Rapport annuel 2021 (B. La mise en valeur et la diffusion de la jurisprudence)

Rapport annuel

Ouvrage de référence dans les milieux judiciaire et universitaire, le Rapport de la Cour de cassation est aussi un précieux instrument de travail pour les praticiens du droit. Le Rapport 2021 comporte des suggestions de modifications législatives ou réglementaires, ainsi que l’analyse des principaux arrêts et avis ayant été rendus, tout au long de l’année, dans les différentes branches du droit privé. Le Rapport présente également, de manière détaillée, l’activité juridictionnelle et extra-juridictionnelle de la Cour de cassation, ainsi que celle des juridictions et commissions instituées auprès d’elle.

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Rapport annuel 2021 (B. La mise en valeur et la diffusion de la jurisprudence)

B. La mise en valeur et la diffusion de la jurisprudence

La mise en valeur et la diffusion de la jurisprudence de la Cour de cassation constituent les missions traditionnelles du service que lui confient, pour l’essentiel, les articles R. 433-2, R. 433-3 et R. 433-4 du code de l’organisation judiciaire. Elles se déclinent en plusieurs activités :

  • l’enrichissement des arrêts publiés de la Cour de cassation ;
  • l’élaboration et la publication de ses Bulletins numériques des arrêts publiés des chambres civiles et de la chambre criminelle ;
  • la diffusion de l’intégralité des arrêts sur le site internet de la Cour de cassation via le moteur de recherche Judilibre ;
  • la tenue des bases de données Jurinet et JuriCA ainsi que la conception des moyens de traitement automatisé de données jurisprudentielles et leur diffusion en open data.

La coordination de ces différentes activités est principalement assurée au sein du pôle 2 du SDER par deux bureaux dédiés. Le bureau de la diffusion et de la valorisation de la jurisprudence diffuse, notamment, les arrêts et la jurisprudence de la Cour de cassation dans le cadre traditionnel des publications de la Cour – cadre qui a, toutefois, été modernisé de façon subséquente en 2021 (1). Le bureau du droit du numérique et de la protection des données est, plus spécialement, en charge de la tenue des bases jurisprudentielles de la Cour de cassation (2) et de la diffusion des décisions de la Cour de cassation et des autres juridictions de l’ordre judiciaire en open data (3).

1. L’enrichissement et la publication des arrêts

Traditionnellement, les arrêts de la Cour de cassation étaient siglés « P. B. R. I. ».

Le siglage « P » visait les arrêts qui ont une portée doctrinale, soit par la nouveauté de la solution, soit par une évolution de l’interprétation d’un texte au regard de la jurisprudence antérieure, soit enfin parce que la Cour n’a pas publié cette solution depuis longtemps et qu’elle entend manifester la constance de sa position. Ces arrêts, ainsi que leurs sommaires et leur titrage, sont publiés au Bulletin des arrêts de la Cour de cassation.

Le siglage « B » faisait référence à la publication au Bulletin d’information de la Cour de cassation (BICC). Le BICC étant devenu obsolète avec la transformation numérique des Bulletins, la création du moteur de recherche Judilibre et des Lettres des chambres, il a été supprimé en mai 2020.

Les arrêts classés « R » étaient les arrêts dont la portée doctrinale est plus forte que les précédents ; analysés au Rapport annuel de la Cour de cassation.

Le siglage « I » permettait une mise en ligne de l’arrêt le jour même sur le site internet de la Cour car étant particulièrement attendu et étant le plus susceptible d’intéresser le public.

Ainsi, en 2021, 12 558 décisions ont été publiées qui se ventilent comme suit : 3 arrêts d’assemblée plénière, 31 arrêts de chambre mixte et avis, 1 766 décisions de la première chambre civile, 1 979 de la deuxième chambre civile, 1 467 de la troisième chambre civile, 1 654 de la chambre commerciale, financière et économique, 2 519 de la chambre sociale, 3 116 de la chambre criminelle, 22 du Tribunal des conflits et 1 arrêt de la Cour de justice de la République. Pour les arrêts de la Cour de cassation dont la date de délibéré est postérieure au 15 juin 2021, un nouveau siglage est entré en vigueur.

Ainsi, le « B » vise les arrêts qui sont publiés au Bulletin des arrêts de la Cour de cassation. Il correspond à l’ancien siglage « P ». En sus de leur diffusion au Bulletin, ces arrêts sont diffusés sur le site internet de la Cour de cassation, le jour même de leur mise à disposition (jusqu’à présent, uniquement les arrêts précédemment siglés « I » étaient publiés le jour même de leur prononcé).

Le siglage « R » vise, quant à lui, les arrêts qui sont publiés et commentés dans le Rapport annuel de la Cour de cassation.

