n°4 - Octobre 2021 (Étranger)

Lettre de la première chambre civile

Une sélection des arrêts rendus par la première chambre civile de la Cour de cassation.

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Lettre de la première chambre civile

n°4 - Octobre 2021 (Étranger)

Extension de la garde à vue à de nouveaux faits : le procureur de la République doit en être immédiatement informé. A défaut, quelle incidence sur la mesure de rétention administrative qui succède à la garde à vue?

1re Civ., 23 juin 2021, pourvoi n°19-22.678, publié

Lorsqu’un officier de police judiciaire décide, sur le fondement de l’article 65 du code de procédure pénale, d’étendre une mesure de garde à vue à d’autres faits, doit-il en informer, sans délai, le procureur de la République?

Telle était la question inédite à laquelle devait répondre la première chambre civile dans un dossier de rétention administrative.

Sollicitée pour avis, la chambre criminelle a répondu par l’affirmative, estimant que, pour pouvoir exercer un contrôle effectif de la garde à vue, le procureur de la République doit, dès l’extension de cette mesure à de nouveaux faits, être avisé par l’officier de police judiciaire des soupçons pesant sur la personne concernée ainsi que de la qualification susceptible d’être notifiée à celle-ci.

Elle a précisé que l'absence d'une telle information fait nécessairement grief aux intérêts de la personne gardée à vue, au sens de l'article 802 du code de procédure pénale, et doit entraîner la nullité des procès-verbaux de son audition sur les nouveaux faits, ainsi que, le cas échéant, celle des actes subséquents qui trouvent dans ceux-ci leur support nécessaire et exclusif.

Il appartenait à la première chambre civile de tirer les conséquences de cet avis sur la régularité de la mesure de rétention administrative.

Précédemment, elle avait, dans le prolongement des arrêts rendus par la chambre criminelle, jugé que le refus d’informer l’avocat choisi par la personne gardée à vue fait nécessairement grief à l’étranger placé en rétention administrative (1re Civ., 20 novembre 2019, pourvoi n°18-25.107, publié). En effet, une telle irrégularité ayant pour sanction, en procédure pénale, la nullité de la garde à vue, elle ne peut que porter atteinte aux droits de l’étranger qui a été placé en rétention à l’issue de cette mesure.

Retenant, en l’état de l’avis de la chambre criminelle, que le défaut d’information du procureur de la République en cas d’application des dispositions de l’article 65 du code de procédure pénale n’a pas pour effet d’annuler la garde à vue en son ensemble, la première chambre civile a considéré que l’étranger doit, pour obtenir la mainlevée de la mesure de rétention administrative, établir la preuve d’une atteinte à ses droits.

En conséquence, elle a rejeté le pourvoi formé contre l’ordonnance rendue par le premier président d’une cour d’appel, qui avait ordonné la prolongation de la rétention, après avoir souverainement estimé que l’étranger ne rapportait pas la preuve d’une telle atteinte.

Notification tardive des droits à l’étranger placé en garde à vue et mainlevée de la mesure de placement en rétention administrative : point n’est besoin de prouver un grief

1re Civ., 29 septembre 2021, pourvoi n°20-17.036, publié

En principe, lorsqu’un étranger sollicite la mainlevée d’une mesure de rétention administrative en raison d’une irrégularité affectant la garde à vue qui l’a précédée, il doit établir la preuve d’un grief.

Cette exigence résulte des dispositions de l'article L. 552-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 et, depuis le 1er mai 2021, de l’article L. 743-12 du même code.

Mais, la première chambre civile, s’inspirant de la jurisprudence de la chambre criminelle, a jugé que le refus par l’officier de police judiciaire d’informer l’avocat choisi par la personne gardée à vue portait nécessairement atteinte aux droits de l’étranger placé en rétention administrative (1re Civ., 20 novembre 2019, pourvoi n°18-25.107, publié).

Tout logiquement, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt rendu le 29 septembre 2021, elle applique ce même principe au retard dans la mise en œuvre de la notification des droits à la personne gardée à vue, non justifié par des circonstances insurmontables.

En effet, cette irrégularité, comme celle relative à l’avocat choisi, a pour sanction, en procédure pénale, la nullité de la garde à vue en son ensemble de sorte qu’elle ne peut que faire grief à l'étranger qui a été placé en rétention à l’issue de cette mesure.

Grève des avocats et obstacle insurmontable à l’assistance d’un étranger par un conseil : le juge n’a pas à s’interroger sur la possibilité d’un renvoi qui ne lui est pas demandé

1re Civ., 13 octobre 2021, pourvoi n°20-12.449, publié

En matière de soins psychiatriques sans consentement, la première chambre civile juge qu’un mouvement de grève du barreau, rendant impossible la désignation d'un avocat commis d'office, constitue un obstacle insurmontable à l'assistance d’un conseil, sans qu’il ne puisse être reproché au premier président d’avoir omis de préciser en quoi l’audience ne pouvait pas être reportée à une date ultérieure, dès lors qu’aucune demande de renvoi n’a été formée par le patient (1re Civ., 13 septembre 2017, pourvoi n° 16-22.819, Bull. 2017, I, n° 190).

L’arrêt du 13 octobre 2021 étend cette solution au contentieux de la rétention administrative, ce qui traduit une évolution par rapport à une précédente décision (1re Civ., 27 février 2013, pourvoi n°11-27.273), dont il ressortait que ce magistrat devait s’interroger sur la possibilité d’un renvoi, même s’il n’était saisi d’aucune demande en ce sens.

Cette jurisprudence tend à assurer, dans ces contentieux, un équilibre entre le respect des droits de la défense et la nécessité d’assurer le cours de la justice, en tenant compte des délais très courts imposés au juge pour statuer.

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