Hors-série n°2 - Juin 2022 - Procédure de l'appel civil (II. Structuration des écritures)

Lettre de la deuxième chambre civile

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II.1. Dispositif des conclusions

II.1.1. Mention des prétentions des parties

2e Civ., 15 novembre 2018, pourvoi n° 17-27.844, publié au Bulletin

Sommaire :

En application de l’article 954, alinéa 3, devenu alinéa 4, du code de procédure civile, les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures, à défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées. Seules sont soumises aux prescriptions de ce texte les conclusions qui déterminent l’objet du litige ou qui soulèvent un incident, de quelque nature que ce soit, de nature à mettre fin à l’instance.

Encourt en conséquence la censure l’arrêt d’une cour d’appel qui retient que la partie ayant pris des conclusions ne tendant qu’à l’irrecevabilité des conclusions de la partie adverse est réputée avoir abandonné ses précédentes conclusions.

 

Commentaire :

Cet arrêt a été l’occasion de préciser le contenu et la portée des exigences de l’article 954, alinéa 3, devenu alinéa 4, du code de procédure civile, lorsque plusieurs jeux de conclusions sont successivement remis. Il affirme qu’en application de ce texte, les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures et qu’à défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

Il rappelle encore que seules sont soumises aux prescriptions de ce texte les conclusions qui déterminent l'objet du litige ou qui soulèvent un incident de nature à mettre fin à l'instance. (Dans le même sens : Avis, 21 janvier 2013, pourvoi n° 12-00.016, Bull. 2013, Avis n° 3).

Dans l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt, l’appelant avait remis deux jeux de conclusions, un premier jeu concluant, au fond, à la réformation du jugement, puis, un second, concluant seulement à l’irrecevabilité des conclusions adverses. La cour d’appel avait considéré que le dispositif des dernières conclusions de l’appelante ne contenait aucune demande de réformation du jugement déféré et se bornait à soulever l’irrecevabilité des conclusions de l’intimé. La Cour de cassation censure l’arrêt en retenant que les conclusions de l’appelant, dernières en date, ne tendant qu’à l’irrecevabilité des conclusions de la partie adverse, la cour d’appel demeurait saisie des conclusions antérieures tendant à la réformation du jugement.

 

2e Civ., 4 février 2021, pourvoi n° 19-23.615, publié au Bulletin

Sommaire :

Il résulte de la combinaison des articles 562 et 954, alinéa 3, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, que la partie qui entend voir infirmer le chef du jugement l’ayant déboutée d’une contestation de la validité d’un acte de procédure et accueillir cette contestation doit formuler une prétention en ce sens dans le dispositif de ses conclusions d’appel.

Par conséquent, se trouve légalement justifié l’arrêt d’une cour d’appel qui confirme un tel chef de jugement frappé d’appel, dès lors que les appelants se bornaient, dans le dispositif de leurs conclusions d’appel, à solliciter l’infirmation du jugement frappé d’appel, sans réitérer leur contestation, rejetée par le premier juge, de la validité de la signification d’une précédente décision.

 

Commentaire :

Cet arrêt intéresse la structuration du dispositif des conclusions d’appel et les conditions auxquelles une cour d’appel est saisie d’une prétention.

La Cour de cassation y rappelle qu’il résulte de la combinaison des articles 562 et 954, alinéa 3, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du mai 2017, que la partie qui entend voir infirmer le chef d'un jugement l'ayant déboutée d'une contestation de la validité d'un acte de procédure et accueillir cette contestation doit formuler une prétention en ce sens dans le dispositif de ses conclusions d'appel.

Elle rejette, par conséquent, le pourvoi formé contre un arrêt d’une cour d’appel qui confirme un tel chef de jugement frappé d'appel, dès lors que les appelants se bornaient, dans le dispositif de leurs conclusions d'appel, à solliciter l'infirmation du jugement frappé d'appel, sans réitérer leur contestation, rejetée par le premier juge, de la validité de la signification d'une précédente décision.

Comme dans l’arrêt précédemment commenté, la deuxième chambre civile inscrit son raisonnement et la solution qu’elle retient dans la logique de la jurisprudence qu’elle a initiée par l’avis du 21 janvier 2013, qui a affirmé que les conclusions exigées par les articles 908 et 909 du code de procédure civile sont toutes celles remises au greffe et notifiées dans les délais prévus par ces textes, qui déterminent l'objet du litige ou soulèvent un incident de nature à mettre fin à l'instance (Avis, 21 janvier 2013, pourvoi n° 12-00.016, Bull. 2013, Avis n° 3).

