N°17 - Février 2022 (Éditorial de Jean Richard de la Tour, avocat général à la Cour de justice de l'Union européenne)

Lettre de la chambre criminelle

Une sélection des arrêts rendus par la chambre criminelle de la Cour de cassation (Application des peines / constitution de partie civile / cour d'assises / détention provisoire / douanes / homicide involontaire / mandat d'arrêt européen / non-dénonciation de crime / secret professionnel de l'avocat / tribunal correctionnel).

  • Pénal
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  • action publique

Lettre de la chambre criminelle

N°17 - Février 2022 (Éditorial de Jean Richard de la Tour, avocat général à la Cour de justice de l'Union européenne)

Jean Richard de la Tour, avocat général à la Cour de justice de l’Union européenne

Pendant longtemps, le mécanisme de la question préjudicielle était étranger à la chambre criminelle tout comme la Cour de justice ne traitait pas de questions de procédure pénale.                                                      

Puis, sur le fondement du traité d’Amsterdam, ont été adoptées, notamment, les décisions-cadres 2002/584/JAI relative au mandat d’arrêt européen (MAE) ou 2008/909/JAI relative à la reconnaissance mutuelle des jugements en matière pénale.

Enfin, le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) consacre un titre entier à l’Espace de liberté, de sécurité et de justice. Les affaires relatives à ce domaine occupent une place importante dans l’office de la Cour de justice. Ainsi, en 2021, environ une affaire introduite sur huit y avait trait.

Dans ces matières qui requièrent souvent une réponse rapide de la Cour, car de cette réponse dépend le maintien ou non en détention d’une personne, la procédure préjudicielle d’urgence (PPU), qui a presque 14 ans, est désormais bien connue des juridictions nationales puisque la Cour a enregistré en 2021 un nombre record de 30 demandes d’application de cette procédure en particulier dans le domaine du MAE.

Les règles de fonctionnement du MAE présentent un aspect actuel nouveau, lié aux difficultés concernant l’indépendance de la justice en Pologne. Un certain nombre de juridictions qui doivent exécuter des MAE émis par des juridictions polonaises s’interrogent sur la conduite à tenir.

L’arrêt de la Cour de justice du 22 février 2022[1] constitue une bonne illustration de la manière dont elle peut répondre avec célérité à des questions pourtant fort délicates.

La Cour rappelle que, afin d’apprécier si une personne faisant l’objet d’un MAE court, en cas de remise, un risque réel de violation de son droit fondamental à un procès équitable conforme aux exigences de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux, le juge de l’exécution doit procéder à un examen en deux étapes, au plan général et au niveau des circonstances de l’espèce. Ce n’est qu’au terme de cet examen que cette autorité pourrait être conduite à s’abstenir d’exécuter ce MAE.

Dans le cadre d’un tel examen, la manière dont est composé l’organe qui intervient dans le processus de nomination des juges de l’État d’émission ne suffit pas mais doit être assortie d’autres éléments relatifs au fonctionnement du système juridictionnel de cet État et à ses répercussions concrètes sur la personne faisant l’objet d’un MAE.

Il est à noter que la Cour précise que, figure parmi les éléments devant guider l’appréciation de l’autorité judiciaire d’exécution, « une jurisprudence constitutionnelle de l’État membre d’émission, qui remet en cause la primauté du droit de l’Union et le caractère contraignant de la CEDH, tout comme la force obligatoire des arrêts de la Cour et de ceux de la [Cour EDH] portant sur la conformité à ce droit et à cette convention de règles de cet État membre relatives à l’organisation de son système juridictionnel, notamment à la nomination des juges ».

Ainsi, la Cour continue par un dialogue constant avec les juridictions nationales et en prenant en compte, lorsque c’est nécessaire, les impératifs de célérité, à accomplir sa mission d’interprétation du droit de l’Union.


[1] C-562/21 PPU et C-563/21 PPU.

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