N°2 - Mars 2021 (Protection des consommateurs)

Lettre de la première chambre civile

Lettre de la première chambre civile

N°2 - Mars 2021 (Protection des consommateurs)

Signature d'un contrat de démarchage et connaissance des vices qui l'affectent

1re Civ., 9 décembre 2020, pourvoi n° 18-25.686, publié

Tout contrat de démarchage conclu avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 est soumis, à peine de nullité, à un formalisme particulier prévu aux articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation, dans leur rédaction alors applicable.

C'est ainsi, par exemple, qu'il doit désigner de manière précise la nature et les caractéristiques des biens offerts ou des services proposés.

Afin d'assurer l'information du consommateur, le législateur a imposé la reproduction des articles précités dans le contrat de démarchage.

Peut-on déduire d'une telle reproduction que le consommateur a ainsi connaissance des vices résultant de l'inobservation de ces dispositions par le professionnel ?

Une réponse positive est apportée par la première chambre civile, laquelle clarifie au passage sa jurisprudence.

Une telle position procède de l'idée qu'un consommateur normalement attentif est en mesure de confronter les dispositions légales précitées avec celles de son contrat, et ainsi de déceler les vices qui l'affectent.

Une telle connaissance du vice n'est pas sans conséquence, dès lors qu'en cas d'exécution volontaire du contrat par le consommateur, celui-ci n'a plus la possibilité d'en invoquer la nullité, les conditions de sa confirmation étant réunies.

Contrat de démarchage: le devis doit être accepté au domicile des consommateurs, en présence du professionnel

1re Civ., 9 décembre 2020, pourvoi n° 19-18.391, publié

Lorsqu’ils sont démarchés à domicile par un professionnel en vue de la souscription d’un contrat de vente ou de prestation de service, les consommateurs peuvent être soumis à une pression psychologique ou ne pas disposer d’un recul suffisant sur le contenu et les effets du contrat proposé, qu’ils aient ou non sollicité la visite du professionnel. Ils bénéficient, par conséquent, depuis une loi du 22 décembre 1972, d’une législation protectrice de leur consentement.

L’article L. 121-21, alinéa 1er, du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, disposait que les articles L. 121-21 à L. 121-33 de ce code s’appliquaient lorsque le démarchage était pratiqué au domicile d'une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail.

Dans l’arrêt commenté, relatif à la souscription d’un contrat de fourniture et d’installation d’un système de production d’électricité d’origine photovoltaïque, la Cour de cassation apporte une importante précision sur les conditions de mise en œuvre de ces dispositions. Pour dire qu’un contrat a été conclu à l’occasion d’un démarchage, il ne suffit pas qu’un professionnel se soit déplacé au domicile des consommateurs, et que ces derniers aient accepté ultérieurement un devis adressé par voie postale (1re Civ., 12 juillet 2012, pourvoi n° 11-20.631, inédit). Il est nécessaire que le devis ait été accepté au domicile des consommateurs en présence du professionnel.

Cette solution n’apparaît pas remise en cause par le nouvel article L. 221-1, 2°, du code de la consommation, qui définit le contrat « conclu hors établissement », notion introduite en droit français après la transposition de la directive n° 2011/83/UE par la loi précitée du 17 mars 2014, comme tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur notamment dans un lieu qui n’est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d’une sollicitation ou d’une offre faite par le consommateur.

L'emprunteur de mauvaise foi lors de la souscription du prêt risque la déchéance du terme

1re Civ., 20 janvier 2021, pourvoi n° 18-24.297, publié

L'emprunteur est tenu de contracter de bonne foi.

Le contrat de prêt peut comporter une clause stipulant que la fourniture de renseignements inexacts par l'emprunteur, tels que de faux relevés de compte, autorise le prêteur à prononcer la déchéance du terme et à rendre ainsi immédiatement exigible le capital emprunté, majoré des intérêts échus mais non payés.

Une telle clause n'est pas abusive, dès lors qu'elle est rédigée de manière claire et compréhensible, que les renseignements inexacts portent sur des éléments déterminants du consentement du prêteur dans l'octroi du concours financier et que l'emprunteur conserve la faculté de recourir à un juge pour contester l'application de la clause à son égard.

Il importe peu que l'emprunteur n'ait bénéficié d'aucun préavis avant la déchéance du terme ou n'ait connu aucune défaillance dans le remboursement du prêt.

La lettre recommandée non réclamée peut valoir mise en demeure

1re Civ., 20 janvier 2021, pourvoi n° 19-20.680, publié

En cas d’inexécution par le débiteur de ses obligations contractuelles, il incombe, en premier lieu, au créancier de le mettre en demeure de les respecter. 

Cette formalité, prévue à l’article 1221 du code civil, constituant un préalable obligatoire à toute sanction d’une inexécution contractuelle, permet aussi d’informer le débiteur de l’étendue de son obligation.

Mais la mise en demeure n’obéit pas à un formalisme particulier, hors textes législatifs spéciaux.

Par ailleurs, s’agissant d’un avertissement, elle n’est qu’un acte précontentieux et n’est pas soumise aux règles du code de procédure civile relatives à la notification des actes de procédure.

Dès lors, le défaut de réception effective de la mise en demeure, adressée par lettre recommandée, n’affecte pas sa validité.

En l’espèce, deux emprunteurs s’étaient abstenus de réclamer aux services postaux, la lettre recommandée adressée par le prêteur les mettant en demeure de régler les sommes dont ils demeuraient redevables au titre du prêt qui leur avait été consenti.

La Cour de cassation rappelle, conformément à une jurisprudence classique, que cela n’affecte pas sa régularité. Cette solution évite de paralyser l’action des créanciers ne pouvant être soumise au choix des débiteurs de retirer ou non les lettres recommandées qui leur sont adressées.

Qui supporte le risque de perte du bien acheté en ligne ?

1re Civ., 3 février 2021, pourvoi n° 19-21.046, publié

Le professionnel est tenu de livrer le bien au consommateur.

Il résulte de l'article L. 216-1 du code de la consommation qu'une telle livraison s'entend du transfert au consommateur de la possession physique ou du contrôle du bien.

Selon l'article L. 216-4 du même code, ce n'est qu'au moment où le consommateur ou un tiers désigné par lui, autre que le transporteur proposé par le professionnel, prend physiquement possession du bien, que le risque de perte ou d'endommagement de la chose est transféré au consommateur.

Il s'ensuit que le consommateur qui soutient ne pas avoir reçu un bien acheté en ligne doit être indemnisé par le professionnel lui ayant consenti la vente, dès lors que celui-ci ne rapporte pas la preuve que son client ou un tiers désigné par lui a pris physiquement possession du bien, peu important que le défaut de livraison soit imputable à la défaillance du transporteur.

A noter qu'une telle règle vaudrait également pour une vente non conclue en ligne.

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