Par la suite, elle a jugé que fait une exacte application de l'article 954, alinéas 1 et 2, du code de procédure civile, selon lequel, dans les procédures avec représentation obligatoire, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée, celles-ci sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif, la cour d'appel qui, relevant que l'appelant se bornait dans le dispositif de ses conclusions à conclure à l'infirmation d'un jugement, sans formuler de prétention sur les demandes tranchées dans ce jugement, décide qu'elle n'était pas saisie de prétention relative à ces demandes (2e Civ., 5 décembre 2013, pourvoi n° 12-23.611, Bull. 2013, II, n° 230).

 

2e Civ., 9 septembre 2021, pourvoi n°20-17.263, publié au Bulletin

Sommaire :

L'étendue des prétentions dont est saisie la cour d'appel étant déterminée dans les conditions fixées par l'article 954 code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, le respect de l'obligation faite à l'appelant de conclure dans les conditions imparties par l'article 908 du même code s'apprécie nécessairement en considération des prescriptions de cet article 954.

Il résulte de cet article 954, pris en son alinéa 2, que le dispositif des conclusions de l'appelant remises dans le délai de l'article 908, doit comporter, en vue de l'infirmation ou de l'annulation du jugement frappé d'appel, des prétentions sur le litige, sans lesquelles la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement frappé d'appel. Cette règle poursuit un but légitime, tenant au respect des droits de la défense et à la bonne administration de la justice.

Dans le cas où l'appelant n'a pas pris, dans le délai de l'article 908, de conclusions comportant, en leur dispositif, de telles prétentions, la caducité de la déclaration d'appel est encourue. Cette sanction, qui permet d'éviter de mener à son terme un appel irrémédiablement dénué de toute portée pour son auteur, poursuit un but légitime de célérité de la procédure et de bonne administration de la justice.

Par ailleurs, cette règle ne résulte pas de l'interprétation nouvelle faite par la Cour de cassation dans un arrêt du 17 septembre 2020 (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626), imposant que l'appelant demande dans le dispositif de ses conclusions, l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement ou l'annulation du jugement. Il en résulte que cette règle n'entre pas dans le champ du différé d'application que cet arrêt a retenu en vue de respecter le droit à un procès équitable.

Doit, par conséquent, être approuvé l'arrêt d'une cour d'appel qui, ayant constaté que le dispositif des conclusions de l'appelant, qui procédait par renvoi, ne comportaient pas de prétentions déterminant l'objet du litige, a prononcé la caducité de la déclaration d'appel.

 

Commentaire :

Dans le sillage des précédents arrêts, la deuxième Chambre confirme que les parties sont tenues d’indiquer expressément, dans le dispositif des conclusions, les prétentions déterminant l’objet du litige.

Elles sont tenues de s’acquitter de cette charge procédurale dans les conclusions qu’elles sont tenues de déposer dans le délai prévu à l’article 908 du code de procédure civile. A défaut de ce faire, la déclaration d’appel encourt la caducité.

Dans l’affaire concernée, les conclusions se bornaient à solliciter que le jugement soit partiellement confirmé et, pour le surplus, qu’il soit fait droit à l’ensemble des demandes, avec condamnation eux dépens et exécution provisoire.

Les parties ne peuvent procéder de la sorte et se dispenser d’énoncer, de manière claire et précise, dans le dispositif de leurs conclusions, leurs prétentions de fond, liées à l’appel qu’elles ont interjeté. Dit en termes plus familiers, le dispositif de leurs conclusions ne saurait se borner à une reproduction servile (un simple « copier-coller ») des conclusions qu’elles ont prises en première instance. Elles ne doivent pas davantage se référer à des développements contenus dans de précédentes écritures. Elles doivent faire apparaître clairement et expressément les prétentions qu’elle formulent devant le juge d’appel car ce sont elles qui expriment leur critique du jugement entrepris.

On notera que cette règle de l’énoncé des prétentions de fond, qui découle sans ambiguïté des dispositions de l’article 954, alinéa 2, du code de procédure, s’inscrit dans la droite ligne de la jurisprudence de la chambre fixée par les arrêts précédemment commentés. Dès lors qu’elle ne résulte pas d’une interprétation nouvelle qu’en ferait la Cour de cassation, elle ne relève pas d’un différé d’application tel que la deuxième chambre civile a pu mettre en œuvre dans d’autres hypothèses (cf. 2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626).

