N°9 - Novembre 2023 (Editorial)

Lettre de la deuxième chambre civile

Une sélection commentée des décisions rendues par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (Aide juridictionnelle / Appel civil / Procédure civile / Procédures civiles d'exécution / Sécurité sociale).

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Lettre de la deuxième chambre civile

N°9 - Novembre 2023 (Editorial)

Editorial

            Au moment où je prends mes fonctions de présidente de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, mesurant les responsabilités qui m’incombent et la difficulté de succéder au président Bruno Pireyre, à qui je souhaite rendre hommage, me vient d’abord à l’esprit une question : que peut-on attendre d’une chambre de la Cour de cassation ? A mes yeux, une chambre de la Cour de cassation doit satisfaire à quatre attentes essentielles : la qualité de ses arrêts, l’intelligibilité et la clarté de ses motivations, la pertinence des solutions et le traitement des pourvois dans un délai raisonnable. 

            Ces défis, je les garderai en tête tout au long de l’exercice de mes fonctions de présidente de chambre. Comment mieux les affronter ? Par le travail collectif. Une chambre de la Cour de cassation, c’est d’abord un lieu dans lequel des juges examinent des pourvois, les instruisent puis délibèrent, accompagnés dans leur tâche par les avocats au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, par les avocats généraux, par, bien sûr aussi, dans notre deuxième chambre civile, leur présidente et leurs doyennes, mais également, par des greffiers et agents qui participent au quotidien aux différentes missions de la Cour. La jurisprudence est une œuvre collective que consacre une délibération collégiale où chacun s’exprime dans sa liberté juridictionnelle.

            Mon rôle de présidente sera de permettre à ce travail collectif de s’accomplir au sein de la deuxième chambre civile. Le travail collectif, c’est, d’abord, l’attention portée à chacun afin qu’il soit en mesure de donner le meilleur de lui-même. Cet objectif implique pour moi de faire preuve, à l’égard de toutes et de tous, de disponibilité pour l’écoute et le dialogue.

            Cette dimension collective doit s’élargir au-delà de la seule deuxième chambre civile. Selon la formule du code de l’organisation judiciaire, il y a pour la République une Cour de cassation. Mon souci sera d’inscrire notre travail collectif dans la recherche d’une cohérence des décisions de la chambre avec l’ensemble de la jurisprudence de la Cour.

            Ce travail collectif, je le conçois aussi comme s’inscrivant dans une préoccupation plus générale, qui est celle de placer la garantie des droits au cœur de l’activité de la chambre et de la responsabilité de sa présidente. Dans cette période qui est la nôtre où dans certains Etats, même au sein de l’Union européenne, l’indépendance de la justice connaît d’importants reculs, j’estime que le rôle du juge, tel qu’il découle de l’article 16 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, est fondamental. Je serai donc particulièrement attentive à faire vivre le dialogue des juges avec le Conseil constitutionnel, la Cour de justice de l’Union européenne, la Cour européenne des droits de l’homme et le Conseil d’Etat.

            Ce travail collectif doit, également, à mon sens, s’élargir aux cours d’appel et tribunaux, les missions d’interprétation et d’unification de la jurisprudence qui sont celles de la Cour de cassation ne pouvant trouver leur accomplissement sans l’existence d’un lien fort avec les juridictions du fond, qui sont en première ligne dans le recueil et le traitement des demandes de justice.  Je veillerai à renforcer ce lien, en multipliant les rencontres à la Cour mais aussi en me déplaçant pour échanger avec tous ceux qui, sur le terrain, peuvent faire bénéficier la chambre d’un retour d’expérience.

            Enfin, il faut garder à l’esprit que la finalité de l’exercice juridictionnel de nos fonctions, dans le cadre des missions de service public de la Cour de cassation, demeure le justiciable. C’est lui qui est le destinataire premier des décisions de justice, dont celles de la Cour de cassation et ses chambres. La jurisprudence s’élabore pour lui être utile.

            Tous ces défis, nous pouvons, ensemble, les affronter aujourd’hui grâce à l’enrichissement du droit, notamment par son application prenant en considération les normes constitutionnelles et internationales, mais également grâce à d’importantes évolutions méthodologiques au sein de notre Cour, comme notamment la motivation enrichie, qui permet de mieux expliciter les décisions rendues, de les rendre plus claires pour les citoyens. C’est avec ces leviers que nous pourrons aussi faire en sorte que la jurisprudence joue pleinement son rôle, spécifique, donner, selon les mots du Conseil constitutionnel, aux lois « leur portée effective » (décision n° 2010-52 QPC du 14 octobre 2010).

            Cette lettre de chambre n° 9 comporte des arrêts en matière de procédure civile, de procédures civiles d’exécution et de protection sociale. La deuxième chambre civile a été amenée à trancher récemment la question de l’ouverture de la voie du déféré dans les procédure d’appel à bref délai contre les ordonnances des présidents de chambre de cours d’appel ou de magistrats désignés par le premier président. Elle a opéré, par ailleurs, un important revirement en affirmant l’effet interruptif d’une demande d’aide juridictionnelle, en vue de se pourvoir en cassation, formée auprès d’un bureau d’aide juridictionnelle incompétent. Vous trouverez également, dans cette lettre, le commentaire d’un arrêt de la section de la protection sociale qui annonce une simplification des règles de compétence dans le contentieux de la tarification en matière d’accident du travail et de maladies professionnelles. Enfin, la deuxième chambre civile a dit n’y avoir lieu à renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité posant à nouveau, aux motifs de l’existence de nouvelles circonstances de droit, la question de la conformité à la Constitution de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale au regard du principe d’égalité devant la loi et les charges publiques énoncé aux articles 1er, 6 et 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ainsi qu’au principe de responsabilité, qui découle de son article 4.

            Je vous souhaite une très belle lecture.

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