n°11 - Septembre/Octobre 2021 (Représentation des salariés)

Lettre de la chambre sociale

Une sélection commentée des arrêts rendus par la chambre sociale de la Cour de cassation (Contrat de travail à durée déterminée, durée du travail, rémunération en frais professionnels, santé au travail, rupture du contrat de travail, représentation des salariés, statut collectif du travail, action en justice, statut particulier).

  • Travail
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  • travail réglementation, rémunération
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  • contrat de travail, rupture
  • représentation des salariés
  • statut collectif du travail
  • action en justice
  • statuts professionnels particuliers

Lettre de la chambre sociale

n°11 - Septembre/Octobre 2021 (Représentation des salariés)

Conditions de validité de la désignation d’un représentant syndical au CSE

Soc., 8 septembre 2021, pourvoi n° 20-13.694, FS-B

Sommaire :

Il résulte de la combinaison des articles L.2143-3, L.2143-6, L.2143-22 et L.2314-2 du code du travail que le législateur n’a prévu la possibilité de désigner un représentant syndical au comité social et économique distinct du délégué syndical que dans les entreprises de plus de trois cents salariés et que, dans les entreprises de moins de cinquante salariés dans lesquelles la désignation d’un délégué syndical en application des dispositions de droit commun de l’article L. 2143-3 du code du travail est exclue, les dispositions de l'article L. 2143-22 ne sont pas applicables.

 

Commentaire :

Dans cette affaire, la question posée à la chambre sociale était relative à la désignation, dans les entreprises employant moins de 50 salariés, d’un représentant syndical au comité social et économique (CSE) en l’absence de délégué syndical désigné dans l’entreprise.

Dans une entreprise de moins de 50 salariés, un syndicat, qui n’avait pas désigné de délégué syndical, avait désigné un candidat non élu lors des élections professionnelles comme représentant syndical au CSE. Il faisait valoir que l’entreprise ayant moins de 50 salariés, il pouvait désigner un membre du CSE comme délégué syndical en application des dispositions de l’article L. 2143-6, que comme l’entreprise avait moins de 300 salariés, ce délégué syndical était de droit représentant syndical au CSE en application des dispositions de l’article L. 2143-22 et que la jurisprudence  constante de la chambre sociale interdisant de cumuler des fonctions de membre élu de l’institution représentative du personnel (IRP) et de représentant syndical auprès de cette IRP, il pouvait  désigner directement un représentant syndical auprès du CSE.

La chambre sociale ne retient pas ce raisonnement. Elle juge que de la même manière qu’il n’y avait pas de représentant syndical auprès du comité d’entreprise (CE) dans les entreprises de moins de 50 salariés, puisqu’il n’y avait pas de CE, il n’y a pas de représentant syndical auprès des CSE de moins de 50 salariés, même si un membre du CSE peut être désigné comme délégué syndical.

Elections professionnelles et QPC : salariés disposant d’une délégation écrite particulière d’autorité leur permettant d’être assimilés au chef d’entreprise ou représentants effectivement l’employeur devant les représentants du personnel

Soc., 15 septembre 2021, QPC n° 21-40.013, FS-B, renvoi

Question posée à la Cour :

La disposition de l'article L. 2314-18 du code du travail telle qu'interprétée par la jurisprudence de la Cour de cassation, en privant certains travailleurs de la qualité d'électeur aux élections professionnelles, et en n'encadrant pas mieux les conditions de cette exclusion et en ne les distinguant pas des conditions pour n'être pas éligibles, ne méconnaît-elle pas le principe de participation des travailleurs par l'intermédiaire de leurs délégués à la détermination des conditions de travail à la gestion des entreprises défini au point 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ?

 

Commentaire :

L’article L. 2314-18 du code du travail dispose que sont électeurs les salariés des deux sexes, âgés de seize ans révolus, travaillant depuis trois mois au moins dans l'entreprise et n'ayant fait l'objet d'aucune interdiction, déchéance ou incapacité relatives à leurs droits civiques.