 

2e Civ., 3 mars 2022, pourvoi n° 20-20.017, publié au Bulletin

Sommaire :

Selon l'alinéa 1er de l'article 954 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, applicable au litige, les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée, avec l'indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé. Aux termes des alinéas 2 et 3, les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Encourt la cassation une cour d'appel qui, pour confirmer le jugement entrepris, retient que le dispositif des conclusions de l'appelant n'indique pas les dispositions du jugement dont il est sollicité la réformation de sorte que la cour d'appel n'est pas saisie de demande d'infirmation par l'appelant principal, alors que ce dernier, dans le dispositif de ses conclusions, ne se bornait pas à demander à la cour d'appel de réformer la décision entreprise, mais formulait plusieurs prétentions, et qu' il n'était pas tenu de reprendre, dans le dispositif, les chefs de dispositif du jugement dont il demandait l'infirmation.

 

Commentaire :

L’article 954, dans son deuxième alinéa, énonce, notamment, que « les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions ». Son alinéa 3 ajoute que « La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion ».

Récapituler expressément dans le dispositif des conclusions les prétentions que la partie entend voir juger par la cour d’appel répond à une exigence qui participe de la substance même des alinéas 2 et 3 de l’article 954 du code de procédure civile.

Pour autant, il ne saurait, sans excéder ces prescriptions, être exigé de l’appelant qu’il reprenne formellement, dans le dispositif de ses conclusions, chacun des chefs de jugement dont il sollicite la réformation.

Dès lors, c’est à tort qu’une cour d’appel juge, en substance, que l’absence dans le dispositif des conclusions d’une partie appelante de la mention des chefs de dispositif dont elle demande l’infirmation ne la saisit pas de cette demande et ne l’autorise pas à infirmer le jugement.

II.1.2. Mention de l’infirmation ou de l’annulation du jugement

2e Civ., 31 janvier 2019, pourvoi n° 18-10.983

Commentaire :

Bien que non publié, cet arrêt a été l’occasion, pour la deuxième chambre civile, de se prononcer sur la régularité de la procédure d’appel, au regard du contenu requis des conclusions, en approuvant une cour d'appel qui ayant constaté que les seules conclusions d'appelant prises dans le délai prévu par l'article 908 du code de procédure civile comportaient un dispositif qui ne concluait pas à l'infirmation, totale ou partielle, du jugement déféré, a décidé, en conséquence, que la déclaration d'appel était caduque.

La Cour de cassation affirme à cette occasion que « les conclusions d'appelant exigées par l'article 908 du code de procédure civile, dans sa rédaction alors applicable [il s’agit de sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017], sont toutes celles, remises au greffe et notifiées dans les délais prévus par ce texte, qui déterminent l'objet du litige porté devant la cour d'appel ; que l'étendue des prétentions dont est saisie la cour d'appel étant déterminée dans les conditions fixées par l'article 954 du même code, le respect de la diligence impartie par l'article 908 est nécessairement apprécié en considération des prescriptions de l'article 954 ».

Dans cette affaire, la déclaration d’appel étant antérieure au 1er septembre 2017, la Cour de cassation s’est prononcée sur le fondement de l’article 954 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017.

L’intérêt de l’arrêt réside dans le lien qu’il tisse entre, d’une part, l’obligation imposée à l’appelant par l’article 908 du code de procédure civile, à peine de caducité de la déclaration d’appel, relevée d’office, de remettre au greffe ses conclusions dans le délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel, d’autre part, l’article 954, qui formule des exigences relatives à la forme et au contenu des conclusions.

Ainsi, si des conclusions ne répondent pas aux exigences de l’article 954 du code de procédure civile - tel était le cas, en la circonstance, en l’absence de dispositif concluant à l’infirmation du jugement - elles ne peuvent être regardées comme les conclusions astreintes à être remises dans le délai de l’article 908.

Cette analyse n’était pas nouvelle puisqu’avait déjà trouvé une première expression dans un avis du 21 janvier 2013 (21 janvier 2013, pourvoi n° 12-00.016, Bull. 2013, Avis n° 3), avant d’être reprise des arrêts des 28 mai 2015 (2e Civ., 28 mai 2015, pourvoi n° 14-28.233, Bull. 2015, II, n° 127) et 6 juillet 2016 (1re Civ., 6 juillet 2016, pourvoi n° 15-14.237).

Il reste que l’arrêt du 31 janvier 2019 franchit un pas supplémentaire, d’importance, en précisant que le dispositif des conclusions de l'appelant doit mentionner l'objet de l'appel, à savoir l'infirmation ou la réformation du jugement, sous peine de caducité de la déclaration d’appel. Or, cette prescription ne ressortait pas, de manière claire et univoque, des termes mêmes de l’article 954 précité. Le raisonnement suivi par la Cour de cassation, au fil de son analyse, peut être décomposé en deux temps : elle considère tout d’abord que la mention dans les conclusions de l’objet de l’appel, qui tend à l’infirmation ou à l’annulation du jugement, doit être regardée comme une prétention, pour en déduire, ensuite, que, conformément au deuxième alinéa de l’article 954 précité, cette mention doit figurer dans le dispositif des conclusions considérées, déterminant ainsi, de manière précise, les contours de l’objet du litige.

