N° 10 - Janvier 2024 (Procédure civile)

Lettre de la deuxième chambre civile

Une sélection commentée des décisions rendues par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation (Appel civil / Procédure civile / Procédures civiles d'exécution / Accident de la circulation / Responsabilité et réparation / Astreinte / Surendettement des particuliers et des familles / Sécurité sociale / QPC A venir / Colloques).

  • Contrat
  • Procédure civile
  • Vidéos

Lettre de la deuxième chambre civile

N° 10 - Janvier 2024 (Procédure civile)

QUESTION NOUVELLE : Lorsqu’une ordonnance de radiation est rendue, le délai de péremption recommence à courir à compter de sa notification ou de sa signification.

Civ. 2ème 21 décembre 2023 pourvoi n° 17-13.454 publié au Bulletin

Civ. 2ème 21 décembre 2023 pourvoi n° 21-20.034 publié au Bulletin

Ces deux arrêts viennent préciser le point de départ du nouveau délai de péremption dans les cas où une ordonnance de radiation a été rendue par le juge, point de départ qui n’est pas prévu par l’article 386 du code de procédure civile.

Dans ces deux affaires, l’instance avait été interrompue pour l’une par le décès du demandeur, pour l’autre par la dissolution de la société défenderesse, et constatée par une décision du juge qui avait imparti un délai pour effectuer les diligences en vue de la régularisation de la procédure. Faute d’accomplissement de ces diligences dans le délai imparti, les affaires avaient été radiées, dans le premier cas, au cours de la procédure au fond devant la cour d’appel, dans le second, lors d’une instance devant la Cour de cassation. Les demandeurs ayant par la suite présenté des conclusions de reprise d’instance, il était nécessaire de vérifier si elles intervenaient avant que la péremption ne soit acquise, et pour cela, il était nécessaire de déterminer le point de départ du délai de péremption.

Un nouveau délai de péremption ne peut recommencer à courir sans que les parties en soit averties et aient connaissance des conséquences d’une absence de reprise d’instance dans le délai de deux ans. C’est pourquoi, par ces deux arrêts, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation précise que le délai de péremption recommence à courir à compter de la notification, par le greffe, ou de la signification, à la diligence d'une partie, de cette ordonnance de radiation, qui informe les parties des conséquences du défaut de diligences, de leur part, dans le délai de deux ans impartis.

Il faut relever que l’article 381 du code de procédure civile prévoit que la radiation est notifiée par lettre simple aux parties. Cette solution n'est pas exclusive d'une signification à l'initiative d’une ou plusieurs parties qui y ont intérêt, afin de faire partir le point de départ du délai à compter d’une date certaine.

Péremption : les conclusions aux fins de réinscription au rôle constituent des diligences interruptives.

Civ. 2ème  21 décembre 2023 pourvoi n° 21-23.816 publié au Bulletin

Par cet arrêt, la deuxième chambre civile rappelle une jurisprudence selon laquelle dans la procédure avec représentation obligatoire, après un retrait du rôle, le dépôt au greffe de conclusions sollicitant la réinscription peut interrompre le délai de péremption (2ème Civ., 19 novembre 2009, n° 08-19.781, publié).

Tel était le cas dans l’espèce soumise à la cour d’appel qui avait constaté la péremption au motif que les conclusions aux fins de réinscription ne constituaient pas une diligence interruptive.

Aucune autre diligence ne peut en effet être effectuée par les parties, qui ne peuvent donc que solliciter la réinscription de l’affaire.

Conditions de la fin du mandat de représentation de l’avocat.

2e Civ., 23 novembre 2023, pourvoi n° 21-23.465, 21-23.405 publié au Bulletin

Par cet arrêt concernant la procédure avec représentation obligatoire, la deuxième chambre rappelle les termes de l’article 419 du code de procédure civile, selon lequel lorsque la représentation est obligatoire, l'avocat ne peut se décharger de son mandat de représentation que du jour où il est remplacé par un nouveau représentant constitué par la partie ou, à défaut, commis par le bâtonnier ou par le président de la chambre de discipline.

L’arrêt rappelle, d’abord, une jurisprudence constante au terme de laquelle le message par lequel l'avocat informe la cour d'appel qu'il ne représente plus les appelants est dénué d'effet sur le mandat de représentation de l'avocat, lequel continue de représenter la partie jusqu'à la constitution d'un nouvel avocat. Seule une nouvelle constitution peut donc mettre fin au mandat de représentation de l’avocat. C’est à l’avocat, professionnel droit, de continuer de faire les diligences dans son affaire tant qu’un nouvel avocat n’est pas constitué.

