N°3 - Mai 2021 (Éditorial de Valérie Georget et Anne-Lise Collomp, conseillers référendaires à la 3e chambre civile, chargées de mission du président.)

Lettre de la troisième chambre civile

Lettre de la troisième chambre civile

N°3 - Mai 2021 (Éditorial de Valérie Georget et Anne-Lise Collomp, conseillers référendaires à la 3e chambre civile, chargées de mission du président.)

La Cour de cassation compte environ soixante-dix conseillers référendaires.

Actuellement, neuf d’entre eux, six femmes et trois hommes, sont affectés à la troisième chambre civile.

Qui sont-ils et d’où viennent-ils ?

Ces neuf magistrats, âgés en moyenne de 47 ans, ont été nommés à la Cour de cassation, alors qu’ils avaient entre 39 et 46 ans, après, environ, 15 ans de carrière (entre 11 et 19 ans).

Plutôt civilistes, la plupart ont, auparavant, occupé quatre ou cinq postes en majorité en qualité de juges puis vice-présidents dans des tribunaux alors dénommés de grande instance et d’instance. Une conseillère référendaire a exercé des fonctions en cour d’appel.

Deux d’entre eux ont été magistrats à l’administration centrale de la Justice (MACJ), plusieurs ont exercé des fonctions spécialisés (juge des enfants ou juge d’instruction) et deux ont été juges de l’expropriation.

Sept de ces magistrats ont accompli une carrière en région et deux d’entre-eux presque exclusivement dans des juridictions ou instances parisiennes.

Quelle réalité recouvre la fonction de conseiller référendaire à la troisième chambre civile de la Cour de cassation ?

Conjuguer conseiller référendaire et droit immobilier, c’est imaginer une vie professionnelle austère, solitaire, académique.

Elle est vécue comme exigeante, passionnante, multiple.

En premier lieu, les conseillers référendaires exercent les fonctions inhérentes à l’activité juridictionnelle de la Cour de cassation.

Ces fonctions sont similaires, pour l’essentiel, à celles des conseillers d’un grade plus élevé et consistent, comme pour ceux-ci, à examiner les dossiers qui leur sont nommément attribués, dans les contentieux dont ils ont plus particulièrement la charge (soit, à la troisième chambre civile : le droit des baux, de la propriété immobilière, de la copropriété, de la construction, de l’expropriation, de la vente...). Ce travail consiste à établir un rapport exposant la ou les questions de droit posées par le pourvoi, les références jurisprudentielles et doctrinales utiles, lequel est destiné à éclairer les collègues sur les questions qu’ils auront à juger. Ce rapport est mis à la disposition des parties et des collègues par l’intermédiaire du « bureau virtuel » de la Cour de cassation. Ils rédigent ensuite deux documents qui n’auront pas en revanche la même publicité : un avis et un ou des projets d’arrêts, destinés aux seuls membres de la formation de jugement.

Il existe une différence, de taille, entre le rôle d’un conseiller référendaire et celui d’un conseiller : le conseiller référendaire n’a pas voix délibérative sauf dans les dossiers qu’il rapporte. Cette règle exige, à mi-parcours professionnel, de l’humilité. Mais cela ne signifie aucunement que le conseiller référendaire n’ait pas, au cours du délibéré, une influence effective : en effet, son avis est entendu dans tous les dossiers, et écouté avec la même attention que celui de tous les magistrats composant la formation de jugement. Entendus les derniers au cours du délibéré, les avis des conseillers référendaires n’en sont pas moins susceptibles de modifier le cours de celui-ci lorsqu’une observation de leur part relance le débat.