 

2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626, publié au Bulletin

Sommaire :

Il résulte des articles 542 et 954 du code de procédure civile que lorsque l’appelant ne demande, dans le dispositif de ses conclusions, ni l’infirmation, ni l’annulation du jugement, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement.

L’application immédiate de cette règle de procédure, qui résulte de l’interprétation nouvelle d’une disposition au regard de la réforme de la procédure d’appel avec représentation obligatoire issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 et qui n’a jamais été affirmée par la Cour de cassation dans un arrêt publié, dans les instances introduites par une déclaration d’appel antérieure à la date du présent arrêt, aboutirait à priver les appelants du droit à un procès équitable.

En conséquence, se trouve légalement justifié l’arrêt d’une cour d’appel qui infirme un jugement sans que cette infirmation n’ait été demandée dès lors que la déclaration d’appel est antérieure au présent arrêt.

 

Commentaire :

Dans cette affaire, la deuxième chambre civile a, par l’arrêt commenté, tranché la question des conséquences de l’absence de mention de l’infirmation ou de l’annulation du jugement dans le dispositif des conclusions au regard des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du décret du 6 mai 2017.

Ce faisant, la deuxième chambre civile s’est, d’abord, prononcée sur les effets de l’articulation des articles 542 et 954 du code de procédure quant au contenu des conclusions des parties en appel, avant de retenir une solution innovante et inédite relative à l’application dans le temps d’une jurisprudence nouvelle au regard des règles du procès équitable.

Dans l’affaire concernée, les conclusions de l’appelant ne comportaient pas de demande d’infirmation des chefs de dispositif du jugement, de sorte que le pourvoi reprochait à une cour d’appel d’avoir néanmoins infirmé un jugement.

Or, l’article 954 dispose que « les conclusions d'appel (...) doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. (...) Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. (...). La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. (...) La partie qui conclut à l'infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance. (...) ».

En outre, l’article 542, qui peut être regardé comme énonçant les buts poursuivis par l’appel, précise que cette voie de recours « tend, par la critique du jugement [...] à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel ».

Pouvait-on, dès lors, considérer que, malgré l’absence de demande expresse d’infirmation du jugement dans les conclusions de l’appelant, il se déduisait des prétentions formulées en leur dispositif qu’était implicitement mais nécessairement sollicitée cette infirmation ?

La deuxième chambre civile ne s’est pas engagée dans cette voie. Elle a estimé devoir prendre en juste considération l’esprit de la réforme opérée par le décret du 6 mai 2017 en liant la finalité de l’appel, voie de réformation ou d’annulation, telle que l’énonce l’article 542 du code de procédure civile, et l’exigence de structuration des écritures prescrite à l’article 954, lesquelles doivent être « dispositives », en d’autres termes doivent comporter un dispositif formulant des prétentions.

Les avocats des parties sont ainsi tenus, dans le dispositif de leurs conclusions, de demander d’abord l’infirmation ou la réformation du jugement, ou encore son annulation, puis d’exposer leurs prétentions au fond. A défaut de conclusions sollicitant d’abord l’infirmation de la décision dont appel - comme c’était le cas en l’espèce - la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement qui lui est déféré.

Pour autant, l’application immédiate de cette règle de procédure, qui résultait de l’interprétation nouvelle d’une disposition au regard de la réforme de la procédure d’appel avec représentation obligatoire issue du décret n°2017-891 du 6 mai 2017 et qui n’avait jamais été affirmée par la Cour de cassation dans un arrêt publié, était de nature à porter atteinte tant au principe de sécurité juridique qu’au droit à un procès équitable, plus particulièrement au droit d’accès au juge.

C’est pourquoi, la deuxième chambre civile, prenant en large considération les exigences de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sans même s’y référer explicitement, a choisi de différer l’application de la solution qu’elle retenait aux instances d’appel introduites après le prononcé de son arrêt, soit postérieurement au 17 septembre 2020. 

Ce report dans le temps des effets de la règle ainsi affirmée répond à l’objectif de mettre les praticiens, plus particulièrement les avocats des parties, en mesure de prendre toutes mesures utiles pour adapter et au besoin, modifier, leurs pratiques professionnelles dans un sens conforme aux exigences considérées.