Outre ce rappel, l’arrêt précise, ensuite, et cela constitue son apport, qu'il n'incombe pas au greffe de procéder à la notification de l'ordonnance de caducité à la partie concernée lorsqu'il est informé par l'avocat de sa volonté de se décharger de son mandat. Le greffe n’a donc aucune diligence à effectuer lorsque l’avocat a adressé une simple lettre indiquant sa volonté de se décharger.

Action en recouvrement engagée sur le fondement d'une transaction homologuée.

2ème civ., 26 octobre 2023, Pourvoi n° 21-19.844 publié au Bulletin

Les accords auxquels les juridictions ont conféré force exécutoire constituent, en application de l’article L. 111-3, 1°, du code des procédures civiles d’exécution, des titres exécutoires.

L’arrêt commenté apporte des précisions concernant les actions en recouvrement forcé engagées sur le fondement de tels accords.

Lorsqu'une partie entend poursuivre l'exécution forcée d'une transaction, elle doit saisir le juge d'une requête à fin d'homologation.

S’inscrivant dans la continuité d’un précédent (2e Civ., 1er septembre 2016, pourvoi n° 15-22.915, Bull. 2016, II, n° 199), la Cour de cassation juge, en premier lieu, que les articles 1565, 1566 et 1567 du code de procédure civile, relatifs à la procédure d'homologation des accords auxquels sont parvenues les parties à une médiation, une conciliation, ou une procédure participative, instaurent un régime particulier distinct de celui de droit commun de l'ordonnance sur requête régie par les articles 493 et suivants du code de procédure civile et ne prévoient pas que l'ordonnance d'homologation, rendue à la requête de l'une seule des parties, est exécutoire au seul vu de la minute.

La Cour de cassation ajoute, en second lieu, que, n'étant pas dissociable de la transaction à laquelle elle confère force exécutoire, l’ordonnance d'homologation doit, lorsqu'elle a été rendue à la requête de cette seule partie, être notifiée, conformément aux dispositions de l'article 503 du code de procédure civile, à la partie contre laquelle l'exécution est poursuivie.

L’expertise judiciaire et le principe de la contradiction.

Civ. 2ème 30 novembre 2023 pourvoi n°21-25.640 publié au Bulletin

Parce que le rapport d’expertise est un élément de preuve susceptible d’influencer la décision du juge, les expertises civiles judiciaires sont soumises au principe essentiel du contradictoire, depuis la convocation des parties jusqu’au dépôt du rapport.

Le non-respect de ce principe au cours des opérations d’expertise ne prive cependant pas le rapport de valeur probatoire, dès lors que celui-ci a été régulièrement versé aux débats et soumis à la libre discussion des parties, d’une part, et que le juge ne fonde pas sa décision sur cette seule pièce, d’autre part.

S’inscrivant dans la lignée jurisprudentielle de nombreux arrêts (1re Civ., 11 juillet 2018, pourvois n° 17-17.441 et 17-19581, Bull. 2018, I, n° 140 ; 9 septembre 2020, pourvoi n° 19-13.755, publié), la décision de la deuxième chambre civile rappelle, au visa de l’article 16 du code de procédure civile, que lorsqu’un organisme de sécurité sociale n’a pas été convoqué aux opérations d’une expertise médicale ordonnée par un juge, la cour d’appel, qui a rejeté la demande d’annulation du rapport, ne peut asseoir sa décision exclusivement sur ledit rapport, mais doit rechercher s'il est corroboré par d'autres éléments de preuve.

Outre-Mer (Polynésie française) : la nullité d'un acte de procédure délivré au nom d'une personne décédée.

2e civ., 26 octobre 2023, pourvoi n° 20-22.236 publié au Bulletin

A la différence du code de procédure civile métropolitain, le code de procédure civile de la Polynésie française ne distingue pas les vices de forme et les irrégularités de fond et l’article 43 de ce code dispose qu’ « à l’exception des irrégularités tenant aux déchéances et forclusions, les irrégularités d’exploits ou d’actes de procédure ne sont causes de nullité que s’il est justifié qu’elles ont porté une atteinte certaine aux intérêts de la partie qui les invoque ».

S’inscrivant dans la continuité de précédents (2e Civ., 21 février 2019, pourvoi n° 17-24.255; 2e Civ., 14 janvier 2021, pourvoi n° 19-19.279), la Cour de cassation juge qu’il résulte de ce texte que l'acte délivré au nom d'une personne décédée et comme telle dénuée de la capacité d'ester en justice est affecté d'une irrégularité qui n'est cause de nullité que s'il est justifié qu'elle a porté une atteinte certaine aux intérêts de la partie qui l'invoque.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.