N°9 - Décembre 2022 (Location de courte durée de logements meublés)

Lettre de la troisième chambre civile

Une sélection commentée des arrêts rendus par la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Action en garantie du constructeur / Associations syndicales / Assurance construction / Baux commerciaux / Baux ruraux / Contrat d'entreprise / Enrichissement sans cause / Environnement / Immeuble en péril / Location de courte durée de logements meublés).

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Lettre de la troisième chambre civile

N°9 - Décembre 2022 (Location de courte durée de logements meublés)

L'intermédiaire n'encourt pas l'amende civile prévue par l'article L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation

3e Civ., 9 novembre 2022, pourvois n° 21-20.464 et 21-20.814, publié au Bulletin

Créée pour faire face à la pénurie de logements après-guerre, la législation soumettant à autorisation préalable le changement d'usage des locaux destinés à l'habitation, dans certaines zones urbaines soumises à de fortes tensions sur les loyers, a connu un regain d'utilisation lorsque les pouvoir publics ont souhaité réguler l'offre de locations de courte durée par l'intermédiaire de plateformes numériques.

C'est ainsi que la loi n° 2014-336 du 24 mars 2014, dite ALUR, a complété l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation par un alinéa qui assimile explicitement au changement d'usage soumis à autorisation préalable le fait de louer un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile.

La Cour de cassation (3e Civ., 18 février 2021, pourvoi n° 17-26.156, publié au Bulletin et au Rapport) a précisé la portée de cette assimilation en énonçant que relevaient de ce texte, hormis les locations étudiantes d'une durée au moins égale à neuf mois, les baux mobilité d'une durée de un à dix mois et la location, pour une durée maximale de quatre mois, du local constituant la résidence principale du loueur, toutes les locations de locaux meublés à plus d'une reprise au cours d'une même année, à une clientèle de passage n'y fixant pas sa résidence principale au sens de l'article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, consenties pour une durée inférieure à un an, telle qu'une location à la nuitée, à la semaine ou au mois.

L'arrêt commenté éclaire sous un autre angle les éléments constitutifs de l'infraction aux dispositions de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, que l'article L. 651-2 de ce code sanctionne par une amende civile de 50 000 euros.

Le pourvoi critiquait une cour d'appel pour avoir jugé qu'un intermédiaire, n'ayant pour activité que la mise à disposition de locaux destinés à être loués dans les conditions du dernier alinéa de l'article L. 631-7, n'encourait pas cette amende.

Se posait donc la question de l'articulation du dispositif du code de la construction et de l'habitation avec celui de l'article L. 324-2-1 du code du tourisme, imposant aux intermédiaires se livrant ou prêtant leur concours à la mise en location d'un meublé de tourisme, par une activité d'entremise ou de négociation ou par la mise à disposition d'une plateforme numérique, d'informer le loueur de ses obligations au titre du changement d'usage et d'obtenir de lui, préalablement à la mise en location, une déclaration sur l'honneur attestant de leur respect.

Pour y répondre, la Cour de cassation s'est fondée sur la qualification de l'amende civile encourue de sanction ayant le caractère d'une punition (3e Civ., 5 juillet 2018, QPC, pourvoi n° 18-40.014), de sorte qu'en vertu du principe de légalité des délits et des peines, que le Conseil constitutionnel applique avec le même degré d'exigence dans les matières pénales et non-pénales, les éléments constitutifs de l'infraction qu'elle réprime sont d'interprétation stricte. 

Or, seul le fait de louer, dans certaines conditions, un local meublé est assimilé au changement d'usage et l'intermédiaire n'est pas partie au contrat de location de meublé, même lorsqu'il a mission d'intervenir à l'acte en représentation du bailleur.

De surcroît, il n'a en principe pas accès aux éléments lui permettant d'avoir connaissance du statut du local loué au regard de la réglementation du changement d'usage, qui dépend, selon les articles L. 631-7 et L 631-8 du code de la construction et de l'habitation, de l'affectation des lieux au 1er janvier 1970 et des autorisations administratives de changement d'usage ou de travaux ultérieurement accordées.

Enfin, les dispositions déterminant, d'une part, les obligations du loueur de meublés, d'autre part, celles de l'intermédiaire à la location, sont issues de la même loi dite ALUR et les secondes, enrichies par la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, ont été sanctionnées par diverses amendes civiles, en miroir du dispositif du code de la construction et de l'habitation, par la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, dite ELAN.

Servant ensemble l'objectif, affiché par le législateur de 2014, de mettre en œuvre une stratégie globale et de grande ampleur destinée à réguler les dysfonctionnements du marché en permettant l'accroissement de l'offre de logement dans des conditions respectueuses de l'équilibre des territoires, ces réglementations doivent être appliquées en cohérence l'une avec l'autre.

La Cour de cassation a donc approuvé la cour d'appel en énonçant que celui qui se livre ou prête son concours à la mise en location, par une activité d'entremise ou de négociation ou par la mise à disposition d'une plateforme numérique, en méconnaissance de l'article L. 631-7, et dont les obligations spécifiques sont prévues par l'article L. 324-2-1 du code du tourisme, n'encourt pas l'amende civile prévue par l'article L. 651-2. 

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