N°5 - Janvier 2023 (Editorial)

Lettre de la deuxième chambre civile

Une sélection commentée des décisions rendues par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (Accidents de la circulation / Appel civil / Procédure civile - médiation / Procédure civile d'exécution / Sécurité sociale - cotisations / Sécurité sociale - indu de professionnels de santé / Sécurité sociale - prestations / Sécurité sociale - retraites / Sécurité sociale - risques professionnels)

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Lettre de la deuxième chambre civile

N°5 - Janvier 2023 (Editorial)

EDITORIAL

Dominique Gaillardot,

Premier avocat général

 

Il est parfaitement légitime de se demander ce que peut apporter l’intervention d’un membre du parquet général lors du traitement des pourvois dont connaît la chambre. Il est vrai qu’à l’exception des quelques contentieux où le parquet est partie principale, les juges du fond n’ont le plus souvent pas eu besoin de l’avis du Ministère public pour juger, et le plus souvent bien juger comme en témoigne le nombre de pourvois rejetés.

Si l’intervention de l’avocat général résulte de la mission même du parquet de la Cour de cassation, telle que voulue par le législateur, cette légitimation textuelle ne saurait suffire à justifier l’intérêt potentiel d’une telle intervention.

Le premier intérêt, me semble-t-il est directement induit de la position tant statutaire que procédurale de l’avocat général. Celui-ci n’étant pas une partie, il n’est lié par aucune des thèses en présence, d’où sa grande liberté, consubstantielle à son indépendance, dans la recherche de la solution la plus pertinente, dans l’intérêt de la loi et du bien commun, selon la mission même qui lui est dévolue.

Ce que l’on attend de l’avocat général est alors qu’il développe une argumentation, un raisonnement au soutien de telle ou telle solution, qu’il puisse justifier de la solution proposée. En cela, son avis ne peut et ne doit être un deuxième rapport.  C’est là la condition essentielle pour que son intervention contribue au débat.                

Libre vis à vis de chacune des parties, l’avocat général l’est aussi vis à vis de la chambre dont il est pourtant membre à part entière. Ainsi n’est-il pas tenu, si nécessaire, à s’inscrire dans le prolongement d’une jurisprudence établie ou à la défense de la doctrine de la chambre sur tel ou tel point. Il a ainsi toute liberté pour proposer des évolutions, des modulations, voire des renversements de jurisprudence.

C’est là l’intérêt majeur de l’intervention de l’avocat général. Il est à même de pousser aux évolutions quand une jurisprudence ne lui paraît plus en adéquation avec l’environnement juridique national ou supra-national. Mais il est également à même d’appeler l’attention de  la chambre sur les limites, voir les dangers de telle ou telle solution.

Evaluer les conséquences de telle ou telle solution n’est jamais chose aisée, notamment dans les contentieux dont la chambre a à connaître, dans des contentieux aussi sensibles que ceux, entre autres, de la procédure civile, de l’indemnisation du préjudice ou de la protection sociale et n’est pas sans conséquence pour nombre de parties, victimes, assurés sociaux.

C’est pourquoi l’avocat général a la possibilité de procéder à des consultations extérieures auprès d’administrations ou de toute personne ou organisme qui pourraient éclairer la chambre. C’est là souvent le seul moyen de mieux saisir le contexte économique ou social de la question juridique posée, qui ne résulte pas nécessairement de l’argumentation juridique développée dans les mémoires. La réponse apportée à un pourvoi ne peut se faire sans une compréhension des enjeux économiques, sociaux, voire même parfois simplement techniques.

Mais cette liberté n’a de sens que si l’avocat général est à même de développer sa réflexion en étroit contact avec la chambre. Travailler en aveugle, ou comme un ovni ou un funambule, n’aurait pas de sens si l’avocat général n’était pas à même de répondre aux préoccupations et interrogations de la chambre. Cela ne peut passer que par l’instauration d’un dialogue entre le président de la chambre et le premier avocat général sur l’identification des pourvois et des problématiques les plus significatives, entre les rapporteurs et les avocats généraux, le plus en amont possible, sur les questions posées par un pourvoi. L’instauration des séances d’instruction contribue grandement à cet échange, en permettant de se focaliser sur l’essentiel et de rechercher toutes les réponses possibles à la question posée par le pourvoi, en développant une culture de dialogue.

C’est en tout cas dans cet esprit que travaillent tous les avocats généraux de la chambre et qu’ils essayent, à travers leurs avis, de contribuer aux débats. C’est cette nécessité de dialogue qui m’autorise à remercier le Président Pireyre de m’avoir permis de brièvement présenter la mission des avocats généraux au sein de la 2ème chambre.

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