Rapport annuel 2022 (I. AVIS DE LA COUR DE CASSATION)

Rapport annuel

Ouvrage de référence dans les milieux judiciaire et universitaire, le Rapport de la Cour de cassation est aussi un précieux instrument de travail pour les praticiens du droit. Le Rapport 2022 comporte des suggestions de modifications législatives ou réglementaires, ainsi que l’analyse des principaux arrêts et avis ayant été rendus, tout au long de l’année, dans les différentes branches du droit privé. Le Rapport présente également, de manière détaillée, l’activité juridictionnelle et extra-juridictionnelle de la Cour de cassation, ainsi que celle des juridictions et commissions instituées auprès d’elle.

  • Informations pratiques

Rapport annuel

Rapport annuel 2022 (I. AVIS DE LA COUR DE CASSATION)

I. Avis de la Cour de cassation

A. Formation plénière

Aucun avis en formation plénière publié au Rapport en 2022.

B. Formation mixte

Aucun avis en formation mixte publié au Rapport en 2022.

C. Avis rendus par les chambres

1. Avis rendus en matière civile

Santé publique – Lutte contre les maladies et les dépendances

Avis de la Cour de cassation, 1re Civ., 18 mai 2022, no 22-70.003, publié au Bulletin, rapport de Mme Feydeau-Thieffry et avis de M. Chaumont

L’article L. 3211-10 du code de la santé publique s’analyse comme interdisant toute mesure d’hospitalisation d’un mineur décidée sur le fondement de l’article L. 3212-1 du code de la santé publique par le directeur d’établissement à la demande d’un tiers ou des titulaires de l’exercice de l’autorité parentale.

Un juge des libertés et de la détention a saisi la Cour de cassation pour savoir si l’article L. 3211-10 du code de la santé publique s’analysait comme interdisant toute mesure d’hospitalisation d’un mineur à la demande d’un tiers ou limitait la qualité de tiers demandeurs aux seuls titulaires de l’exercice de l’autorité parentale.

Cet article dispose: « Hormis les cas prévus au chapitre III du présent titre, la décision d’admission en soins psychiatriques d’un mineur ou la levée de cette mesure sont demandées, selon les situations, par les personnes titulaires de l’exercice de l’autorité parentale ou par le tuteur. En cas de désaccord entre les titulaires de l’exercice de l’autorité parentale, le juge aux affaires familiales statue. »

Il en résulte que, par principe, la décision d’admettre un mineur en soins psychiatriques appartient aux titulaires de l’exercice de l’autorité parentale.

Il s’agit là d’une application du principe plus général de l’article 371-1 du code civil, qui rappelle que l’autorité parentale, ensemble de droits et devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant, appartient aux parents qui doivent, jusqu’à la majorité de celui-ci ou son émancipation, le protéger, en particulier dans sa santé.

L’article L. 3211-10 précité évoque également le tuteur car, si l’autorité parentale est le régime de protection de droit commun applicable à la personne et aux biens du mineur, ce régime sera, en vertu de l’article 390 du code civil, celui de la tutelle si le père et la mère sont tous deux décédés ou se trouvent privés de l’exercice de l’autorité parentale ou si l’enfant n’a pas de filiation légalement établie.

Il résulte de la combinaison des articles L. 3211-1 et L. 3211-2 du code de la santé publique que, lorsque la décision d’admission est prise par les titulaires de l’exercice de l’autorité parentale ou par le tuteur, les soins sont considérés comme libres, même si le mineur est opposé aux soins.

Il s’en déduit, en premier lieu, que, par définition, le régime des soins sans consentement ne s’applique pas, de sorte que les mesures échappent au contrôle du juge des libertés et de la détention.

En second lieu, les mesures d’isolement et de contention sont prohibées puisque l’article L. 3222-5-1, I, du code de la santé publique les réserve aux soins contraints.

Le mineur, dont le consentement doit être recherché, conformément à l’article L. 1111-4 du code de la santé publique, et qui conteste les soins psychiatriques, n’est pas sans recours puisqu’il peut, en vertu de l’article 375 du code civil, saisir le juge des enfants au motif que sa santé est en danger ou que les conditions de son développement sont gravement compromises.