L’arrêt est, dès lors, amené à préciser les règles applicables, en une telle situation, pour les déclarations d’appel formées à compter du 1er septembre 2017 et avant le 17 septembre 2020 : la confirmation du jugement ne pouvant être prononcée, la cour d’appel doit statuer sur les prétentions qui lui sont soumises.     

 

2e Civ., 20 mai 2021, pourvoi n°19-22.316, publié au Bulletin

Sommaire :

Il résulte des articles 542 et 954 du code de procédure civile que lorsque l'appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement. Cependant, l'application immédiate de cette règle de procédure, qui a été affirmée par la Cour de cassation le 17 septembre 2020 (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626, Bull. 2020, (rejet)) pour la première fois dans un arrêt publié, dans les instances introduites par une déclaration d'appel antérieure à la date de cet arrêt, aboutirait à priver les appelants du droit à un procès équitable au sens de l'article 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En conséquence, encourt l'annulation l'arrêt qui, pour confirmer un jugement, retient que les appelants se sont abstenus de conclure expressément à la réformation ou à l'annulation du jugement déféré, alors qu'ils avaient relevé appel avant le 17 septembre 2020, soit à une date où cette règle de procédure n'était pas prévisible pour les parties.

                                              

Commentaire :

Dans cette décision, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation met en œuvre le différé d’application instauré par son arrêt du 17 septembre 2020 (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626, publié au Bulletin), commenté ci-dessus.

Au cas particulier, elle était saisie d’un pourvoi formé contre un arrêt d’une cour d’appel qui, pour confirmer le jugement dont elle était saisie par une déclaration d’appel du 6 juillet 2017, avait retenu que le dispositif des conclusions des appelants comportait des demandes tendant à “fixer”, “condamner”, ou encore “dire et juger”, mais s’abstenait de conclure expressément à la reformation ou à l’annulation du jugement.

La Cour de cassation redit, à cette occasion, que l'application immédiate de la règle de procédure qui a été par elle affirmée,  pour la première fois, dans une décision publiée, par son arrêt du 17 septembre 2020 (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626, publié au Bulletin, (rejet), relativement aux instances introduites par une déclaration d'appel antérieure à la date de ce dernier arrêt, aboutirait à priver les appelants du droit à un procès équitable au sens de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La déclaration d’appel étant, au cas particulier, antérieure au 17 septembre 2020, soit à une date où cette règle de procédure n'était pas prévisible pour les parties, la Cour de cassation annule l’arrêt déféré à sa censure.

 

2e Civ., 1er juillet 2021, pourvoi n° 20-10.694, publié au Bulletin

Sommaire :

ll résulte des articles 542, 909 et 954 du code de procédure civile que lorsque l'intimé forme un appel incident et ne demande dans le dispositif de ses conclusions, ni l’infirmation ni l’annulation du jugement, la cour d’appel ne peut que déclarer irrecevables ces conclusions, l’appel incident n’étant pas valablement formé.

L’application immédiate de cette règle de procédure, qui résulte de l’interprétation nouvelle d’une disposition au regard de la réforme de la procédure d’appel avec représentation obligatoire issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 et qui n’a jamais été affirmée par la Cour de cassation antérieurement dans un arrêt publié, dans les instances introduites par une déclaration d’appel antérieure à la date du 17 septembre 2020 (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626, publié au Bulletin) aboutirait à priver les appelants du droit à un procès équitable.

En conséquence, doit être annulée la décision qui infirme, sur le fondement des articles 909 et 954 du code de procédure civile, une ordonnance du conseiller de la mise en état ayant déclaré recevable un appel incident formé, dès lors que la déclaration d’appel était antérieure à l’arrêt du 17 septembre 2020.

 

Commentaire :

Alors qu’elle ne s’était prononcée jusqu’alors qu’au sujet de l’appel principal, la deuxième chambre civile s’est, par son arrêt du 1er juillet 2021, prononcée sur le formalisme applicable à l’appel incident. La solution qu’elle a retenue reprend la formule d’une application différée dans le temps de sa jurisprudence née de l’arrêt, publié, du 17 septembre 2020.

En l’espèce, l’intimé avait formé appel incident au moyen de conclusions qui ne comportaient aucune prétention tendant à l'infirmation, à la réformation ou à l’annulation du jugement attaqué.

