c’est savoir être soi, dans la pureté de sa conscience et de sa conviction (...)”.

 

Conclusion :

Je ne saurais conclure mes propos sans aborder un peu plus avant la question de l’avenir de l’ENM, dans le cadre de la réflexion initiée par le premier ministre sur la réforme plus générale de la Haute fonction publique, suite à la mission qu’il a confiée le 8 mai dernier à Monsieur Frédéric THIRIEZ.

Il me semble qu’il serait dangereux et à tout le moins imprudent de nous tenir à l’écart de cette réflexion, de nous retirer sur l’Aventin et de rejeter, par principe ou par orgueil, toute hypothèse de changement, toute évolution qui pourrait pourtant constituer une ouverture enrichissante sur l’extérieur. 

Comme l’écrivait Portalis dans le discours préliminaire du code civil, « la pire des innovations serait de ne point innover ».

L’idée selon laquelle un socle commun de formation -qui pourrait éventuellement intervenir en cours de cursus initial-, avec les autres écoles de la fonction publique, et donc avec les magistrats de l’ordre administratif et financier, ne mérite-t-elle pas réflexion dès lors qu’elle respecte les fondamentaux de la formation, sa durée nécessaire, ainsi que les spécificités des magistrats judiciaires dont, je le rappelle, l’indépendance et le statut sont régis par la Constitution et la loi organique ?

Aborder ensemble des notions telles que l’Etat, le service public ou encore l’indépendance des magistrats judiciaires, administratifs ou financiers, est-il si inutile ?

Quel que soit l’aboutissement de cette mission, il m’apparaît essentiel que nous y soyons tous associés.

Mais d’ores et déjà, il m’apparaît que cette réflexion ne doit pas remettre en cause la nécessité :

  • d’une école dédiée à la formation des magistrats, qui seule peut leur permettre d’acquérir les techniques professionnelles spécifiques et les fondamentaux du savoir-être des magistrats,
  • d’une école bénéficiant d’une autonomie pédagogique consacrée, en cohérence avec le statut constitutionnel de l’autorité judiciaire, qui depuis 60 ans a démontré sa capacité à former des magistrats de très grande qualité.

L’Ecole Nationale de la Magistrature devra continuer, comme elle l’a toujours fait, à transmettre les vertus nécessaires à l’office du magistrat, qu’il appartienne au siège ou au parquet, vertus qui renvoient notamment au bon sens et à ce qu’Aristote qualifiait de « sagesse pratique », qui consiste à prendre de bonnes décisions et à bien agir en situation :

  • vertu de distance pour juger sans pression ni préjugé ;
  • vertu d’intégrité dans le rapport du magistrat au droit qu’il est chargé d’appliquer, quelles que soient ses opinions personnelles ;
  • enfin, vertu de mesure, représentée par la balance, symbole de la justice.

Puisse l’école continuer à nous persuader de toujours veiller à ce que la justice à laquelle nous œuvrons au quotidien ne devienne jamais un confort, aussi bien en ce qui concerne nos propres certitudes, qu’en ce qui concerne les affaires que nous poursuivons et que nous jugeons.

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Par François Molins

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