N°4 - Juillet 2022 (Sécurité sociale - Prestations familiales)

Lettre de la deuxième chambre civile

Une sélection commentée des décisions rendues par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (appel civil, assurances, assurance-vie, astreinte, avocats / honoraires, coopération judiciaire en matière civile / mesure d'exécution forcée, élections, procédure civile / signification, saisie immobilière, sécurité sociale / contentieux de l'opposabilité / cotisations / faute inexcusable / maladie professionnelle / prestations familiales / Retraites).

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Lettre de la deuxième chambre civile

N°4 - Juillet 2022 (Sécurité sociale - Prestations familiales)

L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé peut-elle être partagée entre les parents séparés bénéficiant d’un droit de résidence alternée sur leur enfant ?

2e Civ. , 25 novembre 2021, pourvois n°19-25.456 et 20-21.978, publiés au Bulletin et au Rapport

Sommaire :

Il ressort de la combinaison des articles L. 513-1 et R. 513-1 du code de la sécurité sociale que les prestations familiales sont, sous réserve des règles particulières à chaque prestation, dues à la personne physique qui assume la charge effective et permanente de l'enfant et que, sous réserve des dispositions relatives aux allocations familiales, ce droit n'est reconnu qu'à une seule personne au titre d'un même enfant.

Lorsqu'à la suite du divorce, de la séparation de droit ou de fait des époux ou de la cessation de la vie commune des concubins, les parents exercent conjointement l'autorité parentale et bénéficient d'un droit de résidence alternée sur leur enfant mis en œuvre de manière effective et équivalente, l'un et l'autre de ces parents sont considérés comme assumant la charge effective et permanente de leur enfant au sens du premier de ces textes.

Il en résulte que l'attribution d'une prestation familiale ne peut être refusée à l'un des deux parents au seul motif que l'autre parent en bénéficie, sauf à ce que les règles particulières à cette prestation fixée par la loi y fassent obstacle ou à ce que l'attribution de cette prestation à chacun d'entre eux implique la modification ou l'adoption de dispositions relevant du domaine de la loi.

Les règles particulières à l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et ses compléments, prévues aux articles L. 541-1 à L. 541-4 du code de la sécurité sociale, qui font dépendre leur attribution, non seulement de la gravité du handicap de l’enfant, mais également des charges supplémentaires et sujétions professionnelles que le handicap a générées pour le parent, ne permettent pas leur attribution à chacun des parents de l’enfant en résidence alternée sans la modification ou l’adoption de dispositions relevant du domaine de la loi ou du règlement.

Dès lors, viole ces textes l'arrêt d'une cour d'appel qui enjoint à une caisse d’allocations familiales de mettre en œuvre le partage de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et de ses compléments entre les parents séparés, au domicile de chacun desquels la résidence de l'enfant handicapé a été fixée en alternance, alors que si l’article L.541-3, dans sa rédaction issue de la loi n°2005-102 du 11 février 2005, prévoit que les dispositions de l’article L.521-2 relatives aux allocations familiales sont applicables à l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, ce renvoi n’inclut pas les dispositions du deuxième alinéa de ce texte, édictées postérieurement.

 

Commentaire :

L’article L. 513-1 du code de la sécurité sociale accorde les prestations familiales à la personne qui assume la charge effective et permanente de l'enfant. L’article R. 513-1 du même code prévoit la règle dite de l’allocataire unique, selon laquelle le droit aux prestations familiales n'est reconnu qu'à une personne au titre d'un même enfant.

Depuis la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007, l’article L. 521-2 du code de la sécurité sociale prévoit une exception à cette règle, en ce qui concerne les allocations familiales. En effet, les parents peuvent se voir reconnaître, chacun, la qualité d’allocataire et obtenir le partage par moitié de la charge de l’enfant pour le calcul de ces allocations, en cas de résidence alternée de l'enfant au domicile de chacun d’eux.

Cette exception à la règle de l’unicité de l’allocataire pour le droit aux prestations familiales est-elle applicable à l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé ?

La deuxième chambre civile y répond par la négative à partir de deux considérations.

L’une tient à la spécificité de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé et de ses compléments, dont l’attribution suppose une appréciation des charges supplémentaires et des sujétions professionnelles que le handicap a occasionnées pour le parent. Or, les dispositions législatives et réglementaires applicables à cette allocation ne permettent pas à la caisse d’allocations familiales de procéder à un partage entre les parents séparés.

L’autre découle de la rédaction du code de la sécurité sociale, qui ne prévoit la possibilité d’un partage des prestations familiales que pour les allocations familiales. Le renvoi de texte effectué par l’article L. 541-3 du code de la sécurité sociale, sur lequel s’était appuyé la cour d’appel pour étendre l’exception à la règle de l’unicité de l’allocataire à l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, est jugé inopérant par la Cour de cassation, les conditions de ce renvoi excluant que le législateur ait voulu procéder à une telle extension.

La Cour de cassation fixe, à cette occasion, le principe selon lequel l’attribution d’une prestation familiale ne peut être refusée à l’un des deux parents au seul motif que l’autre parent en bénéficie, sauf exception prévue par la loi ou impossibilité d’y procéder sans adaptation législative. Sa décision s’inscrit dans la droite ligne de celle rendue par le Conseil d’État, le 19 mai 2021 (n°435429).

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