Clarification de la répartition des compétences entre le juge aux affaires familiales et le juge des enfants
1re Civ., 20 octobre 2021, pourvoi n°19-26.152, publié
Un juge aux affaires familiales prononce le divorce d’époux, fixe la résidence habituelle de l'enfant au domicile de son père et accorde à sa mère un droit de visite et d'hébergement.
Après avoir constaté, au domicile de la mère, une situation de danger née d’éléments postérieurs à la décision du juge aux affaires familiales, un juge des enfants ordonne une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert au bénéfice de l’enfant, le confie à son père et accorde à sa mère un droit de visite médiatisé jusqu'à la prochaine décision du juge aux affaires familiales.
Sa décision est annulée par la cour d’appel qui considère que le juge des enfants a excédé ses pouvoirs.
La première chambre civile rejette le pourvoi, en jugeant :
- qu’un juge des enfants ne peut pas décider d’un placement chez le parent qui a déjà la résidence habituelle, puisqu’il résulte clairement de l'article 375-3, 1°, du code civil, qu’il ne peut décider de confier l’enfant qu’à « l'autre parent » ;
- que, même s’il constate une situation de danger chez le parent qui n’a pas la résidence habituelle, il ne peut pas prendre des mesures qui aboutissent à imposer des modalités différentes, quant à l'exercice de l'autorité parentale, de celles prévues par le juge aux affaires familiales.
Ce second point constitue un revirement de jurisprudence (cf. en sens contraire : 1re Civ., 26 janvier 1994, pourvoi n° 91-05.083, Bull. 1994, I, n° 32 et 1re Civ., 10 juillet 1996, pourvoi n° 95-05.027, Bull. 1996, I, n° 313).
La première chambre civile explique ce revirement par les raisons suivantes.
D’une part, cette solution respecte la lettre des textes, l'article 375-7 du code civil conditionnant la fixation, par le juge des enfants, du droit de visite et d’hébergement à une mesure de placement.
D’autre part, elle est conforme à la mission du juge des enfants, qui n’a pas à intervenir lorsqu’une situation de danger peut être évitée par une mesure autre que celles relevant de l'assistance éducative. Or, dans un contexte d'urgence, le juge aux affaires familiales peut être saisi en qualité de juge des référés, par les parents ou le ministère public, sur le fondement de l'article 373-2-8 du code civil, en vue d'une modification des modalités d'exercice de l'autorité parentale.
Enfin, elle permet d'éviter le risque d’instrumentalisation du juge des enfants.