Hors série n°2 - Les compétences respectives du juge administratif et du juge judiciaire en cas de licenciement économique collectif (Introduction)

Lettre de la chambre sociale

Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, l’article L. 1233-61 du code du travail impose à l’employeur, lorsqu’un projet de licenciement concerne dix salariés ou plus dans une même période de trente jours, d’établir et de mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre.

Jusqu’à la réforme législative de 2013, ces plans donnaient lieu à un contentieux abondant devant le juge judiciaire. A titre d’exemple, celui-ci était compétent pour connaître des contestations portant sur la régularité de la procédure d’information et de consultation des institutions représentatives du personnel sur le contenu du plan social (Soc., 17 juin 1997, pourvoi n° 95-18.904, Bull. 1997, V, n° 223). Il pouvait également apprécier la pertinence du plan au regard des mesures de reclassement qui y étaient prévues (Soc., 14 février 2007, pourvoi n° 05-45.887, Bull.  2007, V, n° 24).

La loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi a procédé à une refonte des procédures de licenciement collectif. Elle a confié à l’administration le soin  de valider ou d’homologuer le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE), étant précisé que le contenu de ce plan est déterminé soit par un accord collectif soit par un document élaboré unilatéralement par l'employeur.

L’article L. 1235-7-1 du code du travail, issu de cette loi, a créé un bloc de compétence exclusif pour le juge administratif en prévoyant que les litiges relatifs aux décisions de l’administration (en l’occurrence la Dirrecte, c’est-à-dire la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi), ainsi qu’à la régularité de la procédure d’adoption et au contenu du plan, ne peuvent plus faire l’objet d’un litige distinct de celui visant à contester la décision de validation ou d’homologation du plan.

Mais si la loi du 14 juin 2013 a confié à l’administration, et par conséquent au juge administratif, le contrôle des PSE, elle a maintenu la compétence du juge judiciaire  pour les contentieux individuels relatifs notamment au motif économique du licenciement inclus dans un plan, à la mise en œuvre des mesures prévues dans ce plan à l’égard du salarié, et à l’indemnisation de ce dernier en cas d’annulation d’une décision administrative ayant procédé à la validation ou à l’homologation de l’accord ou du document unilatéral déterminant le contenu du plan. Il en est résulté certaines interrogations sur la répartition exacte des champs de compétence entre les deux ordres juridictionnels.

Depuis mars 2018, date à laquelle elle a pour la première fois été amenée à se prononcer sur les nouvelles dispositions législatives, la Cour de cassation a rendu plusieurs décisions qui, en parallèle de la jurisprudence du Conseil d’Etat, ont commencé à préciser les frontières de la compétence du juge judiciaire résultant de la loi du 14 juin 2013. Le Tribunal des conflits a également été amené à se prononcer à une occasion.

Ces décisions ont tracé les lignes directrices des compétences respectives du juge administratif et du juge judiciaire. Ce sont ces lignes qui sont ici décrites.

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