N°6 - Février 2022 (Le regard de...)

Lettre de la troisième chambre civile

Une sélection commentée des arrêts rendus par la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Baux commerciaux / construction / construction de maison individuelle / contrat d'architecte / contrat d'entreprise / expropriation  / vente immobilière).

  • Immobilier
  • bail commercial
  • construction immobilière
  • contrat de travaux
  • architecte
  • architectes et entrepreneurs
  • architecte entrepreneur
  • responsabilité contractuelle
  • contrat d'entreprise
  • paiement
  • expropriation
  • renonciation
  • vente immobilière
  • délais

"(R)évolution de Palais" - par Me Clémence Hourdeaux et Me François-Régis Boulloche

Avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation, correspondants de la troisième chambre civile de la Cour de cassation

Il est à peine besoin de rappeler les différentes raisons qui ont conduit la Cour de cassation à modifier la rédaction de ses arrêts ni à expliciter la forme qu’ils prennent désormais. La justice étant rendue au nom du peuple français, formule qui figure en tête de chaque arrêt de la Cour de cassation, tout un chacun doit pouvoir en comprendre aisément les termes. Deux années après la mise en œuvre de ce changement, un premier retour d’expérience peut en être dressé : il s’avère extrêmement positif.

Certains ne se sont pas montrés d’emblée enthousiastes à l’idée de cette modification des pratiques. Irréductiblement attachés aux traditions et rétifs au changement ? Assurément pas, plutôt fervents adeptes de la concision qui permettait, à condition de détenir les clés du syllogisme juridique, de saisir rapidement la portée d’une décision.

Cependant, il était souvent nécessaire, en particulier au moment de l’envoi de la décision de la Cour de cassation au justiciable, d’en expliciter, parfois longuement, parfois avec même une pointe de doute et donc de réserves, sa motivation et sa portée. Cette explication de texte s'imposait spécialement dans le contentieux dévolu à la troisième chambre civile, contentieux technique s’il en est et mettant le plus souvent aux prises de nombreuses parties… De fait, les cassations partielles sont légion, notamment en droit de la construction.

Désormais, la Cour de cassation explicite la portée de la cassation qu’elle prononce. Dès lors, les justiciables que nous assistons et qui sont évidemment les premiers concernés par les arrêts rendus en comprennent plus facilement les termes ; de fait, nous sommes moins systématiquement interrogés sur l’interprétation à donner de la décision qui les intéresse et sur ce qui sera éventuellement de nouveau débattu devant la juridiction de renvoi.

Ce constat est encore plus marqué s’agissant des arrêts dont la motivation est enrichie. L’énoncé, par la Cour suprême, de sa ratio decidendi permet en effet une meilleure compréhension de ses choix. En particulier pour la partie qui subit un revirement de jurisprudence dont le juge, et non son conseil, lui explique désormais la genèse et la justification…

Or, ce point est essentiel : la compréhension, pour la partie perdante, de l’arrêt qui la déboute, est le préalable nécessaire à son acceptation, même si elle n’est pas immédiate. Et le justiciable s’avère très sensible au fait que le juge suprême veuille qu'il comprenne ses décisions, même si l’on ne saurait évidemment faire fi du particularisme et des subtilités de la technique de cassation.

En définitive, ce qui constitue une évolution pour le technicien de la cassation s'avère bien souvent être une révolution pour son client.

« Il n’y a rien de négatif dans le changement, si c’est dans la bonne direction » (Winston Churchill)... On change rarement l’opinion des autres, mais on change quelques fois la sienne.

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