En sus de ces siglages, les arrêts faisant l’objet d’un communiqué et d’une diffusion aux Lettres de chambres sont aussi signalés.

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Le SDER assure l’enrichissement des arrêts « P » (devenus « B ») c’est-à-dire publiés aux Bulletins mensuels des arrêts des chambres civiles et de la chambre criminelle, par le titrage, la recherche de connexités et de rapprochements de jurisprudence.

En 2021, 1 076 décisions de la chambre criminelle et des chambres civiles (environ 8,6 % des arrêts motivés) ont été ainsi enrichis.

Ces 1 076 décisions publiées aux Bulletins se ventilent comme suit : 3 arrêts d’assemblée plénière, 1 arrêt de chambre mixte, 14 avis, 155 décisions de la première chambre civile, 242 de la deuxième chambre civile, 111 de la troisième chambre civile, 122 de la chambre commerciale, financière et économique, 201 de la chambre sociale, 205 de la chambre criminelle, 2 de la CNRD et 20 du Tribunal des conflits.

Surtout, au cours de l’année 2021, le Service de documentation, des études et du Rapport a conduit un important travail d’internalisation de la production et de dématérialisation des Bulletins mensuels.

Les Bulletins des arrêts des chambres civiles et de la chambre criminelle de la Cour de cassation souffraient d’un profond retard dans leur parution depuis de nombreuses années, en raison notamment de contraintes liées au support « papier » de cette publication. Cette situation n’était pas satisfaisante à double titre : d’une part la lecture du Bulletin ne permettait pas de prendre connaissance de la jurisprudence récente de la Cour ; d’autre part, à l’aune de l’open data, une identification rapide des arrêts « B » publiés au Bulletin s’est avérée d’autant plus prégnante qu’indispensable pour identifier les arrêts importants, qui doivent être distingués des simples arrêts d’espèce.

La Cour de cassation a décidé de s’inscrire dans une dynamique de transformation numérique de ses publications et des modes de diffusion de sa jurisprudence. Affranchi des contraintes d’un support papier, un processus de rationalisation et d’internalisation a été mis en place au sein même de la Cour, notamment par le déploiement d’une plateforme d’édition numérique, gérée par une chargée d’ingénierie d’édition et de projet numérique au sein du Service de documentation, des études et du Rapport.

La mise en place de cet outil de maquettage interne a permis de reprendre en quelques mois un stock de Bulletins de près de trois ans. Cette période transitoire s’est achevée en décembre 2021.

Janvier 2022 marque le tournant vers la diffusion exclusivement numérique des Bulletins en temps quasi réel. Ainsi le Bulletin des arrêts des chambres civiles et le Bulletin des arrêts de la chambre criminelle du mois de janvier ont été mis en ligne mi-février (en version HTML et PDF) sur le site internet de la Cour de cassation. Les Bulletins des mois à venir seront mis en ligne tous les 15 du mois suivant.

Ce lancement est matérialisé par une nouvelle couverture et s’accompagne de nouveaux enrichissements et fonctionnalités. Sans proprement parler de mutation, les Bulletins et leur index ont fait l’objet de profondes évolutions.

Ainsi, le numéro de l’arrêt au Bulletin a été supprimé[7] afin de permettre une présentation et une navigation par rubrique et non plus par ordre chronologique. Ensuite, les arrêts et leurs titrages sont publiés dans leur intégralité (titres principaux et titres secondaires). Enfin, les références aux textes visés, les rapprochements de jurisprudence, les liens hypertextes vers le commentaire au Rapport annuel, la hiérarchisation de la publication (B/R), ainsi que la formation ayant rendu la décision[8] ont été adjoints et viennent compléter ces enrichissements.

Autre nouveauté : l’index annuel des arrêts publiés au Bulletin devient pluriannuel et perpétuel. Ainsi, il sera enrichi chaque mois par les nouveaux arrêts publiés au Bulletin du mois en cours et permettra une recherche par rubriques avec possibilité d’affiner jusqu’à la troisième, sur l’ensemble des arrêts publiés depuis 2018 pour les chambres civiles et 2019 pour la chambre criminelle.

La présentation de cet index a également été remaniée. Notamment, la mise en page des rubriques en arborescence a été remplacée par une présentation en ligne, dotée d’un lien hypertexte menant directement à l’arrêt, ainsi que d’un menu HTML dépliant facilitant la navigation au sein du document. Il est également désormais possible de sélectionner les trois premières rubriques du titrage de l’arrêt afin d’affiner sa recherche et accéder directement à la jurisprudence s’y rapportant.