Dans le prolongement de leur activité juridictionnelle au sein de la chambre, les conseillers référendaires rédigent tous les sommaires des arrêts publiés ; le sommaire correspond à une brève et fidèle synthèse de la règle énoncée par l’arrêt (soumise à l’approbation du président). Ils pré-orientent également les pourvois : tous les mois, ils déterminent la nature et la difficulté des questions posées par chacun des dossiers, qui relèvent de leurs « spécialités », afin d’aider le président à distribuer efficacement et équitablement ces dossiers entre les conseillers et à proposer un circuit adapté à leur examen (notamment, pour les pourvois déposés à compter du 1er septembre 2020, une orientation vers un circuit approfondi peut être décidée concernant les dossiers posant une question de droit inédite, inclinant à un revirement de jurisprudence ou présentant un enjeu de société majeur).

Outre ces fonctions communes, les conseillers référendaires de la troisième chambre civile ont une vie professionnelle diversifiée.

Certaines de ces activités ont un lien étroit avec la chambre.

Deux conseillères référendaires sont « chargées de mission ». Leur mission ? Assister et représenter le président de la troisième chambre civile dans les instances internes de la Cour de cassation et participer au comité de rédaction de la présente Lettre.

Plusieurs conseillers référendaires participent à l’événement annuel consacré à la « rencontre de jurisprudence autour du droit immobilier ».

Deux d’entre eux sont référents de la chambre pour l’accueil des présidents de chambre de cours d’appel qui seront reçus prochainement en stage à la Cour de cassation.

L’une est membre du comité éditorial des Études de la Cour de cassation.

Cinq parmi eux dirigent, seul ou en binôme avec un conseiller, des sessions de formation de l’École Nationale de la Magistrature (contentieux de la construction, de la vente immobilière, des baux commerciaux, de l’expropriation et de la copropriété).

Les portes de la troisième chambre civile s’ouvrent vers les instances internes de la Cour de cassation.

Ainsi, nombre de conseillers référendaires ont-ils collaboré aux différents groupes de travail (notamment sur le contrôle de conventionnalité, sur la méthodologie de l’arrêt, sur les méthodes de travail ...) mis en place au cours des dernières années pour moderniser et dynamiser la Cour de cassation.

Deux conseillères référendaires sont membres de la Commission de liaison avec les cours d’appel.

Deux autres participent au précieux dispositif d’aide juridictionnelle de la Cour de cassation (l’une est membre du bureau d’aide juridictionnelle, l’autre statue sur les recours formés contre les décisions du bureau). Outre les conditions de ressources et de patrimoine des personnes qui souhaitent obtenir l’aide de l’État pour financer les frais d’un pourvoi, la demande d’aide juridictionnelle doit présenter une chance sérieuse d’obtenir une cassation de la décision contestée. Le travail des membres de ce bureau se rapproche donc de celui des avocats aux Conseils, qui composent d’ailleurs également ce bureau.

Certains conseillers référendaires conservent un lien avec le droit pénal en siégeant à la Commission d'instruction de la cour de révision et de réexamen des condamnations pénales, à la Cour de révision des condamnations pénales et à la Commission nationale de réparation des détentions.

Les portes de la Cour de cassation ne sont pas fermées.

Au cours des années 2019-2020, pendant une durée de dix mois, un des conseillers référendaires de la section des baux, a été magistrat national détaché au sein du cabinet du juge danois de la Cour de justice de l'Union européenne. A ce titre, il a effectué le même travail que celui des quatre référendaires que compte chaque cabinet de la Cour, soit la rédaction de projets de rapport préalable, de mémorandum, de notes en délibéré et, bien sûr, d'arrêts.

Ce magistrat siège, par ailleurs, à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et est référent de la troisième chambre civile pour les relations avec le Conseil d’État.

Un signe de bien-être professionnel : au cours des six dernières années, aucun conseiller référendaire n’a demandé à changer de chambre.

La durée maximale d’exercice de ce poste est fixée à dix ans.

Que deviennent les conseillers référendaires de la troisième chambre civile ? Ils rejoignent, pour la plupart, les juridictions du fond, tribunaux judiciaires ou cours d’appel, le plus souvent dans des contentieux en lien avec le droit immobilier.

Certains de ceux qui le souhaitent se voient, quelques années plus tard, rouvrir les portes de la Cour de cassation.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.