L’article L. 2314-19 du même code dispose que sont éligibles les électeurs âgés de dix-huit ans révolus, et travaillant dans l'entreprise depuis un an au moins, à l'exception des conjoint, partenaire d'un pacte civil de solidarité, concubin, ascendants, descendants, frères, sœurs et alliés au même degré de l'employeur. Les salariés travaillant à temps partiel simultanément dans plusieurs entreprises ne sont éligibles que dans l'une de ces entreprises. Ils choisissent celle dans laquelle ils font acte de candidature.

A cet égard, il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation (Soc., 31 mars 2021, pourvoi n° 19-25.233, publié), que les articles L. 2314-18 et L. 2314-19 du code du travail sont interprétés en ce sens que ne peuvent ni exercer un mandat de représentation du personnel ni être électeurs les salariés qui, soit disposent d'une délégation écrite particulière d'autorité leur permettant d’être assimilés au chef d'entreprise, soit représentent effectivement l'employeur devant les institutions représentatives du personnel.

La chambre sociale n’a jusqu’à présent jamais eu l’occasion de préciser si elle faisait ou non une différence selon que l’assimilation à l’employeur concernait le droit d’être électeur ou celui d’être éligible.

Dès lors, ainsi interprété, l'article L. 2314-18 précité, en ce qu'il écarte les personnes inéligibles en application de l'article L. 2314-19 précité de la possibilité de participer en tant qu'électeur à l'élection des membres du comité social et économique, pourrait être considéré comme instituant une atteinte non proportionnée au principe de participation des travailleurs reconnu à l'alinéa 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946.

Ce faisant, la question posée présente un caractère sérieux et est renvoyée au Conseil constitutionnel.

Elections professionnelles : il n’appartient pas au Direccte de préciser la répartition des hommes et des femmes dans chaque collège

Soc., 29 septembre 2021, pourvoi n° 20-60.246 F-B

Sommaire :

En vertu de l'article L. 2314-30 du code du travail, pour chaque collège électoral, les listes mentionnées à l'article L. 2314-29 qui comportent plusieurs candidats sont composées d'un nombre de femmes et d'hommes correspondant à la part de femmes et d'hommes inscrits sur la liste électorale. Les listes sont composées alternativement d'un candidat de chaque sexe jusqu'à épuisement des candidats d'un des sexes.

L'article L. 2314-13 du code du travail précise en ses deux premiers alinéas que la répartition des sièges entre les différentes catégories de personnel et la répartition du personnel dans les collèges électoraux font l'objet d'un accord entre l'employeur et les organisations syndicales conclu selon les conditions de l'article L. 2314-6. Cet accord mentionne la proportion de femmes et d'hommes composant chaque collège électoral. L'article L. 2314-31 énonce que, dès qu'un accord ou une décision de l'autorité administrative ou de l'employeur sur la répartition du personnel est intervenu, l'employeur porte à la connaissance des salariés, par tout moyen permettant de donner une date certaine à cette information, la proportion de femmes et d'hommes composant chaque collège électoral. 

Il résulte de ces textes que la proportion de femmes et d'hommes composant chaque collège électoral doit figurer dans le protocole préélectoral en fonction des effectifs connus lors de la négociation du protocole. A défaut, elle est fixée par l'employeur en fonction de la composition du corps électoral existant au moment de l'établissement de la liste électorale, sous le contrôle des organisations syndicales.

C’est dès lors à bon droit qu'un tribunal a jugé que la décision du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi procédant à la répartition des salariés dans les collèges électoraux n’avait pas à préciser la répartition des hommes et des femmes dans chaque collège.

 

Commentaire :

Par cet arrêt, la chambre sociale répond à la question de savoir si le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (direccte, devenu dreeets) en procédant à la répartition des salariés dans les collèges électoraux peut préciser la répartition des hommes et des femmes dans chaque collège.

Elle y répond par la négative en jugeant qu'il revient à l'employeur de préciser la répartition des hommes et des femmes dans chaque collège et non au direccte saisi d'un différend concernant ladite répartition.

Elle s’inscrit ainsi dans la continuité de sa décision du 12 mai 2021 (Soc., 12 mai 2021, pourvoi n° 20-60.118, publié).

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