N°12 - Décembre 2023 (Propriété)

Lettre de la troisième chambre civile

 

Une sélection des arrêts rendus par la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Assurance-construction / Baux commerciaux / Baux ruraux / Construction / Expropriation / Propriété)

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Lettre de la troisième chambre civile

N°12 - Décembre 2023 (Propriété)

L'action en remboursement de celui qui a construit sur le sol d'autrui avec des matériaux lui appartenant n'est pas subordonnée à son éviction

3e Civ., 21 septembre 2023, n° 22-15.359, publié au Bulletin

Après l’article 551 du code civil qui pose le principe, selon lequel « tout ce qui s'unit et s'incorpore à la chose appartient au propriétaire », l’article 555 du même code règle la question du sort des ouvrages, constructions ou plantations effectués par un tiers, avec des matériaux lui appartenant, sur le sol d’autrui.

A moins que le propriétaire n’en exige la suppression, il est tenu, en application du troisième aliéna de ce texte, de lui rembourser soit la somme correspondant à l’augmentation de la valeur du fonds, soit le coût des matériaux et le prix de la main d’œuvre estimés à la date du remboursement.

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt commenté, deux époux communs en biens avaient construit leur maison d’habitation sur une parcelle appartenant à l’un des beaux-parents.

Après leur divorce, l’ex-épouse avait assigné son beau-père en paiement de la somme correspondant à ses droits indivis sur la moitié de l’ancien domicile conjugal.

Ayant relevé qu’il avait opté pour la conservation de l’ouvrage, la cour d’appel l’a condamné à rembourser le coût des matériaux et le prix de la main d’œuvre estimés à la date du remboursement.

Au soutien de son pourvoi, il faisait valoir que l’action indemnitaire du tiers constructeur supposait son éviction préalable, non caractérisée en l’espèce puisque l’ex-épouse avait volontairement quitté les lieux.

Par un énoncé de principe, la Cour de cassation juge, au contraire, que l'action en remboursement dont dispose celui qui a construit sur le terrain d'autrui avec des matériaux lui appartenant, contre le propriétaire du fonds, n'est pas subordonnée à son éviction.

Elle vient ainsi préciser que cette action, ouverte par le troisième alinéa de l’article 555 du code civil, n’est pas conditionnée par l'éviction du tiers, mentionnée à son quatrième alinéa, et à l'égard duquel, s’il est de bonne foi au sens de l’article 550 du même code, le propriétaire ne peut exiger la démolition des ouvrages, constructions ou plantations qu'il a réalisés.

Ce faisant, elle s’inscrit dans la ligne d’une jurisprudence établie ayant reconnu au tiers constructeur un droit de rétention sur les constructions jusqu’au paiement ou la fixation de sa créance indemnitaire (3e Civ., 23 avril 1974, Bull. III, n°164 ; 3e Civ., 3 octobre. 1990, pourvoi n° 88-18.415, Bull. III, n° 180).

Est ainsi à nouveau illustrée la fonction de la règle posée à l’article 555 du code civil, qui est, sans autre condition, d’empêcher un enrichissement sans cause du propriétaire du sol, lorsque celui-ci choisit de conserver les constructions édifiées par un tiers sur son terrain.

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