Avis du médecin du travail et étendue de l’obligation de reclassement de l‘employeur
Soc., 8 février 2023, pourvoi n° 21-19.232, FS-B
Sommaire :
Il résulte de l'article L. 1226-12 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, que lorsque le médecin du travail mentionne expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi, l'employeur n'est pas tenu de rechercher un reclassement au salarié.
Ayant constaté que l'avis d'inaptitude mentionnait expressément que l'état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans l'emploi, une cour d'appel en a exactement déduit que l'employeur était dispensé de rechercher et de proposer au salarié des postes de reclassement.
Commentaire :
Cette affaire est relative à la portée de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que « l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un/l’emploi», prévue par les articles L. 1226-2-1 et L. 1226-12 du code du travail dans leur version issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l’employeur étant alors dispensé de rechercher un reclassement.
Cette mention dispense-t-elle l’employeur de rechercher un reclassement seulement dans l’entreprise, auquel cas, si celle-ci appartient à un groupe, l’employeur doit rechercher un reclassement dans le périmètre du groupe ? Ou bien faut-il considérer que cette mention s'étend à l'ensemble du périmètre de reclassement ?
La chambre décide que la mention expresse s'étend à l'ensemble du périmètre de reclassement et vaut dispense de reclassement pour le groupe.
Exposition à l’amiante et manquement grave de l’employeur a son obligation d’exécuter le contrat de travail de bonne foi
Soc., 8 février 2023, pourvoi n° 21-14.451, FP-B+R
Sommaire :
L'atteinte à la dignité du salarié constitue pour l'employeur un manquement grave à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail.
La cour d'appel qui constate que l'employeur, qui avait bénéficié d'une dérogation jusqu'au 31 décembre 2001 l'autorisant à poursuivre l'utilisation de l'amiante malgré l'entrée en vigueur du décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996 relatif à l'interdiction de l'amiante, et continué, en toute illégalité, à utiliser ce matériau de 2002 à 2005 alors qu'il n'était plus titulaire d'aucune autorisation dérogatoire, retient à bon droit que celui-ci a manqué à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail.
Une note explicative ainsi qu’un communiqué de presse de cet arrêt sont disponibles sur le site internet de la Cour de cassation.
L’arrêt est par ailleurs cité dans le podcast « La Sociale, le Mag’ » n°15, mars 2023, Décryptage.
Remise de l’attestation d’exposition aux agents chimiques dangereux et préjudice du salarié : l’action en réparation est soumise au délai de prescription biennale
Soc., 15 février 2023, pourvoi n° 21-19.094, FS-B
Sommaire :
L'action par laquelle un salarié sollicite la réparation du préjudice résultant de la remise tardive ou incomplète de l'attestation d'exposition aux agents chimiques dangereux prévue par l'article R. 4412-58 du code du travail, alors applicable, se rattache à l'exécution du contrat de travail.
Il en résulte que cette action est soumise à la prescription de deux ans prévue à l'article L. 1471-1, alinéa 1er, du code du travail.
Commentaire :
Dans cet arrêt, la chambre sociale affirme, pour la première fois, au visa de l’article L. 1471-1, alinéa 1er, du code du travail, que l’action par laquelle un salarié sollicite la réparation du préjudice résultant de la remise tardive ou incomplète de l’attestation d'exposition aux agents chimiques dangereux prévue par l’article R. 4412-58 du code du travail se rattache à l’exécution du contrat de travail, même si cette obligation prend effet après la rupture de la relation contractuelle.
Cet arrêt est à rapprocher de celui rendu par la chambre le 1er février 2023 selon lequel l'action fondée sur le non-respect par l'employeur de la priorité de réembauche, qui est liée à l'exécution du contrat de travail, relève de la prescription de l'article L. 1471-1, alinéa 1er, du même code (Soc., 1er février 2023, pourvoi n° 21-12.485, commenté ci-dessous).