Une vidéo expliquant cette transformation numérique est disponible sur le site internet de la Cour de cassation (https://www.courdecassation.fr/kiosque/bulletins-des-arrets-des-chambres-civiles-et-de-la-chambre-criminelle).

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Le Service compose, en outre, le Rapport annuel de la Cour de cassation, dont le livre III comporte les titres et sommaires des avis et arrêts « R », assortis d’un commentaire explicatif. Les 53 décisions les plus marquantes de l’année écoulée sont ainsi analysées dans le présent volume (cf. supra, III).

Par ailleurs, le SDER a institué un comité des Études qui s’est réuni en 2021 pour préparer le recueil des Études diffusé le 27 juin 2022. Chaque année, le comité sélectionne quatre ou cinq thèmes d’études, parmi les sujets proposés par les chambres, le parquet général et les cours d’appel en raison de leur intérêt jurisprudentiel (décisions fondant une jurisprudence nouvelle importante, et s’inscrivant dans un contexte d’un débat doctrinal ou jurisprudentiel ou répondant à une question de droit nouvelle), de leur impact pour les juridictions du fond, des enjeux sociétaux ou encore de l’incidence en droit national du droit de l’Union européenne et de la CEDH.

Les thèmes publiés au recueil 2022 qui est disponible en ligne sur le site internet de la Cour de cassation sont les suivants :

  • Contentieux des clauses abusives : illustration d’un dialogue des juges ;
  • Les enjeux juridiques des locations de courte durée ;
  • Retour sur un bris de jurisprudence : la réforme de l’article 1843-4 du code civil ;
  • Restructuration des sociétés : quelle responsabilité pénale pour les personnes morales ?

[7]. Les arrêts de la Cour ne seront donc plus cités avec une référence du numéro au Bulletin mais seront cités par référence au numéro de pourvoi suivi de la mention « publié au Bulletin ».

[8]. FRH = formation restreinte hors RNSM (rejet non spécialement motivé).

FRR = formation restreinte RNSM.

FP = formation plénière de chambre.

FS = formation de section.

FM = formation mixte.

PL = assemblée plénière.

MI = chambre mixte.

2. Les bases jurisprudentielles de la Cour de cassation

En application de l’article R. 433-3 du code de l’organisation judiciaire, le SDER tient deux bases de données nationales de jurisprudence. La première, appelée « Jurinet », comprend l’ensemble des décisions de la Cour de cassation et une sélection de décisions rendues par les juridictions du fond d’un intérêt particulier. La seconde, dénommée « JuriCA », regroupe l’intégralité des décisions rendues par les chambres civiles, sociale et commerciale des cours d’appel dessaisissant la juridiction, ainsi que certaines décisions des cours d’appel ne dessaisissant pas les juridictions.

En décembre 2021, il y avait un stock de 854 274 décisions (dont 690 411 provenant de la Cour de cassation) dans la base Jurinet et un stock de 2 314 644 décisions dans la base JuriCA.

Les décisions contenues dans la base Jurinet alimentent le site internet Légifrance sur lequel ont été publiées, en 2021, 11 500 décisions, dont 10 032 décisions de la Cour de cassation et 1 468 arrêts et jugements des juridictions du fond.

3. Le lancement de l’open data

L’open data des décisions de justice est défini par l’article L. 111-13 du code de l’organisation judiciaire créé par la loi no 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique et modifié par l’article 33 de la loi no 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

Il est ainsi prévu que : « Sous réserve des dispositions particulières qui régissent l’accès aux décisions de justice et leur publicité, les décisions rendues par les juridictions judiciaires sont mises à la disposition du public à titre gratuit sous forme électronique. Les nom et prénoms des personnes physiques mentionnées dans la décision, lorsqu’elles sont parties ou tiers, sont occultés préalablement à la mise à la disposition du public. Lorsque sa divulgation est de nature à porter atteinte à la sécurité ou au respect de la vie privée de ces personnes ou de leur entourage, est également occulté tout élément permettant d’identifier les parties, les tiers, les magistrats et les membres du greffe. »

Ce faisant, la loi a instauré deux niveaux d’occultation, une occultation dite « socle », obligatoire et dépourvue d’appréciation, et une occultation complémentaire, facultative, décidée par le président de la formation de jugement ou le magistrat ayant rendu la décision en cause, lorsque l’occultation concerne une partie ou un tiers et par le président de la juridiction concernée lorsque l’occultation concerne un magistrat ou un membre du greffe, comme est venu le préciser l’article R. 111-12 du code de l’organisation judiciaire issu du décret no 2020-797 du 29 juin 2020 relatif à la mise à la disposition du public des décisions des juridictions judiciaires et administratives.