Après avoir rappelé que l'appel incident n'est pas différent de l'appel principal par sa nature ou son objet, que les conclusions de l'appelant, qu'il soit principal ou incident, doivent déterminer l'objet du litige porté devant la cour d'appel, et que l'étendue des prétentions dont est saisie la cour d'appel étant déterminée dans les conditions fixées par l'article 954 du code de procédure civile, le respect de la diligence impartie par l'article 909 du code de procédure civile est nécessairement apprécié en considération des prescriptions de  l’article 954, une cour d’appel avait retenu qu’il ne pouvait s’agir d’un appel incident valable.

La Cour de cassation approuve le raisonnement suivi par le juge d’appel en ce qu’il est conforme à l'état du droit, tel qu’applicable depuis le 17 septembre 2020, résultant de l’arrêt du 17 septembre 2020, mais, dans la mesure où la déclaration d’appel était, au cas particulier, antérieure à cette dernière date – elle avait été formée le 16 mai 2018 - annule l’arrêt, la cour d’appel ayant appliqué cette règle par anticipation.

En effet, dès lors que la règle en cause ne pouvait être prévue par les parties lorsqu’elles ont fait appel, son application à l’espèce aurait méconnu les principes relatifs au droit à un procès équitable.

En se déterminant en ce sens, la Cour de cassation rappelle ainsi que l’appel incident n’est pas différent de l’appel principal par sa nature ou par son objet, et obéit au même formalisme en tant qu’il régit les conclusions de son auteur.

Il en découle que lorsque, comme en l’espèce, la déclaration d’appel est antérieure au 17 septembre 2020, ni le conseiller de la mise en état, ni la cour d’appel, statuant sur déféré, ne peuvent déclarer irrecevable un appel incident formé par des conclusions dont le dispositif ne comporte pas de demande d’infirmation, de réformation ou encore d’annulation du jugement.

           

2e Civ., 4 novembre 2021, pourvoi n° 20-15.757, publié au Bulletin

Sommaire :

Il résulte des articles 542 et 954 du code de procédure civile que l'appelant doit, dans le dispositif de ses conclusions, mentionner qu'il demande l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement ou l'annulation du jugement.

En cas de non-respect de cette règle, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement, sauf la faculté qui lui est reconnue à l'article 914 du code de procédure civile de relever d'office la caducité de l'appel. Lorsque l'incident est soulevé par une partie ou relevé d'office par le conseiller de la mise en état, ce dernier ou, le cas échéant, la cour d'appel statuant sur déféré, prononce la caducité de la déclaration d'appel si les conditions en sont réunies.

Cette règle, qui instaure une charge procédurale nouvelle pour les parties à la procédure d'appel, ayant été affirmée par la Cour de cassation le 17 septembre 2020 (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626, Bull. 2020) pour la première fois dans un arrêt publié, son application immédiate dans les instances introduites par une déclaration d'appel antérieure à la date de cet arrêt aboutirait à priver les appelants du droit à un procès équitable.

Il s'ensuit que la cour d'appel qui déclare caduque la déclaration d'appel donne une portée aux articles 542 et 954 du code de procédure civile qui, pour être conforme à l'état du droit applicable depuis le 17 septembre 2020, n'était pas prévisible pour les parties au jour où elles ont relevé appel antérieurement à cette date, une telle portée résultant de l'interprétation nouvelle de dispositions au regard de la réforme de la procédure d'appel avec représentation obligatoire issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l'application de cette règle de procédure instaurant une charge procédurale nouvelle, dans l'instance en cours aboutissant à priver les appelants d'un procès équitable au sens de l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

 

Commentaire :

Par cet arrêt, la deuxième chambre civile se prononce, pour la première fois, sur les incidences de l’absence de mention, dans le dispositif des conclusions, de l’infirmation ou de l’annulation des chefs de dispositif du jugement, au regard de l’application de l’article 908 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret du 6 mai 2017 (la déclaration d’appel avait, en la circonstance, été formée le 18 juillet 2018), qui sanctionne le non- respect de cette charge procédurale par la caducité de la déclaration d’appel.

Rappelons que, dans le régime antérieur à ce décret, le prononcé de la caducité de la déclaration d’appel n’empêchait pas l’appelant de déposer une nouvelle déclaration d’appel, dans les conditions évoquées plus haut.

Tel n’est plus le cas depuis l’entrée en vigueur du décret du 6 mai 2017, qui a modifié l’article 911-1 du code de procédure civile, lequel, en son troisième alinéa, dispose désormais que « la partie dont la déclaration d’appel a été frappée de caducité en application des articles 902, 905-1, 905-2 ou 908 ou dont l’appel a été déclaré irrecevable n’est plus recevable à former un appel principal contre le même jugement et à l’égard de la même partie ».