Par ailleurs, si la santé ou l’intégrité corporelle du mineur risquent d’être gravement compromises par le refus de son représentant légal ou l’impossibilité de recueillir le consentement de celui-ci, l’article R. 1112-35, alinéa 4, du code de la santé publique prévoit que le médecin responsable du service peut saisir le ministère public pour que puissent être mises en œuvre des mesures d’assistance éducative permettant de donner les soins qui s’imposent.

Le juge des enfants peut ainsi, sur le fondement des articles 375, alinéa 1, et 375-3, 5o, du code civil et dans les conditions prévues à l’article 375-9 dudit code, décider du placement du mineur dans un établissement psychiatrique, le cas échéant après ordonnance de placement provisoire prise en urgence par le procureur de la République.

À côté du principe de la décision prise par les titulaires de l’exercice de l’autorité parentale, l’article L. 3211-10 du code de la santé publique prévoit, par la référence au « chapitre III du présent titre », la possibilité d’une décision de soins psychiatriques sans consentement prise par le représentant de l’État dans le département, autrement dit le préfet ou, à Paris, le préfet de police, lorsque, selon l’article L. 3213-1 du même code, le mineur est atteint de « troubles mentaux [qui] nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public ».

Un mineur, dont les troubles mentaux présentent ces mêmes caractéristiques, peut également, en vertu de l’article 706-135 du code de procédure pénale, être admis en soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète sur décision prise par la chambre de l’instruction ou une juridiction de jugement en cas de déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.

Dans ces deux cas de figure, le régime des soins contraints s’applique.

Il s’en déduit que le mineur peut, dans les conditions prévues à l’article L. 3222-5-1 du code de la santé publique précité, être placé en isolement ou sous contention pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour lui ou autrui.

Par ailleurs, le juge des libertés et de la détention exerce un contrôle obligatoire et systématique de la mesure d’hospitalisation, en application de l’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique, et peut, sur le fondement de l’article L. 3211-12 du même code, à tout moment, se saisir d’office ou être saisi aux fins de mainlevée immédiate soit de la mesure de soins psychiatriques, soit de la mesure d’isolement ou de contention, par les personnes visées à ce même texte.

Si l’article L. 3211-10 du code de la santé publique fait référence au chapitre III consacré aux décisions d’admission du préfet, il ne mentionne pas le chapitre II, propre aux décisions d’admission du directeur d’établissement à la demande d’un tiers ou en cas de péril imminent.

La première chambre civile de la Cour de cassation en a déduit que cet article devait s’analyser comme interdisant toute mesure d’hospitalisation d’un mineur décidée, sur le fondement de l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, par le directeur d’établissement à la demande d’un tiers ou des titulaires de l’exercice de l’autorité parentale.

Certes, comme le souligne le juge des libertés et de la détention dans sa décision, cette lecture emporte deux inconvénients, celui de priver le mineur du droit de voir sa situation examinée par le juge des libertés et de la détention et celui d’interdire le recours à des mesures d’isolement et de contention qui pourraient, alors que le mineur se trouve en soins libres, s’avérer indispensables.

S’agissant du premier point, il y a lieu de relever que dans son rapport du 8 novembre 2017, le contrôleur général des lieux de privation de liberté préconisait que les mineurs hospitalisés à la demande de leurs représentants légaux puissent contester la nécessité de leur hospitalisation, en saisissant le juge des libertés et de la détention.

M. Paul Chaumont, avocat général, indique, dans son avis, qu’« un tel recours pourrait être opportunément instauré par le législateur ».

Quant aux difficultés pratiques rencontrées par les soignants, face au comportement violent d’un mineur à l’égard de lui-même ou d’autrui, qui nécessiterait le recours à des mesures d’isolement ou de contention, elles peuvent être résolues par le biais d’une décision de soins contraints prise par le représentant de l’État dans le département, un tel comportement révélant l’existence de troubles mentaux qui nécessitent des soins et portent atteinte à la sûreté des personnes.

2. Avis rendus en matière pénale

Aucun avis en matière pénale publié au Rapport en 2022.

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