Ce décret a confié à la Cour de cassation la responsabilité de la mise à la disposition du public, sous forme électronique, des décisions de justice rendues par les juridictions judiciaires.

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À l’occasion de l’examen de ce projet de décret, la CNIL a, dans son avis du 6 février 2020, estimé « indispensable qu’une doctrine soit élaborée afin de permettre une harmonisation des occultations complémentaires effectuées ». En effet, la CNIL a observé « qu’en l’absence de précisions au niveau réglementaire, il existe, en l’état du dispositif projeté, des risques importants de disparité dans l’occultation des décisions, tant entre les deux ordres de juridictions qu’entre les différentes formations de jugement amenées à se prononcer ».

C’est dans ce cadre, et afin de faciliter la mise en œuvre de l’open data des décisions de justice, que la Cour de cassation a créé, dans un premier temps, un groupe de travail ayant pour mission de réfléchir aux occultations complémentaires des décisions de la Cour de cassation avec pour objectif de tendre vers l’harmonisation des pratiques préconisée par la CNIL, tout en préservant le pouvoir laissé à l’appréciation du juge et sans trop alourdir la charge de travail des magistrats et des greffiers. Le groupe de travail a remis son rapport à la première présidente de la Cour de cassation le 15 janvier 2021.

Les travaux se sont ensuite poursuivis au premier semestre 2021 avec les cours d’appel. Le groupe de travail, présidé par le directeur du SDER et composé de représentants des premiers présidents de cour d’appel, des chambres de la Cour de cassation, des magistrats des cours d’appel, d’un directeur de greffe de cour d’appel et de représentants de la chancellerie et du SDER, a établi des recommandations en vue de la mise à disposition en open data des décisions civiles, sociales et commerciales des cours d’appel. Le rapport a été remis à la première présidente de la Cour de cassation le 24 juin 2021.

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Afin de relever les défis techniques de l’open data, après la mise en production au début de l’année 2020 de son nouveau moteur de pseudonymisation des décisions de justice, qui utilise l’intelligence artificielle, le SDER a créé, dans le cadre du programme « Entrepreneurs d’intérêt général 4 », une nouvelle interface d’anonymisation des décisions de justice, dénommée « LABEL », qui a été mise en production en avril 2021. Cette nouvelle interface permet un contrôle optimisé des décisions de justice, différencié en fonction de la sensibilité des contentieux, tout en améliorant les conditions de travail des agents anonymisateurs.

Par ailleurs, le SDER a développé un moteur de recherche « Judilibre » mettant à disposition, en open data, les décisions de justice, sur le nouveau site internet de la Cour de cassation.

L’équipe technique du SDER est désormais composée d’un chef de projet technique, de deux data scientists et de deux développeurs contractuels au SDER.

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Le moteur de recherche Judilibre a été mis en service le 1er octobre 2021 en rendant disponibles, sur le site internet de la Cour de cassation, toutes les décisions rendues par la Cour de cassation à compter de cette date, outre un « stock » d’environ 480 000 décisions de la Cour rendues principalement depuis 1947. La base de données Judilibre contient, en outre, des enrichissements tels que le titrage et les sommaires, pour les arrêts publiés ; d’éventuels communiqués, des rapprochements de jurisprudence et les références des textes appliqués.

L’arrêté du 28 avril 2021 a, en outre, fixé le calendrier de mise en œuvre de l’open data pour les juridictions du fond : après les décisions civiles, sociales et commerciales des cours d’appel qui sont mises en open data depuis le 21 avril 2022, les décisions des autres juridictions judiciaires seront mises en open data entre juin 2023 et décembre 2025.

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De manière plus générale, la Cour de cassation prend sa place dans la réflexion qui s’est engagée sur la réutilisation des données des décisions de justice, et notamment sur sa dimension éthique. Cette réflexion s’est concrétisée par l’instauration d’un groupe de travail sur ce thème avec le Conseil d’État et le ministère de la justice. Ainsi, de nombreuses réunions du groupe de travail ont eu lieu en 2021, aboutissant à l’établissement d’un rapport en décembre 2021.

Le Cour de cassation a aussi participé à de nombreux évènements en lien avec l’open data : Troisième plan d’action national du Partenariat pour un gouvernement ouvert (mai 2021), les rendez-vous de la transformation du droit et du numérique (novembre 2021) …

Enfin, a été institué en septembre 2021 un groupe de travail coprésidé par le directeur du SDER, le professeur Loïc Cadiet et la professeure Cécile Chainais, chargé de réfléchir aux conséquences de la diffusion des données décisionnelles sur la notion de jurisprudence et sur les pratiques des professionnels du droit. Les conclusions de ce groupe de travail ont été remises le 14 juin 2022.

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