La démarche et le raisonnement suivis par la Cour, en cet arrêt, s’effectuent en deux temps.           

Dans un premier temps, l’arrêt, procédant par un obiter dictum, inspiré de motifs de sécurité juridique, fixe les règles d’interprétation des textes concernés et rappelle les sanctions qui leur sont applicables.

C’est ainsi qu’il affirme :

  • qu’il résulte des articles 542 et 954 du code de procédure civile que l'appelant doit, dans le dispositif de ses conclusions, mentionner qu'il demande l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement, ou l'annulation du jugement ;
  • qu’en cas de non-respect de cette règle, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement, sauf la faculté qui lui est reconnue par l'article 914 du code de procédure civile de relever d'office la caducité de l'appel ;
  • que lorsque l'incident est soulevé par une partie ou relevé d'office par le conseiller de la mise en état, ce dernier ou, le cas échéant, la cour d'appel statuant sur déféré, prononce la caducité de la déclaration d'appel si les conditions en sont réunies.

 

Dans un second temps, la deuxième chambre civile tire les conséquences de la jurisprudence issue de son arrêt du 17 septembre 2020, qui, en imposant aux parties à la procédure d’appel, pour la première fois dans un arrêt publié, de mentionner, dans le dispositif des conclusions, la demande d’infirmation ou d’annulation des chefs de dispositif, instaure une charge procédurale nouvelle (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626, publié au Bulletin). Aussi décide-t-elle qu’à défaut d’être prévisibles pour les avocats des parties, ces règles ne sont pas applicables aux instances introduites par une déclaration d’appel antérieure au 17 septembre 2020.

Le choix ainsi opéré est bien celui d’un maintien de la jurisprudence dégagée par l’arrêt non publié du 31 janvier 2019, à charge de lui donner un effet différé à la date de l’arrêt du 17 septembre 2020 qui a, en quelque sorte, « cristallisé » l’obligation, la charge procédurale en cause, et mis les avocats des parties en mesure de la respecter.

Ont également pesé en faveur de cette solution :

  • la prise en considération de la sévérité toute particulière de la caducité de la déclaration d’appel en ce qu’elle aura pour effet de neutraliser la possibilité d’un appel incident (article 550, alinéa 1er, in fine) ;
  • la volonté de préserver l’égalité des justiciables devant la justice, le non-respect d’une même obligation procédurale ne devant pas entraîner une différence de traitement injustifiée dans l’application des sanctions.

II.2. Motifs des conclusions

2e Civ., 6 juin 2019, pourvoi n° 18-17.910, publié au Bulletin

Sommaire :

La cour d'appel, à laquelle est demandée l'infirmation ou l'annulation du jugement d'une juridiction du premier degré ne doit, pour statuer à nouveau en fait et en droit, porter une appréciation que sur les moyens que les parties formulent expressément dans leurs conclusions à l'appui de leurs prétentions sur le litige ou sur les motifs du jugement déféré que l'intimé est réputé avoir adopté dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile.

Par conséquent, l'appelant principal qui n'a pas lui-même repris à son compte dans ses conclusions d'appel un motif du jugement déféré ne peut pas reprocher à la cour d'appel qui infirme ce jugement sur l'appel incident de l'intimé d'avoir omis de réfuter ce motif du jugement déféré.

 

Commentaire :

A l’occasion de ce pourvoi, il s’agissait de déterminer si la cour d’appel était tenue, pour infirmer le jugement, de réfuter expressément et d’office les motifs de celui-ci.

En l’espèce, le premier juge avait déduit de la créance une somme due au titre des intérêts. L’appelant principal n’avait pas repris à son compte, dans ses conclusions d’appel, la motivation du premier juge sur ce point et il reprochait à la cour d’appel de ne pas s’être expliquée sur l’absence de déduction de ces intérêts.

La deuxième chambre civile rappelle les règles prévues à l’article 954 du code de procédure civile. Elle affirme ainsi que la cour d'appel, à laquelle est demandée l'infirmation ou l'annulation du jugement d'une juridiction du premier degré, ne doit, pour statuer à nouveau en fait et en droit, porter une appréciation que sur les seuls moyens que les parties formulent expressément dans leurs conclusions, à l'appui de leurs prétentions sur le litige ou sur les motifs du jugement déféré que l'intimé est réputé s’être appropriée avoir adopté dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile.

Elle en déduit, par conséquent, que l'appelant principal qui n'a pas lui-même repris à son compte, dans ses conclusions d'appel, un motif du jugement déféré, ne peut reprocher à la cour d'appel, qui infirme ce jugement sur l'appel incident de l'intimé, d'avoir omis de réfuter le motif concerné.

