N°7 - Juillet 2022 (Divorce et séparation de corps)

Lettre de la première chambre civile

Une sélection des arrêts rendus par la première chambre civile de la Cour de cassation (Diffamations et injures / Divorce et séparation de corps / Droit international privé / Droit international privé économique / Etat / Protection des consommateurs / Responsabilité contractuelle / Succession).

Lettre de la première chambre civile

N°7 - Juillet 2022 (Divorce et séparation de corps)

Appel du divorce : quelles sont les conséquences de la fin de l’appel général sur l’intérêt à former appel de l’époux ayant introduit une demande en divorce et ayant obtenu gain de cause sur ce point ?

1re Civ., 20 avril 2022, avis n° 22-70.001, publié

Saisie par la cour d’appel de Paris, la Cour de cassation a eu à s’interroger sur les conséquences du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, en tant qu’il a mis fin à l’appel général, sur la procédure de divorce.

En substance, la question posée à la Cour de cassation revenait à se demander si un époux qui n’a pas succombé en première instance en sa demande en divorce a néanmoins intérêt à relever appel de ce chef afin de différer la date à laquelle le divorce aura force de chose jugée pour la faire coïncider avec celle à laquelle les mesures accessoires au divorce acquerront la même force. 

Pour répondre négativement à cette question, la Cour de cassation s’est fondée sur les principes généraux gouvernant la procédure d’appel.

D’une part, l’article 542 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, selon lequel l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une décision du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel, empêche l’époux qui a obtenu gain de cause sur le prononcé du divorce d’obtenir en appel la réformation du jugement sur ce point.

D’autre part, ainsi qu’il résulte des articles 32, 122 et 546, alinéa 1er, du code de procédure civile la succombance, qui détermine l’intérêt à interjeter à appel, s’apprécie pour chacun des chefs de jugements attaqués (2e Civ., 4 mars 2021, pourvoi n° 19-21.579, publié ; 1re Civ., 9 juin 2021, pourvoi n° 19-10.550, publié). Ainsi, dès lors qu’un époux a obtenu gain de cause sur le chef de dispositif concernant le divorce, il est dépourvu d’intérêt à former appel de ce chef. (2e Civ., 4 mars 2021, pourvoi n° 19-21.579, publié ; 1re Civ., 9 juin 2021, pourvoi n° 19-10.550, publié). 

En conséquence, lorsqu’il ne sera formé appel que des conséquences du divorce, le prononcé du divorce sera acquis à l’expiration du délai d’appel, emportant dès lors la fin des mesures provisoires.

Appel du divorce : en l’absence d’appel principal portant sur le principe du divorce, à quelle date une cour d’appel doit-elle se placer pour apprécier la demande de prestation compensatoire ?

1re Civ., 9 juin 2022, pourvoi n° 20-22.793, publié

La Cour de cassation juge avec constance qu’en application des articles 260, 270 et 271 du code civil, s’agissant du divorce judiciaire, c’est à la date à laquelle il est mis fin au devoir de secours, c’est-à-dire à la date à laquelle la décision prononçant le divorce acquiert force de chose jugée, qu’il convient de se placer pour apprécier la demande de prestation compensatoire.

Si, en première instance, la détermination de cette date ne pose pas de difficulté, le juge aux affaires familiales devant se situer au moment où il prononce le divorce, la question est plus complexe à hauteur d’appel, la détermination de la date à laquelle la décision prononçant le divorce prend force de chose jugée nécessitant de distinguer si l’appel principal porte ou non sur le prononcé du divorce lui-même.

Une jurisprudence réitérée à de nombreuses reprises depuis 2010 (1re Civ., 15 décembre 2010, pourvoi n° 09-15.235, Bull. 2010, I, n° 263) avait fixé comme principe qu’en cas d’appel limité à la prestation compensatoire la cour d’appel devait se placer à la date de dépôt des conclusions de l’intimé, puis, précisant sa jurisprudence à la date des dernières conclusions de l’intimé (1re Civ., 25 juin 2014, pourvoi n° 13-18.751), celui-ci conservant jusqu’à cette date la possibilité de former un appel incident sur le prononcé du divorce.

L’entrée en vigueur du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, qui, opérant un recentrage du procès en appel, a modifié plusieurs dispositions relatives à la procédure d’appel, a suscité des divergences de jurisprudence sur cette question.

Dans l’affaire qui était soumise à la 1ère chambre civile, la cour d’appel, après avoir constaté que l’appel principal ne portait pas sur le prononcé du divorce et que les premières conclusions d’intimé n’avaient pas étendu la saisine de la cour au prononcé du divorce, en avait déduit que le prononcé du divorce était devenu définitif à la date des premières conclusions de l’intimé et que c’était donc à celle-ci qu’il convenait de se placer pour apprécier la demande de prestation compensatoire.

Le moyen, s’appuyant sur la jurisprudence précitée de la Cour de cassation, soutenait que la cour d’appel aurait dû se placer à la date des dernières conclusions de l’intimé.

Se fondant désormais sur l’article 909 du code de procédure civile, qui fixe à trois mois le délai imparti à l’intimé pour déposer ses conclusions au greffe, la Cour de cassation valide le raisonnement des juges du fond affirmant que, lorsque ni l'appel principal ni, le cas échéant, l'appel incident ne portent sur le prononcé du divorce, celui-ci acquiert force de chose jugée à la date du dépôt des conclusions de l'intimé mentionnées à l'article 909 du code de procédure civile.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.