N°21 - Septembre/Octobre 2023 (Représentants du personnel)

Lettre de la chambre sociale

Une sélection des arrêts rendus par la chambre sociale de la Cour de cassation (Existence du contrat de travail / Contrat à durée déterminée / Rémunération / État de santé, inaptitude / Libertés fondamentales / Rupture du contrat de travail / Élections professionnelles / Représentants du personnel / Convention et accords collectifs / QPC).

  • Droits de l'Homme
  • Santé
  • Travail
  • contrat de travail
  • rémunération (salaires et accessoires)
  • contrat de travail, rupture
  • conventions et accords collectifs : interprétation et application
  • représentation des salariés
  • conventions collectives

Lettre de la chambre sociale

N°21 - Septembre/Octobre 2023 (Représentants du personnel)

Comité social et économique : consultation récurrente sur la situation économique et financière de l’entreprise et recours à un expert-comptable

Soc., 20 septembre 2023, pourvois n° 21-25.233, FS-B

Sommaire

Selon l'article L. 2312-22 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, en l'absence d'accord prévu à l'article L. 2312-19, le comité social et économique est consulté chaque année sur la situation économique et financière de l'entreprise dans les conditions définies au sous-paragraphe 2. Cette consultation est conduite au niveau de l'entreprise, sauf si l'employeur en décide autrement et sous réserve de l'accord de groupe prévu à l'article L. 2312-20 du code du travail.

Aux termes de l'article L. 2315-88 du même code, le comité social et économique peut décider de recourir à un expert-comptable en vue de la consultation sur la situation économique et financière de l'entreprise prévue au 2° de l'article L. 2312-17.

Viole ces textes le jugement qui rejette la demande d'annulation de la délibération du comité social et économique d'établissement et de la désignation d'un expert,  alors qu'il résulte de ses constatations qu'aucun accord collectif d'entreprise ne prévoyait la consultation de ce comité  et que l'employeur n'avait pas décidé de le consulter, de sorte que la consultation récurrente sur la situation économique et financière de l'entreprise relevait du seul comité social et économique central et que le comité social et économique de l'établissement ne pouvait recourir à une expertise à ce titre.

 

Commentaire

Dans cette affaire, la Chambre sociale de la Cour de cassation était invitée à se prononcer sur l’existence, pour un comité social et économique d’établissement, d’un droit propre à consultation et expertise sur la situation financière et économique de l’entreprise.

L’article L. 2312-22 du code du travail réserve désormais, en l’absence d’accord collectif contraire, la consultation récurrente sur les orientations stratégiques et sur la situation économique et financière de l’entreprise au seul comité social et économique d’entreprise. Par ailleurs, la consultation sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi n’a à être conduite au niveau des établissements que lorsque des mesures d’adaptations spécifiques à ces établissements sont prévues.

Par un arrêt du 29 juin 2022, la Cour de cassation a fait application de ce texte en censurant le jugement déboutant une société de sa demande d’annulation de la délibération d’un comité social et économique d’établissement décidant du recours à une expertise dans le cadre de la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi, alors qu’il n’était pas dérogé par accord collectif aux niveaux de consultations définis à l’article L. 2312-22 du code du travail et que n’était pas constaté de mesures d’adaptations spécifiques à cet établissement (Soc., 29 juin 2022, pourvoi n° 21-24.553).

Dans la continuité de cet arrêt, la Cour de cassation exclut, par la présente décision, qu’en l’absence d’un accord collectif prévoyant une consultation sur la situation économique et financière au niveau des établissements et en l’absence de consultation volontaire de l’employeur, un comité social et économique d’établissement puisse recourir à une expertise.

Défaut de consultation des représentants du personnel : conséquences sur les droits subjectifs des salariés

Soc., 27 septembre 2023, pourvoi n° 21-19.483, FS-B

Sommaire

L'article 25 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils, dite Syntec, du 15 décembre 1987, dans sa rédaction antérieure à l'avenant n° 46 du 16 juillet 2021, relatif à la période de congés, n'impose à l'employeur de consulter le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel, qu'au sujet de l'alternative ouverte à l'employeur entre la fermeture totale de l'entreprise dans une période située entre le 1er mai et le 31 octobre et l'établissement des congés par roulement.

L'absence de consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, sur cette alternative étant sans incidence sur la fixation des dates individuelles de congés des salariés, ceux-ci ne peuvent s'en prévaloir.

 

Commentaire

Cet arrêt permet à la Chambre sociale de la Cour de cassation de rappeler les cas dans lesquels un salarié peut se prévaloir d’un manquement de l’employeur à la consultation des institutions représentatives du personnel.

Il ressort en effet de la jurisprudence de la Haute Juridiction que l’absence de consultation de ces institutions sur un thème qui relève du collectif ne peut jamais créer de droit subjectif pour les salariés, sauf lorsque le défaut de consultation concerne la situation individuelle du salarié (Soc., 8 novembre 2017, pourvoi n° 16-15.584, Bull. 2017, V, n° 190 (3) ; Soc., 18 septembre 2019, pourvoi n° 17-31.274 et Soc., 5 février 2020, pourvoi n°18-17.925).

Salarié protégé : modification du contrat ou changement des conditions de travail et procédure disciplinaire

Soc., 4 octobre 2023, pourvois n° 22-12.922, F-B

 

Sommaire

Il résulte des articles L. 1221-1, L. 1231-1 et L. 2411-1 du code du travail qu'aucune modification de son contrat de travail ou changement de ses conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé. En cas de refus par celui-ci de cette modification ou de ce changement, l'employeur doit poursuivre le contrat de travail aux conditions antérieures ou engager la procédure de licenciement en saisissant l'autorité administrative d'une demande d'autorisation de licenciement.

Ayant constaté qu'au moment où il a imposé une mutation au salarié l'employeur avait connaissance de sa candidature aux élections professionnelles, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que l'employeur ne pouvait lui imposer de modification de ses conditions de travail sans son accord, peu important que cette candidature soit postérieure à la convocation du salarié à l'entretien préalable à la sanction disciplinaire.

 

Commentaire

Selon une jurisprudence constante, la Chambre sociale de la Cour de cassation juge qu'aucune modification de son contrat de travail, aucun changement de ses conditions de travail ne peut être imposé à un salarié protégé et qu'il incombe à l'employeur, en cas de refus du salarié d'accepter la modification ou le changement litigieux, d'obtenir l'autorisation de l'inspecteur du travail de rompre le contrat de travail (Soc., 25 novembre 1997, pourvoi n° 94-42.727, Bull. 1997, V, n° 406 ; Soc., 6 avril 1999, pourvoi n° 97-40.499, Bull. 1999, V, n° 159; Soc., 13 septembre 2017, pourvoi n° 15-24.397, Bull. 2017, V, n° 137).

Dans la présente affaire, un salarié s’était porté candidat à des élections professionnelles entre un entretien préalable en vue d’une sanction disciplinaire et la notification d’une mutation prononcée au titre de cette sanction.

La question posée portait donc sur la détermination de la date à laquelle il convenait de se placer pour apprécier si le salarié bénéficiait ou non de la qualité de salarié protégé : soit à la date de la convocation du salarié à l’entretien préalable, comme en matière de licenciement, soit à la date du prononcé de la sanction.

La Cour de cassation décide que la qualité de salarié protégé s’apprécie, en cas de sanction disciplinaire, à la date du prononcé de la sanction et non à la date de la convocation à l’entretien préalable. L’employeur, ayant eu connaissance de la candidature du salarié au moment du prononcé de la sanction, ne pouvait lui imposer aucune modification de ses conditions de travail sans son accord.

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