 

2e Civ., 3 mars 2022, pourvoi n° 20-20.017, publié au Bulletin

Sommaire :

Selon l'alinéa 1er de l'article 954 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, applicable au litige, les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée, avec l'indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé. Aux termes des alinéas 2 et 3, les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte. La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Encourt la cassation une cour d'appel qui, pour confirmer le jugement entrepris, retient que le dispositif des conclusions de l'appelant n'indique pas les dispositions du jugement dont il est sollicité la réformation de sorte que la cour d'appel n'est pas saisie de demande d'infirmation par l'appelant principal, alors que ce dernier, dans le dispositif de ses conclusions, ne se bornait pas à demander à la cour d'appel de réformer la décision entreprise, mais formulait plusieurs prétentions, et qu' il n'était pas tenu de reprendre, dans le dispositif, les chefs de dispositif du jugement dont il demandait l'infirmation.

 

Commentaire :

Cette décision est venue compléter la jurisprudence de la chambre sur le contenu des conclusions en appel en précisant que l’article 954 du code de procédure civile n’impose pas à l’appelant, dans le dispositif de ses conclusions, d’énumérer les chefs de dispositif de jugement dont il demande l’infirmation.

Dans le cas concerné, l’appelante demandait, dans le corps de ses conclusions, la confirmation du jugement sur un chef de dispositif et l'infirmation sur d'autres chefs qui y étaient énumérés. Dans le dispositif de ces mêmes conclusions, elle sollicitait l'infirmation du jugement et récapitulait ses prétentions, sans toutefois reprendre les dispositions du jugement dont elle sollicitait la réformation.

S’il est vrai que les chefs du jugement critiqué doivent être mentionnés dans la déclaration d’appel, à défaut de quoi celle-ci se trouve privée de tout effet dévolutif, les conclusions de l’appelant ne sont pas soumises aux même règles.

Ainsi que le mettent en évidence les arrêts précédemment commentés, les conclusions de l’appelant, outre qu’elles doivent, dans leur dispositif, demander la réformation ou l’annulation de la décision entreprise, doivent encore formuler des prétentions sur le litige.

En revanche, tel est l’apport important de l’arrêt commenté, le dispositif de ces conclusions n’a pas à reprendre les chefs de dispositif du jugement dont l'infirmation est demandée, lesquels sont déjà énumérés tant dans la déclaration d’appel que dans le corps des conclusions.

II.3. Signature électronique

2e Civ., 3 mars 2022, pourvoi n° 20-17.868

Commentaire :

L’arrêt commenté à ces lignes rappelle l’étendue et les limites des exigences attendues des parties en matière de communication électronique. Il s’inscrit dans le sillage et la continuité d’une jurisprudence constante : notamment, 2e Civ., 24 septembre 2015, pourvoi n° 14-20.212, Bull. 2015, II, n° 208 ou 2e Civ., 2 juillet 2020, pourvoi n° 19-14.745.

On rappellera à cet égard que l’article 930-1 du code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes des parties sont remis à la juridiction par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire. Cette « remise électronique » - on la dénomme ainsi - a lieu selon des modalités d’échanges définies par arrêté du garde des Sceaux, auquel renvoie le dernier alinéa de l’article 930-1. Il s’est agi de l’arrêté du 30 mars 2011 relatif à la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d’appel, abrogé par arrêté du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d’appel, récemment modifié par arrêté du 25 février 2022.

En l’espèce l’arrêt attaqué avait déclaré irrecevable comme tardive une requête en déféré formée (le 12 juin 2019) à l’encontre de l’ordonnance d’un conseiller de la mise en état de la cour d’appel. Cette requête devait, par application de l’article 930-1 précité, être remise à la juridiction par voie électronique. Elle devait l’être dans les quinze jours de la date de l’ordonnance conformément aux dispositions de l’article 916, alinéa 2, du code de procédure civile. Dans les faits, l'avocat des appelants avait remis au greffe, via le réseau privé virtuel avocat, une requête en déféré, avec l’indication d’un numéro de dossier erroné, mais dans le délai légal, et cette remise avait fait l’objet d’un avis de refus de traitement du greffe.

En cassant la décision de la cour d’appel, la deuxième chambre civile rappelle que l’indication d’un numéro de répertoire erroné ne saurait remettre en cause la validité de la remise et que l’avis de refus du greffe, qui atteste de la réception, est sans incidence sur la validité de l’acte. Dès lors, la cour d’appel « était bien saisie de la requête remise par voie électronique, en dépit de l'indication du numéro de dossier erroné ».

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